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Les nationalismes blanc et chrétien de l’alt-right : discours et mobilisations nationalistes à l’ère numérique

Authors:
Collection
Science Politique et Sociologie
Les nationalismes au tournant du
XXIe siècle :
regards croisés Amérique/Europe
Sous la direction de
Pierre-Alexandre BEYLIER, Marie-Violaine LOUVET, Michel MARTINEZ et
Véronique MOLINARI
Presses de l’Université Toulouse Capitole
Dafaure, Maxime. « Les nationalismes blanc et chrétien de l’alt-right : discours et mobilisations
nationalistes à l’ère numérique ». Les nationalismes au tournant du XXIe siècle : regards croisés
Amérique/Europe, sous la direction de Pierre-Alexandre Beylier, Marie-Violaine Louvet,
Michel Martínez et Véronique Molinari. Toulouse : Presses de l’Université Toulouse Capitole,
2023. p. 407-434
Les nationalismes blanc et chrétien de l’alt-right : discours
et mobilisations nationalistes à l’ère numérique1
Maxime DAFAURE
Doctorant et ATER,
Université Gustave Eiffel, LISAA
Si l’histoire des États-Unis est traversée par divers courants que l’on peut sans peine qualifier de
nationalistes2, la campagne puis l’élection de Donald Trump en novembre 2016 marquent le retour au
premier plan de cette proposition politique. La campagne du milliardaire américain témoigne également
de l’influence croissante de la révolution technologique et communicationnelle que représente internet,
et de l’utilisation des outils numériques à des fins politiques.
Ces phénomènes coïncident et sont liés à l’émergence, au milieu des années 2010, de l’alt-right,
nébuleuse en ligne ultraréactionnaire particulièrement médiatisée à partir de 2015. Celle-ci est
caractérisée par son exploitation des codes et pratiques issus de la culture internet, et par son amalgame
d’idéologies parmi lesquelles se trouvent notamment fascisme, antiféminisme, ou antisémitisme, ainsi
que plusieurs formes de nationalisme3. L’objectif de ce travail est donc de contribuer à la compréhension
de la résurgence de certaines formes de nationalisme étasunien observée depuis le début des années
2010, en étudiant leurs reconfigurations et leurs nouvelles expressions à l’heure des réseaux sociaux et
du Web dit participatif4.
Une telle étude nécessite d’adopter en premier lieu une perspective historique, qui, si elle ne prétend
pas à l’exhaustivité, permettra de revenir sur l’ancrage très important du nationalisme blanc et du
nationalisme chrétien aux États-Unis, et de contextualiser leurs formes contemporaines en les inscrivant
dans ces traditions. Ce travail offre ensuite une analyse critique de ces constructions politiques, visant à
démontrer comment elles se confondent et fonctionnent aujourd’hui à bien des égards de la même
manière, notamment sur les plans discursifs, politiques, ou encore stratégiques.
Cette recherche illustre par la suite ce propos en analysant un tel renouveau de la pensée nationaliste
au prisme de deux études de cas, Michael Flynn et Nicholas Fuentes. Bien que les formes de
nationalismes promues par ces derniers ne soient pas particulièrement novatrices en termes de contenu,
et qu’elles s’inscrivent indubitablement dans de longues traditions politiques, c’est notamment leur
popularité et leur portée qu’il s’agit d’interroger. C’est ainsi que ce travail se conclura par une réflexion
sur l’influence de ces traditions sur les discours et politiques du Parti républicain contemporain, ainsi
que sur le médium numérique comme vecteur de nationalisme.
1 L’auteur souhaiterait remercier brièvement mais néanmoins chaleureusement les organisateurs du colloque « Quels
nationalismes au XXIe siècle : regards croisés Europe/Amérique », ainsi que les relecteurs anonymes pour leurs suggestions
avisées.
2 Voir, parmi d’innombrables autres ouvrages, H. KOHN, American Nationalism: An Interpretative Essay, New York,
Macmillan, 1957 ; R. SMITH, Civic Ideals: Conflicting Visions of Citizenship in U.S. History, New Haven, Yale University
Press, 1997 ; ou A. LIEVEN, America Right or Wrong: An Anatomy of American Nationalism, Oxford, Oxford University
Press, 2012.
3 Pour une analyse plus détaillée et en langue française de l’alt-right, voir S. RIDLEY, L’alt-right : de Berkeley à Christchurch,
Paris, Le Bord de l’eau, 2020.
4 G. BLANK & B. C. REISDORF, « The Participatory Web », Information, Communication & Society, vol. 15, n° 4, 2012, p.
537-554, doi: <10.1080/1369118X.2012.665935>.
I. Panorama historique du nationalisme blanc aux États-Unis
L’histoire des États-Unis est indissociable de la notion d’ethnonationalisme, selon laquelle la nation
et la nationalité sont définies en termes ethniques ou raciaux, contrairement, par exemple, au
nationalisme civique, où ces dernières reposent sur des valeurs et une culture communes5. La race est
ici entendue dans son sens biologique, hérité des XVIIIe et XIXe siècles, au cours desquels on classifie
puis hiérarchise les « races » humaines. Il s’agit là de l’âge d’or du racisme dit scientifique6, dont les
thèses vont être appliquées aux théories du nationalisme qui sont alors elles aussi en plein essor.
Racisme scientifique et nationalismes connaissent durant cette période une grande popularité, et
vont exercer une influence considérable sur la fondation des États-Unis, justifiant notamment
l’esclavage, le déplacement, voire même le massacre des « races inférieures ». Elles se traduisent
également par des lois ou des politiques visant à préserver la prétendue pureté raciale du pays. En 1790
par exemple, au moment même de sa création, le premier Congrès des États-Unis vote le Naturalization
Act, qui exclut toute possibilité de naturalisation de populations non-blanches7. Un siècle plus tard,
toujours sur fond d’homogénéité raciale auquel s’ajoutent des facteurs économiques8, le Chinese
Exclusion Act de 1882 interdit aux travailleurs chinois d’émigrer aux États-Unis. De 1921 à 1965, de
nombreuses lois se succèdent et mettent en place des quotas dans le but de réguler l’immigration et de
préserver la composition ethnique des États-Unis. Regroupées sous l’appellation de National Origins
Formula, ces lois, dont les premières sont adoptées au cours de ce que l’historien étasunien John Higham
appelle les « Tribal Twenties9 », restreignent très fortement l’immigration asiatique et africaine tout en
imposant des quotas extrêmement stricts aux immigrants d’autres régions, en particulier ceux d’Europe
du Sud et de l’Est. Il faut attendre 1965 pour que l’administration Johnson fasse voter l’Immigration
and Nationality Act et mette ainsi officiellement fin à la discrimination à l’immigration. Si ces quelques
exemples ne représentent qu’un échantillon des politiques d’inspiration ethnonationaliste instituées par
les États-Unis durant la majeure partie de l’existence de la nation, il convient de rappeler qu’elles ne
concernent que le niveau fédéral, et que l’on trouve également d’innombrables cas de semblables
législations à l’échelle des états individuels10.
On peut ainsi proposer deux constats initiaux à la lumière de ce bref panorama historique.
Premièrement, il semble impossible de dissocier les concepts de nationalisme blanc et de suprémacisme
blanc : les deux sont inextricables de l’idée de race supérieure et de pureté, cette dernière devant être
préservée afin de garantir la cohésion sociale et la grandeur du pays. Deuxièmement, nationalisme et
suprémacisme blancs sont tentaculaires : si les populations d’origine africaine sont fréquemment les
5 « Le nationalisme civique adhère à la tradition libérale de tolérance et d’universalisme. Le nationalisme ethnique (ou
ethnonationalisme), à contrario, délimite strictement ce qu’être “réellement” américain signifie, en insistant sur l’importance
de caractéristiques telles que les origines, le lieu de naissance, la langue, et des coutumes et traditions partagées » (« Civic
nationalism embraces the liberal tradition of tolerance and universalism. By contrast, ethnic nationalism (or ethnonationalism)
draws strong boundaries around what it means to be “truly” American by emphasizing the importance of characteristics such
as ancestry, birthplace, language, and shared customs and traditions. » Notre traduction. Sauf mention contraire, toutes les
traductions sont de l’auteur). J. THOMPSON, « Ethnonationalism and White immigration attitudes », Nations and Nationalism,
vol. 28, n°1, 2022, p. 31-46, doi: <10.1111/nana.12754>.
6 Pour un historique du racisme scientifique et de son renouveau aux XXe et XXIe siècles, consulter A. SAINI, Superior: The
Return of Race Science, Londres, 4th Estate, 2019.
7 A. GLASS, « U.S. enacts first immigration law, March 26, 1790 », Politico, 26 mars 2012,
<https://www.politico.com/story/2012/03/the-united-states-enacts-first-immigration-law-074438> (consulté le 14 janvier
2023).
8 Lors de l’industrialisation de la côte Ouest, de nombreux travailleurs chinois, beaucoup moins chers que leurs homologues
américains, viennent concurrencer ces derniers, entrainant ainsi une forte vague de racisme antichinois. Voir M. S. HSU, Asian
American History: A Very Short Introduction, Oxford, Oxford University Press, 2017.
9 J. HIGHAM, Strangers in the Land: Patterns of American Nativism, 1860-1925, Rutgers, Rutgers University Press, 1955, p.
264.
10 On peut à titre d’exemple évoquer l’état de l’Oregon, considéré au XXIe siècle comme un bastion progressiste, dont les lois
interdisaient pourtant jusqu’en 1926 aux populations noires de s’y établir.
premières victimes des politiques susmentionnées, celles d’origine asiatique ne sont, comme on l’a vu,
pas épargnées, à l’instar des populations amérindiennes, qui n’accèdent officiellement à la citoyenneté
qu’en 1924 et doivent dans certains États attendre 1948 pour obtenir le droit de vote.
