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Art et histoire des Luba méridionaux Partie I : La collection du Père Peeraer à l'Université de Gand

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Abstract and Figures

The art of the Luba people has been the subject of several monographic exhibitions and publications and is one of the best-studied artistic traditions of the Congo. However, current literature on the Luba and their art largely ignores the valuable work of Servaas Peeraer, a Belgian Franciscan missionary, who lived among the southern Luba in western Katanga province from 1929 to 1940. Not only did Father Peeraer leave highly interesting writings, all of which are based on firsthand observations, he also field-collected a number of Luba art objects. In 1939 Ghent University acquired fifteen Luba sculptures from him, along with ample contextual annotations. This article discusses Ghent University's little-known Luba collection against the background of Father Peeraer's field notes and other primary sources.
Content may be subject to copyright.
Art et histoire des Luba méridionaux. Partie I La collection du Père Peeraer à
l'Université de Gand
Author(s): Constantine Petridis
Source:
Anthropos
, 2005, Bd. 100, H. 1. (2005), pp. 5-16
Published by: Nomos Verlagsgesellschaft mbH
Stable URL: https://www.jstor.org/stable/40466471
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Ê ANTHROPOS
1^2 100.2005: 5-16
Art et histoire des Luba méridionaux
Partie I
La collection du Père Peeraer à l'Université de Gand
Constantine Petridis
Abstract. - The art of the Luba people has been the subject
of several monographic exhibitions and publications and is one
of the best-studied artistic traditions of the Congo. However,
current literature on the Luba and their art largely ignores
the valuable work of Servaas Peeraer, a Belgian Franciscan
missionary, who lived among the southern Luba in western
Katanga province from 1929 to 1940. Not only did Father
Peeraer leave highly interesting writings, all of which are based
on firsthand observations, he also field-collected a number of
Luba art objects. In 1939 Ghent University acquired fifteen
Luba sculptures from him, along with ample contextual anno-
tations. This article discusses Ghent University's little-known
Luba collection against the background of Father Peeraer' s field
notes and other primary sources. [Democratic Republic of the
Congo, Luba, Katanga, Peeraer, African art, missionaries]
Constantine Petridis, docteur en Sciences de l'Art (Gand
1997), est Assistant Professor à Case Western Reserve Uni-
versity et Associate Curator au Cleveland Museum of Art à
Cleveland (Ohio, USA). - Sa thèse de doctorat sur l'art des
Luluwa fait suite à quatre années de recherches dans des fonds
d'archives, des musées et sur le terrain; en 2001, il a organisé
une exposition sur Frans Olbrechts et les arts africains au Musée
ethnographique à Anvers. - II a publié des articles sur les arts
de différents peuples du Congo et il est l'éditeur et l'auteur
principal de Frans M. Olbrechts (1899-1958). In Search of Art
in Africa (Antwerp 2001).
Plusieurs expositions ont été récemment con-
sacrées à l'art des Luba du Katanga, au sud-est
de la République Démocratique du Congo (pré-
cédemment République du Zaïre).1 Grâce à son
réalisme, à sa finition méticuleuse et à ses sur-
faces lisses, la sculpture luba a toujours été fort
prisée. Ainsi, comme l'écrit Mary Nooter Roberts,
"Luba art has always been valued in the West
as one of the most 'naturalistic,' 'sophisticated,'
and 'refined' of African art styles, the type that
would be featured in an exhibition whose goal
was to prove that African art is 'art' and not mere
'artifact'" (1998: 91, n. 10).
Grâce aux publications de François Neyt, de
Mary Nooter Roberts et de Pierre Petit, l'art des
Luba compte dorénavant parmi les mieux connus
des arts congolais. Par ses recherches tant dans
les musées que dans les archives, Neyt (1993)
a classifié leur sculpture en différents centres
stylistiques. Le catalogue d'exposition "Memory.
Luba Art and the Making of History" (Roberts
and Roberts [eds.] 1996), fondé en partie sur des
recherches de terrain de Mary Nooter Roberts, a
étudié la dimension mnémotechnique de certains
objets d'art qui servent de point de départ pour
commenter l'histoire des différentes chefferies de
l'espace politico-culturel luba. Enfin, Petit (1995b,
c, 1996c), sur base de ses enquêtes de terrain, a
étudié plus spécifiquement la fonction religieuse
et politique que remplissaient certains des plus
célèbres objets d'art luba.2
1 Ainsi, deux expositions spécifiques leur ont été consacrées
par le Musée Dapper à Paris (Neyt 1993) et par le Musée
de l'art africain à New York (Roberts and Roberts [eds.]
