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Evolution of rheological properties of nuclear bituminized waste products, towards an ageing/viscosity law

Authors:
  • TotalEnergies

Abstract and Figures

This work is a contribution to the understanding of rheological properties of bitumen and their evolution under gamma irradiation. The prediction of swelling ratio is necessary to evaluate the state of the containers, particularly during the reversibility phase of the storage. The objective of this work is thus to establish the rheological data its evolution under irradiation in order to predict the container swelling with time. After the rheological and thermal characterization of pure bitumen, a series of extrusion trials has been carried out. The state of dispersion essentially depends on the ratio N/Q (screw speed to feed rate). Extreme values of N/Q show the highest yield stress, indicating an improved dispersion state. The industrial bitumen compound exhibits the highest viscosity compared to model compounds, which limits bubble migration. Finally, the effect of gamma irradiation on pure bitumen and compounds behaviour has been studied. External and structural modifications have been evidenced. A theoretical model based on Krieger-Dougherty equation has been developed and shows a good agreement with experimental data.
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´
Evolution des propri´et´es rh´eologiques des enrob´es
bitume, vers une loi vieillissement/viscosit´e
Mouhamad Mouazen
To cite this version:
Mouhamad Mouazen. ´
Evolution des propri´et´es rh´eologiques des enrob´es bitume, vers une
loi vieillissement/viscosit´e. Materials. ´
Ecole Nationale Sup´erieure des Mines de Paris, 2011.
French. <NNT : 2011ENMP0026>.<pastel-00628039>
HAL Id: pastel-00628039
https://pastel.archives-ouvertes.fr/pastel-00628039
Submitted on 30 Sep 2011
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MINES ParisTech
Centre de mise en forme des matériaux UMR 7635
BP 207, 06904 Sophia Antipolis
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École doctorale n° 364 : Sciences Fondamentales et Appliquées
présentée et soutenue publiquement par
Mouhamad MOUAZEN
le 15 septembre 2011
Evolution des propriétés rhéologiques des enrobés bitume,
vers une loi vieillissement/viscosité
Doctorat ParisTech
T H È S E
pour obtenir le grade de docteur délivré par
l’École nationale supérieure des mines de Paris
Spécialité “ Sciences et génie des matériaux
Directeur de thèse : Bruno VERGNES
Co-encadrement de la thèse : Arnaud POULESQUEN
Jury
M. Thierry ADVOCAT, Chef de programme, CEA Saclay, DEN/EC/DADN Invité
M. Jean-François ARGILLIER, Expert Colloïdes et interfaces, IFP Energiesnouvelles, Rueil-Malmaison Rapporteur
M. Philippe CASSAGNAU, Professeur, Université Claude Bernard Lyon I, UMR 5223 Rapporteur
Mme. Nathalie DUPUY, Professeur, Université des sciences d’Aix-Marseille III, ISM2 - UMR 6263 Présidente du jury
M. Toby FARES, Chargé d’affaires, AREVA Invité
M. Arnaud POULESQUEN, Ingénieur chercheur, CEA Marcoule Examinateur
M. Elie VALCKE, Chef de projet, SCKCEN, Waste and Disposal Expert Group - Bélgique Examinateur
M. Bruno VERGNES, Directeur de recherche, MINES ParisTech, CEMEF - UMR 7635 Examinateur
Remerciements
Il est difficile de savoir par commencer quand je considère le nombre de personnes qui
m’ont aidé pendant le déroulement de cette thèse. Je voudrais commencer ces remerciements
en m’excusant auprès de toutes les personnes que je n'ai pas mentionnées de façon nominative
mais qui ont contribué au développement de cette thèse et, de façon significative, à ma vie au
cours de ces dernières années.
J’exprime ma très sincère reconnaissance à mes directeurs de thèse, Messieurs Arnaud
POULESQUEN et Bruno VERGNES, pour la confiance et le soutien qu’ils m’ont témoigné
ainsi que pour leurs conseils durant toute la préparation de cette thèse.
Je remercie Monsieur Jean-François ARGILLIER, Chef de projet à la Direction Chimie et
Physico- chimie appliquées Institut Français du Pétrole, Rueil-Malmaison, et Monsieur
Philippe CASSAGNAU, Professeur à l’Université de Claude Bernard-Lyon 1, d’avoir
examiné mon travail en tant que rapporteurs. Je leur exprime toute ma reconnaissance d'avoir
porté un grand intérêt à mon travail. À Madame Nathalie DUPUY, Professeur à l’Université
d’Aix-Marseille III, j’exprime ma gratitude pour avoir accepté d’être une examinatrice de
cette thèse.
Que Monsieur Elie VALCKE, Chef de projet au Centre Belge d'Etude de l'Energie Nucléaire
(SCK•CEN) soit remercié d’être venu tout spécialement participer à ce jury comme
examinateur de ce travail.
J’exprime toute ma reconnaissance à Monsieur Thierry ADVOCAT, Chef de programme au
CEA Saclay, d'avoir accepté notre invitation et de porter un grand intérêt à mon travail.
J’adresse aussi mes remerciements à Monsieur Christophe JOUSSOT-DUBIEN pour tous
ses conseils judicieux et ses remarques pertinentes durant ces trois années.
Mes remerciements vont également à Monsieur Toby FARES, Chargé d’affaires à AREVA
La Défense, pour sa participation à cette commission d'examen.
Je ne pourrais oublier Madame Florence BART (Chef du laboratoire d’études de l’enrobage
des déchets L2ED CEA Marcoule) pour sa sympathie et tous les services qu’elle m’a rendu.
Je tiens à remercier toutes les personnes du service SPDE.
Je remercie également AREVA pour le cofinancement de ce travail, tous les collaborateurs
qui sont intervenus dans ce travail et le laboratoire LGCI-CEA Marcoule pour m’avoir permis
d’utiliser leurs équipements.
Infiniment, de tout mon cœur, merci à Anne, Véronique (s), Maryline, Karine, Fabien, David
(s), Céline, Olivier, Adrien (s), Thierry, Pascal et Nadège pour leur aide tout au long de ces
années, cette ambiance familiale va beaucoup me manquer.
Au cours de ces trois années, j’ai eu l’occasion de rencontrer beaucoup de doctorants,
postdoctorants et stagiaires, qui ont maintenu une ambiance à chaque instant. Je remercie
d’abord mes voisins de bureau, Kévin, Ali, Nathalie, Thomas, Pauline, Hélène, Paul ; les
voisins du bâtiment 438 : Jean-Baptiste, Emilie, Cédric, Dang Hanh, Elodie, Pierre, Prune et
les voisins du bâtiment 51 : Axel, Matthieu, Pierre, Cindy, Fred, Vincent, Emilie, Félicité…
Merci à tous les personnes du LFSM, LPAD, LGCI, LCLT, ICSM, ATALANTE et du service
informatique, qui ont contribué de près ou de loin à la réussite de cette thèse.
Merci au groupe de libanais en Avignon : Ali (it’s complicated), Ibrahim (I am hungry), Rami
(Asi at the morning), Toby (new basketball team soon in Paris), Sarah (tous les WE à Lyon) et
Fadi (be quiet playing cards). Nous avons passé de très bons moments ensemble.
Merci à tous mes professeurs depuis l’école jusqu’à ce jour, sans eux ce travail ne pouvait pas
être accompli.
Je remercie du fond du cœur toute ma famille pour leur soutien tout le long de cette thèse.
Mes efforts leur sont dédiés.
A mes parents
A mon frère
A mes sœurs
A…
Table des matières
Introduction : contexte et objectifs .................................................................. 11
Bibliographie de l’introduction ............................................................................................ 19
Chapitre 1 Matériaux et Méthodes ............................................................... 23
Table des matières chapitre 1 ............................................................................................ 24
1. Matériaux ..................................................................................................................... 25
1.1. Le bitume 70/100 ............................................................................................... 25
1.2. Les boues incorporées dans le bitume ................................................................ 25
1.3. Le tensioactif ...................................................................................................... 27
2. Les outils ...................................................................................................................... 27
2.1. Extrudeuse bivis ................................................................................................. 27
2.2. Irradiateur γ ........................................................................................................ 29
2.3. Cellule de diffusion de l’hydrogène ................................................................... 30
3. Les techniques de caractérisation ................................................................................. 30
3.1. Rhéologie ........................................................................................................... 30
3.2. Analyse enthalpique différentielle modulée ....................................................... 31
3.3. Microscopie électronique à balayage environnementale (MEBE) ..................... 32
3.4. Spectroscopie Infrarouge à Transformée de Fourier (IRTF) ............................. 32
3.5. Analyse thermique différentielle et Analyse Thermogravimétrique (ATD/ATG) .
............................................................................................................................ 33
3.6. Analyse élémentaire des bitumes ....................................................................... 34
3.7. Le fractionnement SARA ................................................................................... 35
3.8. Chromatographie Exclusion Stérique (SEC) ...................................................... 35
3.9. Diffraction des Rayons X (DRX) ....................................................................... 37
3.10. Diffusion des rayons X aux petits angles (SAXS) ............................................. 38
3.11. Microtomographie X .......................................................................................... 42
4. Bibliographie du chapitre 1 .......................................................................................... 43
Chapitre 2 Caractérisation rhéologique et thermique du bitume 70/100 . 47
Table des matières chapitre 2 ............................................................................................ 48
1. Caractéristiques physico-chimiques du bitume « Azalt 70/100 » ................................ 49
1.1. Composition élémentaire et par famille ............................................................. 49
1.2. Spectroscopie Infra-rouge du bitume 70/100 ..................................................... 52
1.3. Diffusion des rayons X dans le bitume 70/100 (SAXS) .................................... 53
2. Caractérisation rhéologique et thermique du bitume 70/100 ....................................... 55
2.1. Description générale du comportement rhéologique du bitume ........................ 55
2.2. Effet de la contrainte appliquée sur le comportement rhéologique .................... 57
2.3. Influence de la température sur le comportement rhéologique .......................... 59
2.4. Caractérisation du bitume comme un fluide à seuil ........................................... 61
2.5. Loi de comportement rhéologique globale et modèle ........................................ 64
2.6. Caractérisation de la microstructure du bitume par des analyses thermiques .... 67
2.7. Importance d’une contrainte seuil dans le cas du bitume ................................... 71
3. Bilan de ce chapitre ...................................................................................................... 76
4. A retenir du chapitre 2 .................................................................................................. 77
5. Bibliographie du chapitre 2 .......................................................................................... 78
Chapitre 3 
et les enrobés bitume ......................................................................................... 83
Table des matières chapitre 3 ............................................................................................ 84
1. Influence des conditions opératoires d’extrusion sur les propriétés du bitume pur ..... 86
1.1. Caractérisations rhéologiques ............................................................................ 86
1.2. Séparation asphaltènes/maltènes ........................................................................ 90
1.3. Interprétation ...................................................................................................... 91
1.4. Discussion générale ............................................................................................ 94
2. Influence des conditions opératoires d’extrusion sur les propriétés des enrobés bitumes
.................................................................................................................................... 101
2.1. Enrobé monosel type BaSO4 .................................................................................. 101
2.1.1. Effet de la vitesse de vis N ............................................................................... 101
2.1.2. Effet du débit d’écoulement Q ......................................................................... 103
2.1.3. Discussion ........................................................................................................ 104
2.2. Enrobé monosel type NaNO3 ................................................................................. 107
2.2.1. Effet de la vitesse de vis N ............................................................................... 107
2.2.2. Effet du débit d’écoulement Q ......................................................................... 109
2.2.3. Discussion ........................................................................................................ 110
2.3. Enrobé bisel ............................................................................................................ 111
2.3.1. Effet de la vitesse de vis N ............................................................................... 111
2.3.2. Effet du débit d’écoulement Q ......................................................................... 113
2.4. Comparaison et discussion générale entre les 3 enrobés bitumes .......................... 115
3. Enrobé industriel de type STE3 ................................................................................. 118
3.1. Effet de la vitesse de vis N ............................................................................... 120
3.2. Effet du débit d’écoulement Q ......................................................................... 123
3.3. Comparaison et discussion générale ................................................................ 125
4. Mesure de la vitesse de migration des bulles ............................................................. 127
5. Bilan de ce chapitre .................................................................................................... 130
6. A retenir du chapitre 3 ................................................................................................ 132
7. Bibliographie du chapitre 3 ........................................................................................ 133
Chapitre 4 
 ............................................................................................. 137
Table des matières chapitre 4 .......................................................................................... 138
1. Comportement sous irradiation de la matrice bitume ................................................ 140
1.1. Evolution du gonflement .................................................................................. 141
1.2. Modifications des propriétés rhéologiques sous irradiation du bitume pur ..... 147
1.3. Modifications internes ou structurales ............................................................. 154
1.4. Bilan ................................................................................................................. 164
2. Comportement sous irradiation de l’enrobé industriel (STE3) .................................. 165
2.1. Evolution du gonflement des enrobés STE3 en fonction de la dose ................ 165
2.2. Effet de l’irradiation γ sur la population de bulles dans STE3 ......................... 167
2.3. Effet de l’irradiation γ sur la rhéologie du STE3 ............................................. 170
3. Détermination d’une loi de rhéo-vieillissement radiolytique pour l’enrobé bitume type
STE3 à T = 22°C ................................................................................................................ 174
4. Bilan de ce chapitre .................................................................................................... 179
5. A retenir du chapitre 4 ................................................................................................ 180
6. Bibliographie du chapitre 4 ........................................................................................ 181
Conclusion générale ........................................................................................ 185
Perspectives ...................................................................................................... 188
Annexe A Extraction du bitume sur colonne ............................................. 193
Annexe B Diffusion des rayons X aux petits angles (SAXS) .................... 195
Bibliographie des annexes .................................................................................................. 196
9
INTRODUCTION
11
Introduction : contexte et objectifs
Le bitume se définit comme un matériau complexe non volatile existant dans la nature ou
produit essentiellement via une distillation fractionnée non-destructive du pétrole brut. Les
bitumes sont considérés comme des langes d’hydrocarbures, distincts par leur masse, leur
degré d’aromaticité, le nombre et la nature de leurs groupements polaires.
La composition élémentaire du bitume dépend principalement de sa provenance (source du
pétrole). Il est majoritairement formé de carbone (80 à 87%) et d’hydrogène (8-12%).
En outre, il contient une quantité non négligeable d’hétéroatomes tels que le soufre (0-9%),
l’azote et oxygène (0-2%) [1]. Des traces de métaux tels que le vanadium, le nickel et le fer
sont aussi présentes. Les hétéroatomes jouent un rôle très important sur les propriétés
chimiques et physiques du bitume, du fait de leur polarité élevée qui permet d’associer des
molécules par des liaisons intra et intermoléculaires, induisant un durcissement du bitume
[2, 3].
Suite à la complexité de sa chimie, il n’est pas possible de donner la formule chimique
exacte d’un bitume, et c’est pourquoi des structures moléculaires moyennes sont proposées.
Une façon de simplifier la description de cette variété moléculaire consiste à séparer le bitume
en différentes fractions (classes ou composés) selon leur solubilité dans des solvants de
différentes polarités [4, 5].
Cette méthode standard, la plus commune utilisée dans l’industrie pétrolière, est abregée
par le terme fractionnement SARA, qui signifie Saturés, Aromatiques, Résines et Asphaltènes
[4, 5]. Ces différentes fractions diffèrent par leur polarité, leur masse molaire, ainsi que par
leur rapport C/H. Les trois premières fractions forment une phase appelée maltène, qui est une
huile noire très visqueuse.
Les asphaltènes, qui représentent généralement entre 5 et 30 % du bitume, forment la partie
insoluble du bitume dans les n-alcanes (heptane ou pentane), ce sont des molécules polaires
de masse moléculaire très élevée (103 105 g/mol) [6].
D’après la littérature, les molécules d’asphaltènes possèdent entre trois et vingt cycles
aromatiques fusionnés les uns aux autres, et le diamètre de ces molécules est de l’ordre de
10 à 22 Å. Ces structures aromatiques condensées portent des chaînes latérales alkyle dont la
taille varie entre 4 et 20 atomes de carbone [6-9].
Grâce au système relativement conjugué d’une molécule d’asphaltène, les interactions π–π
entre ces molécules peuvent conduire à la formation d’agrégats d’asphaltènes [7].
La teneur en asphaltènes par rapport aux autres constituants, ainsi que les proportions des
fractions dans la phase maltène ont un effet significatif sur les propriétés viscoélastiques des
bitumes.
Par conséquent, la structure du bitume est essentiellement biphasique, les asphaltènes étant
dispersés dans une matrice maltène [1]. Cette structure a été proposée par Nellensteyn dès les
années 1920, qui a décrit le bitume comme une suspension colloïdale. Cette idée fut
12
ensuite largement développée par l’école hollandaise. Grâce au développement des techniques
rhéologiques, le bitume est maintenant décrit comme une suspension colloïdale à haute
température, constituée de particules d´asphaltènes agrégées, dispersées dans une matrice
maltène vitrifiable à basse température [1].
Figure 1- Schéma simplifié de la structure colloïdale du bitume [1].
La viscosité du bitume peut être décrite par une loi de type Krieger-Dougherty [10],
fonction de la fraction volumique effective de solide (asphaltènes péptisés) et de la viscosité
de la phase maltène :
 
(Eq.1)1
,0
m
m
eff
m
η est la viscosité du bitume, η0,m correspond à la viscosité des maltènes, ϕeff est la fraction
volumique effective de solide, ϕm est la fraction d’empilement maximum et [η] correspond à
la viscosité intrinsèque. Cette relation est très importante puisqu’elle quantifie l’effet
viscosifiant des asphaltènes.
A température ambiante, le bitume est considéré comme un matériau flexible avec une
densité proche de 1, mais, à faible température, il devient fragile et cassant. Par contre, à haute
température, il coule comme un liquide visqueux [11].
Il existe différents types de bitumes tels que les bitumes de distillation directe de pétrole,
les fluxés, les fluidifiés, les modifiés et les oxydés ou soufflés. C’est la raison pour laquelle ils
sont souvent caractérisés par un grand nombre de tests standards tels que l’indice de
pénétrabilité (I.P), le point de ramollissement, la teneur en asphaltènes et la viscosité…
Cette diversité de type offre de vastes applications dans les domaines de l’étanchéité, de
l’isolation thermique et acoustique, mais l’application du bitume comme revêtement routier
reste majoritaire (90% de ces applications [12]).