II. Le nationalisme blanc au XXIe siècle
De nos jours, la suprématie blanche n’est plus consacrée par l’État fédéral, ou tout du moins plus
aussi explicitement, et l’on voit donc apparaître aux États-Unis des formes plus défensives de
nationalisme blanc depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale, comme l’ont notamment expliqué les
historiens Daniel Geary, Camilla Schofield, et Jennifer Sutton, qui décrivent ce développement comme
une réponse à « la décolonisation, aux luttes pour l’égalité des droits, aux migrations de masse, et aux
institutions internationales de l’après-guerre11 ». Ces nationalismes blancs contemporains reposent aussi
sur les sentiments de déclassement, de dépossession et de ressentiment exprimés par une partie
conséquente de l’électorat blanc étasunien, sentiments habilement exploités lors de la campagne
présidentielle menée par Donald Trump en 201612.
Les nationalismes blancs actuels se voient également justifiés par des théories du complot qui
activent de tels sentiments : ils sont par exemple nécessaires pour lutter contre le fameux « grand
remplacement » des populations blanches par une immigration massive, théorisé par l’écrivain français
Renaud Camus au début des années 201013, ou encore contre le « génocide blanc », version comparable
d’un complot orchestré contre la race blanche, très répandue parmi les suprémacistes étasuniens depuis
plusieurs décennies14. Omniprésents dans les espaces et les discours en ligne des nationalistes
américains, ces récits paranoïaques structurent une grande partie de l’extrême droite contemporaine et
illustrent la « mentalité obsidionale15 » qui la caractérise, fondée sur la conviction d’être continuellement
assiégé, menacé de toute part, et bien souvent en danger existentiel. Si une telle posture victimaire est
bien entendu difficilement conciliable avec la réalité sociale et politique, elle permet néanmoins aux
nationalistes blancs contemporains de se revendiquer du nationalisme anticolonial, dans le but de
s’arroger le prestige et la légitimité qui y sont associés.
Loin d’être cantonnée aux franges les plus radicales des suprémacistes blancs, cette mentalité
obsidionale semble particulièrement apparente dans les politiques de l’administration Trump en matière
d’immigration, avec notamment deux mesures phares du début du mandat du milliardaire républicain,
le décret présidentiel 1376916, couramment appelé « Muslim Ban », interdisant l’entrée sur le territoire
étasunien aux citoyens de sept pays à majorité musulmane, et le non moins controversé projet de mur à
la frontière entre les États-Unis et le Mexique.
11 « decolonization, struggles for equal rights, mass migration, and postwar international institutions ». D. GEARY, C.
SCHOFIELD, et J. SUTTON, Global White Nationalism: From Apartheid to Trump, Manchester, Manchester University Press,
2020, p.4.
12 Voir notamment D. C. MUTZ, « Status threat, not economic hardship, explains the 2016 presidential vote », Proceedings of
the National Academy of Science, vol. 115, n° 19, 2018, doi: <10.1073/pnas.1718155115>.
13 R. CAMUS, Le Grand Remplacement, Neuilly-sur-Seine, David Reinharc, 2011.
14 B. PERRY, « White Genocide: White Supremacists and the Politics of Reproduction », dans Home-grown Hate: Gender and
Organized Racism (ed. A. L. FERBER), New York, Routledge, 2003, p. 75-95.
15 S. MORT, « Rush Limbaugh, la figure médiatique devenue l’architecte du conservatisme étatsunien contemporain »,
Fondation Jean Jaurès, 19 février 2022, <https://www.jean-jaures.org/publication/rush-limbaugh-la-figure-mediatique-
devenue-larchitecte-du-conservatisme-etatsunien-contemporain/> (consulté le 14 janvier 2023).
16 Pour le texte du décret, voir <https://trumpwhitehouse.archives.gov/presidential-actions/executive-order-protecting-nation-
foreign-terrorist-entry-united-states/> (consulté le 14 janvier 2023).
Ces mesures ne sont toutefois pas suffisantes pour les factions les plus extrémistes de la droite
américaine. Richard Spencer, figure et chef de file autoproclamé de l’alt-right17, appelle ainsi en 2013
à une « épuration ethnique pacifique18 », une formulation inquiétante qui rappelle certaines des heures
les plus sombres de l’histoire mondiale du XXe siècle, mais qui s’inscrit de fait dans l’idée de pureté
raciale consacrée au niveau fédéral, au moins jusqu’en 1965. Chez d’autres, qui estiment bien souvent
qu’il est déjà trop tard pour sauver les États-Unis en tant que nation blanche, l’on trouve le leitmotiv du
séparatisme et de la formation d’enclaves pour les populations blanches. C’est le cas avec le Northwest
Territorial Imperative, fantasme récurrent d’une partie des suprémacistes blancs américains depuis les
années 1970, visant à créer un bastion sur le territoire des États de l’Idaho, du Montana, de l’Oregon, et
de Washington. Le choix de cet emplacement géographique ne doit bien entendu rien au hasard,
puisqu’il s’agit d’une région éloignée du Sud, de la côte Est, ainsi que des centres urbains, et par
conséquent des populations non-blanches19. Il est intéressant de remarquer ici qu’un tel séparatisme peut
être entendu comme une forme de nationalisme ou de régionalisme dépourvue de la traditionnelle idée
d’osmose avec la terre d’origine, illustré par exemple par le tristement célèbre slogan « Blood and Soil20
». Ce séparatisme, fréquemment évoqué en ligne, présente aussi des liens avec le survivalisme, idéologie
eschatologique appelant ses adeptes à se préparer en vue d’une révolution, guerre civile, ou autre
cataclysme imminent21.
III. L’apparition du nationalisme chrétien au XXe siècle et ses
développements contemporains
Une autre tradition nationaliste majeure aux États-Unis est celle du nationalisme chrétien, qui fait
la promotion d’une fusion entre christianisme et vie civique. Aussi appelée dominionism par certains
17 Nébuleuse presque exclusivement présente et active en ligne, l’alt-right, ou droite alternative, est davantage un phénomène
numérique qu’un mouvement cohérent. Cette extrême droite décomplexée, principalement caractérisée par son amalgame
d’idéologies réactionnaires et par son utilisation des réseaux sociaux et des pratiques numériques contemporaines, jouit d’une
médiatisation considérable à partir de la campagne présidentielle de 2016. Voir notamment S. RIDLEY, op. cit., ou M.
DAFAURE, « The “Great Meme War:” the Alt-Right and its Multifarious Enemies », Angles, vol. 10, 2020, doi:
<10.4000/angles.369>.
18 « peaceful ethnic cleansing ». T. BAR-ON, « Richard B. Spencer and the Alt Right », dans Key Thinkers of the Radical
Right: Behind the New Threat to Liberal Democracy (ed. M. SEDGWICK), Oxford, Oxford University Press, 2019, p. 226.
19 Il peut être noté que, conjointement à l’argument racial, l’on trouvait également au début du XXe siècle un argument
météorologique, cette région étant la moins ensoleillée des États-Unis et fournissant de ce fait l’environnement supposément
idéal pour une « civilisation robuste » (voir M. SPARKE, « Excavating the Future in Cascadia : Geoeconomics and the
Imagined Geographies of Cross-Border Region », BC Studies, vol. 127, 2000, p. 18, doi : <10.14288/bcs.v0i127.1537>.
L’auteur remercie Pierre-Alexandre Beylier pour avoir suggéré cet ajout).
20 Adapté du « Blut und Boden » (littéralement, « sang et sol »), cette expression utilisée par l’Allemagne nazie pour définir
l’appartenance à la nation et à la « race » est devenue un slogan chez les néo-nazis et autres suprémacistes blancs. On a
notamment pu l’entendre en août 2017 à Charlottesville en Virginie, au cours du rassemblement « Unite the Right », la
principale manifestation physique de l’alt-right à ce jour, durant laquelle un activiste d’extrême droite a foncé dans une foule
de contre-manifestants et a tué une jeune femme.
21 L’on peut remarquer ici que de tels fantasmes ne sont pas exclusifs aux États-Unis : on trouve par exemple en France des
militants identitaires qui depuis plusieurs années prônent un retour à la terre comparable, ou alors, non sans ironie, de migrer
vers des pays d’Europe de l’Est, épargnés selon ces activistes par l’immigration non-blanche et le « grand remplacement ». Ces
pays présenteraient par ailleurs des valeurs plus traditionnelles, et, de fait, plus nationalistes, mais également, comme on peut
fréquemment le lire dans les discours des organisations qui font la promotion de cette émigration, des femmes plus faciles à
séduire puisqu’elles n’ont pas été corrompues par le féminisme occidental, illustrant ainsi les convergences entre nationalismes
et antiféminisme au sein de l’extrême droite contemporaine. Voir G. D’ALLENS, « Enquête sur l’écofascisme : comment
l’extrême droite veut récupérer l’écologie », Reporterre, 1er février 2022, <https://reporterre.net/Enquete-sur-l-ecofascisme-
comment-l-extreme-droite-veut-recuperer-l-ecologie> (consulté le 14 janvier 2023), ou P. CONGE, Les Grands-remplacés :
Enquête sur une fracture française, Paris, Arkhê, 2020, p. 43-62.
auteurs22, celle-ci consiste à œuvrer en faveur d’une nation gouvernée par les chrétiens et d’une
hégémonie de ces derniers dans les champs de la culture, des médias, des affaires, ou encore de
l’éducation, se rapprochant ainsi des objectifs d’une théocratie classique. Toutefois, si cette tradition
peut sembler, tout comme le nationalisme blanc, inhérente à l’histoire des États-Unis, l’historien Kevin
M. Kruse rappelle que cette fusion commence en réalité seulement à partir des années 1930, en réaction
au New Deal de Franklin D. Roosevelt, puis se développe durant la présidence Eisenhower, avec
notamment l’ajout de « one nation under God » (« une nation » devenant « une nation sous l’autorité de
Dieu ») au serment d’allégeance étasunien, avant de se consolider avec la Christian Right, la droite
chrétienne, qui émerge sous Jimmy Carter et devient une force politique de premier plan durant les
années Reagan23.