1996). Voir les références citées à la fin de la Partie II,
pp. 30.
2 Pour des informations plus générales sur les Luba et leur art,
le lecteur pourra consulter les références bibliographiques.
Nous mentionnons en particulier les publications de Nooter
1992, Roberts 1995, et Petit 1995b, 1996c.
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6 Constantine Petridis
Carte: Pays des Luba méridionaux, entre les rivières Lubilash et Lwalaba. Les divisions administratives
représentées ont été empruntées à Boone (1961). Certaines frontières ont été précisées sur base des cartes reproduites
dans de Smet (1971). L'orthographe des noms de villages est celle des anciennes cartes au 17200000e du CSK et
ne correspond pas nécessairement avec celle utilisée par le Père Peeraer.
Anthropos 100.2005
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Art et histoire des Luba méridionaux 7
D'après Roberts (1998: 64), les missionnaires
européens relevaient généralement plus d'infor-
mations sur les objets qu'ils récoltaient sur place
que ne le faisaient les fonctionnaires coloniaux. Ils
demeuraient souvent pendant de longues périodes
sur le territoire luba et s'intéressaient intensément
à la culture locale. Ainsi, des missionnaires comme
Pierre Colle, William Burton et Theodoor Theuws
ont rédigé de très intéressantes monographies sur
divers aspects de la culture, de l'histoire et de l'art
des Luba. Le travail du Père Peeraer, bien que peu
connu, mérite certainement de compter parmi ces
sources précieuses.3
Les Collections ethnographiques de l'Université
de Gand contiennent quelques objets inédits récol-
tés chez les Luba-Shyanikadi de la République
Démocratique du Congo par le Père Servaas Pee-
raer dans les années 1930. Ces sculptures, qui, du
point de vue stylistique, sont assez différentes des
objets d'art luba les plus célèbres des collections
occidentales, sont bien documentées grâce à des
données contextuelles de première main.
Servaas (ou Servatius) Peeraer a vécu pendant
plus de dix années parmi les Luba du Katanga, en
tant que missionnaire de l'ordre belge des Francis-
cains (Frères mineurs, OFM, ou, en néerlandais,
"Minderbroeders"). Outre les articles ethnogra-
phiques qu'il a écrits, il a également récolté un cer-
tain nombre d'objets d'art, dont quelques-uns sont
aujourd'hui conservés dans les Collections eth-
nographiques de l'Université de Gand ("Etnogra-
fische Verzamelingen van de Universiteit Gent").
Tout comme les objets que Peeraer a récoltés pour
le Musée royal de l'Afrique centrale (MRAC)
à Tervuren, ceux de l'Université de Gand sont
accompagnés de notes de terrain documentant le
contexte culturel de leur usage.
Né le 27 août 1903 à Ravels-Eel et baptisé Gus-
taaf, le Père Peeraer est arrivé au Congo en 1929 et
y a travaillé jusqu'à sa mort précoce le 9 juin 1940,
à La Rochelle, en France. Résidant à la mission
de Lwabo, au sud de Kamina, il était surtout actif
parmi les Luba du sud, dans les territoires de Mato,
de Kinda et de Kafakumba, dans le centre-ouest
de l'actuelle province du Katanga (voir carte).
Ce groupe de Luba est également présenté sous
sa plume comme Luba-Samba, ou comme Luba-
Shankadi, -Shyankadi ou -Shankaji, appellation
qui, dans la littérature, est généralement donnée
à tous les Luba centraux du Katanga, afin de les
distinguer des Luba Orientaux ou Luba-Hemba et
des Luba Occidentaux ou Luba-Kasaï. Le terme
shyankadi, souvent utilisé pour les salutations, re-
flète le respect et la politesse (Peeraer 1934a: 20;
Nooter 1990: 35, 46, n. 2). Dans le domaine de l'art
plastique, les Luba-Shyankadi sont surtout connus
pour leur coiffure "à cascade", qui se retrouve sur
plusieurs sculptures (de Maret, Dery et Murdoch
1973: 14 s.; cf. infra).