Il y a une cinquantaine d’années, le bitume a été choisi par l’industrie nucléaire française
comme matrice d’enrobage des déchets de faible et moyenne activité générés lors du
retraitement du combustible nucléaire de par, son pouvoir agglomérant élevé, sa grande
inertie chimique, son imperméabilité, sa faible solubilité dans l’eau, son pouvoir de
confinement important, sa faible température de mise en œuvre, son coût modéré et enfin sa
disponibilité.
L’enrobage des déchets radioactifs dans une matrice bitume a été mis en œuvre
industriellement de 1966 à 2007 par Cogema (actuellement AREVA-NC) dans l’usine STEL
Asphaltènes
Couche de Résine
13
(Station de Traitement des Effluents Liquides) de Marcoule et dans l’usine de traitement de
La Hague STE2 et STE3 (Station de Traitement des Effluents 2, 3, respectivement).
On compte à l’heure actuelle environ 80 000 fûts entreposés (dont 60 000 sur le site de
Marcoule) [13].
En France, le principe général du traitement des effluents liquides de faible et moyenne
activité consiste à insolubiliser les radionucléides par coprécipitation successivement par du
sulfate de baryum (BaSO4), du précipité préformé de ferrocyanure de nickel (PPFeNi), et du
sulfure de cobalt (CoS). Ce principe d’enrobage consiste à extruder à chaud les déchets
radioactifs, initialement sous forme d’une boue liquide, avec du bitume. Ce procédé a été mis
en œuvre à l’aide d’une extrudeuse, le mélange obtenu est ensuite déshydraté en ligne et coulé
dans un fût en acier de capacité de 220 litres.
La composition chimique et le contenu en radionucléides des enrobés dépendent de la
nature des effluents traités, de la quantité et de la nature des réactifs de coprécipitation.
Le PPFeNi est un précipité performé de ferrocyanure de nickel, il est ajouté pour entraîner le
césium (Cs). CoS est formé in situ pour piéger le ruthénium (Ru) et enfin le sulfate de baryum
pour entraîner le strontium (Sr). Les radionucléides, hors U, ne représentent que quelques
ppm dans les colis, l’uranium majoritairement est 238U. Typiquement, l’activité βγ est
prédominante durant les 300 premières années. C’est ensuite l’activité α qui domine. Le débit
de dose initial dans un colis standard type STE3 est inférieur à 10 Gy/h.
Selon la nature du rayonnement α, β et γ, le rendement radiolytique est différent. Chaque
radioélément présent dans l’enrobé bitume est caractérisé par une énergie de rayonnement.
Dans le cas des émetteurs α, le rayonnement est beaucoup plus énergétique que les
rayonnements β et γ [14]. Le rendement radiolytique d’un gaz (G), qui est défini comme le
nombre de moles de gaz généré par quantité d’énergie déposée dans le matériau, est par
conséquent supérieur pour les émetteurs α que pour les émetteurs βγ [14]. Le rendement
radiolytique en hydrogène d’un émetteur γ est de l’ordre de 0,32 molécules/100 eV, soit
0,3 × 10-7 mol.J-1 contre 1 × 10-7 mol.J-1 pour un émetteur α [15].
Comme le bitume est un continuum de composés organiques majoritairement insaturés et
polycycliques, il est sensible à l’auto-irradiation : des radicaux libres sont générés
principalement des H, issus de la coupure d’une liaison C-H :
Les noyaux aromatiques sont en effet plus résistants aux rayonnements que les alcanes et
les alcènes du fait de leurs électrons π délocalisés, qui permettent la dissipation de l’énergie
émise par les rayonnements α, β et γ et, par conséquent, les coupures de chaînes sont
moindres [13].
Le radical H ainsi généré est très réactif, il va notamment pouvoir réagir avec un atome
d’hydrogène d’un groupement CH2 voisin, créant ainsi un nouveau radical et produisant une
molécule d’H2 selon :
H H
H
H
C
H
H
HH
+
14
C’est un par mécanisme radicalaire que le bitume produit de l’hydrogène sous irradiation.
Il peut y avoir également d’autres substances volatiles telles que les faibles alcanes (CH4,
C2H6, C2H4,…) ainsi que CO et CO2 (présents à la surface). La quantité des gaz autres que
l’hydrogène reste faible devant celle d’H2 qui constitue plus de 95% de la production totale.
Les gaz de radiolyse produits dans tout le volume de l’enrobé se solubilisent d’abord dans
la matrice jusqu’à saturation (environ 5 % en volume). Au-delà, l’hydrogène forme des bulles
de gaz par nucléation. Cette production est continue et dépend uniquement de l’activité
incorporée dans le fût. Les gaz produits ne peuvent pas être complètement évacués à travers la
surface libre dans les fûts de stockage, compte tenu du très faible coefficient de diffusion d’H2
dans le bitume, de l’ordre de 4 à 7 ×10-12 m2/s à 25°C.
Des phénomènes de croissance des bulles auront lieu dans les fûts par coalescence et
mûrissement d’Ostwald qui conduisent à une accélération de l’évacuation de ces bulles selon
deux mécanismes. Le premier est à la diffusion/perméation des gaz dissous et le second
provient de la migration ascensionnelle des bulles de gaz suite à leur différence de densité
avec l’enrobé [16].
Par conséquent, une compétition entre production de gaz et évacuation a lieu. Si la
production est plus importante que l’évacuation des bulles, un phénomène de gonflement des
fûts persiste [17]. Plusieurs modèles ont été développés dans la littérature afin d’estimer ou
prédire le taux de gonflement des composés bitumineux [14, 17, 18] parmi lesquels JACOB2,
le modèle le plus récent, développé par le CEA, à la fin des années 1990. Ce modèle est basé
sur l’intégration des différents phénomènes tels que la création et le grossissement in situ des
bulles, l’évacuation des bulles par diffusion et migration. Ce modèle est schématiquement
représenté sur la Figure 2.
L’existence du gonflement repose sur les paramètres d’entrée suivants :
1. le terme source gaz (quantité maximale de gaz susceptible d’être générée par
radiolyse)
2. la viscosité de l’enrobé
3. la distribution de la densité des bulles
4. les coefficients de diffusion
5. la solubilité des gaz dans l’enrobé.
H H
H
H+H H2+C
H
HH
15
Figure 2- Phénoménologie du gonflement radiolytique des enrobés de bitume (image obtenue par Microtomographie
à 1 MGy et 400 Gy/h).
La prédiction du gonflement suivant la composition radiologique d’un enrobé est
nécessaire pour évaluer l’intégrité des colis en particulier durant la phase de réversibilité du
stockage (durée séculaire). La température du site de stockage a été évaluée par l’ANDRA
(Agence Nationale pour la gestion des Déchets RAdioactifs) aux alentours de 22°C.
Par conséquent, la viscosité du bitume est fortement augmentée, ce qui impacte la capacité à
évacuer les gaz produits par radiolyse, induisant ainsi un taux de gonflement important.
Le but de cette thèse est donc d’acquérir les données expérimentales rhéologiques et leur
évolution sous irradiation pour prédire in fine l’évolution dans le temps des colis de bitume
en terme de gonflement.
L’essentiel de cette étude a donc été consacré à mettre en évidence l’évolution sous
irradiation gamma des propriétés rhéologiques et chimiques des enrobés bitume entre 1 et
7 MGy afin de mettre en évidence les modifications induites par ces irradiations.
La démarche expérimentale de cette thèse consiste dans un premier temps (chapitre 2) en
une caractérisation physico-chimie du bitume 70/100 vierge, utilisé en France pour l’enrobage
des déchets. Une caractérisation rhéologique détaillée, suivie par des études thermiques à
l’aide des analyses calorimétriques (DSC), a été réalisée afin de comprendre le comportement
du bitume exempt de sels.
Puisque l’enrobage de déchets radioactifs dans le bitume s’effectue par extrusion en
présence d’oxygène, il est nécessaire de déterminer (première partie du chapitre 3),
si l’histoire thermomécanique de l’extrudeuse a une influence sur le comportement
rhéologique et chimique.
Cependant, la matrice réelle utilisée pour l’enrobage est plus complexe. Le matériau réel
étant composé de 60% en masse de bitume et de 40% en masse de sels sont
majoritairement incorporés les radioéléments, la deuxième partie du chapitre 3 sera
consacrée à l’étude de l’enrobé (bitume + sels), synthétisé au moyen d’une extrudeuse bi-vis.
nucléation
croissance
coalescence
mûrissement
diffusion
migration
16
Compte tenu de la complexité de l’enrobé industriel (plusieurs types de sels solubles et
insolubles de granulométrie différente), des échantillons modèles (monosels et bisels) ont été
synthétisés afin de déconvoluer les effets, en particulier de granulométrie, sur la réponse
rhéologique. Par ailleurs, à l’échelle industrielle, les enrobés sont extrudés dans des conditions
opératoires de 270 tr/min pour la vitesse de vis et 75 kg/h pour le débit, ce qui n’est pas
réalisable avec notre extrudeuse de laboratoire. Pour estimer l’influence de l’histoire
thermomécanique subie par le matériau, diverses conditions opératoires (vitesse de vis et débit
d’écoulement) ont étestées sur les échantillons modèles, afin de comprendre d’une part
l’impact de ces sels sur le comportement rhéologique du bitume, et d’autre part d’étudier les
effets des conditions d’extrusion sur l’état de dispersion des sels et la réponse rhéologique.
La 3ème partie du chapitre 3 présente les effets des conditions opératoires sur un enrobé
industriel de type STE3, synthétisé à l’échelle du laboratoire avec différentes conditions
d’extrusion.
Le matériau réel est un enrobé de bitume (type STE3) contenant des éléments radioactifs
émettant des rayonnements α, β et γ. Afin d’évaluer l’impact de ces rayonnements et
d’accélérer les phénomènes d’endommagement sur le bitume et l’enrobé bitume, des
irradiations γ externes ont été effectuées. C’est la raison pour laquelle le chapitre 4 est dédié à
l’étude de l’effet de l’irradiation γ sur le comportement du bitume pur et d’enrobé bitume de
type STE3. Dans un premier temps, ce chapitre décrit les modifications externes apportées,
comme le gonflement. Ce dernier phénomène est évalué en fonction de plusieurs paramètres,
tels que la dose d’irradiation, le débit de dose, le diamètre de la géométrie et l’ajout de sels.
Ensuite, afin d’expliquer d’une part les valeurs de gonflement ainsi mesurées et d’autre
part de quantifier la population et la distribution des bulles, ainsi que d’obtenir des
informations sur les mécanismes d’évacuation des bulles, des caractérisations de la population
des bulles par microtomographie X ont été effectuées sur des échantillons de bitume pur et de
STE3 irradiés à différentes doses.
D’après la littérature, un effet prononcé de l’irradiation γ sur les propriétés du bitume telles
que les propriétés rhéologiques, est remarqué. Pour cela, la 2ème partie de ce chapitre sera
focalisée sur l’étude des propriétés rhéologiques du bitume pur et du STE3 sous irradiation.
Cette étude présente également les caractérisations physico-chimiques des matériaux qui
permettent d’expliquer les évolutions rhéologiques.
Pour finir, ce chapitre met en évidence les données rhéologiques obtenues dans les parties
consacrées au bitume et aux enrobés bitume afin de proposer une loi de rhéo-vieillissement
radiolytique permettant d’ajuster la viscosité de l’enrobé industriel irradié à partir de celle du
bitume pur irradié.
Ce travail a déjà donné lieu à des publications dans des journaux à comité de lecture :
- M. Mouazen, A. Poulesquen, B. Vergnes; “Correlation between thermal and
rheological studies to characterize the behavior of bitumen”; Rheol. Acta, 50: 169-178 (2011).
- M. Mouazen, A. Poulesquen, B. Vergnes; “Influence of extrusion conditions on the
rheological behavior of Nuclear Bituminized Waste Products (BWP)”; Int. Polym. Process, en
presse (2011).
- M. Mouazen, A. Poulesquen, B. Vergnes; “influence of thermo-mechanical history on
chemical and rheological behavior of bitumen”; Energy & Fuels, en presse (2011).
17
- M. Mouazen, A. Poulesquen, B. Vergnes, F. Bart; Effect of gamma-irradiation on
Nuclear bituminized Waste Products (BWP): X-ray microtomography and rheological
characterization”; J. Nucl. Mater, 419: 24-31 (2011).
- M. Mouazen, A. Poulesquen, B. Vergnes, F. Bart; “Modification of chemical and
physical properties of bitumen under gamma irradiation”; J. Chem. Phys, soumise (2011).
18
Résumé de la démarche scientifique de la thèse
Viscosité
Comportement rhéologique
du matériau
Taux de
Gonflement
Irradiations
Activités Rendement radiolytique
Vieillissement Histoire thermomécanique
(N et Q)
Teneur en sels
Volume effectif
d’un aggrégat
Couche de
résines
Asphaltènes
Température
Boue
Bitume
venant du
fondoir
Enrobé
Tensioactif
10
1
2
3
4
5
6
7
8
9
Ecran de contrôle
extrudeuse
10 Fourreaux
thermo-régulés
contenant les 2 vis
4 cheminées
d’évaporation
Moteur entraînement
des vis
Condensateur
2 arbres de vis
Population des bulles Réticulations
19

[1] D. Lesueur, "The colloidal structure of bitumen: Consequences on the rheology and on
the mechanisms of bitumen modification", Adv. Colloid. Interface. Sci, 145: 42-82
(2009).
[2] P. Michalica, I. B. Kazatchkov, J. Stastna, L. Zanzotto, "Relationship between
chemical and rheological properties of two asphalts of different origins", Fuel, 87:
3247-3253 (2008).
[3] X. A. Vargas, N. Afanasjeva, M. Alvarez, P. H. Marchal, L. Choplin, "Asphalt
rheology evolution through thermo-oxidation (aging) in rheo-reactor", Fuel, 87: 3018-
3023 (2008).
[4] L. Raki, J.-F. Masson, P. Collins, "Rapid Bulk Fractionation of Maltenes into
Saturates, Aromatics, and Resins by Flash Chromatography", Energy & Fuels, 14:
160-163 (2000).
[5] ASTM Standard D 4124 - 09, Standard Test Method for Separation of Asphalt into
Four Fractions (2009).
[6] D. Espinat, E. Rosenberg, M. Scarsella, L. Barre, D. Fenistein, D. Broseta, "Colloidal
structural evolution from stable to floculated state of asphaltene solutions and heavy
crudes", in Structure and Dynamics of Asphaltenes, O. C. Mullins and E. Y. Sheu.,
New York: Plenum Press, 145-202 (1998).
[7] T. F. Yen, J. G. Erdman, S. S. Pollack, "Investigation of the structure of petroleum
asphaltenes by XRD", Anal. Chem, 33: 1587-1594 (1961).
[8] O. C. Mullins, "The Modified Yen Model", Energy & Fuels, 24: 2179-2207 (2010).
[9] Y. Long, T. Dabros, H. Hamza, "Selective Solvent Deasphalting for Heavy Oil
Emulsion Treatment ", in Asphaltenes Heavy Oils and Petroleomics, Springer, New
York, 511-547 (2007).
[10] I. M. Krieger, T. J. Dougherty, "A Mechanism for Non-Newtonian Flow in
Suspensions of Rigid Spheres", Trans. Soc. Rheol, 3: 137-152 (1959).
[11] O. Gonzalez, M. E. Munoz, A. Santamarıa, M. Garcıa-Morales, F. J. Navarro, P.
Partal, "Rheology and stability of bitumen/EVA blends", Eur. Polym. J, 40: 2365
2372 (2004).
[12] M. A. Rodríguez-Valverde, P. Ramón-Torregrosa, A. Páez-Dueñas, M. A. Cabrerizo-
Vílchez, R. Hidalgo-Álvarez, "Imaging techniques applied to characterize bitumen
and bituminous emulsions", Adv. Interface. Sci.colloid, 136: 93108 (2008).
[13] J. Sercombe, F. Adenot, P. P. Vistoli, S. Parraud, C. Riglet-Martial, B. Gwinner, I.
Felines, C. Tiffreau, M. Libert., "Dossier de référence bitume : Synthèse des
connaissances sur le comportement à long terme des colis bitumes," CEA
MarcouleN°= DTCD/2004/09 (2004).
[14] S. G. Burnay, "Comparative evaluation of and radiation effects in a bitumenisate",
Nucl. Chem. Waste. Manage, 7: 107-127 (1987).
[15] P. Bernat, "Etude du comportement des enrobés bitumineux sous irradiation gamma ",
Thèse de Doctorat, Université Réné Descartes-Paris 6 (1994).
[16] C. Tiffreau, M. F. Libert, P. P. Vistoli, J. Sercombe, "Dossiers de synthèse sur le
comportement à long terme des colis : Dossier opérationnel "bitume"," CEA
CadaracheN°= DEN/DTN/SMTM/LMTE/ 2004- n°69 (2004).
[17] D. C. Philipps, J. W. Hitchon, D. I. Johnson, "The Radiation Swelling of Bitumens
and Bituminised Wastes ", J. Nucl. Mater, 125: 202-218 (1984).
20
[18] W. Kluge, W. Hild, R. Köster, G. Meier, H. Krause, "Bitumenisation of radioactive
waste concentrates from reprocessing, nuclear research establishments and nuclear
power plants," N°= KFK 2975 (1980).
21
CHAPITRE
1
23
Chapitre 1 Matériaux et Méthodes
Ce chapitre a pour objectif de présenter d’une part les matériaux utilisés dans le cadre de cette
étude et d’autre part les diverses techniques qui ont servi à fabriquer et à caractériser les
enrobés bitume.
L’objectif principal de ce travail est de comprendre les effets de l’irradiation γ sur les
propriétés rhéologiques et thermiques du bitume et de ses enrobés. Puisque lenrobage de
déchets radioactifs dans le bitume se fait par extrusion, des échantillons inactifs ont été
préparés sur une extrudeuse bivis co-rotative dont le profil de vis et les températures
d’extrusion sont sensiblement identiques à ce qui est utilisé à l’échelle industrielle.
La première partie présente les principales caractéristiques du bitume 70/100 utilisé en France
pour l’enrobage des déchets nucléaires, ainsi que certaines caractéristiques des sels solubles et
insolubles utilisés. Dans un second temps, tous les outils (extrusion, irradiateur,…) ainsi que
les techniques de caractérisation rhéologique et physico-chimique sont présentés.