Sous ses formes contemporaines et numériques, le nationalisme chrétien se retrouve lui aussi
associé à l’alt-right et à l’élection de Donald Trump, notamment sous la dénomination de Christian
Trumpism24, dénoncé dans des publications tant libérales25 que conservatrices26. Le nationalisme
chrétien a également joué un rôle substantiel dans la tentative d’insurrection du 6 janvier 202127, comme
souligné par de nombreux experts qui ont relevé la présence massive de symboles religieux au cours de
l’invasion du Capitole et de la manifestation qui l’a précédée. Il possède par ailleurs de nombreux traits
communs avec un autre phénomène proprement numérique qui a bénéficié d’une médiatisation
considérable depuis son apparition en 2017, la théorie du complot QAnon. Cette dernière, très répandue
aux États-Unis28 et bénéficiant d’une solide implantation dans plusieurs pays européens depuis le début
de la crise du Covid-19, affirme en substance qu’il existe une cabale d’élites satanistes et pédophiles
dirigeant secrètement le monde, et que la seule personne en mesure de lui tenir tête est le quarante-
cinquième président étasunien.
De toute évidence, Donald Trump incarne ici très explicitement, et parfois très littéralement auprès
des adeptes les plus radicaux, une figure messianique pour une importante partie de la droite nationaliste
chrétienne. Cela peut bien évidemment sembler paradoxal lorsque l’on connait la personnalité sulfureuse
du milliardaire républicain, célèbre pour ses frasques extraconjugales, les accusations d’agressions
sexuelles portées à son encontre par plus d’une vingtaine de femmes, et plus généralement son
comportement aux antipodes des valeurs chrétiennes d’humilité, de charité, ou encore d’amour de son
prochain. Mais un tel paradoxe peut s’expliquer par certaines études sociologiques de l’électorat
trumpiste et nationaliste chrétien, qui tendent à démontrer que cet électorat se réclamant du christianisme
ne fait en réalité pas partie des plus religieux29. Le nationalisme chrétien apparaît donc davantage comme
22 Voir notamment S. DIAMOND, Roads to Dominion: Right-Wing Movements and Political Power in the United States, New
York, Guilford Press, 1995; ou C. HEDGES, American Fascists: The Christian Right and the War on America, New York,
Free Press, 2007.
23 K. M. KRUSE, One Nation Under God: How Corporate America Invented Christian America, New York, Basic Books,
2015.
24 Michael Horton, professeur de théologie, explique que le « trumpisme chrétien » repose notamment sur la combinaison de
trois courants religieux et pseudo-religieux, l’« américanisme chrétien » (Christian Americanism), les théories du complot
eschatologiques (End-Times Conspiracy), et la théologie de la prospérité (Prosperity Gospel). Voir M. HORTON, « The Cult
of Christian Trumpism », The Gospel Coalition, 16 décembre 2020, <https://www.thegospelcoalition.org/article/cult-christian-
trumpism/> (consulté le 14 janvier 2023).n
25 E. GREEN, « A Christian Insurrection », The Atlantic, 8 janvier 2021,
<https ://www.theatlantic.com/politics/archive/2021/01/evangelicals-catholics-jericho-march-capitol/617591/> (consulté le 14
janvier 2023).
26 R. DREHER, « Church of Trumpianity », The American Conservative, 17 décembre 2020,
<https://www.theamericanconservative.com/trump-christians-trumpianity/> (consulté le 14 janvier 2023). n
27 E. GREEN, op. cit.
28 G. RUSSONELLO, « QAnon Now as Popular in U.S. as Some Major Religions, Poll Suggests », The New York Times, 27
mai 2021, <https://www.nytimes.com/2021/05/27/us/politics/qanon-republicans-trump.html> (consulté le 14 janvier 2023). n
29 Voir G. LAYMAN, « Where is Trump’s evangelical base? Not in church », Washington Post, 29 mars 2016,
<https://www.washingtonpost.com/news/monkey-cage/wp/2016/03/29/where-is-trumps-evangelical-base-not-in-church/>
(consulté le 14 janvier 2023).
une posture politique et culturelle que religieuse, et peut-être surtout comme une forme de marqueur
identitaire largement dépouillé de sa dimension spirituelle.
IV. Des constructions révisionnistes aux visées identitaires
À l’instar du nationalisme blanc, le nationalisme chrétien peut être qualifié de construction
politique, reposant tous deux sur des fondements sociaux et historiques, ainsi que sur des discours qui
élaborent des mythes : d’une part, celui de la race blanche, et de l’autre, celui de la chrétienté, les deux
étant supposément homogènes ainsi que scientifiquement et historiquement valides. De tels mythes
nationalistes sont cependant rapidement ébranlés dès lors que l’on examine l’histoire de ces groupes.
La notion de race blanche est ainsi particulièrement instable et mouvante. L’historien étasunien
Noel Ignatiev décrit dans son influent ouvrage publié en 1995, How the Irish Became White, la manière
dont les immigrants irlandais ont fait face à l’hostilité des vagues précédentes d’immigrés européens et
ne sont que progressivement « devenus » blancs à leurs yeux, en adoptant par exemple leurs mœurs,
mais surtout en faisant preuve d’un racisme exacerbé à l’encontre des Noirs américains puis des vagues
suivantes d’Européens, majoritairement en provenance du sud du continent30. L’universitaire française
Marie-Christine Michaud décrit un phénomène similaire chez les immigrants venus d’Italie :
Afin d’affirmer leur appartenance au groupe majoritaire [the mainstream], ils ont dû changer
leur image, en s’identifiant en tant que blancs, et en adoptant les modes de vie et mentalités de
la classe moyenne. Ils se sont tournés vers le Parti républicain dans les années 1980 (parce que
le Parti démocrate a toujours été associé aux minorités). À l’instar d’autres descendants de
migrants européens (les Irlandais ou les Polonais par exemple), ils sont devenus plus
conservateurs et ont développé une conscience raciale vis-à-vis de l’immigration des non-
blancs31.
Si ces complexes questions d’identité et d’affiliation raciales32 sont intimement liées aux théories
du racisme scientifique et aux hiérarchisations raciales évoquées au début de cette recherche, la
dimension religieuse y joue également un rôle majeur, puisque ces populations tendent à être de
confession juive, chrétienne orthodoxe, mais surtout catholique.
C’est ainsi que les populations catholiques subissent dès l’époque des treize colonies des
discriminations particulièrement sévères de la part des puritains alors majoritaires, qui votent notamment
des lois, dans les colonies de Virginie ou du Massachussetts, interdisant aux catholiques de s’y établir.
Ceux-ci sont traités comme des citoyens de seconde zone dans la majorité des colonies, bien que cette
Pour une discussion plus approfondie de ce point, consulter l’ouvrage de référence sur le nationalisme chrétien, A. L.
WHITEHEAD et S. L. PERRY, Taking Back America for God: Christian Nationalism in the United States, Oxford, Oxford
University Press, 2020, notamment pages 89-120.
30 N. IGNATIEV, How the Irish Became White, New York, Routledge, 1995.
31 « To assert their belonging to the mainstream, they had to change their image, identifying themselves as whites, and adopting
a middle-class standard of living and mentality. They turned to the Republican Party in the 1980s (because the Democratic
Party has always been associated with minorities). Along with other descendants of European migrants (the Irish, the Poles
for example), they became more conservative and more race conscious vis-à-vis the immigration of colored people. » M.-C.
MICHAUD, « The Italians in America, form Transculturation to Identity Renegotiation », Diasporas, vol. 19, 2011. doi:
<10.4000/diasporas.1788>.
Voir également la monographie de Thomas A. Guglielmo sur les Italiens à Chicago, T. A. GUGLIELMO, White on Arrival:
Italians, Race, Color, and Power in Chicago, 1890-1945, Oxford, Oxford University Press, 2003.
32 Pour une vision plus globale et une discussion plus approfondie de ces réflexions, se référer au travail de l’historien étasunien
et pionnier des critical whiteness studies David D. Roediger, en particulier les ouvrages D. D. ROEDIGER, The Wages of
Whiteness: Race and the Making of the American Working Class, New York, Verso Books, 1999 ; et D. D. ROEDIGER,
Working Toward Whiteness: How America’s Immigrants Became White: The Strange Journey from Ellis Island to the Suburbs,
New York, Basic Books, 2005.
hostilité et ces discriminations commencent à s’apaiser au moment de la guerre d’indépendance, au
cours de laquelle de nombreux catholiques se battent pour le camp révolutionnaire. Il faut aussi souligner
le soutien de la France catholique aux colonies rebelles face à la Couronne britannique, qui contribue
également à améliorer le sort des catholiques en Amérique du Nord33.
L’anticatholicisme ne disparaît cependant pas, et connaît un renouveau important aux XIXe et XXe
siècles, sous l’impulsion notamment du Know Nothing Party, mouvement nativiste du milieu du XIXe,
radicalement opposé à l’immigration catholique, puis de celle du deuxième Ku Klux Klan, lui aussi
marqué par un violent anticatholicisme34, ses membres allant jusqu’à brûler des croix devant des églises
et à assassiner au moins un prêtre.
Tout comme lors de la guerre d’indépendance près de deux siècles auparavant, la mobilisation des
catholiques au cours de la Deuxième Guerre mondiale et la camaraderie éprouvée par les soldats font
considérablement diminuer l’anticatholicisme aux États-Unis. Il s’agit néanmoins d’un phénomène
remarquablement persistant, dans la mesure où la campagne de John Fitzgerald Kennedy, descendant
d’une famille d’immigrés irlandais, se voit fragilisée par son catholicisme, son adversaire Richard Nixon
n’hésitant pas à en faire un enjeu de campagne35. La virulence et la persistance de l’anticatholicisme aux
États-Unis s’expliquent notamment par le fait que les protestants, historiquement majoritaires,
soupçonnaient les catholiques d’être davantage fidèles au Vatican et à la papauté qu’à leur pays. Ils
accusaient ainsi la foi catholique d’encourager communautarisme et séparatisme chez ses fidèles, et
d’être par conséquent incompatible avec la démocratie américaine36, des accusations qui ne sont par
ailleurs pas sans rappeler celles que l’on peut aujourd’hui entendre proférées dans de nombreux pays
occidentaux à l’encontre d’autres minorités religieuses, en particulier musulmanes37.