Peeraer livre des informations ethnographiques
très pertinentes dans ses articles "Enkele benamin-
gen voor het Opperwezen bij de Baluba-Shankaji"
(1934a; Quelques appellations de l'Etre suprême
chez les Luba-Shyankadi) , "Dood en onderwereld
bij de Baluba Shankadi" (1936; Mort et infra-
monde chez les Luba-Shyankadi) et "Toespraken
tot jonggehuwden bij de Baluba (Katanga)" (1939;
Recommandations aux jeunes mariés chez les
Luba du Katanga), parus dans les revues Kongo-
Overzee, ainsi que "Gouwzang der Bene-Lupulu"
(1938; Chants du terroir chez les Bene-Lupulu),
publié dans la revue Congo. Dans le premier
article, il explique notamment la distinction entre
trois catégories d'esprits, à savoir les bavidye,
bakishi et bafu (Peeraer 1934a: 24 s.).4 Dans le
second, il traite de l'inframonde kalunga et des
pratiques funéraires dont quelques-uns des usages
seront d'ailleurs étudiés plus en profondeur par
Theuws dans "Le styx ambigu" (Peeraer 1936:
197-202; Theuws 1968). Les deux derniers ar-
ticles mentionnés fournissent de nombreux rensei-
gnements originaux sur la vie au village. Ajoutons
à cette liste un dernier article particulièrement in-
formatif de Peeraer, signé "P. Servatius" et pu-
blié en 1932 dans la revue Anthropos, qui traite
de la circoncision mukanda des Luba, long rituel
initiatique qui n'était pratiqué que dans l'extrême
sud-ouest de leur ancien royaume.5
3 Dans un article consacré aux photos prises par le Révérend
William Burton au Congo belge entre 1930 et 1940 pour
le Département des études bantoues de l'Université du
Witwatersrand à Johannesbourg, Godby (1993) développe
les dimensions politiques et sociales de l'œuvre des
missionnaires et les liens étroits entre ces derniers et
l'administration coloniale (voir aussi Nettleton et al. 1992).
Vu la rareté des informations disponibles, il est pour le
moment impossible d'analyser le travail du Père Peeraer de
la même façon.
4 Petit (2000) a confirmé la pertinence de cette classification
qui se traduit notamment dans la typologie des espaces
rituels.
5 Theuws (1960) a repris dans son article "Naître et mourir
dans le rituel luba" les informations fournies par Peeraer.
Des données succinctes sur le même sujet ont également été
publiées dans un article de Nennen (1927: 373 s.) et dans
le livre de Amaat Burssens (1943), qui résume les résultats
d'un voyage d'étude entrepris en 1937 auprès des Luluwa
et des Luba du Kasaï et du Katanga. Peeraer a également
publié quelques textes sur la danse et le chant luba dans la
revue Bulletin des Amis de l'Art Indigène du Katanga.
Anthropos 100.2005
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8 Constantine Petridis
Fig. 1: Appuie-tête récolté par Servaas Peeraer au village de
Kalongo (Bene Kabondo) entre 1929 et 1938. Bois; h. 16 cm.
Collections ethnographiques de l'Université de Gand, G. E.
39.20.10 (photo Gustaaf Toch).
Fig. 2: Appuie-tête récolté par Servaas Peeraer au village de
Kalongo (Bene Kabondo) entre 1929 et 1938. Bois, perles;
h. 13,7 cm. Collections ethnographiques de l'Université de
Gand, G. E. 39.20.12 (photo Gustaaf Toch).
Servaas Peeraer n'est certainement pas le seul
missionnaire franciscain qui se soit intéressé aux
sujets ethnographiques, au mode de vie et à
l'univers spirituel d'une population dont l'Eglise
catholique souhaitait avant tout la conversion. Par-
mi ses confrères ayant également publié sur le
sujet, on citera les plus connus: Placied Tempels,
auteur d'un ouvrage très célèbre et très controversé
intitulé "Bantoe-filosofie" (1946; La Philosophie
bantoue), Ernest Van Avermaet, qui a publié un
dictionnaire kiluba-français en collaboration avec
Benoît Mbuyà (1954), et enfin Theodoor Theuws,
déjà mentionné. Ce dernier a aussi publié un cer-
tain nombre de romans sous le pseudonyme de
Jacques Bergeyck.6
Les écrits du Père Peeraer, presque tous rédigés
en néerlandais, ont été systématiquement négligés
par les chercheurs non-belges travaillant sur les
Luba. Pourtant, son travail scientifique fut fort
apprécié par plusieurs africanistes professionnels
de l'époque. Son amitié avec Amaat Burssens,
professeur de linguistique et de langues africaines
à l'Université de Gand de 1926 à 1967, lui a
d'ailleurs permis de publier ses articles dans la
revue Kongo-Overzee, dont Burssens fut le fonda-
teur et le rédacteur en chef. A l'instar de Burssens,
qui s'est appuyé sur des informations de Pee-
raer pour ses recherches sur les langues bantoues,
d'autres spécialistes de l'art africain ont utilisé ses
connaissances dans le domaine de l'ethnographie
et de l'art luba: c'est notamment le cas de Frans
Olbrechts, alors professeur à l'Université de Gand,
et de Joseph Maes, Directeur du Musée du Congo
belge (futur MRAC), avec lesquels Peeraer entre-
tenait une correspondance suivie depuis sa mission
de Lwabo.