24
Table des matières chapitre 1
1. Matériaux ..................................................................................................................... 25
1.1. Le bitume 70/100 ............................................................................................... 25
1.2. Les boues incorporées dans le bitume ................................................................ 25
1.2.1. Boue monosel BaSO4 ..................................................................................... 25
1.2.2. Boue monosel NaNO3 .................................................................................... 26
1.2.3. Boue bisel (2/3 BaSO4 + 1/3 NaNO3) ............................................................ 26
1.2.4. Boue STE3 ...................................................................................................... 26
1.3. Le tensioactif ...................................................................................................... 27
2. Les outils ...................................................................................................................... 27
2.1. Extrudeuse bivis ................................................................................................. 27
2.2. Irradiateur γ ........................................................................................................ 29
2.3. Cellule de diffusion de l’hydrogène ................................................................... 30
3. Les techniques de caractérisation ................................................................................. 30
3.1. Rhéologie ........................................................................................................... 30
3.2. Analyse enthalpique différentielle modulée ....................................................... 31
3.3. Microscopie électronique à balayage environnementale (MEBE) ..................... 32
3.4. Spectroscopie Infrarouge à Transformée de Fourier (IRTF) ............................. 32
3.5. Analyse thermique différentielle et Analyse Thermogravimétrique (ATD/ATG) .
............................................................................................................................ 33
3.6. Analyse élémentaire des bitumes ....................................................................... 34
3.6.1. Détermination du carbone et de l’hydrogène ................................................. 34
3.6.2. Détermination de l’azote ................................................................................ 34
3.6.3. Détermination de l’oxygène ........................................................................... 34
3.6.4. Détermination du souffre ................................................................................ 34
3.7. Le fractionnement SARA ................................................................................... 35
3.8. Chromatographie Exclusion Stérique (SEC) ...................................................... 35
3.9. Diffraction des Rayons X (DRX) ....................................................................... 37
3.10. Diffusion des rayons X aux petits angles (SAXS) ............................................. 38
3.11. Microtomographie X .......................................................................................... 42
4. Bibliographie du chapitre 1 .......................................................................................... 43
25
1. Matériaux
1.1. Le bitume 70/100
Le bitume utilisé en France pour l’enrobage des déchets nucléaires est un bitume de
distillation directe.
Chaque bitume fabriqué est caractérisé par son grade et classé selon ses caractéristiques
physiques. Plus le grade est élevé et plus le bitume est mou (plus faible viscosité). Les normes
que l’on retrouve usuellement sont les grades 180/220, 70/100, 40/50…. Ces valeurs
correspondent à un indice de pénétrabilité (I.P) et sont obtenues au moyen d’un test normalisé
qui est la pénétrabilité d’une aiguille. Celui-ci représente l’enfoncement en dixième de
millimètre d’une aiguille calibrée, au bout de 5 secondes et sous une charge de 100 g.
Les mesures sont effectuées à 25°C.
Le bitume utilisé dans cette étude est fourni par Total (raffinerie de Normandie) et porte le
nom Azalt 70/100. Quelques caractéristiques physico-chimiques de ce bitume sont listées
dans le Tableau 1.
Tableau 1- Caractéristiques du bitume 70/100 [1].
Essais
Unités
Spécifications
Pénétration à 25°C
1/10 mm
70/100
Point de ramollissement
°C
43 51
Point de fragilité Fraass1
°C
-10
Solubilité dans le toluène
%
≥ 99
Données informatives
Densité à 25°C
g.cm-3
1,02
Température à ne pas dépasser2
°C
220
Teneur en asphaltènes
%
23,6
1.2. Les boues incorporées dans le bitume
Quatre boues ont été utilisées dans cette étude. Ce sont des mélanges de sels dans de l’eau à
une concentration de 180 g/L. Ces boues ont été synthétisées afin de préparer d’une part des
échantillons modèles, c’est le cas des monosels et bisel, et d’autre part des enrobés simulant le
cas réel (cas du STE3).
1.2.1. Boue monosel BaSO4
Ce sont des suspensions à base de sulfate de baryum (BaSO4). Les principales caractéristiques
de ces sels sont leur insolubilité dans l’eau et leur masse volumique élevée, de l’ordre de
4,5 g/cm3. Ces sels sont sous la forme d’une poudre blanche, de taille élémentaire entre 300 et
500 nm, et sous forme d’agglomérats de l’ordre de 5 ± 3 µm.
1 Le point de fragilité Fraass est un indicateur permettant de caractériser la fragilité du bitume à basse température. Plus le point Fraass est
élevé, plus le bitume est fragile.
2 C’est la température à partir de laquelle le risque d’inflammation et d’intoxication du bitume devient important.
26
1.2.2. Boue monosel NaNO3
La principale différence des nitrates de sodium (NaNO3) avec les BasO4 est leur solubilité
totale dans l’eau et leur pouvoir cristallisant. Ils se présentent sous forme de cristaux cubiques
de taille de l’ordre de 31,5 ± 13,2 µm. La densité de ces sels est de l’ordre de 2,261.
1.2.3. Boue bisel (2/3 BaSO4 + 1/3 NaNO3)
Cette boue est formée d’un mélange 2/3 en masse de sels BaSO4 et 1/3 de NaNO3, dissous
dans l’eau et de densité de 3,75.
1.2.4. Boue STE3
C’est une solution aqueuse contenant divers sels en suspension. Cette boue a été préparée au
laboratoire suite à une procédure bien définie. Cette boue possède la même composition
qu’une boue STE3 industrielle.
Les pourcentages massiques des produits solubles et insolubles et leurs concentrations
respectives sont données dans le Tableau 2.
Tableau 2- Composition finale de la boue STE3
Produits insolubles
% massique
C (g/L)
BaSO4
54,1
99,5
PPFeNi
6,1
11,1
Co(OH)2
2,8
5,17
CoS
3,7
6,85
Ca3(PO4)2
0,34
0,62
Produits solubles
NaNO3
28,51
52,4
Na2SO4
4,52
8,30
La composition finale de la boue est de 67% de sels insolubles et 33% de sels solubles dans
l’eau. Cette boue se caractérise par une large distribution granulométrique de sels, entre 0,01
et 75 µm, dont la taille moyenne est de l’ordre de 19 µm (Figure I.1).
Figure I.1 Répartition granulométrique des sels présents dans les boues BaSO4, NaNO3 et STE3.
050 100 150 200 250
0
2
4
6
8
10
75 µm
Volume fraction (%)
Particule diameter (µm)
19 µm
MonoselBaSO4MonoselNaNO3STE3
31,5 13,2 µm5 3 µm 19 10 µm
100 µm
27
1.3. Le tensioactif
Afin de fluidifier le mélange bitume/boue, un tensioactif est utilisé. Ce tensioactif industriel
utilisé dans le processus de fabrication des enrobés bitume porte le nom ODS-17 et est issu
d’un produit animal non purifié. C’est un tensioactif de type ionique avec deux composantes :
(1) une composante anionique RCOO-, constituée d’un mélange de 60% de linoléate
C17H31COO-, de 30% d’oléate C17H33COO- et de 10% de palmitate C15H31COO-, (2) une
composante cationique, constituée d’un mélange de plusieurs diamines polyéthoxylés [2].
La teneur en tensioactif est de l’ordre de 2% massique par rapport à l’extrait sec. Pour des
raisons techniques, le tensioactif est introduit dans l’extrudeuse après dilution dans du toluène
(rapport de masse toluène/ODS-17 de l’ordre de 5). Le toluène est ensuite éliminé par
évaporation au cours de l’extrusion.
2. Les outils
2.1. Extrudeuse bivis
Il s’agit d’une extrudeuse bivis co-rotative de marque Werner ZSK25 WLE (Figure I.2).
Figure I.2 Schéma de lextrudeuse ZSK25.
Les caractéristiques principales de cette extrudeuse sont résumées dans le Tableau 3.
Tableau 3 Caractéristiques 
Longueur totale (L)
1000 mm
Diamètre intérieur du fourreau (D)
25 mm
Entraxe (Cl)
21,1 mm
L/D
40
10 fourreaux thermo-régulés
Vitesse de rotation disponible
0 600 tr/min
Elle possède un fondoir contenant du bitume. Le bitume est préalablement chauffé à 140°C
dans le fondoir équipé d’un chauffage à bain d’huile et d’une pompe à engrenage. Le bitume
est transféré à l’extrudeuse via un cordon chauffant calorifugé.
Tensio
actifBoue
Bitume
venant du
fondoir
Enrobé
10
12 3 4 5 6 7 8 9
Ecran de
contrôle
extrudeuse 10 Fourreaux
thermo-régulés
contenant les 2 vis
4 cheminées
d’évaporation
Moteur entraînement
des vis
Condensateur
2 arbres
de vis
28
L’introduction du tensioactif (ODS-17) et des boues se fait à l’aide de deux pompes
péristaltiques.
Le profil de vis et la température des fourreaux sont donnés sur la Figure I.3. L’eau et le
toluène s’évaporent tout au long du procédé via les évaporateurs placés dans les zones 4, 6, 7
et 9. Ces évaporateurs permettent également de suivre en ligne la teneur en eau évacuée.
Figure I.3 Profils de vis et de température 
Ce profil de vis consiste en différentes zones de mélange (des blocs malaxeur (BM) décalés
de +45° et 90°) séparés par des éléments de convoyage (monofilet et bifilet). Cette extrudeuse
possède à la sortie un élément de vis à pas inverse, permettant de retenir la matière et de
récupérer le matériau qui s’écoule par gravité à la partie basse du fourreau.
Dans notre cas, le temps de séjour moyen (pas de transport solide ni de filière) est donné par :
1)(Eq..
1
cos
22v
j k k
v
jj
jQ
B
N
A
LS
Q
B
L
N 
N est la vitesse de vis, Qv est le débit volumique, L représente la longueur de l’élément de vis,
Bj le pas, φj l’angle que fait le filet avec un plan perpendiculaire à l’axe de la vis
(
e
D
B
tan
, où De est le diamètre de la vis), S est la surface de la section libre du fourreau
et Lk est la longueur des éléments restrictifs [3, 4]. A et B sont des constantes.
Seuls les blocs malaxeurs décalés à 90° et l’élément en amont du dernier pas inverse sont
considérés comme remplis. Tous les autres éléments sont partiellement remplis. Le temps de
séjour dans le cas du bitume pur est alors donné par :
    
2)(Eq.
/
16,124
/
07,63 hkgQstrN
s
Dans le cas des enrobés, le facteur B est égal à 169,36 au lieu de 124,16 puisque la densité des
enrobés est plus élevée que celle du bitume pur.
L’objectif de l’extrusion est de prévoir l’influence de l’histoire thermomécanique sur les
propriétés rhéologiques du bitume pur et des enrobés. C’est la raison pour laquelle une
vingtaine d’enrobés a été extrudée dans différentes conditions opératoires (N et Q).
Fourreau
1Fourreau
2Fourreau
3Fourreau
4Fourreau
5Fourreau
6Fourreau
7Fourreau
8Fourreau
9Fourreau
10
T(C) 120 100 125 150 160 170 180 160 150 140
Sortie
bitume
Bitume
préchauffé +
TA
Boue Condensateur
Fourreau
1Fourreau
2Fourreau
3Fourreau
4Fourreau
5Fourreau
6Fourreau
7Fourreau
8Fourreau
9Fourreau
10
T(C) 120 100 125 150 150 160 155 170 180 125
29
L’extrusion d’enrobés est suivie par trois types de caractérisations :
- La mesure de la quantité en sels dans l’enrobé par une méthode de séparation
sels/bitume par centrifugation, en utilisant le toluène comme éluant.
- Le calcul de la quantité d’eau piégée dans l’enrobé par la méthode de Karl-Fisher.
Tous les enrobés montrent à partir de ce dosage une teneur en eau inférieure à 0,5%.
- La mesure de la granulométrie des sels par l’utilisation d’un microscope électronique à
balayage environnemental et d’une granulométrie Laser (Mastersizer S, Malvern).
2.2. 
Les enrobés bitumineux réels contiennent des radioéléments émetteurs α, β et γ. Compte tenu
des contraintes de sureté nucléaire, il est difficile d’utiliser des éléments radioactifs en
laboratoire. Nous utilisons donc une source d’irradiation γ externe pour simuler le
vieillissement radiochimique, tout en étant conscient que les interactions rayonnement/matière
sont différentes, en particulier entre une particule α et la matrice bitume (in-situ plus
importante). Outre les contraintes de sureté, l’utilisation d’un rayonnement γ externe (le plus
courant et accessible) permet d’atteindre des niveaux de dose intégrée importants et donc de
pouvoir simuler plusieurs dizaines d’années d’entreposage d’un fût réel en quelques jours
d’irradiation.
Une des sources de rayonnement γ la plus couramment utilisée est le cobalt-60, caractérisé par
une période radioactive de 5,27 ans. Chaque source possède une activité qui correspond au
nombre de désintégrations par seconde. Cette activité se mesure en becquerels (Bq). A titre
d’exemple, un gramme de Cobalt 60 correspond à 44 TBq (1100 curies), avec
1 Ci = 3,7×1010 Bq [5].
La grandeur physique qui permet de quantifier l’interaction d’un rayonnement avec la matière
est la dose absorbée (D). Elle est définie comme l'énergie absorbée par unité de masse de la
cible. L’unité internationale de la dose est le gray (Gy). 1 Gy correspond à la dose absorbée
par une masse de 1 kg à laquelle les rayonnements communiquent une énergie de 1 joule : 1
Gy = 1J/kg. L'ancienne unité était le rad (1 Gy = 100 rad). La dose absorbée se mesure avec
un dosimètre.
Le débit de dose absorbée () est la variation de la dose absorbée (dD) en fonction du
temps (dt) :
3)(Eq.
dt
dD
D
Si le débit de dose absorbée est constant dans le temps, on a la relation D = × t. L’unité
internationale du débit de dose absorbée est le gray par seconde (Gy/s).
Pour quantifier le dégagement gazeux à l’irradiation, on définit le rendement radiolytique
comme la quantité d’espèces formées ou détruites par unité d’énergie déposée. Il est exprimé
en mol/J (unité S.I). Il peut être également exprimé en molécules par 100 eV
(1 molécule/100eV = 1,036 × 10-7 mol/J). Le rendement radiolytique γ de l’H2 dans le bitume
est de l’ordre de 0,33 × 10-7 mol/J.
En résumé, la quantité de moles de gaz générées par irradiation est donnée par la relation :
4)(Eq....][ mtDGGaz
30
avec m la masse en kg et G le rendement radiolytique.
Deux irradiateurs industriels γ ont été utilisés dans cette étude. Les deux possèdent une source
cobalt-60. La différence entre ces irradiateurs est le niveau de débit de dose : l’irradiateur
Cigal (Conservation par Ionisation Gamma des Aliments) du CEA Cadarache possède un
débit de dose de l’ordre de 400 Gy/h, tandis que le débit de dose de l’irradiateur Isotron
(Marseille) est de 5000 Gy/h.
2.3. 
Il s’agit d’une cellule thermostatée formée de deux cavités C1 et C2 séparées par une couche
de bitume d’épaisseur e (Figure I.4). La 1ère cavité est liée à une bouteille d’hydrogène avec
une pression de 950 mbar tandis que la 2ème est connectée à une chromatographie en phase
gazeuse (GPC). Cette cavité est alimentée par un gaz inerte tel que l’azote.
La chromatographie sert à mesurer la quantité d’hydrogène ayant diffusé à travers le bitume
pendant un temps donné.
Figure I.4 - 
Le pourcentage dhydrogène a été mesuré par la GPC en fonction du temps, à une pression de
950 mbar et une température de 24°C. A partir de ces résultats, le débit d’hydrogène QH a été
calculé selon :
5)(Eq.
100
%22 CcelluleladevolumecumuléH
QH
Connaissant QH, e et S/dC (section de la cellule de diffusion), nous pouvons tracer le rapport
(QH×e)/(S/dC) en fonction du temps, qui donne une régression linéaire dont la pente est égale
à la constante de diffusion de l’hydrogène dans le bitume. Tous les essais ont été répétés deux
fois afin de s’assurer de la reproductibilité des mesures.
3. Les techniques de caractérisation
3.1. Rhéologie
Dans l’objectif d’étudier le comportement rhéologique du bitume pur et des enrobés vierges et
irradiés, deux rhéomètres à contrainte imposée ont été utilisés dans cette étude : un rhéomètre
de type AR-G2 de la société TA Instruments, équipé du système EHP (Electrically Heated
Plates), permettant une homogénéité thermique dans l’échantillon. L’autre rhéomètre utilisé
H2
N2
e
C1
C2
GPC
31
est le MCR 301 de la société Anton Paar, équipé d’une cloche permettant une stabilité
thermique.
Des géométries plan-plan de diamètres différents (25, 40 et 50 mm) ont été utilisées suivant la
température d’étude. L’entrefer choisi est de 1 mm dans le cas des bitumes et de 1,5 mm pour
les enrobés. Les tests ont été réalisés entre 22 et 90°C.
Le domaine de viscoélasticité linéaire a été déterminé en balayant en déformation entre 10-6 et
100, à une fréquence angulaire de 100 rad/s. La limite de ce domaine, donc la déformation
critique, est déterminée lorsque le module élastique G’ atteint 90% de sa valeur au plateau [6].
Les tests de balayage en fréquence ont été réalisés entre 100 et 0,01 rad/s, à une contrainte ou
déformation choisie dans le domaine de linéarité.
Les courbes d’écoulement ont été obtenues par l’application d’un couple en continu (5 points
par décade) et le déplacement correspondant est mesuré. Dans tous les cas, un temps de
stabilisation de 60 s est utilisé, ce qui a été jugé suffisant pour assurer un taux de cisaillement
constant à ± 5%.
Des rampes en température ont également été effectuées, entre -20 et 100°C, avec une vitesse
de 1°C/min.
Tous les tests effectués ont été précédés d’une étape de stabilisation de 10 minutes à une
déformation de 10-3 et une pulsation de 1 rad/s.