Porter un tel regard synthétique, mais néanmoins critique, sur l’histoire des États-Unis permet de
révéler que la réalité historique ne correspond pas aux constructions sociales que les deux formes
contemporaines de nationalisme étudiées ici tentent de présenter comme des groupes homogènes, et
comme des communautés quasi-naturelles et, par conséquent, légitimes. Ce constat s’inscrit
indéniablement dans la lignée du diagnostic partagé par la plupart des grand penseurs critiques du
nationalisme des années 1980 et 1990 : ce dernier repose sur l’élaboration d’un mythe, qui ignore les
spécificités contextuelles et les nuances, afin de construire une histoire et pour ainsi dire un roman
national unificateur. Comme l’indique la célèbre formule d’Eric Hobsbawm, qui stipule que « les nations
ne créent pas les États et les nationalismes, c’est le contraire38 », il s’agit bien là d’une construction a
posteriori du passé et de la nation. Cette construction mobilise par ailleurs certains mécanismes
d’unification et d’homogénéisation, censés susciter et stimuler l’adhésion à la nation et au sentiment
national : ces mécanismes reposent par exemple sur la scolarisation massive, répondant notamment à
33 M. J. FARRELLY, Anti-Catholicism in America, 1620-1860, Cambridge, Cambridge University Press, 2017.
34 Concernant l’anticatholicisme du deuxième Ku Klux Klan, se référer à K. J. BAKER, Gospel According to the Klan: The
KKK’s Appeal to Protestant America, 1915-1930, Lawrence, University Press of Kansas, 2011. Voir en particulier les pages
34-69 et 198-225.
35 Voir par exemple S. A. CASEY, The Making of a Catholic President: Kennedy vs. Nixon 1960, Oxford, Oxford University
Press, 2009.
36 J. T. MCGREEVY, « Thinking on One’s Own: Catholicism in the American Intellectual Imagination, 1928-1960 », Journal
of American History, vol. 84, n° 1, 1997, p. 98, doi : <10.2307/2952736>.
37 N. T. AMMERMAN et G. DAVIE, « Is religion bad for democracy? », The Conversation, 28 juin 2018,
<https://theconversation.com/is-religion-bad-for-democracy-97351> (consulté le 15 janvier 2023).
38 « Nations do not make states and nationalisms but the other way round ». E. J. HOBSBAWM, Nations and Nationalism
Since 1780: Programme, Myth, Reality, Cambridge, Cambridge University Press, 1990, p. 10.
Cette phrase est remarquablement proche de celle, antérieure et non moins célèbre, d’Ernest Gellner, « C’est le nationalisme
qui engendre les nations, et non pas l’inverse » (« It is nationalism which engenders nations, and not the other way round ». E.
GELLNER, Nations and Nationalism, Ithaca, Cornell University Press, 1983, p. 55.
des impératifs économiques (chez Ernest Gellner39), ou sur l’instauration d’une langue, de frontières, ou
encore d’un patrimoine communs (chez Benedict Anderson40).
En parallèle à de tels mécanismes homogénéisants, que l’on pourrait qualifier d’inclusifs, on trouve
toutefois des processus d’exclusion, de démarcation, et d’altérisation, particulièrement palpables au sein
des discours nationalistes étudiés ici. À travers ces processus, facilités, et parfois amplifiés, par les
pratiques numériques issues des espaces en ligne41, la construction unifiante du nationalisme s’appuie
alors sur une forme de négation et de rejet de l’Autre visant à déterminer les éléments qui ne font pas
partie de l’endogroupe national, ainsi que ceux qui en sont des membres illégitimes.
V. « Le patriotisme, c’est l’amour des siens. Le nationalisme, c’est la haine
des autres42. »
Il s’agit donc pour les nationalismes blanc et chrétien d’identifier, de désigner, voire de créer des
ennemis de la nation, que ces derniers se trouvent à ses frontières ou en son sein, empruntant là encore
le registre du nationalisme défensif, et illustrant la mentalité obsidionale évoquée plus haut.
Aux États-Unis, l’Autre qui apparaît comme le plus évidemment antagoniste au début du XXIe
siècle, tant pour les nationalistes blancs que chrétiens, est sans aucun doute le musulman.
L’islamophobie s’est déjà fermement implantée dans les esprits au cours de la seconde moitié du XXe
siècle, notamment en raison :
des entrepreneurs de la cause noire [qui] se saisissent de l’islam pour en faire un instrument
d’émancipation des Afro-Américains. Des mouvements comme le Moorish Science Temple, ou
la Nation of Islam, avec son porte-parole Malcolm X, mobilisent le référent islamique pour
promouvoir la dignité noire et lutter contre la suprématie blanche. Des conversions massives ont
lieu. L’islam acquiert alors un potentiel de subversion de l’ordre racial dominant43.
L’islam est ainsi assimilé à des politiques révolutionnaires, puis à des cultures contestataires comme
celle du hip hop, mais l’islamophobie que cette assimilation entraîne s’éloigne du fait religieux en se
concentrant sur les faits social et politique, par le biais de la question raciale. L’islamophobie
étasunienne prend toutefois une nouvelle dimension, toujours raciale mais résolument religieuse cette
fois-ci, à la suite des attentats du 11 septembre, et se voit exacerbée davantage encore par la crise des
réfugiés des années 2010, qui touche pourtant principalement l’Europe44.
La construction d’une chrétienté homogène, aussi révisionniste soit-elle, permet aux discours
nationalistes de présenter les autres religions comme des menaces et des ennemis : l’islam, comme on
vient de l’évoquer, mais également le judaïsme. Bien que l’antisémitisme soit considéré comme
indissociable du nationalisme blanc, en particulier aux États-Unis45, il convient toutefois de préciser que
39 E. GELLNER, op. cit.
40 B. ANDERSON, Imagined Communities: Reflections on the Origin and Spread of Nationalism, Londres, Verso Books,
1983.
41 Voir notamment W. PHILLIPS & R. M. MILNER, The Ambivalent Internet: Mischief, Oddity, and Antagonism Online,
Cambridge, Polity, 2017, ou M. DAFAURE, op. cit.
42 R. GARY, Éducation européenne, Paris, Gallimard, 1956.
43 J. GALONNIER, « Discrimination religieuse ou discrimination raciale ? L’islamophobie en France et aux États-Unis »,
Hommes & Migrations, vol. 1324, 2019, doi : <10.4000/hommesmigrations.8252>.
44 Pour une meilleure compréhension de ce phénomène et de son évolution, se référer à K. A. BEYDOUN, American
Islamophobia: Understanding the Roots and Rise of Fear, Los Angeles, University of California Press, 2018.
45 Derek Black, suprémaciste blanc « repenti » et fils du fondateur de Stormfront, l’un des plus anciens et influents sites
d’extrême-droite étasuniens, déclare que l’antisémitisme « est le ciment du nationalisme blanc, c’est l’idéologie qui, à bien des
égards, est absolument au cœur de ses motivations et de son organisation » (« antisemitism is the fiber of white nationalism, it
certains nationalistes étasuniens expriment une forme d’admiration, voire de jalousie à l’égard de l’État
d’Israël. Cela s’explique dans une large mesure par les politiques mises en place par l’État hébreu, qui
tendent parfois vers l’ethnonationalisme46, ainsi que par l’influence marquée des ultraconservateurs
religieux sur la vie politique du pays depuis plusieurs décennies.
Ce mythe d’une chrétienté homogène et unie est pourtant lui aussi malléable, comme le démontrent
l’absence de compassion, et bien souvent la franche hostilité, des nationalistes chrétiens étasuniens
envers les migrants d’Amérique Centrale et du Sud, en dépit du fait que ces populations soient dans leur
écrasante majorité de confession chrétienne. On peut souligner qu’au travers de ces figures ennemies,
nationalismes blanc et chrétien se confondent d’autant plus explicitement dans la mesure où les critères
raciaux et religieux, sur lesquels reposent la négation et l’altérisation des exogroupes, semblent donc se
superposer et s’imprégner mutuellement, et apparaissent ainsi interchangeables aux yeux des
nationalistes blancs et chrétiens47.
Un dernier exemple d’ennemi contre lequel les nationalismes contemporains se dressent et se
construisent est à trouver dans la figure du « globaliste ». Ce terme, désormais omniprésent dans les
discours conservateurs étasuniens et sur l’espace numérique anglophone48, rejoint dans une large mesure
l’opposition binaire théorisée par le journaliste anglais David Goodhart, entre les somewheres, ancrés à
un territoire, une nation, et les anywheres, les « n’importe où » cosmopolites, hors sol et en dehors de la
réalité des somewheres49. On peut remarquer que le souvent vague « globaliste » des discours
nationalistes ne manque pas d’évoquer une idée de réseau et de complot mondial des élites corrompues,
et se conjugue particulièrement bien avec des théories antisémites historiques, ou plus récemment avec
celle de QAnon50.
Il semble opportun de proposer à ce stade de la réflexion deux études de cas qui illustrent, de
manières différentes mais complémentaires, le renouveau des nationalismes évoqué dans ces pages, ainsi
que sa dimension numérique.
VI. Michael Flynn et Nicholas Fuentes : les nationalismes étasuniens à
l’heure des réseaux sociaux
La personnalité sulfureuse de Michael Flynn représente à bien des égards les liens et continuités
entre le nationalisme chrétien traditionnel et ses formes numériques, mais aussi la proximité
intellectuelle entre l’administration du quarante-cinquième président des États-Unis et des idéologies
supposément marginales. Général à la retraite, Flynn est nommé conseiller à la sécurité nationale au
is the ideology that in many ways is absolutely at the core and motivates all of its organizing »). « Exploring hate: How
antisemitism fuels white nationalism », PBS NewsHour, 24 octobre 2021, <https://www.pbs.org/newshour/show/exploring-
hate-how-antisemitism-fuels-white-nationalism> (consulté le 15 janvier 2023).
46 H. PINSON & A. K. AGBARIA, « Ethno-nationalism in citizenship education in Israel: an analysis of the official civics
textbook », British Journal of Sociology of Education, vol. 42, n°5-6, 2021, doi: <10.1080/01425692.2021.1902277>.