Les informations contextuelles fournies par
Peeraer ont occupé une place centrale dans le
débat entre Maes et Olbrechts concernant les por-
teuses de coupe luba.7 Olbrechts relève dans un
article consacré aux statues dites kabila les qua-
lités scientifiques de Peeraer, informateur remar-
quable par l'exhaustivité et l'excellence de ses
observations ("uitvoerige, uitstekende waarnemin-
gen") ainsi que par son attention et ses qualités
de chercheur ("met zooveel opmerkingsgeest en
vorschershoedanigheden bedeelde onderzoeker").
6 Le dernier manuscrit du Père Theuws a été publié à titre
posthume en 1992 dans la série Africana Gandensia de
l'Université de Gand. D'autres missionnaires franciscains,
tels les Pères Delille et Borgonjon, se sont intéressés en par-
ticulier à la culture des Tshokwe du sud du Katanga et nous
ont laissé un nombre important d'écrits ethnographiques à
ce sujet (voir Petridis 2001).
7 Voir aussi Petit 1995b; de Strycker and de Grunne 1996;
Pirat 1996, 2001; Roberts 1998:70-72.
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Art et histoire des Luba méridionaux 9
Fig. 3: Appuie-tête récolté par Servaas Peeraer au village de
Lumpungu (Bene Samba de la Lwina) entre 1929 et 1938. Bois;
h. 12 cm. Collections ethnographiques de l'Université de Gand,
G. E. 39.20.1 1 (photo Gustaaf Toch).
Fig. 4: Appuie-tête récolté par Servaas Peeraer au village de
Nsalele (Bene Dibangandu) entre 1929 et 1938. Bois, métal;
h. 12 cm. Collections ethnographiques de l'Université de Gand,
G. E. 39.20.13 (photo Gustaaf Toch).
Il décrit également le Père Peeraer comme un
excellent "field-worker" (Olbrechts 1940:43).
Le Père Peeraer a enrichi tant le MRAC que
l'Université de Gand grâce à des objets récoltés
sur place et bien documentés. En 1939, il fit trans-
porter en Belgique une caisse contenant quinze
objets luba, avec pour destination les Collections
ethnographiques de l'Université de Gand, alors
gérées par Olbrechts. Outre quatre appuies-tête
et une coupe, la caisse contenait dix sculptures
anthropomorphes, dont une porteuse de coupe
assez particulière. Les données ci-dessous pro-
viennent essentiellement de la "liste d'envoi" qui
accompagnait les objets (dossier Peeraer, 1939,
n° 39.20).
Selon cette liste, les appuies-tête proviennent
des villages de Kalongo (chefferie Bene Ka-
bondo), Lumpungu (chefferie Bene Samba de la
Lwina) et Nsalela (ancienne sous-chefferie Bene
Dibangandu) (figs. 1-4). Il s'agissait, selon Pee-
raer, d'objets quotidiens appartenant à des per-
sonnages importants et à des leaders politiques,
observations confirmées par Nooter (1992:324).
Ces appuies-tête étaient utilisés pour préserver, du-
rant le sommeil, les coiffures tant masculines que
féminines, souvent très complexes et très longues
à réaliser. L'un d'eux figure huit petites cornes
de l'antilope kabuluku, destinées à contenir des
substances magiques manga (bwanga au singulier)
et à protéger le dormeur contre le mauvais sort
(fig. 3). D'après Peeraer, ces objets étaient souvent
savamment décorés de perles et d'autres atours
car ils étaient conservés comme un patrimoine
familial à la mémoire de parents décédés. Nooter
(1992: 324) a par ailleurs appris d'Albert Maesen
- qui a voyagé dans la région luba pendant quelque
temps en 1955 lors d'une mission pour le MRAC -
que chez les Kanyok voisins, les personnes âgées
étaient très attachées à leurs appuies-tête qui les
accompagnaient souvent dans la tombe. Ils étaient
parfois même enterrés à la place du défunt. Chez
les Luba, les appuies-tête étaient également utilisés
dans le cadre de divination par friction kasheke-
sheke*
La coupe kiteya, qui servait à boire de la bière,
a été récoltée auprès d'un vieux chef du vil-
lage Dibadi, chez les Bene Samitanda qui consti-
tuaient l'ancienne sous-chefferie du même nom
(fig. 5).9 Du point de vue stylistique, la sculp-
ture semble pourtant plutôt produite par un des
sous-groupes kuba. Peeraer, faisant référence à un
article du Père Verbeke dans le Bulletin des Juri-
dictions Indigènes et du Droit Coutumier Congo-
lais (1937), mentionne qu'autrefois, lors de leur
8 Burton 1961: 144; Nooter 1992: 324 s., cat. 184-187; Neyt
1993: 183.