3.2. Analyse enthalpique différentielle modulée
La DSC est une technique de mesure du flux de chaleur émis par un échantillon donné en
fonction de la température et du temps. La DSC conventionnelle permet d’étudier les
transitions physiques (i.e. Tg) et les réactions chimiques (endo-exothermiques) de manière
quantitative. Les principaux effets révélés par la DSC sont souvent caractéristiques d’une
substance. Ces effets sont la transition vitreuse, la fusion et la cristallisation [7].
La Tg est la température au dessous de laquelle un solide amorphe devient fragile (cassant) et
au-dessus de laquelle il devient souple. La transition vitreuse est un phénomène cinétique
révélé par un changement de ligne de base, correspondant à une variation de la chaleur
spécifique (Cp).
Puisque les bitumes sont connus pour leur composition complexe, ainsi que par la présence de
différentes familles de molécules (fractionnement SARA paragraphe 3.7) [8], les résultats
obtenus par une DSC standard sont difficiles à interpréter. Pour cela, une DSC modulée a été
utilisée. Le principe est d’imposer simultanément à une vitesse de chauffage linéaire (DSC
classique) une oscillation (modulation) sinusoïdale en température. En particulier, la MDSC
permet la séparation du signal du flux thermique total dans ses composantes
thermodynamiques et cinétiques. La première composante est liée réversiblement (Rev. ΔH) à
la capacité calorifique (Cp), alors que la seconde est attachée à la cinétique d’une façon non-
réversible (NonRev. ΔH) [7].
La DSC modulée offre les mêmes possibilités que la DSC classique, ainsi que plusieurs
avantages supplémentaires dont :
- La séparation de transitions complexes en composantes plus facilement interprétables
(Rev et NonRev ΔH) ;
- L’augmentation de la sensibilité pour détecter de faibles transitions ;
32
- L’augmentation de la résolution sans perte de sensibilité…
Les mesures décrites dans cette thèse ont été réalisées sur une DSC Modulée Q200 de TA
Instruments, en utilisant une masse d’environ 10 mg de bitume placée dans des creusets
aluminium hermétiques avec couvercle scellé. L’échantillon a été purgé à l’azote liquide avec
un débit de 50 mL/min
Suite à la complexité et l’instabilité du bitume, 3 cycles de chauffage et de refroidissement de
-90 à 100°C ont été effectués, sans changer l’échantillon, avec une vitesse de chauffage de
5°C/min. Les valeurs de transition vitreuse (Tg) ont été déterminées sur le 2ème cycle de
chauffage, à partir du point d’inflexion du flux de chaleur réversible.
3.3. Microscopie électronique à balayage environnementale (MEBE)
La microscopie électronique à balayage environnementale est utilisée pour observer
essentiellement l’état de dispersion des sels introduits dans la matrice bitume, ainsi que
l’évolution de ces tailles selon les conditions opératoires d’extrusion (N, Q).
L’appareil utilisé est un FEI Quanta 200 ESEM FEG. Les mesures ont été effectuées à une
température de 4°C afin de maintenir l’enrobé bitume dans un état stable. Les images ont été
obtenues en mode électrons rétrodiffusés, avec une tension d’accélération de 15 kV et sous
pression de 90 Pa.
3.4. Spectroscopie Infrarouge à Transformée de Fourier (IRTF)
La Spectroscopie Infrarouge à Transformée de Fourier est basée sur l'absorption d'un
rayonnement infrarouge par le matériau analysé. L’IRTF permet de mesurer les absorbances
d’énergie des liaisons chimiques (fonctions alcool, acides, méthyles, méthylène…) de tous les
composants présents dans les produits analysés et de les corréler à leurs concentrations,
puisque l’intensité de l’absorption est directement proportionnelle à la concentration de la
molécule considérée.
Les spectres IRTF des différents bitumes présentent tous des bandes d’absorption dont les
attributions sont maintenant couramment admises. La Figure I.5 présente un spectre
infrarouge typique d’un bitume pur [9].
Figure I.5 Spectre FT--1 [9]).
33
Les différentes bandes présentées sur la Figure I.5 sont indiquées dans le Tableau 4.
Tableau 4 Les différentes bandes observées dans un bitume standard [9-11]
-1)
Attributions
3100 3640
Elongation O-H, N-H
3000 3100
Elongation C-H aromatiques
2780 3000
Elongation C-H aliphatiques
1640 1800
Elongation C=O
1590 1620
Elongation C=C aromatiques
1500 1320
Déformation C-H aliphatiques
1320 1270
Elongation O=S=O
1050 975
Elongation S=O
910 850
Déformation C-H aromatiques (1 CH isolé)
850 780
Déformation C-H aromatiques (2 CH adjacents)
780 730
Déformation C-H aromatiques (4 ou 5 CH adjacents)
730 690
Enchaînement au moins égal à 4 CH2
Les indices fonctionnels et structuraux ont été calculés à partir de l’aire de la bande mesurée
de vallée à vallée. Le choix a été établi sur les aires plutôt que les hauteurs de bandes, en
raison de plusieurs vibrations du même type simultanément prises en compte (par exemple la
bande de vibration C=O ester, acide et cétone est entre 1753 et 1635 cm-1).
D’après la littérature [9, 11], plusieurs indices ont été calculés à partir des aires de bande IR
présentées sur la Figure I.5 :
Indice d’oxydation : A1700/ ∑A
Indice d’aromaticité : A1600/ ∑A
Indice d’aliphaticité : (A1460 + A1376)/ ∑A
Indice de ramification A1376/ (A1460 + A1376),
Présence de groupe sulfoxyde (S=O) : A1030/ ∑A
C-H aromatiques (A874 + A809 + A747) / ∑A
La somme totale des aires est égale à : A = A1700cm-1 + A1600 cm-1 + A1460 cm-1 + A1376 cm-1
+ A1030 cm-1 + A874 cm-1 + A809 cm-1 + A747 cm-1 + A720 cm-1 + A2950 cm-1 + A2860 cm-1.
Les analyses ont été effectuées sur un appareil Nicolet 380 FT-IR fourni par la société
Thermo Electron. La cellule utilisée est en diamant. Les spectres sont obtenus avec une
résolution de 4 cm-1 et un nombre de balayage de 100.
3.5. Analyse thermique différentielle et Analyse Thermogravimétrique
(ATD/ATG)
Ces techniques permettent d’étudier les propriétés ou changement d’état en fonction de la
température et du temps.
L’ATD permet d’étudier les transformations internes des échantillons ou les réactions entre
l’échantillon et le milieu extérieur, le transfert de masse étant associé à une libération ou une
absorption d’énergie. Le principe de la méthode ATD consiste à chauffer dans une enceinte de
température programmée un échantillon actif et un échantillon témoin, en général inerte,
34
disposés symétriquement. Un dispositif à thermocouples mesure la différence de température
entre les deux échantillons.
La thermogravimétrie (ATG) est basée sur un pesage de la masse-échantillon.
La thermobalance permet de porter un solide à des températures déterminées, en enregistrant
les variations de masse en fonction du temps. On dispose de 3 variables, la masse m, le
temps t et la température T.
L’appareil utilisé est de type SDT 2960 simultaneous DSC-TGA de la société TA
Instruments. Les mesures ont été effectuées sous une pression d’azote de 120 mm de Hg,
en chauffant de la température ambiante jusqu’à 800°C, avec une vitesse de chauffe de
20°C/min. Le refroidissement de ce système se fait par l’utilisation d’air comprimé à 3 bars.
3.6. Analyse élémentaire des bitumes
La microanalyse élémentaire organique permet la détermination, à partir de prélèvements
analytiques de l’ordre du milligramme, de différentes teneurs élémentaires telles que le
carbone C, l’hydrogène H, l’azote N, l’oxygène O et le souffre S.
Ces analyses ont été réalisées au sein du Service Central d’Analyse à Solaize.
3.6.1. 
La détection de C et H se réalise par une combustion totale de l’échantillon (1 à quelques mg)
à 1050°C sous courant d’oxygène ou d’hélium/oxygène. Le carbone et l’hydrogène sont
respectivement transformés en dioxyde de carbone et en eau (C CO2, H →H2O). CO2 et
H2O sont quantifiés par des détecteurs spécifiques infrarouge et la précision de la mesure est
de l’ordre de ± 0,30%.
3.6.2. 
Elle se fait par combustion totale de l’échantillon à 1050°C sous courant d’hélium et
d’oxygène. L’azote est transformé en divers oxydes d’azote (NxOy). Les oxydes d’azotes sont
réduits en azote moléculaire sur cuivre à 450°C avant d’être quantifiés par catharométrie
(conductimétrie thermique). La limite de détection est de l’ordre de 0,10% et la précision de la
mesure est de ± 0,30%.
3.6.3. Déte
Un à quelques milligrammes de l’échantillon ont subi une pyrolyse totale à 1080°C sous
courant d’azote. L’oxygène des composés de pyrolyse est transformé en monoxyde de
carbone par passage sur du charbon actif à 1120°C, O + C → CO.
Le monoxyde de carbone est quantifié ensuite par un détecteur spécifique infrarouge.
La limite de détection est de l’ordre de 0,30% et la précision de la mesure est de ±0,30%.
3.6.4. Détermination du souffre
Elle se fait par combustion totale de l’échantillon à 1350°C sous courant d’oxygène. Le soufre
des échantillons est transformé en dioxyde de souffre (SO2). Le SO2 est quantifié à l’aide d’un
détecteur spécifique infrarouge.
35
3.7. Le fractionnement SARA
Comme il a été signalé précédemment, le bitume possède une structure colloïdale avec des
particules d’asphaltènes dispersées dans une matrice huileuse appelée Maltène. Cette dernière
est formée de trois familles d’hydrocarbures, les saturés, les aromatiques et les résines.
Le fractionnement SARA consiste à séparer ces quatre fractions [12].
Dans un premier temps, le bitume est dissout dans le n-pentane (1 g dans 40 mL) sous
agitation magnétique pendant 4 heures. Une filtration sur Buchner avec un filtre borosilicate
de porosité de 3 µm a lieu afin de séparer la partie soluble qui contient les maltènes de la
partie insoluble (asphaltènes). Ces derniers sont présents sous forme de poudre fine de couleur
marron clair.
Les maltènes sont ensuite fractionnés par chromatographie liquide sur colonne 300 × 8 mm
d’alumine particules = 0,063 - 0,2 mm) en fonction de leurs affinités pour divers supports
polaires, en diluant avec des solvants de polarités différentes. Avant chaque séparation SARA,
l’alumine est remplacée et activée à une température 180-200°C pendant 24 h.
La séparation a été effectuée sur une pompe HPLC 515 de la société Waters avec un débit de
1 mL/min. Un organigramme de notre fractionnement SARA est présenté dans la Figure I.6.
Une incertitude de ± 5 % est généralement admise pour ce type de séparation.
Figure I.6 Fractionnement SARA.
3.8. Chromatographie Exclusion Stérique (SEC)
La chromatographie d’exclusion stérique (SEC : Size Exclusion Chromatography ou GPC) est
une technique de séparation de molécules selon leur volume hydrodynamique en solution.
Cette technique est très largement utilisée pour déterminer les poids moléculaires et les
distributions massiques des polymères.
La séparation est réalisée en solution sur une colonne remplie d’une phase stationnaire
poreuse (polystyrène). Les molécules de tailles importantes ne pouvant pas entrer dans les
pores de la phase stationnaire sont éluées plus rapidement que les molécules de tailles plus
petites [13].
Pour relier le volume d'élution au poids moléculaire, il est nécessaire de calibrer l'instrument
avec des étalons de poids moléculaires connus. Dans notre cas, le polystyrène (12 masses
Bitume
Maltènes
Saturés Aromatiques Résines
Asphaltènes
n- pentane
n- hexane Toluène Toluène + Méthanol 50:50
36
moléculaires différentes) a été choisi. La courbe de calibration déterminée par les étalons est
ajustée par un polynôme d’ordre 3 (Figure I.7).
Figure I.7 
Il existe plusieurs types de systèmes permettant de détecter les molécules en sortie de
systèmes chromatographiques, à titre d’exemple un refractomètre différentiel ou un détecteur
ultraviolet [14].
Il est d’usage en SEC de représenter la courbe de distribution pondérale sur une échelle
logarithmique des masses molaires (Figure I.8).
Figure I.8 Paramètres de distributions massiques en SEC.
Mn est la masse de distribution en nombre, donnée par :
)6(Eq.
i
ii
nn
Mn
M
Mw est la distribution moyenne en masse ou en poids :
Courbe de calibration
Pic de toluène
Pic de solvant (THF)
1200
0
M / dLog (M)
Log Masse moléculaire (g/mol)
Mn
Mw
Mz
37
)7(Eq.
2
ii
ii
wMn
Mn
M
Mz est la distribution de masse centrifuge :
)8(Eq.
2
3
ii
ii
zMn
Mn
M
Finalement, Ip représente l’indice de polymolécularité :
)9(Eq.
n
w
pM
M
I
L’appareil utilisé est de type PL-GPC 50 plus de Polymer Laboratories, équipé avec un
passeur d’échantillon PL-AS RT. Il contient deux colonnes (300 × 7,5 mm) en série de
polystyrène (PLgel 5 µm) de la société Varian. Le tétrahydrofurane (THF) est le solvant
d’élution utilisé dans ces séparations, de part de sa polarité permettant de solubiliser à la fois
des composés aliphatiques polaires et non polaires ainsi que les composés polyaromatiques.
Les séparations ont été réalisées à une température de 35°C et avec un débit de 1mL/min de
THF. Cet appareil est connecté à un réfractomètre différentiel (RI) qui permet de détecter les
molécules en sortie des colonnes en jouant sur l’indice de réfraction entre la fraction séparée
et le solvant (THF).
Nous utilisons une calibration établie avec des échantillons de polystyrène (PS) dont les
masses exactes sont comprises entre 162 et 377400 g/mol.
La courbe de calibration établie avec le détecteur RI par les étalons de PS est ajustée par un
polynôme d’ordre 3 :
)10(Eq.603126,11324626,00187579,0000535,0)( 23 rrr tttMMLog
3.9. Diffraction des Rayons X (DRX)
Les mesures de diffraction des rayons X ont été effectuées sur un appareil D8 Advance with
Davinci design de la société Brucker, en utilisant la raie Cu-Kα de longueur d’onde
λ=1,5418 Ǻ. La source de rayon X est une source en cuivre alimentée par une tension de 40
kV et une intensité de 40 mA. Chaque balayage a été effectué avec un pas de 0,01 degré et un
temps de mesure d’une seconde par pas. La plage d’angle balayée est comprise entre 5 et
50°.
Les échantillons sont placés sur des portes échantillons en acier qui font 25 mm de diamètre et
0,3 mm d’épaisseur. Les mesures ont été effectuées à la température ambiante.
Tout d’abord, la distance entre les feuillets aromatiques (dm) a été estimée à partir du
maximum de la bande de graphène [15], en utilisant la relation de Bragg :
)11(Eq.
sin2
m
d
Ensuite, la hauteur moyenne de la pile de feuilles aromatiques perpendiculaire au plan (Lc) a
été calculée en utilisant la relation (formule de Scherrer) [16] :
38
)12(Eq.
cos
9,0
c
L
ω est la largeur de la bande graphène à mi-hauteur (FWHM).
Enfin, le nombre des feuillets aromatiques empilés (M) dans un cluster d’asphaltènes est
donné par la formule suivante :
)13(Eq.1
m
c
d
L
M
3.10. Diffusion des rayons X aux petits angles (SAXS)
Ce type de technique permet l’observation des caractéristiques structurales d’un matériau à
faible échelle (5-500 Ǻ). Ces expériences sont très sensibles à la différence entre les densités
électroniques des particules (asphaltènes) et du solvant (maltènes) [17].
Une expérience de diffusion consiste à générer des rayons X de longueur d’onde λ à partir
d’un générateur de rayons X. Les rayons passent alors successivement à travers un
monochromateur, puis un tube rempli d’hélium comportant plusieurs collimateurs, pour
ensuite traverser l’échantillon dans son épaisseur. Les rayons X vont être diffractés suivant un
angle et une intensité qui seront propres respectivement à la distance caractéristique et à la
densité électronique du milieu traversé. Un écran situé perpendiculairement à la source et à
une distance D de l’échantillon récupère l’image générée par la diffraction des rayons X
(Figure I.9).
L’image collectée sur l’écran permet alors de déterminer l’intensité dispersée I en fonction du
vecteur d’onde q, relié à l’angle de diffraction θ suivant l’équation :
)14(Eq.)(
4
sin
4anglespetitslespourq
)15(Eq.2tan2 D
x
et
avec x la distance sur l’écran par rapport au centre (x = np × taille d’un pixel = np × 150 µm).
Figure I.9 Schéma de la distance échantillon-détecteur.
L’intensité variant dès qu’il y a une légère fluctuation de densité électronique, ce vecteur
d’onde est également caractéristique de la microstructure de l’échantillon et l’on a :
)16(Eq.
2
d
q
avec d la distance considérée dans l’échantillon.
39
Pour les faibles q, la pente de la courbe log(I) par rapport au vecteur d’onde (q) renseigne sur
la forme des particules en suspension dans le milieu, ainsi que sur leur état de surface (lisse,
rugueux).
Ainsi, si l’intensité I décroît en q-4, c’est la significative de la présence d’interface nette. De
plus, les particules ont des interfaces parfaitement lisses et bien définis (régime de Porod). De
même, si I est proportionnelle à q-2, les particules ont une structure bidimensionnelle, ou
lamellaire (disque). Enfin, lorsque la courbe présente une pente en q-1, on est en présence de
structures unidimensionnelles, tubulaires par exemple.
L’expression théorique générale reliant l’intensité perçue par le détecteur au vecteur d’onde
est [18]:
)17(Eq.)()()1()( 2qSqFqI
S(q) est le facteur de structure, qui prend en compte les interactions entre particules.
Il tend vers 1 lorsque le système est dilué (pas d’interactions entre les particules) ;
F(q) est le facteur de forme normalisé (c'est-à-dire pour lequel F(0)=v, v : volume
caractéristique). Il dépend de la taille, de la forme et de l’indice interne de réfraction de la
distribution.
Δρ2 = [ bTh (de1-de2) ]², avec de1 et de2 les densités électroniques dans les milieux 1 et 2
respectivement, calculées d’après la composition chimique et la densité du milieu, et bTh le
coefficient de Thomson (bTh = 2,83.10-13 cm). bTh² représente l’intensité dispersée par un seul
électron. Δρ2 est appelé « terme de contraste » (Ǻ4).