47 On pourra consulter à ce sujet l’ouvrage collectif Race, Nation, and Religion in the Americas (ed. H. GOLDSCHMIDT et
E. MCALISTER), Oxford, Oxford University Press, 2004.
48 Pour un bref historique de l’utilisation de ce mot, voir B. ZIMMER, « The Origins of the ‘Globalist’ Slur », The Atlantic, 14
mars 2018, <https://www.theatlantic.com/politics/archive/2018/03/the-origins-of-the-globalist-slur/555479/>. (consulté le 15
janvier 2023).
49 D. GOODHART, The Road to Somewhere: The Populist Revolt and the Future of Politics, Londres, C. Hurst & Co., 2017.
50 Apparu en octobre 2017 à la suite de messages cryptiques sur des forums en ligne anonymes, le phénomène conspirationniste
QAnon est un « assemblage étrange de théories du complot d’extrême droite qui affirme que le président des États-Unis Donald
Trump mène une guerre secrète contre une cabale internationale de sataniques pédophiles » (« the bizarre assemblage of far-
right conspiracy theories that holds that U.S. President Donald Trump is waging a secret war against an international cabal
of satanic pedophiles »). A. AMARASINGAM et M.-A. ARGENTINO, « The QAnon conspiracy theory: A security threat in
the making? », CTC Sentinel, vol. 13, n° 7, 2020, p. 37, <https://ctc.westpoint.edu/the-qanon-conspiracy-theory-a-security-
threat-in-the-making/>.
début du mandat de Donald Trump, mais doit démissionner au bout d’une vingtaine de jours seulement
suite à des révélations de conversations téléphoniques illégales avec l’ambassadeur de Russie aux États-
Unis ainsi qu’à des fausses déclarations à ce sujet au FBI. Il sera finalement gracié par le président avant
son départ de la Maison Blanche51.
Si Flynn se fait auparavant connaître pour sa virulente islamophobie, c’est au cours de la campagne
présidentielle de 2016 qu’il devient une figure centrale du trumpisme naissant (il est même un temps
évoqué pour être le colistier du milliardaire républicain52), et commence à jouir d’une popularité
marquée au sein des factions les plus radicales de l’extrême-droite étasunienne. Flynn se sert du réseau
social Twitter pour disséminer des commentaires islamophobes et antisémites53, interagir avec des
personnalités affiliées à l’alt-right, et propager des théories du complot émanant de la nébuleuse54. En
novembre 2016, il va jusqu’à déclarer que Donald Trump a été élu par « une armée de soldats
numériques55 », un commentaire remarquablement élogieux adressé aux activistes en ligne qui
composent l’alt-right, alors en quête de reconnaissance et de légitimité politique.
Michael Flynn est également un acteur majeur de la constellation QAnon. Il est l’une des vedettes
d’une conférence QAnon organisée en septembre 2019, dont le titre synthétise le nationalisme chrétien
prôné par l’ancien général, et reprend sa formulation citée plus haut : « Pour Dieu et pour la patrie :
conférence de soldats numériques56 » (« For God and Country : Digital Soldiers Conference »). Le but
affiché de cette conférence était de « préparer des guerriers des réseaux sociaux patriotes » en vue d’une
« guerre civile numérique57 ». En juillet 2020, Flynn publie en ligne une vidéo dans laquelle il prête
allégeance à la théorie du complot, et quelques mois plus tard, il participe activement aux tentatives de
renversement de l’élection présidentielle, en proposant notamment à l’équipe de Donald Trump
d’instaurer la loi martiale et de déployer l’armée pour s’emparer des machines à voter58. On l’aperçoit
par la suite à des rassemblements « Stop the Steal », qui dénoncent le « vol » de l’élection par Joe Biden
et les Démocrates, ce qui l’amène à être convoqué par le comité parlementaire chargé d’enquêter sur les
évènements du 6 janvier 2021, devant lequel il plaide cependant le cinquième amendement, qui permet
de refuser de fournir des réponses potentiellement incriminantes59.
Enfin, lors d’un discours dans le cadre d’une autre conférence QAnon en novembre 2021, l’ancien
général, que le professeur de sociologie Samuel Perry va jusqu’à décrire comme « un martyr et une
mascotte pour le contingent d’extrême droite du mouvement nationaliste chrétien aux États-Unis60 »,
51 Pour un résumé concis de ces évènements, se référer à E. TUCKER, « Trump pardons Flynn despite guitly plea in Russian
probe », AP News, 26 novembre 2020, <https://apnews.com/article/donald-trump-pardon-michael-flynn-russia-
aeef585b08ba6f2c763c8c37bfd678ed> (consulté le 15 janvier 2023).
52 J. SANTUCCI et A. ABRAMSON, « Donald Trump Vetting Gen. Michael Flynn for Potential VP Pick », ABC News, 9
juillet 2016, <https://abcnews.go.com/Politics/donald-trump-vetting-gen-michael-flynn-potential-vp/story?id=40462921>
(consulté le 15 janvier 2023).
53 K. EAST, « Flynn retweets anti-Semitic remark », Politico, 24 juillet 2016,
<https://www.politico.com/story/2016/07/michael-flynn-twitter-226091> (consulté le 15 janvier 2023).
54 A. KACZYNSKI, « On Twitter, Michael Flynn interacted with alt-right, made controversial comments on Muslims, shared
fake news », CNN, 18 novembre 2016, <https://edition.cnn.com/2016/11/18/politics/kfile-flynn-tweets> (consulté le 15 janvier
2023).
55 « an army of digital soldiers ». C. RONDEAUX, « The Digital General: How Trump Ally Michael Flynn Nurtured and
Profited From the QAnon Conspiracy Theory », The Intercept, 27 juin 2021, <https://theintercept.com/2021/06/27/qanon-
michael-flynn-digital-soldiers/> (consulté le 15 janvier 2023).
56 Ibid.
57 J. BOWDEN, « Flynn, Papadopoulos to speak at event preparing ‘social media warriors’ for ‘digital civil war’ », The Hill,
14 août 2019, <https://thehill.com/blogs/blog-briefing-room/news/457384-flynn-papadopoulos-to-speak-at-event-preparing-
social-media/> (consulté le 15 janvier 2023).
58 C. RONDEAUX, op. cit.
59 K. FAULDERS et B. SIEGEL, « Former Trump adviser Michael Flynn meets with Jan. 6 committee, takes 5th », ABC News,
10 mars 2022, <https://abcnews.go.com/US/trump-adviser-michael-flynn-meets-jan-committee-sources/story?id=83367606>
(consulté le 15 janvier 2023).
60 « Mike Flynn has emerged as a martyr and a mascot for the far-right contingent of the Christian-nationalist movement in
the United States ». P. WEHNER, « The Desecrations of Michael Flynn », The Atlantic, 25 octobre 2022,
prononce les mots suivants : « Si nous devons avoir une nation sous l’autorité de Dieu, ce qui est
nécessaire, nous devons avoir une religion. Une nation sous l’autorité de Dieu et une religion sous
l’autorité de Dieu61 ». Cette altération sans équivoque du serment d’allégeance déjà modifié en 1954
sous Eisenhower62 est remarquée et controversée, mais illustre néanmoins les stratégies (« réapproprier
le langage et l’iconographie chrétiens afin de dissimuler certains objectifs politiques et sociaux derrière
un symbolisme moral et religieux63 ») et peut-être surtout les finalités du projet politique qu’est le
nationalisme chrétien, tant sous sa forme traditionnelle que contemporaine.
Nicholas Fuentes coche quant à lui toutes les cases de l’extrême droite nationaliste contemporaine
représentée par l’alt-right. Jeune homme âgé d’une vingtaine d’années, il se fait connaître en ligne grâce
à son livestream, c’est-à-dire son émission diffusée en direct sur internet qu’il a baptisée America First
with Nick Fuentes. Il s’agit d’une émission ouvertement nationaliste blanche et nationaliste chrétienne,
dans laquelle le jeune animateur fait continuellement preuve d’ironie et de provocation, et produit du
contenu radicalement raciste, suprémaciste, islamophobe, antisémite, et négationniste. Il est par ailleurs
proche de la sous-culture désormais tristement célèbre des incels, les « célibataires involontaires »
(involuntary celibates) violemment misogynes, sous-culture appartenant à la « manosphère », qui
représente elle-même l’un des courants de l’alt-right64. Il a, à titre d’exemple, déclaré en début 2022
qu’il s’opposait au droit de vote des femmes, promouvant ainsi sa virulente misogynie réactionnaire par
le biais d’une provocation sensationnaliste qui n’a pas manqué d’être remarquée et commentée dans les
médias65.
En 2020, Fuentes fonde l’AFPAC, l’America First Political Action Conference, en réponse à la
plus conventionnelle CPAC, la Conservative Political Action Conference, que lui et ses soutiens jugent
insuffisamment radicale : Fuentes et ses alliés estiment en particulier que la CPAC n’est pas assez
nationaliste et ne défend pas suffisamment l’Amérique blanche (Fuentes déclare ainsi lors d’une
émission de février 2022 : « Si nous voulons rendre sa grandeur à l’Amérique, nous devons parler de ce
phénomène anti-blancs qui est à l’œuvre. Et si nous voulons restaurer l’Amérique, nous devons refaire
de l’Amérique une nation chrétienne66 »). L’un des principaux objectifs de l’AFPAC est donc d’orienter
le Parti républicain vers un conservatisme plus extrême, en élargissant par exemple le spectre du dicible
au moyen de discours allant d’euphémismes à des expressions de racisme et/ou d’antisémitisme
explicites. Fuentes et l’America First Political Action Conference reprochent notamment à la majorité
des conservateurs étasuniens, et particulièrement aux néo-conservateurs des années Reagan et à leurs
<https://www.theatlantic.com/ideas/archive/2022/10/michael-flynn-maga-christian-trump/671852/> (consulté le 15 janvier
2023).
61 « If we are going to have one nation under God, which we must, we have to have one religion. One nation under God and
one religion under God. » (nous soulignons). B. SMIETANA, « Michael Flynn calls for ‘one religion’ at event that is a who’s
who of the new Christian right », Washington Post, 19 novembre 2021,
<https://www.washingtonpost.com/religion/2021/11/19/michael-flynn-alex-jones-feucht/> (consulté le 15 janvier 2023).