9 Dans un texte non-publié de 1938-39, conserve a la Section
d'Ethnographie du MRAC, Peeraer utilise également le
terme kiteya pour les sièges à cariatides ("Enkele nota' s
over de Kiteya en de Nkishi-beelden bij de Baluba", Dossier
Ethnographique, n° 932 d).
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10 Constantine Petridis
Fig. 5: Coupe céphalomorphe (kiteya) récoltée par Servaas
Peeraer au village de Dibadi (Bene Samitanda) entre 1929
et 1938. Bois; h. 20 cm. Collections ethnographiques de
l'Université de Gand, G. E. 39.20.15 (photo Gustaaf Toch).
Fig. 6: Porteuse de coupe (nkishi) récoltée par Servaas
Peeraer au village de Kyovwe (Bene Bukwamadi) entre 1929
et 1938. Bois, métal; h. 61 cm. Collections ethnographiques de
l'Université de Gand, G. E. 39.20.1 (photo Gustaaf Toch).
initiation, les chefs devaient boire de la bière dans
le crâne d'un homme sacrifié dans ce but.10 Peeraer
ajoute que de telles coupes contenaient également
souvent une petite corne manga. Que la présence
de cette corne indique qu'elles étaient utilisées
pour assassiner quelqu'un avec de la bière em-
poisonnée, comme l'explique Peeraer, paraît peu
vraisemblable.
La statue la plus remarquable de la série est
sans doute la porteuse de coupe (fig. 6). Ses di-
mensions et sa pose à moitié debout, exception-
nelles pour l'art luba, seraient typiques de l'art
de l'ancien territoire de Kinda, selon Peeraer.
Ceci est également vrai de ses scarifications, qui,
toujours selon lui, diffèrent considérablement des
tatouages appliqués près du fleuve Lwalaba (nom
que prend le fleuve Congo à cette hauteur). La
sculpture provient des Bene Bukwamadi (qui for-
maient jadis la sous-chefferie du même nom)
du village de Kyovwe. Tout comme les Bene
Dibangandu, ils dépendaient autrefois du roi luba
10 II se peut que Huguette Van Geluwe songeait à ce même
texte de Verbeke lorsqu'elle informa Mary Nooter de cet
usage (Nooter 1990: 36, 1992: 325, cat. 188; mais voir aussi
Ceyssens 2001: cat. 89-90).
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Art et histoire des Luba méridionaux 1 1
Fig. 7: Statuette féminine (nkishi) représentant Umba Kilubi,
récoltée par Servaas Peeraer entre 1929 et 1938. Sculptée
par Kyabala du village de Kininga (Bene Kabondo). Bois;
h. 33,5 cm. Collections ethnographiques de l'Université de
Gand, G. E. 39.20.2 (photo Gustaaf Toch).
Fig. 8: Statuette féminine (nkishi) représentant Umba Kilubi,
récoltée par Servaas Peeraer entre 1929 et 1938. Sculptée
par Kyabala du village de Kininga (Bene Kabondo). Bois;
h. 32,5 cm. Collections ethnographiques de l'Université de
Gand, G. E. 39.20.3 (photo Gustaaf Toch).
Kasongo Nyembo, mais au temps de Peeraer, à
l'instar des Bene Kabondo, ils s'étaient émancipés
de la cour royale de Kasongo Nyembo. La statue
était utilisée par un devin-médium (kilumbu; plur.
bilumbu) et portait le nom de la sœur défunte
de celui-ci, Katanga. La sculpture a été décorée
par le devin, qui lui avait fixé des anneaux en
cuivre et en aluminium autour des poignets et des
chevilles.
Petit (1995b) fournit un aperçu de l'icono-
graphie et des fonctions des porteuses de coupe
luba et de leur rapport avec la calebasse mboko.