L’hypothèse la plus couramment utilisée dans la littérature est l’approximation de Zimm [19],
valable pour les faibles q (qRg < 3, avec Rg le rayon de giration) :
)18(Eq.
3
1
)0(
1
)(
12
2
g
Rq
IqI
Ainsi, elle permet d’avoir accès au rayon de giration Rg en traçant 1/I(q) en fonction de q2. On
peut également connaître le volume des particules v en extrapolant vers les très faibles q,
connaissant le terme de contraste Δρ2 :
)19(Eq.
.)0(
)0( 2
I
F
Avec I(0) l’intensité au niveau du plateau à faible q lorsque le système est dilué.
Dans le cas des bitumes, si l’on considère que les agrégats d’asphaltènes sont des particules
de dimension fractale df et si l’échelle considérée est beaucoup plus grande que celle de la
taille des agrégats (qRg>1), alors on a:
)20(Eq.)0( f
d
qI
D’autre part, la dimension fractale des particules peut également être déduite des paramètres
propres aux agrégats calculés précédemment (Rg, A2 et Mw) puisque ces 3 paramètres sont
reliés entre eux par des lois de puissance [17]:
40
)21(Eq.
/1 f
d
wg MR
)22(Eq.
3
2
2f
d
w
MA
avec A2 le second coefficient du viriel, traduisant les interactions macromolécule-solvant.
La polydispersité de particules en suspension influence aussi fortement la dispersion des
rayons X. En régime dilué, l’expression générale peut s’écrire :
)23(Eq.)()( 2
kkkk qFnqI
nk et νk sont respectivement le nombre et le volume de chaque entité.
Le calcul des densités électroniques des deux milieux (asphaltènes et maltènes) est
indispensable pour trouver le facteur de contraste :
Δρ2 = [ bTh (de Asph - de Malt) ]² avec (bTh)2 = 7,9×10-26 cm2 représente l’intensité dispersée par
un seul électron
Les densités électroniques sont calculées selon :
)24(Eq..
.. Th
wi
Aii
ei b
MNZd
d
avec Zi est le nombre moyen d’électrons, di la densité du milieu, Mw est la masse molaire
moyenne, NA est le nombre d’Avogadro (NA = 6,022 × 1023 mol-1).
Les valeurs utilisées sont répertoriées dans le Tableau 5.
Tableau 5- Densité et masse molaire moyenne des asphaltènes et maltènes
Densité (g.cm-3)
Masse molaire
moyenne (g.mol-1)
Asphaltènes
1,17
3000
Maltènes
0,97
900
Les nombres moyens d’électrons
i
Z
ont été calculés d’après l’analyse élémentaire des
asphaltènes et des maltènes (Tableau 6):
Tableau 6- Fractions massiques et molaires des éléments chimiques dans les asphaltènes et les maltènes
Elément
C
H
O
N
S
Dans les
asphaltènes
Fraction massique xj
0,8013
0,0772
0,0206
0,0092
0,0532
Fraction molaire yj
0,452
0,523
0,0087
0,0045
0,0113
Dans les
maltènes
Fraction massique xj
0,8555
0,1233
0,0035
0,0033
0,0143
Fraction molaire yj
0,478
0,5993
0,0024
0,0013
0,0068
41
Le calcul de
i
Z
donne :
jjj
iZyZ .
avec i l’élément chimique considéré.
On obtient alors
asph
Z
= 6,515 et
malt
Z
= 6,612
et des densités électroniques : de, asph = 1,52 × 1021 cm-3 et de, malt = 4,31 ×1021 cm-3,
qui permettent de calculer un facteur de contraste Δρ2 de 6,27 × 1017 cm-4 (ou (cm/cm3)²),
soit 6,27 × 10-15 Å-4.
Les mesures de diffusion X ont été effectuées sur un spectromètre à l’Institut de Chimie
Séparative de Marcoule (ICSM). La gamme de q explorée se situe entre 2×10-2 et 2 Ǻ-1. La
source de Molybdène fournit des rayons X de longueur d’onde λ = 0,711 Å. Un miroir à la
sortie de la source permet d’orienter les rayons X incidents de façon parallèle et dans l’axe de
l’appareil. Les rayons X vont traverser deux collimateurs avant d’atteindre l’échantillon.
L’épaisseur de celui-ci est de 2 mm ou 3 mm. Les rayons diffusés à travers l’échantillon
viennent alors exciter les cellules d’Europium du récepteur. Les données sont recueillies en
effectuant un comptage au niveau de l’écran des excitations qui ont eu lieu pendant un temps
donné, à l’aide d’un faisceau laser qui quantifie le niveau d’excitation de la cellule et la
désexcite. Pour traiter les données, la surface de cet écran est subdivisée en 2400 x 2400
pixels de 150 µm de côté, auxquels on associe une intensité moyenne reçue pendant le temps
d’acquisition de la mesure.
Avant de traiter les données, on procède à l’ajustement de la distance détecteur-échantillon D.
Pour cela, on réalise le test avec une cellule contenant du sel d’argent dont on connaît la
position du premier pic (qui a lieu pour qréf = 1,076) ainsi que la distance Dréf de 749 mm.
Le logiciel Fit2D a été utilisé pour convertir les données d’intensité en fonction de X et Y de
l’écran en une seule fonction de x et donc de q (équations (14) et (15)). Pour cela, il est
nécessaire de déterminer à l’aide de ce même logiciel les coordonnées du centre du faisceau,
calculées par intégration, après avoir appliqué un masque permettant de s’affranchir des bruits
au centre du faisceau, autour de celui-ci, et de la tige en plomb, cette dernière servant à
masquer l’intensité trop importante des faisceaux directs (non déviés).
Une fois ces opérations effectuées, on dispose alors de la courbe de l’intensité I en fonction du
vecteur d’onde q. Un zoom sur la partie qui nous intéresse permet d’observer la
microstructure à différentes échelles.
L’intensité brute a cependant besoin d’être corrigée. Elle ne tient pas compte en effet ni du
background du signal d’intensité IBG (ou bruit de fond du détecteur, qui vaut 8 cm-1), ni de la
valeur de la transmission T, ni du temps d’acquisition taq (fixé à 1800 sec pour chaque
mesure). Il faut également retrancher à cette intensité le signal dû aux feuilles de kapton
(polymère à base d’imide) fixées de part et d’autre de l’échantillon. Enfin, il reste à prendre
en considération l’épaisseur de l’échantillon traversée, qui n’est pas la même pour chaque
échantillon. Pour toutes ces raisons, l’intensité corrigée est donnée par :
)25(Eq.
1
acq
BGCV
acq
BGéch
corr tT II
tT II
e
I
42
avec e l’épaisseur de l’échantillon, ICV l’intensité obtenue avec la cellule vide (qui ne
comporte que les films de kapton), IBG l’intensité du background, T la transmission et tacq le
temps d’acquisition.
3.11. Microtomographie X
C’est une technique non destructive qui permet la reconstruction d’images en coupe d’un
objet à 3 dimensions utilisant une source de rayons X. Elle permet de visualiser la structure
d’un objet en 3D avec une résolution très fine, de l’ordre de 20 µm pour les dimensions
d’échantillons et le tomographe utilisés pour notre étude.
L’appareil utilisé est un Phœnix Nanotom M, de GE Inspection Technologies. Le principe
réside dans l’émission d’un faisceau de rayon X (150 kV) qui traverse l’objet à analyser,
monté sur un porte échantillon tournant. Les faisceaux transmis sont reçus par un détecteur
(pixels). Ces images additionnées vont être analysées et reconstituées grâce au logiciel
VGStudio Max 2.1 développé par la société GE Inspection [20]. La Figure I.10 présente une
schématisation du principe de la microtomographie X.
Figure I.10 -  [21]).
L’intérêt de l’utilisation de cette technique est de visualiser les endommagements résultant de
l’irradiation γ sur la structure interne du bitume, surtout sur la visualisation des bulles
d’hydrogènes créées. Le premier objectif est d’estimer la distribution de taille de ces bulles
suivant les conditions d’irradiation (dose et débit de dose) et suivant la composition de
l’échantillon (bitume pur ou enrobés). Dans un deuxième temps, le devenir des bulles
générées sous radiolyse en fonction du temps a été analysé pour quantifier les mécanismes
d’évacuation.
43
4. Bibliographie du chapitre 1
[1] Total, "Azalt 70/100," Raffinerie TOTAL de Normandie Gonfreville l'Orcher, N°= EN
12591 (2010).
[2] C. Moulin, "Expertise tensioactif," CEA SaclayN°= LSRM 03-290 (2003).
[3] J.-F. Agassant, P. Avenas, J.-P. Sergent, B. Vergnes, M. Vincent, "La mise en forme
des matières plastiques", Lavoisier (1996).
[4] W. Lertwimolnun, "Réalisation de nanocomposites polypropylène/argile par extrusion
bivis", Thèse de Doctorat, Ecole Nationale Supérieure des Mines de Paris (2006).
[5] Curie, "Encyclopædia Britannica", (2011).
[6] A. Durmus, A. Kasgoz, C. W. Macosko, "Linear low density polyethylene
(LLDPE)/clay nanocomposites. Part I: Structural characterization and quantifying clay
dispersion by melt rheology", Polymer, 48: 4492-4502 (2007).
[7] L. Thomas, J. Cattiaux, M. Chahinian, "Principe et avantages de la DSC ModuléeTM :
Application à la mesure de la cristallinité initiale des polymères", Spectra. Analyse,
195: 31-33 (1997).
[8] D. Lesueur., "The colloidal structure of bitumen: Consequences on the rheology and
on the mechanisms of bitumen modification", Adv. Inter. Sci. Colloid, 145: 42-82
(2009).
[9] J. Lamontagne, P. Dumas, V. Mouillet, J. Kister, "Comparison by Fourier transform
infrared (FTIR) spectroscopy of different ageing techniques: application to road
bitumens", Fuel, 80: 483-488 (2001).
[10] R. Scotti, L. Montanari, "Molecular Structure and Intermolecular Interaction of
Asphaltenes by FT-IR, NMR, EPR", in Structure and Dynamics of Asphaltenes, O. C.
Mullins and E. Y. Sheu., New York: Plenum Press, 79-113 (1998).
[11] V. Mouillet, J. Lamontagne, F. Durrieu, J.-P. Planche, L. Lapalu, "Infrared
microscopy investigation of oxidation and phase evolution in bitumen modified with
polymers", Fuel, 87: 1270-1280 (2008).
[12] ASTM Standard D 4124 - 09, Standard Test Method for Separation of Asphalt into
Four Fractions (2009).
[13] C. Lorentz, "Caractérisation de carburants alternatifs par chromatographie d’exclusion
stérique et résonance magnétique nucléaire", Thèse de Doctorat, Conservatoire
National des Arts et Métiers, Centre régional associé de Lyon, (2010).
[14] K. A. Ferworn, W. Y. Svrcek, "Characterization and Phase Behavior of Asphaltenic
Crude Oils", in Structure and Dynamics of Asphaltenes, O. C. Mullins and E. Y. Sheu,
New York: Plenum Press, 227-246 (1998).
[15] R. Tanaka, E. Sato, J. E. Hunt, R. E. Winans, S. Sato, T. Takanohashi,
"Characterization of Asphaltene Aggregates Using X-ray Diffraction and Small-Angle
X-ray Scattering", Energy & Fuels, 18: 1118-1125 (2004).
[16] A. Patterson, "The Scherrer Formula for X-Ray Particle Size Determination", Phys.
rev. A, 56: 978-982 (1939).
[17] C. Pierre, L. Barre, A. Pina, M. Moan, "Composition and Heavy Oil Rheology", Oil
& Gas Science and Technology - Rev. IFP, 59: 489-501 (2004).
[18] T. Zemb, P. Lindner, "Neutron, X-rays and Light. Scattering Methods Applied to Soft
Condensed Matter", Amsterdam, Elsevier (2002).
[19] B. H. Zimm, "The scattering of light and the radial distribution function of high
polymer solutions", J. Chem. Phys, 16: 1093-1099 (1948).
44
[20] O. Brunkea, K. Brockdorf, S. Drews, B. Müller, T. Donath, J. Herzen, F. Beckmann,
"Comparison between X-ray tube based and synchrotron radiation based μCT", The
International Society for Optical Engineering, San Diego CA , Etats-Unis (2008).
[21] T. Donath, "Quantitative X-ray Microtomography with Synchrotron Radiation,"
Institute of Materials Research, Geesthacht N°= GKSS 2007/17 (2007).
45
CHAPITRE
2
47
Chapitre 2 Caractérisation rhéologique et
thermique du bitume 70/100
Nous nous intéressons dans ce chapitre à la caractérisation rhéologique et thermique du
bitume 70/100.
Dans un premier temps, nous présenterons les caractéristiques physico-chimiques de ce
matériau.
Dans l’objectif de prédire l’évolution du comportement des colis bitumineux en fonction du
temps, il est nécessaire de caractériser très précisément le comportement rhéologique de la
matrice bitume. C’est la raison pour laquelle la deuxième partie de ce chapitre sera consacrée
à l’étude rhéologique détaillée de ce matériau. Des analyses thermiques par calorimétrie sont
ensuite réalisées pour une compréhension plus profonde du matériau d’une part, et pour
confirmer les résultats obtenus en rhéologie d’autre part.
Pour finir, ce chapitre présente l’état d’avancement des études menées sur le suivi de la
vitesse de migration ascensionnelle des bulles de gaz dans le bitume pur, sous l’effet de la
poussée d’Archimède.
48
Table des matières chapitre 2
1. Caractéristiques physico-chimiques du bitume « Azalt 70/100 » ................................ 49
1.1. Composition élémentaire et par famille ............................................................. 49
1.1.1. Asphaltènes ..................................................................................................... 51
1.1.2. Maltènes .......................................................................................................... 52
1.2. Spectroscopie Infra-rouge du bitume 70/100 ..................................................... 52
1.3. Diffusion des rayons X dans le bitume 70/100 (SAXS) .................................... 53
2. Caractérisation rhéologique et thermique du bitume 70/100 ....................................... 55
2.1. Description générale du comportement rhéologique du bitume ........................ 55
2.2. Effet de la contrainte appliquée sur le comportement rhéologique .................... 57
2.3. Influence de la température sur le comportement rhéologique .......................... 59
2.4. Caractérisation du bitume comme un fluide à seuil ........................................... 61
2.5. Loi de comportement rhéologique globale et modèle ........................................ 64
2.6. Caractérisation de la microstructure du bitume par des analyses thermiques .... 67
2.6.1. Détermination de Tg par DSC conventionnelle .............................................. 68
2.6.2. Détermination de Tg par DSC modulée .......................................................... 69
2.7. Importance d’une contrainte seuil dans le cas du bitume ................................... 71
2.7.1. Calcul de la vitesse de migration des bulles ................................................... 71
2.7.2. Mesures de la vitesse de migration des bulles ................................................ 72
3. Bilan de ce chapitre ...................................................................................................... 76
4. A retenir du chapitre 2 .................................................................................................. 77
5. Bibliographie du chapitre 2 .......................................................................................... 78
49
1. Caractéristiques physico-chimiques du bitume « Azalt
70/100 »
1.1. Composition élémentaire et par famille
L’analyse élémentaire du bitume 70/100 utilisé dans cette étude donne les résultats référencés
dans le Tableau 7.
Ce bitume est caractérisé par un contenu en hydrogène-carbone élevé (> 90%) et le rapport
H/C est autour de 1,45. Ce rapport est intermédiaire entre une structure aromatique (benzène
H/C = 1) et les cycloalcanes saturés (H/C = 2).
Tableau 7- Composition élémentaire du bitume « Azalt 70/100 » (en % massique).
Eléments
C
H
O
N
S
Métaux (ppm)
V
Ni
Fe
Teneur
84,7
10,23
0,53
1,33
4,35
116
37
100
La teneur en oxygène est faible (0,53%) alors que la teneur en soufre est relativement élevée,
ce qui offre au bitume un caractère sensible à l’oxydation [1].
Suite aux analyses élémentaires réalisées sur les asphaltènes et les maltènes, il a été remarqué
que les hétéroatomes et les métaux se localisent principalement dans les asphaltènes, avec un
pourcentage supérieur à 70% et 90% respectivement. Le rapport H/C est de l’ordre de 1,16
et 1,54 pour les asphaltènes et les maltènes, respectivement.
Pour ce qui est de la composition par familles génériques, la séparation SARA donne les
résultats listés dans le Tableau 8.
Tableau 8- Composition fractionnelle du bitume 70/100.
Famille
Saturés
Aromatiques
Résines
Asphaltènes
Teneur massique (%)
30,4
31,9
13,5
23,6
La chromatographie d’exclusion stérique (SEC) équipée avec un réfractomètre (RI) a été
utilisée pour quantifier la distribution en masse des différentes familles génériques (Figure
II.1). On constate l’existence de plusieurs composantes pour une même famille. La calibration
a été établie avec des échantillons de polystyrène (PS) dont les masses exactes sont comprises
entre 162 et 377400 g/mol.
50
Figure II.1 Elugrammes obtenus pour les 4 familles du bitume (en noir) et déconvolutions gaussiennes (en rouge).
La séparation des différentes composantes dans une même famille a été effectuée par
déconvolution gaussienne. Le Tableau 9 présente un récapitulatif des masses (Mn et Mw)
obtenues par SEC-RI. Nous remarquons que les masses moléculaires moyennes évoluent de la
façon suivante : Msat < Maro < Mrés < Masph.
Tableau 9- Masses moléculaires moyennes en nombre (Mn) et en poids (Mw) pour les fractions du bitume.