62 De « one nation » à « one nation under God » sous Eisenhower, puis à « one nation under God and one religion under God »
avec Flynn.
63 « Christian nationalism […] co-opts Christian language and iconography in order to cloak particular political or social
ends in moral and religious symbolism ». A. L. WHITEHEAD et S. L. PERRY, op. cit., p. 153.
64 Tout comme l’alt-right, la manosphère incarne un renouveau de discours réactionnaires traditionnels, en l’occurrence
antiféministes et bien souvent profondément misogynes, perpétués par le biais des espaces et pratiques numériques
contemporains. Pour une discussion plus approfondie de la manosphère et de ses liens avec l’alt-right, consulter M. DAFAURE,
« Memes, trolls and the manosphere: mapping the manifold expressions of antifeminism and misogyny online », European
Journal of English Studies, vol. 26, n° 2, 2022, doi : <10.1080/13825577.2022.2091299>.
65 L. THEROUX, « ‘They had their own cameras trained on meLouis Theroux on his showdowns with US extremists »,
The Guardian, 10 février 2022, <https://www.theguardian.com/tv-and-radio/2022/feb/10/louis-theroux-showdowns-us-
extremists-forbidden-america-white-nationalists-no-platforming> (consulté le 15 janvier 2023).
66 « If we’re going to make America great again, we’ve got to talk about this anti-white thing that’s going on. And if we want
to restore America, we’ve got to make America a Christian nation again ». « Nick Fuentes », Southern Poverty Law Center,
<https://www.splcenter.org/fighting-hate/extremist-files/individual/nick-fuentes> (consulté le 15 janvier 2023).
héritiers, d’être trop modérés sur des questions sociétales telles que l’immigration, les droits des
personnes LGBTQ+, ou encore le respect des valeurs chrétiennes traditionnelles67.
La formule America First illustre ainsi fort bien l’amalgame des nationalismes étudiés dans ce
travail : dans les années 1920, elle servait de slogan au deuxième Ku Klux Klan, dont les revendications
étaient remarquablement proches de celles de Michael Flynn un siècle plus tard : « Un Dieu, un pays,
un drapeau » (« One God, one country, one flag68 »). Dans les années 1930 et 1940, America First
devient synonyme d’isolationnisme, mais également souvent d’antisémitisme et de sympathies pour les
régimes fasciste et nazi, notamment au sein de lAmerica First Committee69. Au XXIe siècle, le slogan
est d’abord le programme, puis le nom officiel donné à la politique étrangère de l’administration Trump.
Il devient par la suite celui d’une organisation fondée par d’anciens cadres de son gouvernement, parmi
lesquels Stephen Miller, architecte de sa politique migratoire, dont la proximité avec des groupes
nationalistes blancs est avérée70. America First est enfin, comme on a pu le voir dans ces lignes, le nom
de l’émission et de la conférence de Fuentes, et témoigne de ce fait des profondes continuités
idéologiques et rhétoriques de l’extrême droite étasunienne.
Conclusion(s) : l’influence des nationalismes contemporains sur le Parti
républicain, et la question du médium numérique
Si la figure de Nicholas Fuentes peut au premier abord sembler relativement marginale, voire
anecdotique, celle de Michael Flynn l’est indubitablement moins, eu égard à ses responsabilités au sein
de certaines des plus hautes instances de l’État américain (armée, gouvernement). Il convient également
de rappeler brièvement par quelques chiffres l’influence malgré tout significative de ces deux hommes
sur l’écosystème numérique des conservateurs étasuniens. Avant que la chaîne de Fuentes ne soit
suspendue de manière permanente par le site YouTube, ses vidéos cumulaient plus de trois millions de
vues, et son compte Twitter était suivi par plus de 125 000 personnes au moment de son éviction du
réseau social71. Témoignage de son influence bien plus marquée, Flynn dépassait quant à lui le million
d’abonnés lorsque son compte Twitter est banni par la plateforme en janvier 2021 suite à sa promotion
répétée de la théorie du complot QAnon et à sa participation active aux tentatives de renversement de
l’élection présidentielle de 2020.
En dépit de son expulsion des principaux réseaux sociaux, l’influence de Fuentes ne semble
cependant pas s’amoindrir. Certains chiffres, relevés par la correspondante politique de Time Magazine
Vera Bergengruen, sont éloquents à cet égard : le 11 août 2020, au moment où Joe Biden annonce avoir
choisi Kamala Harris comme colistière, l’émission de Fuentes, ponctuée de tirades clamant que cette
dernière « hait les blancs » ou qu’elle va se servir du gouvernement fédéral pour « détruire les
67 Z. PETRIZZO, « What you need to know about AFPAC, the white nationalist alternative to CPAC », The Daily Dot, 25
février 2021, <https://www.dailydot.com/debug/nick-fuentes-afpac-cpac/> (consulté le 15 janvier 2023).
68 Slogan qui apparaît notamment lors d’une manifestation du Klan à Binghamton, dans l’état de New York. Voir par exemple
C. KIDD, « Behold, America by Sarah Churchwell review the underside of the ‘American dream’ », The Guardian, 14 juillet
2018, <https://www.theguardian.com/books/2018/jul/14/behold-america-history-of-american-dream-sarah-churchwell-
review> (consulté le 15 janvier 2023).69 Voir par exemple W. S. COLE, America First: The Battle Against Intervention, 1940-
1941, Madison, University of Wisconsin Press, 1953.
69 Voir par exemple W. S. COLE, America First: The Battle Against Intervention, 1940-1941, Madison, University of
Wisconsin Press, 1953.
70 K. BELLWARE, « Leaked Stephen Miller emails show Trump’s point man on immigration promoted white nationalism,
SPLC reports », The Washington Post, 13 novembre 2019, <https://www.washingtonpost.com/politics/2019/11/12/leaked-
stephen-miller-emails-suggest-trumps-point-man-immigration-promoted-white-nationalism/> (consulté le 15 janvier 2023).
71 J. BREWSTER, « Twitter Bans White Nationalist Leader Nick Fuentes, Ally of Republican Rep. Gosar », Forbes, 9 juillet
2021, <https://www.forbes.com/sites/jackbrewster/2021/07/09/twitter-bans-white-nationalist-leader-nick-fuentes-ally-of-
arizona-republican-rep-gosar/> (consulté le 15 janvier 2023).
conservateurs, pour détruire America First et quiconque défend les blancs72 », est regardée par 9000
personnes. Concomitamment, les chaînes de télévision grand public ABC News et NBC couvrent
également l’annonce, et recueillent à elles deux une moyenne de 6100 téléspectateurs73, témoignage de
l’évolution des modes de consommation de l’information, mais peut-être surtout du poids non
négligeable du jeune nationaliste. Le nom de Fuentes commence également à apparaître régulièrement
dans la presse en ligne au cours de l’année 2022, notamment en octobre lorsqu’il tente de faire son retour
sur Twitter suite au rachat du site par le milliardaire et autoproclamé « absolutiste de la liberté
d’expression » (« free speech absolutist ») Elon Musk74. Mais l’évènement le plus marquant et médiatisé
pour Fuentes est certainement son diner avec Donald Trump et le rappeur Kanye West le 22 novembre,
qui se voit largement commenté dans de nombreux médias, et provoque une vague de condamnations
d’une grande partie de la classe politique étasunienne, tant chez les Démocrates que chez les
Républicains75. Là où nombreux sont ceux qui y voient un symbole de la proximité idéologique entre
l’ancien président et le nationalisme blanc défendu par Fuentes, l’on ne peut manquer de souligner
qu’une telle exposition médiatique a été particulièrement bénéfique à ce dernier, et de ce fait à son
émission, en faisant connaître son nom à une large part de la population américaine alors qu’il était
jusque-là relativement inconnu du grand public.
L’emprise croissante des nationalismes blanc et chrétien sur le Parti républicain se vérifie
également parmi ses élus, ses candidats, et sa base électorale. La conférence AFPAC de 2022 organisée
par Nicholas Fuentes attire ainsi quatre élus républicains dont deux issus de la chambre des
représentants, Paul Gosar, de l’État de l’Arizona, et la très médiatique Marjorie Taylor Greene, de celui
de Géorgie76. Cette dernière déclare quelques mois plus tard, lors d’une autre conférence devant des
jeunes conservateurs de l’organisation Turning Point USA, que le Parti républicain « doit être le parti
du nationalisme. Je suis chrétienne, et je le dis fièrement nous devrions être des nationalistes
chrétiens77 ». En parallèle, à la plus traditionnelle CPAC, Lauren Witzke, candidate républicaine au
Sénat qui a reçu le soutien de Fuentes et n’a pas manqué de l’en remercier publiquement, malgré la
réputation pour le moins sulfureuse de ce dernier, décrit en février 2022 la Russie comme une « nation
nationaliste chrétienne ». Elle déclare aussi qu’elle « s’identifie plus aux valeurs chrétiennes de Poutine
qu’à Joe Biden », et que « les pays nationalistes chrétiens sont une menace pour le régime global78 ». Il
72 « “She hates white people,” Fuentes told viewers on DLive. “She is going to use the full weight of the federal government
… to destroy conservatives, to destroy America First, anybody that speaks up for white people.” ». V. BERGENGRUEN,
« How Far-Right Personalities and Conspiracy Theorists Are Cashing in on the Pandemic Online », Time, 20 août 2020,
<https://time.com/5881595/right-wing-conspiracy-theorists-coronavirus/> (consulté le 15 janvier 2023).
73 Ibid.
74 J. KNUTSON, « Twitter re-bans white nationalist Nick Fuentes after he makes new account », Axios, 30 octobre 2022,
<https://www.axios.com/2022/10/30/twitter-bans-nick-fuentes-new-account> (consulté le 15 janvier 2023).