Parmi les exemplaires reproduits dans son article,
aucun n'est stylistiquement apparenté à celle de
l'Université de Gand. Néanmoins, il commente
quelques pièces du MRAC, également récoltées
par Peeraer (Petit 1995b: 124, figs. 11-12). En
se basant surtout sur Burton (1961), Petit (1995b:
118-121) décrit l'usage de la calebasse mboko
dans le contexte de la divination telle qu'elle était
pratiquée par les médiums bilumbu, à savoir les
devins les plus puissants chez les Luba et leurs
voisins. La calebasse mboko est remplie de terre
blanche (mpemba) et d'une multitude de petits
objets; on secoue le tout et on interprète ensuite
la position qu'ont prise les objets, une technique
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12 Constantine Petridis
Fig. 9: Statuette féminine (nkishi) récoltée par Servaas Peeraer
entre 1929 et 1938. Sculptée par Kyabala du village de Kinin-
ga (Bene Kabondo). Bois; h. 31,5 cm. Collections ethnogra-
phiques de l'Université de Gand, G. E. 39.20.7 (photo Gustaaf
Toch).
Fig. 10: Statuette féminine (nkishi) récoltée par Servaas Pee-
raer entre 1929 et 1938. Sculptée par Kyabala du village
de Kininga (Bene Kabondo). Bois; h. 31,5 cm. Collections
ethnographiques de l'Université de Gand, G. E. 39.20.8 (photo
Gustaaf Toch).
connue de plusieurs peuples du sud du Congo
et de régions voisines d'Angola et de Zambie.
Le mboko est donc un instrument de médiation
entre les esprits et les hommes, et son utilisa-
tion conjointe par les médiums et les chefs poli-
tiques témoigne clairement des pouvoirs sacrés de
ce dernier.
Les porteuses de coupe appartiennent à la
catégorie des bankishi ou "objets de pouvoir"
(sing, nkishi). A l'instar du devin qui tient la
calebasse mboko entre ses mains, ces statues
monoxyles portent un récipient qui est parfois
rempli d'argile blanche et de perles. En tant que
représentation d'un kilumbu qui manipule un
mboko, la porteuse de coupe représente l'inter-
action entre le monde des humains et celui des
esprits (Petit 1995b: 126; 1996c: 122). Que le
kilumbu soit spécifiquement représenté par une
femme, alors qu'en réalité, la plupart des de-
vins sont des hommes tient à ce que l'alliance
entre les esprits et les hommes est conçue selon
le modèle de l'union matrimoniale et sexuelle,
le devin étant la "femme" de l'esprit. Ainsi, la
porteuse de coupe incarne tout à la fois la dua-
lité et l'alliance sexuelles, le récipient masculin
s Opposant à - et complétant - la porteuse fémi-
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Art et histoire des Luba méridionaux 1 3
Fig. 11: Statuette féminine (nkishi) récoltée par Servaas Pee-
raer entre 1929 et 1938. Sculptée par Kyabala du village de
Kininga (Bene Kabondo). Bois; h. 31,5 cm. Collections eth-
nographiques de l'Université de Gand, G. E. 39.20.9 (photo
Gustaaf Toch).
Fig. 12: Statuette féminine agenouillée (nkishi) qui portait
le nom de Ndayi, récoltée par Servaas Peeraer au village
de Kyakwisamba (Bene Mwidya) entre 1929 et 1938. Bois;
h. 14,5 cm. Collections ethnographiques de l'Université de
Gand, G. E. 39.20.4 (photo Gustaaf Toch).
nine (Petit 1995b: 128). D'après Nooter (1992: 324,
cat. 181), la porteuse de coupe représente l'épouse
de l'esprit par lequel le devin est possédé. En effet,
la représentation de la femme dans la sculpture
luba est spécifiquement destinée à l'attraction des
esprits.
Selon Petit (1995b: 128), les porteuses de coupe
font avant tout partie du matériel des médiums
luba. Il fait d'ailleurs référence ici à des informa-
tions données par Peeraer à propos d'une sculpture
récoltée au village de Mpumpa et conservée au-
jourd'hui au MRAC. L'esprit qui assiste le devin
est censé habiter la sculpture, qui porte le nom
d'un ancêtre ou d'un autre esprit puissant. Pee-
raer mentionne également l'usage des porteuses
de coupe dans le cadre de la guérison, de la
protection, voire de l'espionnage magique. Selon
l'interprétation de Petit (1995b: 129), les porteuses
de coupe établissent un pont entre les applications
divinatoires des mboko et les actions magiques
plus directes des bankishi.