Famille
Mn (g/mol)
Mw (g/mol)
Ip
Saturés
1110
1383
1,25
317
339
1,07
Aromatiques
1256
2465
1,96
284
291
1,03
Résines
5612
7961
1,42
1744
3643
2,09
287
292
1,02
Asphaltènes
227550
493800
2,17
67490
500150
7,41
717
783
1,09
275
285
1,04
600 750 900 1050 1200
0
20
40
60
80
I (mV)
Temps de rétention (sec)
Asph_2MGy
900 1000 1100 1200
0
10
20
30
I (mV)
Temps de rétention (sec)
Rés_0MGy
900 1000 1100 1200
0
10
20
30
I (mV)
Temps de rétention (sec)
Aro_0MGy
Aromatiques
Asphaltènes
Résines
900 1000 1100 1200
0
10
20
30
40
I (mV)
Temps de rétention (sec)
Saturés 0 MGy
Saturés
51
1.1.1. Asphaltènes
Dans la littérature, beaucoup d’études se sont focalisées sur les asphaltènes car on leur confère
souvent les propriétés viscosantes des bitumes. La structure des asphaltènes est souvent
schématisée par le modèle de Yen. Yen et al. [2] ont suggéré l’existence de quatre entités
différentes dans la macrostructure d’asphaltène. Ces entités sont attribuées à une molécule
élémentaire, la particule, la micelle et enfin l’agrégat.
Tout d’abord, la structure de la molécule est similaire à celle présentée sur la Figure II.2-a et
constituée schématiquement d’une région aromatique connectée à des chaînes aliphatiques.
Leurs masses moléculaires sont dans la gamme 1000 4000 g/mol.
Ensuite, les particules se forment par l’empilement des molécules aromatiques planaires,
probablement par des liaisons π-π ou bandes d’hydrogène (Figure II.2-b). Ces particules
possèdent une masse entre 4000 et 104 g/mol. Les particules peuvent ensuite s’associer pour
former des micelles de masse moléculaire entre 4×104 et 4×107 g/mol. Enfin, les micelles
s’arrangent entre elles pour former de larges agrégats [3].
Figure II.2 Structure des asphaltènes selon Yen et al. [2] (a) vue en coupe transversale où La est le diamètre du
feuillet aromatique, dm et dγ sont respectivement les distances entre les feuillets aromatiques et les chaînes aliphatiques
périphériques, L 
et al. [3]).
Le modèle de Yen a récemment été complété et raffiné par Mullins [4]. Ce modèle est
présenté sur la Figure II.3. L’architecture dominante d’une molécule d’asphaltènes est
représentée par des hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP) branchés par des chaînes
d’alcanes. Les HAP sont le 1èr site des attractions intermoléculaires et ils sont polarisables
grâce à la présence des hétéroatomes dans ces molécules. La dimension d’un feuillet
aromatique est comprise entre 0,7 et 1 nm [5].
Ces molécules peuvent former un nano-agrégat d’asphaltènes, formé par l’empilement des
HAP avec un nombre moyen de 6. Ces nano-agrégats peuvent s’arranger pour former des
clusters d’agrégats. Au-delà de cette structure, les clusters d’asphaltènes ne peuvent plus
croître et le nombre maximal de nano-agrégats est estimé à huit par agrégat. Ce modèle a été
justifié par de nombreuses techniques expérimentales et il fournit un cadre de traitement d’un
grand nombre d’études diverses.
(a) (b)
52
Figure II.3 Modèle de Yen modifié -

Mullins [4]).
1.1.2. Maltènes
Les maltènes se comportent comme un fluide parfaitement visqueux (fluide newtonien).
Trois familles constituent les maltènes :
Les huiles saturées : ce sont les alcanes, les cycloalcanes qui possèdent un poids
moléculaire compris entre 300 et 2000 g/mol. Ce sont de longues chaînes paraffiniques, iso et
cycloparaffiniques. Leur rapport H/C vaut environ 2.
Les huiles aromatiques : ce sont des hydrocarbures naphtaléniques. Il s’agit des
fractions majoritaires (entre 30 et 55% en masse) qui sont en grande partie responsables de la
transition vitreuse du bitume avec les saturés non cristallisés. Le rapport H/C est de l’ordre de
1,4 1,5.
Les résines : Elles sont également appelées aromatiques polaires. Leur structure se
rapproche de celle des asphaltènes mais leur masse molaire est plus faible. Elles contiennent
en proportion plus de composés oxygénés et soufrés que les composés précédents. Leur
rapport H/C se situe entre 1,38 et 1,69. Leurs fonctions polaires leur confèrent un rôle
tensioactif à la surface des agglomérats d’asphaltènes, assurant ainsi la stabilité de la
dispersion colloïdale de ces derniers dans la matrice maltène.
1.2. Spectroscopie Infra-rouge du bitume 70/100
Un spectre infra-rouge typique du bitume 70/100 est présenté sur la Figure II.4. Comme cela a
été détaillé dans le chapitre « Matériaux et Méthodes », plusieurs indices ont été calculés à
partir des zones des bandes IR de la Figure II.4.
Les différents indices caractérisant le bitume 70/100 sont listés dans le Tableau 10.
Tableau 10 Valeurs des différents indices caractérisant le bitume 70/100.
Indice
Iaromaticité
Ialiphaticité
Isubistitution
C-H
aromatiques
sulfoxyde
Valeur
0,048
0,276
0,147
0,061
0,018
asphaltène Nano-agrégat
asphaltène Cluster de
nano-agrégats

(a) (b) (c)
53
Sur ce spectre, nous observons l’apparition d’une bande peu large centrée à 1600 cm-1
caractérisant la contribution C=C aromatiques. Ce bitume ne possède pas de bande à
1700 cm-1 caractérisant les carbonyles. Ces bandes sont plutôt observées dans les cas de
bitumes oxydés ou soufflés comme le R85/40. Par contre, une bande centrée à 1030 cm-1 est
visible, attribuée à la présence de sulfoxydes S=O. L’intensité de cette bande est
proportionnelle à la teneur en soufre dans le bitume.
Figure II.4 Spectre FT-IR typique du bitume 70/100.
L’aliphaticité de ce bitume est représentée par 2 pics, centrés à 1452 et 1373 cm-1.
Une troisième bande caractérise également l’aliphaticité du bitume, plus spécialement les
chaînes aliphatiques qui possèdent plus de 4 CH2 consécutifs. Ces chaînes sont attribuées aux
ramifications greffées sur le cycle aromatique. Enfin, les C-H aromatiques sont représentés
par 3 bandes placés à 874 cm-1 (4 à 5 C-H adjacents), 809 cm-1 (2 C-H adjacents) et 747 cm-1
(C-H isolé).
1.3. Diffusion des rayons X dans le bitume 70/100 (SAXS)
Les expériences de SAXS ont la capacité de fournir des informations sur une gamme de
vecteur d’onde (q) située entre 0,02 et 2 Å-1. A partir d’une courbe de SAXS, nous pouvons
tirer deux informations : une sur la dimension fractale à faible q et la seconde sur le taux de
cristallinité aux q élevés.
Après correction de l’intensité I, on obtient les données représentées sur la Figure II.5.
La dimension fractale df, pente de la courbe représentant I en fonction de q sur des échelles
logarithmiques, vaut 1. La valeur obtenue signifie que les asphaltènes présentent des
structures unidimensionnelles (bâton, filament (R << L)) [6].
720
747
809
874
1030
1373
1452
1591
1699
2845 2916
3057
*bitume pur 10-02-2010
0,00
0,05
0,10
0,15
0,20
0,25
0,30
0,35
0,40
0,45
0,50
Ab s o r ba n c e
600 800 1000 1200 1400 1600 1800 2000 2000 2500 3000 3500
W ave nu m be rs ( cm-1 )
54
Figure II.5 Intensité en fonction du vecteur d'onde q obtenu par SAXS pour le bitume 70/100.
A q plus élevé, la bosse amorphe est située entre 0,67 Å-1 et 2,37 Å-1, soit pour des distances
caractéristiques entre 9,38 Å et 2,65 Å. Sur cette bosse amorphe, deux pics cristallins sont
présents pour q = 1,54 Å-1 et q = 1,72 Å-1, soit pour des distances caractéristiques (dm) de
4,08 Å et de 3,66 Å. Ces distances sont attribuées à la distance entre les feuillets aromatiques
d’une molécule d’asphaltènes et sont en parfaite cohérence avec les données de la littérature
[3, 4, 7].
D’autre part, on peut obtenir une première idée de la taille des « disques » formés par les
feuillets en traçant la fonction représentant le facteur de forme, fonction de q et de la
géométrie. Si l’on considère le modèle le plus simple qui est celui de sphères de rayon R,
on utilise la fonction de facteur de forme [8] ci-dessous :
   
 
 
1)(Eq.
cossin3
),(
2
3
qR
qRqRqR
RqF
avec R est le rayon des sphères uniformes. La courbe en pointillés bleues sur la Figure II.6
représente cette fonction (après l’avoir ajustée à l’aide d’un coefficient permettant de la faire
glisser de façon verticale). Le rayon R qui permet d’ajuster au mieux la courbure de cette
courbe modèle à celle des données obtenues est de 40 Å, ce qui correspond au rayon des
feuillets d’asphaltènes. Cette valeur est incluse dans la gamme des dimensions proposée dans
littérature (entre 2 et 8 nm) [9].
D’autre part, on note que la courbe représentant les données présente une courbure plus
arrondie, signe d’une géométrie oblate des feuillets, correspond à une géométrie de type
disque bâtonnet [6].
0,01 0,1 110
0,01
0,1
1
10
I (cm-1)
q (A°-1)
-1
11,5 2
0,1
I (cm-1)
q (A°-1)
3,66 Å4,08 Å
55
Figure II.6 Intensité en fonction du q pour les données de SAXS expérimentales (trait plein) et le
modèle théorique sphérique (pointillés).
2. Caractérisation rhéologique et thermique du bitume 70/100
2.1. Description générale du comportement rhéologique du bitume
La plupart des caractérisations rhéologiques listées dans cette partie ont été effectuées en
mode dynamique sur un rhéomètre à contrainte imposée (AR-G2 TA instruments). Dans un
premier temps, nous avons effectué, dans le domaine de linéarité, des balayages en fréquence
à des températures allant de 22 à 90°C.
Quelle que soit la température, le comportement viscoélastique général du bitume est le même
(Figure II.7). Dans toute la gamme de fréquence angulaire (ω), le module visqueux (G’’) est
toujours supérieur au module élastique (G’) à une contrainte appliquée de 100 Pa. Les pentes
mesurées sur G’’ et G’ à basse fréquence sont proches de 1 et 2, respectivement. A première
vue, le bitume se présente donc comme un fluide viscoélastique maxwellien classique.
Figure II.7 Modules élastiques G’ et visqueux G’’ en fonction de la pulsation à différentes températures.
10-2 10-1 100101
10-3
10-1
101
I (cm-1)
q -1)
Bitume 0 MGy
Modélisation sphère
10-3 10-2 10-1 100101102
10-5
10-2
101
104
G' 30°C
G" 30°C
G' 50°C
G" 50°C
G' 70°C
G" 70°C
G', G" (Pa)
Fréquence angulaire (rad/s)
2
1
56
Il est possible de constituer une courbe maîtresse à Tréf par simple glissement des courbes de
balayage en fréquence à ces différentes températures. Le coefficient de glissement aT peut être
introduit de la façon suivante :
2)(Eq.
)( )(
réf
TTT
a
λ est un temps caractéristique. Dans le domaine Tg Tg + 100°C, la dépendance en
température de aT est usuellement décrite par la relation Williams-Landel-Ferry (WLF) [10]:
3)(Eq.
)(
)(
0
2
0
1
réf
réf
TTTC
TTC
aLog
Figure II.8 Superposition des modules élastiques G’ et visqueux G’’ en fonction de la pulsation réduite (ω*aT) à Tréf
= 50°C.
Les coefficients C01 et C02 dépendent du matériau et aussi du choix de la température Tréf. Le
produit C01C02 est de l’ordre de 900 ± 100 pour les bitumes, selon Jongepier et Kuilman
[11, 12].
Le principe d’équivalence temps-température (PETT) présenté sur la Figure II.8 semble
s’appliquer parfaitement dans le cas du bitume pur, malgré les petites différences observées
sur G’.
Les valeurs des coefficients C01 et C02 de l’équation WLF sont respectivement 8,53 et 115,6 à
Tréf = 50°C et par conséquent le produit C01C02 vaut 986. Cette valeur montre une grande
cohérence avec la gamme de valeurs proposées dans la littérature [11, 12]. A partir des
valeurs du facteur de glissement aT, il est possible de tracer un diagramme d’Arrhenius qui est
présenté dans la Figure II.9. L’énergie d’activation du système vaut 155 kJ/mol.
10-2 100102104
10-5
10-2
101
104
G' 30°C
G" 30°C
G' 50°C
G" 50°C
G' 70°C
G" 70°C
G', G" (Pa)
Fréquence angulaire réduite (rad/s)
57
Figure II.9  aT en fonction de 1/T) 
2.2. Effet de la contrainte appliquée sur le comportement rhéologique
Sur la Figure II.8, le PETT semble applicable à une contrainte appliquée de 100 Pa.
Récemment, une étude effectuée par Meyer et ses collaborateurs [13] sur l’étude du
comportement du bitume suggère la présence d’un phénomène de relaxation à basse
fréquence, phénomène d’autant plus marqué que la contrainte appliquée est faible.
La Figure II.10 montre l’évolution des modules de stockage ou d’élasticité (G’) et de perte ou
visqueux (G’’) par rapport à la fréquence angulaire à trois contraintes appliquées (1, 10 et 50
Pa) et à une température de 50°C. Quelle que soit la contrainte appliquée, le module visqueux
est toujours plus élevé que le module élastique et les valeurs de G’’ sont parfaitement
superposables.
Figure II.10 Effet de la contrainte appliquée sur le comportement du bitume à T= 50°C.
0,0028 0,0030 0,0032 0,0034
-6
-3
0
3
6
9
ln aT
1/T (K)
10-3 10-2 10-1 100101102
10-4
10-2
100
102
104
106
G' 1 Pa
G" 1 Pa
G' 10 Pa
G" 10 Pa
G' 50 Pa
G" 50 Pa
G', G" (Pa)
(rad/s)
58
Cependant, une différence sur G’ à basse fréquence est clairement observée : un plateau tend
à se développer quand la contrainte appliquée diminue. Meyer et al. [13] attribuent
l’apparition de ce plateau à un processus de relaxation due à l’existence d’agrégats
d’asphaltènes. A faible contrainte et faible fréquence, les agrégats d’asphaltènes ont
suffisamment le temps de se relaxer, ce qui conduit à un plateau au niveau du module
élastique. Par contre, avec une contrainte élevée, ces particules vont se déstructurer et ce
plateau est invisible.
Contrairement à cette explication, nous suggérons que la dislocation de la structure est due à
une augmentation de la déformation due à la contrainte appliquée. En effet, la Figure II.11
présente l’évolution en mode dynamique des modules G’ et G’’, ainsi que la déformation à
une contrainte appliquée de 10 Pa.
En balayage en déformation, le domaine viscoélastique linéaire à 10 Pa possède une
déformation critique de 0,86. Par conséquent, deux régions peuvent être distinguées sur la
Figure II.11 : la région à haute fréquence où les propriétés viscoélastiques du bitume sont
mesurées dans le domaine linéaire et la région à basse fréquence où les mesures sont
effectuées hors du domaine linéaire.
Figure II.11 Existence des domaines linéaires et non-linéaires à une contrainte appliquée de 10 Pa.
La fréquence critique, à la transition linéaire non linéaire, dépend de la contrainte appliquée.
Ces valeurs à 50°C sont de 10-3, 1,2 ×10-2 et 6,3 ×10-2 à 1, 10 et 50 Pa respectivement.
En effet, la fréquence critique est directement proportionnelle à la contrainte appliquée :
4)(Eq..*..* ccc
G
Puisque γc est constant (0,86) à 50°C, quelle que soit la contrainte appliquée, ainsi que la
viscosité complexe, une contrainte imposée dix fois plus importante conduit évidement à une
fréquence critique dix fois plus élevée.
Aubry et ses collaborateurs [14] suggèrent que le travail nécessaire pour casser les connexions
entre les agrégats dans un nanocomposite est la quantité d’énergie stockée à la déformation
critique. Cette énergie est donnée par :
10-3 10-2 10-1 100101102
10-4
10-3
10-2
10-1
100
101
(rad/s)
(-)
G''
G'
Domaine linéaire
= 0,86
1,2*10-2
10-4
10-2
100
102
104
G', G" (Pa)
59
5)(Eq..'
2
12
0c
GE
avec G’0 la valeur du plateau à ωc. A une déformation inférieure à γc et à haute fréquence,
l’énergie fournie n’est pas suffisante pour rompre les agrégats d’asphaltènes, mais le temps
d’observation est trop court pour visualiser l’agrégation des asphaltènes (absence de plateau).
Au contraire, à faible fréquence angulaire, le temps d’observation est suffisant long pour
détecter la présence d’un cluster d’asphaltènes (apparition d’un plateau), mais, à déformation
élevée, l’énergie est assez grande pour dégrader la structure. C'est la raison pour laquelle un
plateau à basse fréquence est observé uniquement à faible contrainte appliquée.
Par conséquent, nous pouvons dire que les données mesurées à basse fréquence avec un
rhéomètre à contrainte imposée doivent être soigneusement examinées, sauf s’il est piloté en
mode déformation.
2.3. Influence de la température sur le comportement rhéologique
En se basant sur les résultats obtenus ci-dessus, le comportement rhéologique du bitume a été
reconsidéré en imposant une déformation.
La Figure II.12-a présente les évolutions de G’ et G’’ en fonction de la pulsation à trois
températures 22, 50 et 70°C. La pente sur G’ à faible fréquence est égale à 1. Cependant,
un plateau sur G’ est observé à 50 et 70°C. Nous remarquons que plus la température
augmente, plus le plateau sur G’ apparaît rapidement. Le PETT a été appliqué à une Tréf de
50°C et une courbe maîtresse est obtenue (Figure II.12-b).
L’existence du plateau à faible fréquence a été vérifiée par d’autres expériences aux mêmes
températures mais avec des conditions différentes : à 50°C, les essais ont été répétés mais sur
une gamme de fréquence allant jusqu’à 10-4 rad/s : un plateau est obtenu et qui est
parfaitement superposable avec le résultat présenté ci-dessus. L’utilisation d’une géométrie
plan-plan de diamètre 50 mm à 70°C confirme également la présence et la superposition de ce
plateau à faible pulsation.
Figure II.12 (a) Evolution des modules élastiques G’ et visqueux G’’ en fonction de la pulsation à différentes
-température à Tréf = 50°C en mode
de déformation.