La suspension du compte Twitter de Michael Flynn est quant à elle annulée par Musk le 6 janvier 2023, deux ans jour pour
jour après la tentative d’insurrection au Capitole, le général à la retraite récupérant ainsi l’ensemble de ses abonnés et une
plateforme considérable. M. R. SMITH, « Michael Flynn restored to Twitter on Jan.6 anniversary », AP News, 6 janvier 2023,
<https://apnews.com/article/technology-politics-michael-flynn-business-48b079e6b87cd9ebcf45d9e24d7861b7> (consulté le
15 janvier 2023).
75 D. JONES, « Republican leaders denounce Trump’s dinner with white nationalist Nick Fuentes », NPR, 29 novembre 2022,
<https://www.npr.org/2022/11/29/1139742844/republicans-denounce-trump-dinner-white-supremacist-nick-fuentes>
(consulté le 15 janvier 2023).
76 J. EDWARDS et M. ALFARO, « McConnell says no space in GOP for ‘white supremacists or anti-Semitism’ after two
House Republicans participate in white nationalist’s conference », The Washington Post, 28 février 2022,
<https://www.washingtonpost.com/nation/2022/02/28/marjorie-taylor-greene-white-nationalist-conference/> (consulté le 15
janvier 2023).
77 « We need to be the party of nationalism […]. I’m a Christian and I say it proudly we should be Christian nationalists ».
T. KIKA, « Marjorie Taylor Greene to GOP: ‘We Should Be Christian Nationalists », Newsweek, 24 juillet 2022,
<https://www.newsweek.com/marjorie-taylor-greene-gop-we-should-christian-nationalists-1727445> (consulté le 15 janvier
2023).
78 « Russia is a Christian Nationalist nation […]. I identify more with Russian, ah , with Putin’s Christian values than I do Joe
Biden… Christian Nationalist countries are a threat to the global regime » (nous soulignons). S. BAZZLE, « WATCH: GOP
Senate Candidate Aligns ‘More With Putin’s Christian Values’ Than Biden’s », Hill Reporter, 24 février 2022,
<https://hillreporter.com/watch-gop-senate-candidate-aligns-more-with-putins-christian-values-than-bidens-125708>
(consulté le 15 janvier 2023).79 K. JOYCE, « CPAC opens and immediately devolves into GOP dissent over Ukraine », Salon,
peut sembler surprenant et paradoxal qu’une citoyenne étasunienne se présentant comme patriote et
nationaliste déclare qu’elle soutient et s’identifie davantage au président de la Russie qu’à celui des
États-Unis, et l’on trouve dans ces propos une illustration des profondes fractures et divisions du Parti
républicain quant à la Russie79. Il convient cependant de rappeler que Vladimir Poutine se sert lui aussi
du christianisme comme d’une arme rhétorique et idéologique, et que le président russe incarne pour de
nombreux conservateurs la figure d’un homme fort et d’un président nationaliste autoritaire que ces
derniers souhaiteraient voir accéder au pouvoir dans leur pays80.
La radicalisation des discours et la tendance croissante au(x) nationalisme(s) des conservateurs
étasuniens ont des conséquences politiques et législatives concrètes tout au long de la présidence Trump.
Outre ses politiques migratoires, teintées du nationalisme blanc de leur principal artisan, Stephen Miller,
l’on voit éclore des propositions de lois dites « anti-sharia » dans une quarantaine d’États. Celles-ci sont
adoptées dans une dizaine d’entre eux81, bien que les musulmanes et musulmans ne représentent environ
qu’un centième de la population des États-Unis82. D’autres lois du même acabit sont votées à travers le
pays, visant notamment à lutter contre la critical race theory ou le mystérieux LGBT agenda, autant de
moyens de séduire un électorat friand de telles paniques morales83.
Si, comme on l’a évoqué dans ces pages, Donald Trump n’est pas particulièrement religieux, son
mandat a toutefois été remarquablement bénéfique à la droite chrétienne. L’illustration la plus frappante
est certainement sa nomination de trois juges à la Cour suprême (Neil Gorsuch, Brett Kavanaugh, et
Amy Coney Barrett), qui ne compte rappelons-le que neuf membres désignés à vie, une énorme
satisfaction pour les chrétiens conservateurs. Ces nominations seront donc déterminantes dans les années
à venir, et sont un geste politique déjà lourd de conséquences au vu de la décision Dobbs v. Jackson
Women’s Health Organization du 24 juin 2022, qui revient sur le célèbre arrêt Roe v. Wade qui avait
décriminalisé l’avortement au niveau fédéral depuis 197384.
Force est donc de constater que les nationalismes étudiés dans le cadre de ce travail sont non
seulement des constructions prenant la forme de marqueurs identitaires, mais peut-être bien avant tout
des artéfacts politiques, comme l’affirmaient Ernst Gellner ou Eric Hobsbawm : à la fois produits et
légitimations d’intérêts spécifiques, ces artéfacts visent ici à préserver la domination sociale, politique,
économique, ou encore culturelle, des chrétiens blancs. Ceux-ci constituent l’écrasante majorité de
24 février 2022, <https://www.salon.com/2022/02/24/cpac-opens-and-immediately-dissolves-into-dissent-over-ukraine/>
(consulté le 15 janvier 2023).
79 K. JOYCE, « CPAC opens and immediately devolves into GOP dissent over Ukraine », Salon, 24 février 2022,
<https://www.salon.com/2022/02/24/cpac-opens-and-immediately-dissolves-into-dissent-over-ukraine/> (consulté le 15
janvier 2023).
80 S. OLMOS, « ‘Key to white survival’: how Putin has morphed into a far-right savior », The Guardian, 5 mars 2022,
<https://www.theguardian.com/us-news/2022/mar/05/putin-ukraine-invasion-white-nationalists-far-right> (consulté le 15
janvier 2023).
81 « Entre 2010 et 2018, onze États ont adopté des lois anti-sharia : l’Alabama, l’Arizona, l’Arkansas, la Floride, le Kansas, la
Louisianne, la Caroline du Nord, l’Oklahoma, le Tennessee, le Texas, et le Dakota du Sud. […] Bien qu’il s’agisse d’une
minorité d’États, presque chaque État a proposé de telles lois, à l’exception de la Californie, de l’Illinois, du Maryland, du
Massachusetts, du Nevada, et des États de New York et de Rhode Island » (« Between 2010 and 2018, 11 states adopted some
form of an anti-sharia law. These include Alabama, Arizona, Arkansas, Florida, Kansas, Louisiana, North Carolina,
Oklahoma, Tennessee, Texas and South Dakota. […] Although this is a minority of states practically every state has introduced
these laws with the exception of California, Illinois, Maryland, Massachusetts, Nevada, New York and Rhode Island. ») D.
HUMMEL, « Legislating Islamophobia: The factors for the existence of anti-sharia laws in the United States », Public Policy
and Administration, vol. 37, n° 3, doi : <10.1177/0952076720977610>.
82 D. HUMMEL, Prejudice and Policymaking: Islamophobia in the United States and the Diffusion of Anti-Sharia Laws,
Lanham, Lexington Books, 2021.
83 Voir par exemple F. FEJES, Gay Rights and Moral Panic: The Origins of America’s Debate on Homosexuality, New York,
Palgrave Macmillan, 2008.
84 L. HURLEY, « Analysis: Trump’s justices decisive in long campaign to overturn Roe v. Wade », Reuters, 24 juin 2022,
<https://www.reuters.com/legal/government/trumps-justices-decisive-long-campaign-overturn-roe-v-wade-2022-06-24/>
(consulté le 15 janvier 2023).
l’électorat républicain, ce qui explique la popularité des nationalismes blanc et chrétien au sein du Parti
républicain contemporain.
Une telle résurgence à l’ère d’internet et des réseaux sociaux pourrait sembler relever d’un
paradoxe : comment expliquer que la mise en réseau du monde, et le potentiel de rapprochement des
individus qu’elle implique, mènent, comme on a pu le voir, à une exacerbation des nationalismes,
marquée par un profond repli identitaire ? On trouve un moyen de résoudre ce paradoxe apparent chez
Benedict Anderson. Pour l’historien britannique, la « camaraderie horizontale » sous-tendant le
nationalisme est rendue possible par une autre révolution technologique, le capitalisme d’imprimerie,
qui entraine notamment l’émergence des journaux :
La signification de cette cérémonie de masse Hegel a observé que les journaux sont pour
l’homme moderne un substitut de la prière matinale est paradoxale. Elle est réalisée
intérieurement, silencieusement et en privé. Pourtant chaque communiant est bien conscient que
la cérémonie qu’il accomplit est reproduite simultanément par des milliers (ou des millions)
d’autres personnes dont il sait pertinemment qu’elles existent, mais ignore complètement
l’identité. […] Peut-on imaginer une représentation plus frappante de la communauté imaginée
séculière […] ? Au même moment, le lecteur du journal, qui en observe des répliques exactes
dans le métro, chez son coiffeur, ou dans les mains de ses voisins, est continuellement rassuré,
son monde imaginé étant visiblement ancré dans la vie quotidienne85.
Selon Anderson, c’est donc en lisant les mêmes journaux dans le même espace temporel que les
individus ont pu envisager cette camaraderie horizontale avec des gens qu’ils n’avaient jamais
rencontrés et ne rencontreraient jamais. Les parallèles avec le médium et l’espace numériques semblent
s’imposer, d’autant que ces derniers amplifient des mécanismes préexistants tout autant qu’ils offrent
de nouvelles possibilités pour créer ou consolider des communautés imaginées : chaque « communiant
» des réseaux sociaux ou autres forums en ligne ne se contente pas d’être conscient de l’existence
d’autres communiants, ni de voir ses voisins et proches utiliser le même médium, mais est en mesure de
communiquer directement au travers de ce dernier. Les internautes partagent ainsi, à des échelles très
variées et en synchronie, la même culture, le même langage vernaculaire, ou encore les mêmes
informations, cimentant la dimension communautaire et identitaire des réseaux sociaux. Comme on l’a
vu, la création d’ennemis et le vocabulaire guerrier viennent alors renforcer le sentiment d’appartenance
à l’endogroupe, ce qui explique les « soldats numériques » de Michael Flynn ou les adeptes de Fuentes
qui se caractérisent eux-mêmes comme une « armée ».