Les neuf autres sculptures de la collection sont
des bankishi utilisés hors du contexte royal. Deux
d'entre elles ont été réalisées par un boiteux du
nom de Kyabala, du village de Kininga (chefferie
Bene Kabondo) (figs. 7-8). La cavité dans leur
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14 Constantine Petridis
Fig. 13: Statuette féminine (nkishi) qui portait le nom de
Lunga, récoltée par Servaas Peeraer au village de Dibadi (Bene
Samitanda) entre 1929 et 1938. Bois; h. 20,3 cm. Collections
ethnographiques de l'Université de Gand, G. E. 39.20.6 (photo
Gustaaf Toch).
Fig. 14: Statuette féminine (nkishi) qui portait le nom de
Seya, récoltée par Servaas Peeraer au village de Dibadi (Bene
Samitanda) entre 1929 et 1938. Bois. Anciennement dans les
Collections ethnographiques de l'Université de Gand, G. E.
39.20.5 (photo Africa-Museum, Tervuren).
tête contient une petite corne kabuluku remplie de
manga. Ces deux sculptures servaient aux devins
dans le cadre de pratiques de divination. Elles
représenteraient Umba Kilubi, le "fou", l'esprit
souverain du Kalunga ka Musono, dont parle lon-
guement Peeraer dans son article de 1936. C'est le
nom donné au niveau le plus bas de l'inframonde,
sombre lieu de souffrance. Musono est le nom
de la gangrène ou du panaris (Peeraer 1936: 199).
C'est précisément parce que Umba Kilubi est très
redouté que les devins l'invoquent, afin de conjurer
les malfaiteurs et de faire obéir les clients. La
tête tournée de la statue de la figure 7 reflète la
rage caractéristique du souverain de la "Résidence
des Damnés": normalement, la statuaire luba est
frontale.
Trois autres statues ont également été sculptées
par Kyabala (figs. 9-11). Les scarifications re-
présentées sur leurs épaules seraient, tout comme
la coiffure, un juste reflet de la mode en vogue
à cette époque sur les bords du fleuve Lwalaba.
Bien que ce genre de sculptures étaient normale-
ment destinées à des devins, les trois exemplaires
illustrés ici ont été fabriqués pour des blancs de
passage. Ceci explique pourquoi elles ne sont pas
dotées d'une cavité pour ficher la petite corne
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Art et histoire des Luba méridionaux 15
Fig. 15: (Hors-texte.) Statuette féminine (nkishi) qui fut offerte
à Servaas Peeraer par le chef Kimputu (Bene Kabondo)
entre 1929 et 1938. Bois, métal, tissu; h. 27 cm. Collections
ethnographiques de l'Université de Gand, G. E. 39.20.14 (photo
Gustaaf Toch).
manga. Sans fonction particulière, ces statues
n'ont reçu aucun nom.
Une figure féminine de petite taille, à la coiffure
et aux scarifications typiques, a été récoltée auprès
des Bene Mwidya (qui formaient l'ancienne sous-
chefferie du même nom) dans le village de Kyak-
wisamba (fig. 12). Elle portait le nom de Ndayi et
était la propriété d'un devin. Son sommet est percé
d'une cavité dans laquelle était fichée une petite
corne remplie de manga. De telles statuettes sont
gardées dans un panier magique ("tooverkorf"),
avec la calebasse mboko. Pendant les séances de
divination, elles sont posées dans la calebasse rem-
plie de terre blanche. Le devin les prend entre les
mains et leur parle, afin de découvrir la cause d'un
problème.
Deux autres statues féminines, portant les noms
de Lunga et de Seya, proviennent, tout comme la
coupe kiteya, du village de Dibadi des Bene Sami-
tanda (figs. 13-14). Outre les décorations figurant
des scarifications et la coiffure, elles présentent
également une cavité prévue pour la corne manga.
Il est possible que ces deux exemplaires aient été
aussi utilisés dans le cadre de la divination. Avec
sept autres objets, dont trois porteuses de coupe,
ces deux sculptures sont considérées par Pierre
Petit comme des exemples d'un sous-style qu'il
qualifie d' "atelier de la Haute-Lovoy" et qui sera
largement commenté dans les pages qui suivent.
Si l'on excepte les porteuses de coupe, rela-
tivement peu d'intérêt a été accordé aux figures
féminines de la statuaire luba. Un exemplaire
d'une collection privée, reproduit par Nooter
(1990:55, fig. 12), semble avoir été, à l'origine,
attaché à une tige en métal et était probablement
utilisé dans le contexte de l'initiation mbudye.
De telles statues auraient représenté la hiérarchie
de l'association mbudye: ses dignitaires et ses
esprits protecteurs. Ces sculptures incarnent, avec
les proverbes qui les accompagnent, les principes
éthiques et philosophiques de l'association, dont
les membres voyageaient de village en village,
jouant le rôle de gardiens des secrets royaux
et de protecteurs des fondations idéologiques et
historiques du royaume (Nooter 1992).