10-2 10-1 100101102
10-2
100
102
104
106
G' 22°C
G" 22°C
G' 50°C
G" 50°C
G' 70°C
G" 70°C
G', G" (Pa)
(rad/s)
10-4 10-2 100102104106
10-2
100
102
104
106
G' 22°C
G" 22°C
G' 50°C
G" 50°C
G' 70°C
G" 70°C
G', G" (Pa)
* aT (rad/s)
(a) (b)
60
Le calcul de l’énergie d’activation à partir des valeurs du facteur de glissement aT selon une
loi d’Arrhenius donne une valeur de 159 kJ/mol. Ces valeurs sont très proches de celles
proposées dans la littérature (117 145 kJ/mol), sur d’autres types de bitume [15].
Au regard de la Figure II.12-b, le PETT semble correct. Cependant, un moyen simple de
vérification de la validité du PETT est préconisé dans la littérature [16-18] : tracer le
diagramme de Van Gurp-Palmen (ou diagramme de Black), sans l’utilisation d’aucun facteur
de glissement. Cette représentation consiste à tracer les données brutes obtenues à l’issue d’un
test rhéologique en dynamique, c'est-à-dire tracer l’angle de phase (δ) (tan δ = G’’/G’) en
fonction du module complexe (G*).
Sur la Figure II.13, une mauvaise superposition est observée, principalement à basse
température.
Figure II.13 Diagramme de Black (angle de phase versus module complexe) à trois températures.
Beaucoup d’auteurs suggèrent que le PETT ne peut être strictement appliqué dans le cas du
bitume, même si il peut être utilisé avec précaution dans un but industriel.
Comme nous le verrons plus tard, ces résultats peuvent s'expliquer par une évolution de la
microstructure du bitume, fortement dépendante de la température. Néanmoins, ces résultats
peuvent donner une première idée du comportement du bitume, qui apparaît plutôt comme un
fluide viscoélastique fortement thermodépendant, avec une élasticité résiduelle non
négligeable, détectable à basse fréquence (Figure II.14).
10-1 101103105107
60
70
80
90 22°C
50°C
70°C
Angle de phase (°)
Module complexe G* (Pa)
61
Figure II.14 Superposition des viscosités complexes en fonction de la pulsation réduite, Tréf = 50°C.
2.4. Caractérisation du bitume comme un fluide à seuil
De nombreux matériaux comme la peinture, les boues, les pâtes et certains produits
alimentaires sont décrits comme des fluides à seuil. L’exemple le plus répandu est le
dentifrice qui ne peut sortir du tube simplement sous l’action de son propre poids : il faut
franchir un seuil de contrainte pour que le matériau s’écoule.
Différents modèles ont été développés dans l’objectif de décrire les fluides à seuil. Le plus
simple est le modèle de Bingham, dont l’équation constitutive est la suivante :
)6(Eq.0 0
00
si
si
σ0 étant la contrainte critique ou seuil, η la viscosité et  le taux de cisaillement. Un fluide
satisfaisant à cette relation présente ainsi une évolution linéaire de la contrainte en fonction du
taux de cisaillement une fois la contrainte critique dépassée. Un tel modèle demeure toutefois
théorique, le comportement d’un fluide réel étant plus proche d’un modèle en loi de
puissance. Pour un fluide à seuil rhéofluidifiant, le modèle de Herschel-Bulkley est souvent
utilisé :
)7(Eq.0 0
00
si
siKn
avec K la consistance et n l’indice de la loi puissance.
Malgré une définition simple de la contrainte critique, sa mesure expérimentale reste délicate.
Il existe dans la littérature de nombreuses publications traitant de la caractérisation
rhéologique et thermique du bitume. Par contre, peu de chercheurs ont tenté d’élucider
l’existence d’une contrainte seuil dans le cas des bitumes. Benallal [19] a trouvé un
10-4 10-2 100102104106
102
103
* 22°C
* 50°C
* 70°C
*/aT (Pa.s)
* aT (rad/s)
62
seuil d’écoulement pour un des brutes paraffiniques, bien décrit par un modèle de Bingham. Il
a attribué ce seuil d’écoulement à la fraction des paraffines cristallisables présentes dans le
brute. Il a observé que la valeur de ce seuil d’écoulement diminue avec la température, en
raison de la fusion de ces fractions cristallisables. Une autre étude [20] effectuée récemment
montre que le pétrole brut montre un aspect non-newtonien de type rhéofluidifiant, avec une
contrainte seuil de l’ordre de 1 Pa à 30°C.
Pour valider l’existence d'un seuil d’écoulement, des tests d’écoulement ont été effectués,
d'abord en fluage, puis en mode continu sur le rhéomètre plan-plan. Pour estimer rapidement
la borne basse de la contrainte à partir de laquelle le bitume s’écoule, des créneaux de
contraintes successifs ont été menés à 22°C. Les résultats sont présentés sur la Figure II.15.
Figure II.15 Détection de la zone seuil par un test de fluage (créneaux de contraintes à T=22°C).
Nous constatons que, pour une contrainte de 0,1 Pa, le matériau ne s’écoule pas, alors qu’à
1 Pa la formation évolue linéairement avec le temps. D’après ce test, on peut dire que le
bitume est un fluide à seuil, dont la valeur du seuil à 22°C est comprise entre 0,1 et 1 Pa.
Pour valider le comportement à seuil du bitume 70/100, un test d’écoulement est nécessaire.
Il permet de mesurer l’évolution de la viscosité du matériau en fonction de la vitesse de
cisaillement. La Figure II.16 montre l’évolution de la viscosité en fonction du taux de
cisaillement à différentes températures, variant entre 22 et 90°C. Pour ces essais, on est limi
à des cisaillements inférieurs à 100 s-1 car, au-delà, le bitume se fracture. Ces essais ont été
effectués en pilotant le rhéomètre en couple. A très faible taux de cisaillement (typiquement
inférieur à 10-3 s-1), un comportement à seuil apparaît. Ce comportement est moins marqué à
basse température (22 et 30°C). Ceci est surement dû d’une part à la haute viscosité du bitume
à basse température et d’autre part à l’apparition de ce seuil à des taux de cisaillement
beaucoup plus faibles (inférieurs à 10-5 s-1), qui sont difficiles à atteindre compte tenu des
limites des capteurs (10-3 µN.m).
A nouveau, l’existence d’un seuil d’écoulement a été soigneusement vérifiée. A haute
température (70 et 90°C), les expériences ont été répétées avec un plateau plan-plan plus
010 20 30 40 50 60 70 80
10-1
100
101
102
103
Temps global (min)
Contrainte appliquée (Pa)
10-5
10-4
10-3
10-2
10-1
Déformation mesurée (-)
63
grand (40 mm au lieu de 25 mm). Ces résultats confirment les résultats obtenus dans la Figure
II.16 [21].
Quelle que soit la température, le bitume peut être précisément décrit sur toute cette gamme
de taux de cisaillement par le modèle de Bingham (représenté en traits pleins dans la Figure
II.16) :
)8(Eq.
0
0
0
pour
Figure II.16 Evolution de la viscosité du bitume en fonction de la température et ajustement avec une loi de
Bingham (traits pleins).
Les valeurs des viscosités newtoniennes ainsi que celles du seuil d’écoulement sont données
dans le Tableau 11.
Tableau 11- 
Température
(°C)
Viscosité Newtonienne
(Pa.s)

22
434000
0,293
30
80650
0,137
50
935
0,005
70
56
0,006
90
7,7
0,002
La viscosité newtonienne varie en fonction de la température selon une loi de type Arrhenius
avec une énergie d’activation de l’ordre de 147 kJ/mol (Figure II.17), très proche de celles
obtenues précédemment lors des mesures en dynamique (155 159 kJ/mol). Les faibles
valeurs de seuil d’écoulement (< 1 Pa) sont complètement cohérentes avec les études
antérieures [19, 20, 22].
10-6 10-4 10-2 100102
100
102
104
106
Viscosité (Pa.s)
Taux de cisaillement (s-1)
22°C
30°C
50°C
70°C
90°C
64
Par ailleurs, la Figure II.17 montre que la viscosité varie avec la température suivant deux
régimes ; une partie pour des températures inférieures à 50°C et une autre au-delà. Une valeur
de l’énergie d’activation de 175 kJ/mol pour la gamme 22-50°C et de 117 kJ/mol dans le
domaine de 50-90°C a été déterminée. Ces valeurs signifient que la viscosité du bitume à
basse température est plus sensible au changement de température qu’à haute température. Au
dessous de 50°C, les interactions entre les particules d’asphaltènes deviennent plus
importantes (la structure du bitume est plus rigide) alors qu’au-delà de cette gamme de
température, le mouvement brownien est prédominant et les particules d’asphaltènes bougent
plus librement dans la matrice maltène. Une telle variation de l’énergie d’activation en
fonction de la température ainsi que les mécanismes mis en jeu sont en accord avec les
données de la littérature [2, 19].
Figure II.17 
L’évolution du seuil d’écoulement avec la température semble plus délicate à expliquer
(Figure II.17). anmoins, comme pour l’énergie d’activation, deux domaines semblent se
dessiner : un à T < 50°C, le seuil est thermodépendant, et un à T 50°C, le seuil
semble indépendant de la température. Au-delà de 50°C, le seuil est très faible, typiquement
aux alentours de 2 à 10-3 Pa. Au dessous de 50°C, il augmente avec la diminution de la
température, avec une énergie d’activation de 119 kJ/mol. Cette valeur élevée montre la forte
thermodépendance du seuil d’écoulement.
Cette thermodépendance du seuil d’écoulement est mentionnée dans la littérature sur les
dérivés pétroliers. Pandey et Ewing [23] ont observé la chute importante de la valeur du seuil
d’écoulement, d’un facteur de 4 à 8 en augmentant la température de 5°C.
L’obtention de ces deux domaines pourrait être expliquée, encore une fois, par une évolution
structurale du bitume. Pour cela, une étude par calorimétrie a été effectuée qui sera présentée
dans la partie 2.6, dans l’objectif de confirmer leur existence.
2.5. Loi de comportement rhéologique globale et modèle
Nous avons observé précédemment que le PETT ne peut pas être strictement appliqué dans le
cas du bitume. En effet, ce principe serait vérifié si la thermodépendance du
2,8x10-3 3,0x10-3 3,2x10-3 3,4x10-3
10-3
10-1
101
103
10522°C
30°C
50°C
70°C
Viscosité Newtonienne (Pa.s)
et seuil d'écoulement (Pa)
1/T (K-1)
90°C
65
seuil d’écoulement et celle de la viscosité étaient les mêmes. Cependant, d’un point de vue
industriel, et afin de disposer d’une loi globale de viscosité sur plusieurs décades, il peut être
utile d’appliquer le PETT à des températures supérieures à 50°C, dans la zone où le seuil est à
peu près constant. Nous observons à la Figure II.18 que ce principe fonctionne très
correctement dans la gamme de température 50-90°C. Ces résultats sont cohérents avec ceux
obtenus par le diagramme de Black montré à la Figure II.13.
Figure II.18 Superposition des viscosités réduites en fonction des taux de cisaillement réduits selon le PETT à Tréf =
50°C.
Afin d’appliquer le PETT aux températures inférieures à 50°C le seuil semble
thermodépendant, il est nécessaire d’utiliser un facteur de glissement supplémentaire, à la
thermodépendance du seuil d’écoulement. Ce facteur est donné par le rapport
cT = σ(T)/σ(Tref).
Figure II.19 x de cisaillement réduit,
corrigé par un facteur cT, à Tréf = 50°C.
La Figure II.19 présente le PETT en utilisant deux coefficients de glissement : un sur la
10-8 10-6 10-4 10-2 100
102
103
104
105
50°C
70°C
90°C
/aT (Pa.s)
* aT (s-1)
10-8 10-6 10-4 10-2 100102
102
103
104
105
22°C
30°C
50°C
70°C
90°C
/aT (Pa.s)
. *aT(s-1)
66
température et un sur le seuil d’écoulement. La superposition des courbes est plutôt bonne et
l’on peut considérer en première approximation cette courbe comme une courbe maîtresse.
Compte tenu de la fracturation du bitume aux forts cisaillements, il n’est pas possible
d’accéder au comportement en continu en dessus de 1 s-1. Nous allons donc compléter la
caractérisation en utilisant les essais en dynamique. Pour cela, il faut vérifier que l’on peut
appliquer la règle de Cox-Merz [21]. C’est ce que l’on voit effectivement sur la Figure II.20.
Figure II.20 - Superposition des viscosités en cisaillement continu (symbole plein) et dynamique (symbole vide) en
fonction du taux de cisaillement ou de la fréquence angulaire, à trois températures.
Nous pouvons donc compléter les données de la Figure II.19 par une courbe en fréquence
recalée à la température de référence choisie (50°C) en appliquant le PETT. Nous obtenons
alors une courbe de viscosité pour le bitume sur 10 décades, de 10-7 à 10+3 s-1 (Figure II.21).
Cette courbe peut être ajustée très précisément par une loi de Carreau-Yasuda à seuil [24]:
)9(Eq.])(1[)( 1
0
0a
n
a
TT
Taa
c
λ est un temps caractéristique, a le paramètre de Yasuda, aT et cT sont définis par les lois
d’Arrhenius :
)10(Eq.)
11
(exp
réf
TTTR
E
a
)11(Eq.50)
11
(
'
exp CTTavec
TTR
E
cref
réf
T
Les paramètres de cette loi sont donnés dans le Tableau 12 :
10-6 10-4 10-2 100102
101
102
103
104
105
106
70°C
30°C
ou * (Pa.s)
ou . (s-1)
50°C
67
Tableau 12- Paramètres obtenus pour la loi de Carreau-Yasuda à seuil à Tréf = 50°C.
0 (Pa.s)
0(Pa)
(sec)
n
a
E(kJ/mol)
(kJ/mol)
870
0,002
0,3
0,85
0,5
145
124
Les valeurs de seuil et de viscosité limite sont proches de celles obtenues par le modèle de
Bingham (respectivement 0,005 Pa et 935 Pa.s). Le temps de relaxation λ est quant à lui
faible, ce qui reflète la faible élasticité du bitume pur.
Figure II.21 Courbe maîtresse de la viscosité en fonction du taux de cisaillement à Tréf = 50°C (symboles) et
ajustement par une loi de Carreau-Yasuda à seuil (trait plein).
2.6. Caractérisation de la microstructure du bitume par des analyses
thermiques
Tout matériau amorphe (non cristallin ou semi-cristallin) possède une température de
transition vitreuse Tg.
La température de transition vitreuse d’un matériau Tg est la température en-dessous de
laquelle les molécules ont une faible mobilité relative. Cette température est la transition de
l’état vitreux à l’état caoutchoutique. La température de la transition vitreuse d’un matériau
peut être mesurée, par exemple, par DSC (Differential Scanning Calorimetry) [25].
Le bitume est un polymère naturel de faible masse moléculaire et, comme tous les polymères,
il est viscoélastique. A faible température, il est rigide et fragile ; à la température ambiante,
il est flexible et, à haute température, il s’écoule.
Par contre, les facteurs qui gouvernent la viscoélasticité du bitume ne sont pas bien définis
dans la littérature. En effet, la structure moléculaire précise et l’unité répétitive du bitume
(HAP) ne sont pas bien établies. La chimie du bitume est le plus souvent définie en termes de
fractions obtenues par chromatographie, e.g. saturées, résines, aromatiques et asphaltènes
10-9 10-7 10-5 10-3 10-1 101103
102
103
104
105
22°C
30°C
50°C
70°C
90°C
30°C
Loi de Carreau-Yasuda à seuil
/aT (Pa.s)
. *aT(s-1)
68
(SARA), ou en termes de contenu en maltènes et asphaltènes, les asphaltènes se dispersant
dans une matrice maltène [26].
Dans une seule expérience, deux paramètres importants peuvent être évalués : la température
de la transition vitreuse de la matrice, qui contient les aromatiques et saturés d'hydrocarbures
qui ne cristallisent pas, et le pourcentage des fractions qui cristallisent en raison des n-alcanes
(paraffine) [27].
D’après quelques études de la littérature, la transition vitreuse se produit à des températures
entre -50 et -10 °C suivant la nature du pétrole brut. Claudy et al. [26] montrent que le
pourcentage massique des fractions saturées et aromatiques sont à relier à la valeur de Tg.
La capsule contenant l’échantillon de bitume pur a été conditionnée à température ambiante
pendant 24 heures, temps nécessaire pour que le bitume retrouve pleinement son équilibre
[26].
Deux types d’expériences ont été réalisés : la 1ère série consiste, sur une DSC standard,
à répéter le même test trois fois sur le même échantillon, avec la même vitesse de chauffage et
de refroidissement (5°C/min), afin d’évaluer la reproductibilité.
Le 2ème type consiste à répéter les mêmes tests avec la même procédure, mais avec une DSC
modulée.
2.6.1. Détermination de Tg par DSC conventionnelle
La Figure II.22 montre l’évolution du flux de chaleur (ΔH) en fonction de la température
obtenue par une DSC standard. Une température de transition vitreuse aux alentours de -20°C
est identifiée, et différents pics endothermiques et exothermiques, entre -5 et 42°C, reliés aux
éléments cristallisables ou à la fusion des fractions saturées, sont observés.
Figure II.22 Evolution du flux de chaleur en fonction de la température par une DSC standard.
-60 -40 -20 0 20 40 60 80 100
-1,0
-0,5
0,0
0,5
1,0
-40°C 39°C
42°C
28°C
13°C
Flux de chaleur (W/g)
Température (°C)
Chauffage
Réfroidissement
Tg
-5°C
Exo
69
Etant donnée la complexité du bitume, ainsi que le chevauchement des pics, il est difficile de
les séparer et de les traiter. Pour cela, l’utilisation d’une DSC modulée, permettant de séparer
le signal de flux de chaleur total en 2 signaux réversible et non réversible, est nécessaire.
2.6.2. Détermination de Tg par DSC modulée
Le composant réversible (Rev. ΔH) est le contributeur majeur du flux de chaleur total, il est lié
réversiblement à la capacité calorifique (Cp) et donne des informations sur la température de
transition vitreuse (Tg). Le second (non-Rev. ΔH) est la plus faible contribution du ΔHtotal
et donne des informations supplémentaires sur le profil thermique (réactions endo
et exothermiques) [28].