L’une des contributions majeures de cette recherche est de démontrer que si les nationalismes
contemporains et numériques qu’elle étudie peuvent prendre des formes en apparence nouvelles et
séduire de nouveaux publics, ils sont néanmoins indubitablement connectés à certaines traditions
idéologiques et au passé, même s’il s’agit, comme c’est le cas ici, d’un passé mythifié, réifié, et
instrumentalisé. En focalisant son regard sur les États-Unis, ce travail suggère également que ces
nationalismes peuvent être connectés entre eux à l’échelle d’un pays, en révélant que les nationalismes
blanc et chrétien étasuniens sont largement interchangeables, notamment aux niveaux sociologique et
démographique, et par conséquent en termes d’intérêts, d’enjeux, et d’ennemis communs.
Au travers des réflexions et des exemples qu’elle a mobilisés, cette étude nourrit l’ambition d’offrir
des outils pour mieux comprendre la résurgence des nationalismes à l’heure du numérique. Elle espère
permettre à de futurs travaux d’analyser les spécificités d’autres formes de nationalisme à l’échelle
85 « The significance of this mass ceremony Hegel observed that newspapers serve modern man as a substitute for morning
prayers is paradoxical. It is performed in silent privacy, in the lair of the skull. Yet each communicant is well aware that the
ceremony he performs is being replicated simultaneously by thousands (or millions) of others of whose existence he is confident,
yet of whose identity he has not the slightest notion. […] What more vivid figure for the secular, historically clocked, imagined
community can be envisioned? At the same time, the newspaper reader, observing exact replicas of his own paper being
consumed by his subway, barbershop, or residential neighbours, is continually reassured that the imagined world is visibly
rooted in everyday life. » B. ANDERSON, op., cit., p. 35-36.
locale ou régionale, mais également de développer une approche transnationale de ces phénomènes,
fondée sur des regards croisés. Celle-ci semble justifiée par les succès politiques et électoraux des
propositions d’inspiration nationaliste à travers le monde, et peut-être surtout par la réappropriation et
l’adaptation par ces dernières des discours, théories, et stratégies qui ont rendu possible une renaissance
des nationalismes blanc et chrétien aux États-Unis.
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Article
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Through a number of case studies, this article will conduct an analysis of the sometimes seemingly ubiquitous antifeminism, and even misogyny, in certain anglophone online spaces, and of their roots in older historical antifeminist discourses. It will also discuss how this patriarchal backlash is strategically presented by its proponents as an indicator of a crisis in contemporary masculinity, and to what extent it is part of a wider phenomenon of reaction against progressive advances, in both online and offline spaces. Do not hesitate to contact me if you want to learn more.
Article
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Abstract: The QAnon conspiracy theory, which emerged in 2017, has quickly risen to prominence in the United States. A survey of cases of individuals who have allegedly or apparently been radicalized to criminal acts with a nexus to violence by QAnon, including one case that saw a guilty plea on a terrorism charge, makes clear that QAnon represents a public security threat with the potential in the future to become a more impactful domestic terror threat. This is true especially given that conspiracy theories have a track record of propelling terrorist violence elsewhere in the West as well as QAnon’s more recent influence on mainstream political discourse.
Article
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In this essay, I discuss how the alt-right has brought back into fashion traditional tenets of the reactionary, xenophobic, and often racist far-right, as demonstrated by George Hawley, and how it has managed to make these tenets appear as novel, provocative, and updated to the 21st century U.S. society and digital environment. I argue that to do so, alt-righters relied heavily on the creation, and sometimes reappropriation, of enemy images, with the ultimate goals of provoking outrage, instilling fear and/or hatred towards specific groups, reinforcing a sense of belonging within their own community, or more broadly manipulating collective perceptions and representations, first online then in real life. Indeed, the election of Donald Trump was hailed by the online alt-right as one of their major successes. With the help of irony, subversion, and often carefully engineered propaganda-like messages and images, the alt-right, it boasts, “meme’d into office” the Republican candidate. This paper consequently leads to an analysis of real-life repercussions of such adversarial rhetoric, notably through examples of recent far-right domestic terrorism in the US, and to a reflection on their place in an age of post-truth, fake news, and alternative facts. This contribution focuses on several enemy images. The first is that of the civilizational enemy from the outside, which uses the traditional process of othering. This theme is linked to Trump’s campaign and to his attacks against two major “enemies” of the U.S., namely Hispanics and Muslims. With the alt-right, refugees for example become “rapefugees,” which easily appeals to rampant islamophobia. The second enemy image created by the alt-right consists in its ideological opponents. Here, the function of the enemy image is to discredit opponents and their views (“cuckservative,” “feminazi,” or the sarcastic “Social Justice Warrior”). The third enemy image establishes a link between the first two. It depicts what I would call the “enemy within,” a common thread (or threat) in far-right ideologies. Indeed, cultural Marxism, a widespread conspiracy theory among the alt-right, is what its proponents believe to be the hidden reason for the perceived decline of the Western civilization. According to this worldview, the ideological opponents push a conspiracy against the West and its values. The recurring claims of a liberal bias among the media and academia also belong to this conspiracy theory. It also embraces elements of anti-Semitism, as well as traditional aspects of anti-communism, reminiscent of the historical Red Scares. Such a theory thus provides its believers with a broader narrative, as well as with a common enemy to rally against, and therefore builds a form of intersectionality among various online fringe groups.
Book
Immigrating to the United States, Italians, like all others arriving on America’s shores, were made to fill out a standardized immigration form. In the box for race, they faced two choices: North Italian or South Italian. On the line requesting information on color, they wrote simply “white.” By World War II, the only option they had for race and color questions was “white.” This identification is suggestive of the many ways in which Italians became white on arrival in the United States, as Thomas A. Guglielmo demonstrates in this prize-winning book. While many suffered from racial prejudice and discrimination, they were nonetheless viewed as white, with all the privileges this color classification bestowed, in the corridors of American power--from judges to journalists, from organized labor to politicians, from race scientists to realtors. Taking the mass Italian immigration of the late 19th century as his starting point and drawing on dozens of oral histories and a diverse array of primary sources in English and Italian, Guglielmo focuses on how perceptions of Italians’ race and color were shaped in one of America’s great centers of immigration and labor, Chicago. His account skillfully weaves together the major events of Chicago immigrant history--the “Chicago Color Riot” of 1919, the rise of Italian organized crime, and the rise of industrial unionism--with national and international events--such as the rise of fascism and the Italian-Ethiopian War of 1935-36--to present the story of how Italians approached, learned, and lived race. By tracking their evolving position in the city’s racial hierarchy, Guglielmo reveals the impact of racial classification--both formal and informal--on immigrants’ abilities to acquire homes and jobs, start families, and gain opportunities in America. Carefully drawing the distinction between race and color, Guglielmo argues that whiteness proved Italians’ most valuable asset for making it in America. Even so, Italians were reluctant to identify themselves explicitly as white until World War II. By separating examples of discrimination against Italians from the economic and social advantages they accrued from their acceptance as whites, Guglielmo counters the claims of many ethnic Americans that hard work alone enabled their extraordinary success, especially when compared to non-white groups whose upward mobility languished. A compelling story, White on Arrival contains profound implications for our understanding of race and ethnic acculturation in the United States, as well as twentieth-century immigration, urban, and political history.
Book
Asians have migrated to North America for centuries, in search of opportunities and conveyed by increasingly dense, international circuits of trade, labor markets, and family networks. Asians joined a diverse array of immigrants arriving in capacities as diverse merchants, farmers, soldiers, missionaries, soldiers, artists, and students. They contributed significantly to the massive transformation of the United States into the wealthiest and most powerful nation in the world, particularly on the west coast and Hawaii. Asian American History: A Very Short Introduction highlights how Asian immigration has shaped the evolution of ideological and legal interpretations of America as a “nation of immigrants.”
Book
The United States was founded on principles enshrined in the Constitution. One of the foremost of these principles is religious freedom. Unfortunately, this freedom has not been shared by all equally. The place of Islam in the United States has always been controversial. This controversy expanded following the attacks on 9/11 and the rise of nationalist movements that aimed to narrowly define American identity. The hatred of Islam, otherwise known as Islamophobia, has risen to new heights fueled by recurring events and various anti-Muslim hate groups. This has manifested in anti-mosque protests, hate crimes, and prejudicial legislation. This book is focused on one form of this legislation, the anti-Sharia laws, otherwise known as the foreign law bans. Sharia is also known as Islamic law and as the physical manifestation of Islam in practice. Several states have passed these laws, with many other states introducing them several times with the intention of banning the use of Sharia in civil courts. This book is a study of the factors most closely associated with whether a state has this law and how many times this bill has been introduced in the legislature. These include political, demographic, religious, and ideological factors.
Article
In 2010 a number of states began introducing a law that prohibited the application of sharia in U.S. courtrooms. Sharia, translated as the ‘clear path’, is essentially the law of Islam. These laws are an outgrowth of the angst and prejudice toward Muslim Americans known as Islamophobia. This study attempts to understand these laws, their origin and the population, legislative and political/cultural factors most closely related to their introduction and existence. This is a very salient topic given the targeting of Islam by some politicians most prominently in the 2016 presidential election. Their introduction and passage in some states have alienated the small, but growing population of Muslims. It was found in this study that religious salience, traditionalism and the size of the presence of anti-Muslim groups predicted the existence of an anti-sharia law, while Democratic dominance predicted no law. These results indicate that Islam is part of the ‘culture war’ in the United States.
Article
La comparaison du traitement public de l’islam en France et aux États-Unis permet de saisir des imbrications différentes entre approches raciale, sociale et religieuse. Si l’islam est perçu en France comme se heurtant au modèle laïc, il est protégé en tant que religion aux États-Unis. Pour autant, dans les deux sociétés, ses pratiquants cristallisent les préjugés racialisants. Ainsi, l’étude de la stigmatisation des Musulmans, ou de ceux qui sont perçus comme tels, permet de comprendre l’articulation des considérations raciales et religieuses dans la structuration d’un imaginaire de la menace et ses conséquences pour les populations qui en sont victimes.