Neyt (1993: 143, 158, 166) qualifie les sta-
tuettes féminines de figurines cultuelles. Il ne men-
tionne d'ailleurs aucune sculpture utilisée dans le
cadre de la divination, à l'exception des porteuses
de coupe. Notons qu'il se base ici essentiellement
sur la monographie du Père Colle (1913), qui
concerne avant tout les Luba orientaux ou Luba-
Hemba. Dans une notice de catalogue relative à
deux statues du MRAC, qui forment apparemment
un couple, Roberts (1995:363 s., cat. 184-185)
relate que les figures autonomes sont utilisées dans
des contextes différents et qu'elles sont également
employées dans la divination. Les deux statues
dont traite cet auteur ont été récoltées avant 1912,
et sont d'un style proche de celui de la majorité
des objets récoltés par Peeraer: ils proviennent
donc probablement du sud-ouest de la région
luba. Tenant compte des notes du Père Peeraer,
il serait néanmoins quelque peu hâtif de souscrire
à l'hypothèse que les deux exemples avec les
cornes d'antilopes implantées dans le crâne étaient
destinés à la conjuration et à la guérison, plutôt
qu'à la divination.
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16 Constantine Petridis
Au-delà des très précieuses (et toujours trop
rares) informations de terrain que nous apporte
ce bref aperçu de la collection offerte par Peeraer
à l'Université de Gand, une conclusion générale
s'impose. Du point de vue stylistique, les sta-
tues récoltées par le Père Peeraer ne s'inscrivent
dans aucun des nombreux ateliers distingués par
François Neyt (1993). Le fait qu'on n'ait encore
attesté l'existence d'aucun atelier dans la région
proche de Kabongo, là où se trouvaient pourtant
les anciennes capitales royales, amène Petit à
contester l'hypothèse historique de Neyt concer-
nant la diffusion des œuvres d'art luba (Petit
1995b: 124; 1996b: 89). Selon lui, c'étaient les
vallées de la Luvua, de la Lukuga et du Lwalaba
- et non le centre du royaume - qui formaient le
berceau de l'art luba (voir aussi Roberts 1998: 64).
Par conséquent, il est peu probable que la dif-
fusion de certaines formes sculpturales ait suivi
l'expansion politique du royaume. De surcroît, ce
sont surtout des braises du feu royal et des ob-
jets non sculptés, comme les calebasses mboko,
qui ont été diffusées comme symboles politiques
de la capitale vers la périphérie (Petit 1996b:
88).
Nooter (1992: 88) remarque à juste titre que
les collections reposent sur une sélection arbi-
traire, résultant de préférences individuelles et
subjectives. Force est de constater que, dans la
plupart des collections anciennes, ce sont sur-
tout des objets sculptés et figuratifs qui ont été
conservés, alors que les recherches de terrain
démontrent toute l'importance que les Luba ac-
cordent, tant dans le domaine politique que dans
le domaine religieux, à des objets non-plastiques
et non-figuratifs. Parmi ceux-ci, il faut compter
les paniers dikumbo qui contiennent les reliques
des rois défunts, ainsi que des chaises et bâtons
non-figuratifs. Selon Nooter (1992: 89), une autre
carence de ces anciennes collections est le manque
d'information sur le lieu de provenance, sur le
nom des artistes, des propriétaires et des objets
eux-mêmes, sur la fonction des œuvres et sur le
contexte dans lequel elles étaient utilisées, ainsi
que sur les circonstances de leur récolte. De ce
point de vue, les collections qui ont été rassem-
blées par le Père Peeraer au début des années 1930
constituent, avec le support des notes et des publi-
cations de cet auteur, une très heureuse exception
à la règle.
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Article
This article examines the motivations, institutions and processes involved in colonial knowledge formation through a study of the missionary William Burton. It considers Burton's work on the Luba of Katanga in relation to the practices of Belgian colonial science and Anglo-Saxon social anthropology. The essay discusses why missionaries engaged in ethnographic research when they were so intent on changing the customs and beliefs they described and why Burton in particular did not get the recognition he deserved as an authority on his subject. The article charts Burton's shifting attitude toward the Luba, showing how he moved from an aggressive intrusive mode of research to a position of greater sympathy as he came to consider their cultural riches through study of language, proverb and folklore. Consideration of the second phase of Burton's research opens up discussion of the missionary origins of the disciplines of African theology and African religious studies.
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