La Figure II.23 montre l’évolution du flux de chaleur réversible et non-réversible, dans la
gamme de température -60, 100°C. D’après ce graphique (Rev. ΔH), nous pouvons clairement
identifier une Tg aux alentours de -20°C, attribuée aux maltènes [25, 29]. Une seconde
transition vitreuse est également mesurée autour de 53°C, mais avec une plus faible
contribution. Elle est liée aux asphaltènes [25]. Cette température de transition élevée (53°C)
peut expliquer l’évolution du seuil d’écoulement présentée sur la Figure II.17, où il est
thermodépendant au dessous de 50°C et relativement indépendant au-delà. De plus, comme le
suggère Lesueur [16], la non-applicabilité stricte du PETT peut être liée à l’existence de cette
transition vitreuse. Enfin, elle permet aussi d’expliquer l’existence de deux régimes
d’évolution de la viscosité newtonienne avec la température et donc deux énergies
d’activation.
Figure II.23 Evolution du flux de chaleur total, réversible et non-réversible, en fonction de la température par DSC
modulée.
La Figure II.23 montre aussi certains pics endo- et exothermiques. Les pics exothermiques (-6
et 31°C) sont attribués à l’existence des éléments cristallisables présents dans le bitume. Ces
valeurs sont cohérentes avec des études précédentes effectuées sur le même bitume [30]. Nous
pouvons aussi observer trois endothermes, centrées à -20, 14 et 44°C. Les valeurs de Tg ainsi
que les pics thermiques sont listés dans le Tableau 13.
-60 -30 0 30 60 90
-0,14
-0,12
-0,10
-0,08
-0,06
44°C
14°C
31°C
-6°C
Température (°C)
H total (W/g)
Tg = -20°C Tg = 53°C
-20°C
-0,12
-0,09
-0,06
-0,03
Rev. H et non-Rev. H (W/g)
Exo
70
Tableau 13- Transition vitreuse Tg, capacité calorifique Cp et contributions endo et exothermiques.
Etape
Tg
(°C)
Cp
(J/g/°C)
Tg (°C)
Cp
(J/g/°C)
Pic endo
(°C)
Pic exo
(°C)
Chauffage
-20,8
0,217
52,9
0,042
-20 ; 14 ; 44
-6 ; 31
Refroidissement
-20
-0,571
-
-
-18 ; 38
-5 ; -36
Selon Benallal [19], la présence d’une contrainte seuil pourrait être due à l’existence des
fractions cristallisables. Cependant, d’après les résultats cités précédemment, la présence de
ce seuil ne peut pas être seulement liée à ces fractions, mais aussi aux agrégats d’asphaltènes.
En effet, à T < 50°C, la thermodépendance du seuil d’écoulement observée est due aux
interactions entre les particules d’asphaltènes ainsi qu’à la présence des fractions
cristallisables. Quand la température augmente, les fractions cristallisées disparaissent au-
delà de 50°C, et ce sont les agrégats d’asphaltènes qui participent alors au faible seuil
d’écoulement.
Pour compléter cette étude thermo-rhéologique, une rampe en température a été effectuée afin
de donner des informations sur la Tg via l’évolution des modules élastique et visqueux. Nous
avons appliqué une rampe en température de 90 à -20°C avec une vitesse de 1°C/min, suivie
par un chauffage jusqu’à 90°C avec la même vitesse après une étape de repos à -20°C de
5 min (Figure II.24). Le calcul de Tg est alors réalisé par la méthode des deux tangentes sur
G’. Le logiciel (Rheoplus, Anton Paar), après extrapolation du plateau vitreux sur G’, donne
une Tg de -20°C avec un module G’ de l’ordre de 147 MPa, ce qui est en adéquation avec les
résultats obtenus en MDSC. De plus, autour de 55°C, la pente sur les deux modules est
modifiée, ce qui confirme l’existence d’un second processus et ainsi la présence de la seconde
Tg observée par MDSC.
Figure II.24 Détermination de la température de la transition vitreuse par un test de rampe en température.
Evolution de G’ et G’’ avec la température (phase de refroidissement)-3 .
-20 0 20 40 60 80 100
100
102
104
106
108
Tg = 55°C
G'
G''
G' et G" (Pa)
T (°C)
Tg = -20°C
G'
G"
71
Le calcul de l’énergie d’activation correspondant à ces deux régions (avant et après 50°C)
donne 161 et 117 kJ/mol, respectivement, qui est cohérent avec les résultats rhéologiques
obtenus précédemment (175 et 117 kJ/mol).
2.7. ontrainte seuil dans le cas du bitume
Lorsque le bitume est soumis à l’auto-irradiation α, β et γ, celui-ci se radiolyse en générant
principalement de l’hydrogène. Suivant l’activité radiologique incorporée, la production
d’hydrogène est plus ou moins prononcée et doit être mise en regard des modes d’évacuation.
Lorsque l’activité est importante, l’hydrogène s’accumule et forme des bulles qui, par
croissance, entrainent un gonflement des enrobés de bitume [31].
A partir des différents tests rhéologiques cités ci-dessus, il a été montré que le bitume 70/100
présentait un comportement rhéofluidifiant avec un seuil d’écoulement. La connaissance de la
contrainte seuil nous permet ainsi de définir une taille minimale de bulles pour qu’elles
puissent être soumises à la migration sous l'effet de la poussée d'Archimède.
Comme il s’agit d’un seuil d’écoulement, on peut évaluer la force correspondante exercée par
la bulle :
)12(Eq.
0S
F
S est la surface sur laquelle s’exerce la force
F
(différence entre le poids de la bulle et la
poussée d’Archimède = poussée d’Archimède car le poids de la bulle est nul) de norme F,
avec

   (surface projetée, normale à la force), avec R le rayon de
la bulle, g l’accélération de la pesanteur et Δρ est la différence de masse volumique entre la
matrice bitume et la bulle.
Pour que la poussée d’Archimède soit supérieure au seuil d’écoulement et provoque le
mouvement des bulles il faut donc que :
)13(Eq.
.430g
R
L’application numérique donne, pour une contrainte seuil de 0,293 Pa à 22°C et pour une
différence de masse volumique de 999,4 kg/m3 : R = 22 µm.
Par conséquent, une bulle d’hydrogène créée par radiolyse doit atteindre une taille minimale
de 22 µm pour qu’elle puisse migrer dans du bitume pur non irradié à 22°C.
2.7.1. Calcul de la vitesse de migration des bulles
Lorsque la taille minimale de bulle est atteinte, celle-ci est soumise à la poussée d’Archimède
et il est possible d’estimer sa vitesse d’ascension dans la matrice bitume connaissant la
viscosité newtonienne. La loi de Hadamard-Rybczynski (Eq. 14), qui néglige l’effet de paroi,
l’effet élastique de la matrice bitume et l’effet de la population de bulle [32], est utilisée pour
calculer cette vitesse :
)14(Eq.
3.. 2
Rg
U
72
Connaissant le rayon de la bulle calculé à partir de la valeur de la contrainte seuil
(R = 22 µm), avec une viscosité newtonienne η = 4,4.105 Pa.s à 22°C, nous obtenons une
vitesse de migration de 3,59.10-12 m/s.
A titre indicatif, les valeurs des vitesses pour différentes tailles de bulles sont regroupées dans
le Tableau 14. Ce tableau présente la vitesse de migration de plusieurs bulles de différents
diamètres, allant de 44 µm à 5 cm, selon la loi de Hadamard-Rybczynski.
Tableau 14- 
Diamètre bulle
(cm)
Vitesse U
(m/s)
4,40 × 10-3
3,59 × 10-12
1,70 × 10-2
5,37 × 10-11
0,100
1,86 × 10-9
0,137
3,48 × 10-9
0,6
6,68 × 10-8
1
1,86 × 10-7
5
4,64 × 10-6
2.7.2. Mesures de la vitesse de migration des bulles
La mesure de la vitesse de migration des bulles dans le bitume a été effectuée
expérimentalement. La méthode consiste à injecter des bulles dans le bitume et à suivre leur
migration en fonction du temps par imagerie X. Une éprouvette en polypropylène (hauteur 15
cm et diamètre 5 cm) trouée en bas (diamètre 3 mm) a été remplie par du bitume pur. Le trou
a été bouché par un septum afin d’éviter l’écoulement par cet orifice lorsqu’il est chauffé.
Ce bitume a été chauffé à 50°C afin de faciliter l’injection de bulles à l’aide d’une
microseringue. Après l’injection, l’éprouvette est tout de suite refroidie (T = 4°C) pour limiter
les mouvements des bulles.
Des analyses par imagerie X ont été réalisées afin de détecter les positions de bulles et leurs
dimensions. Les mesures ont été effectuées à différents temps (t0, t0+1 semaine, t0+1 mois),
l’objectif étant de déterminer la distance parcourue par ces bulles et leur vitesse de migration.
73
Figure II.25 pur par imagerie X.
Quatre bulles de différentes tailles ont été injectées et identifiées (Figure II.25). Les valeurs de
vitesses obtenues sont données dans le Tableau 15.
Tableau 15- Comparaison entre les vitesses de migration expérimentales et théoriques.
Bulle
Diamètre
bulle (cm)
Δd
(mm)
Vitesse
Uexp
(mm/j)
Vitesse
Uexp
(m/s)
Vitesse Utheo
(m/s)
Viscosité
calculée
(Pa.s)
1
0,600
31,9
4,557
5,27 × 10-8
6,68 × 10-8
4,11 × 10+5
2
0,060
1,77
0,253
2,93 × 10-9
6,68 × 10-10
9,75 × 10+4
3
0,137
1,72
0,245
2,83 × 10-9
3,45 × 10-9
5,07 × 10+5
4
0,137
2,17
0,310
3,59 × 10-9
3,45 × 10-9
4,00 × 10+5
avec Δd la différence de distance parcourue par la bulle entre t0 et ti.
D’après ce tableau, nous remarquons une bonne corrélation entre les valeurs de vitesse
obtenues expérimentalement et théoriquement, ce qui valide la valeur de la viscosité obtenue
expérimentalement. Les valeurs de viscosité ont été recalculées à l’aide de l’équation de
Hadamard-Rybczynski corrigée de l’effet de parois [30] :
)15(Eq.)1(
12 .. 35,2
2
dg
U
avec λ le rapport du diamètre de la bulle par le diamètre de l’éprouvette. Le facteur 2,35
correspond à un facteur correctif qui varie d’un auteur à l’autre suivant le système étudié.
Attané et Palade [30] ont également constaté que la valeur moyenne corrective d’effet de
parois sur le même type de bitume est égale à (1-λ) 2,35.
Un deuxième essai a été réalisé afin de confirmer les valeurs obtenues. Une seule bulle d’air
d’un diamètre de 0,931 mm a été injectée : la valeur de la viscosité obtenue est de l’ordre de
450000 Pa.s.
Par ailleurs, une forme sphérique des bulles est visualisée par imagerie X, ce qui confirme le
caractère majoritairement newtonien du bitume.
1
3
2
4
Matrice bitume

y = 0
74
Connaissant la vitesse de migration pour un diamètre de bulle, il est possible d’estimer le taux
de cisaillement, qui est le rapport de la vitesse d’ascension et du diamètre de la bulle. A titre
d’exemple, le Tableau 16 répertorie des valeurs de vitesse de bulles et de taux de cisaillement
associés.
Tableau 16- Calcul de tailles, vitesses et du taux de cisaillement à partir de bulles expérimentales.
Diamètre bulle
(cm)
Vitesse U
(m/s)
Taux de cisaillement
(s-1)
0,600
5,27 × 10-8
8,78 × 10-6
0,137
2,83 × 10-9
2,07 × 10-6
0,137
3,59 × 10-9
2,62 × 10-6
La Figure II.26 présente la variation de la viscosité en fonction de la vitesse de cisaillement en
mode écoulement à 22°C. Le plateau newtonien apparaît au dessus de = 10-5 s-1. Les bulles
injectées se placent juste avant le plateau newtonien (dans la partie seuil) avec une viscosité
un peu plus élevée que la viscosité newtonienne.
Figure II.26 Evolution de la viscosité en fonction de taux de cisaillement à 22°C, zones de migration des bulles.
Si la taille des bulles décroît encore (< 0,1 cm), la viscosité sera très élevée ( < 10-6 s-1) et par
conséquent la migration des bulles sera impossible.
De l’autre côté, plus la taille augmente, plus la viscosité se déplacera dans le plateau
newtonien (par exemple pour D = 1 et 5 cm). Mais en augmentant le rayon, la surpression
selon la loi de Laplace (Eq. 16) sera plus faible, pour arriver à un rayon limite où la
surpression sera égale à la contrainte seuil σ0 (état d’équilibre = bulle immobile). La valeur de
ce rayon est de 20 cm.
10-7 10-6 10-5 10-4 10-3 10-2 10-1 100
2x105
4x105
6x105
8x105
106
D = 1,7 *10-2 cm
D = 5 cm
D = 1 cm
Bulle 3
Bulle 2 (D = 0,137 cm)
R = 20 cm
P = 0
7,4 ×10-4
Migration plus rapide
Migration, Pas de croissance
(Pa.s)
(s-1)
Peu de migration
Bulle 1 (D = 0,6 cm)
75
)16(Eq.
.2R
P
avec Γ = 0,03 N/m la tension superficielle d’une bulle dans le bitume pur [31].
La Figure II.27 présente l’évolution de la vitesse de migration des bulles, calculées par
l’équation 14, en fonction de leur diamètre. Les vitesses de migration correspondant aux
bulles injectées expérimentalement sont aussi présentées sur ce graphe.
Figure II.27 Vitesse de migration versus diamètre de bulles. Vitesse des bulles injectés (rouge), vitesse calculée par la
loi de Hadamard-Rybczynski (bleue).
La comparaison entre les deux Figures II.26 et II.27 nous permet de distinguer quatre
domaines sur la Figure II.27 :
D < 4,4 × 10-3 cm : une croissance de bulles est possible, mais pas de migration car
ce domaine correspond à des taux de cisaillement inférieurs à 8,2 × 10-8 s-1.
4,4 × 10-3 < D < 0,6 cm : une croissance des bulles avec une migration très lente.
Les limites de cette zone sont estimées entre 8,2 × 10-8 et 9 × 10-6 s-1.
0,6 < D < 40 cm : Croissance et migration de bulles de plus en plus rapide,
elle correspond à la zone entre 9 × 10-6 et 7,5 × 10-4 s-1.
Au-delà de 40 cm les bulles ne peuvent plus croître dû à la pression de Laplace.
Donc une migration des bulles est possible à 22°C lorsque le rayon de la bulle est compris
entre 4,4 × 10-3 et 40 cm.
10-4 10-3 10-2 10-1 100101102103
10-14
10-12
10-10
10-8
10-6
10-4
D = 0,0044 cm
D =40 cm
D = 0,6 cm
D = 0,137 cm
Plus de croissance
Croissance,
migration
Croissance,
pas de migration
UHadamard-Rybczynski
Uexpérimentale
U (m/s)
D (cm)
Croissance,
migration très lente
D = 0,06 cm
76
3. Bilan de ce chapitre
Dans ce chapitre, une corrélation entre les études rhéologiques et thermiques a été mise en
place afin de caractériser le comportement du bitume.
Tout d’abord, il a été montré que l’utilisation d’un rhéomètre à contrainte imposée ne garantit
pas des mesures rhéologiques dans le domaine de linéarité, surtout à basse pulsation, puisque
la déformation évolue constamment au cours d’un test de balayage en fréquence. Le mode
déformation imposée est donc la meilleure façon pour caractériser le bitume. En effet,
un plateau pseudo-solide sur G’ apparaît à faible fréquence, dû aux interactions entre les
particules d’asphaltènes.
Le principe d’équivalence temps-température (PETT) ne peut pas être strictement appliqué
sur toute la gamme de température, en raison d’une évolution de la microstructure avec la
température.
D’après différents tests rhéologiques, le bitume 70/100 possède un faible seuil d’écoulement.
Ce seuil est dépendant de la température en dessous de 50°C et indépendant au-delà. Ce seuil
est attribué à deux événements : interactions entre les agrégats d’asphaltènes et existence de
fractions cristallisables.
D’un point de vue industriel et afin de disposer d’une courbe maîtresse générale, le PETT a
été appliqué en utilisant un facteur de glissement particulier pour le seuil. L’applicabilité de la
loi de Cox-Merz conduit à l’obtention d’une courbe maîtresse de viscosité qui couvre
10 décades, correctement modélisée par une loi de type Carreau-Yasuda à seuil.
L’évolution microstructurale suggérée par les mesures rhéologiques a été vérifiée par des
analyses calorimétriques à l’aide d’une DSC modulée. 2 Tg ont été observée : une autour de
-20°C attribuée à la matrice maltène et une autre aux alentours de 50°C associée aux
asphaltènes.
Grâce à l’imagerie X, les vitesses de migration de bulles ont été mesurées. Ces valeurs
montrent une bonne cohérence avec la loi de Hadamard-Rybczynski, basée sur la viscosité
mesurée.
77
4. A retenir du chapitre 2
10-3 10-2 10-1 100101102
10-4
10-2
100
102
104
106
G' 1 Pa
G" 1 Pa
G' 10 Pa
G" 10 Pa
G' 50 Pa
G" 50 Pa
G', G" (Pa)
(rad/s)
2,8x10-3 3,0x10-3 3,2x10-3 3,4x10-3
10-3
10-1
101
103
10522°C
30°C
50°C
70°C
Viscosité Newtonienne (Pa.s)
et seuil d'écoulement (Pa)
1/T (K-1)
90°C
-20 0 20 40 60 80 100
100
102
104
106
108
Tg = 55°C
G'
G''
G' et G" (Pa)
T (°C)
Tg = -20°C
G'
G"
Lutilisation d’un rhéomètre à
contrainte imposée ne garantit pas des
mesures rhéologiques dans le domaine
delinéarité
1
Présence d’une Tg
aux alentours de
50°C attribuées
aux asphaltènes
Présence de deux
domaines de
viscosiet de
seuil d’écoulement
2
10-7 10-6 10-5 10-4 10-3 10-2 10-1 100
2x105
4x105
6x105
8x105
106
D = 1,7 *10-2 cm
D = 5 cm
D = 1 cm
Bulle 3
Bulle 2 (D = 0,137 cm)
R = 20 cm
P = 0
7,4 ×10-4
Migration plus ra pide
Migration, Pas de croissance
(Pa.s)
(s-1)
Peu de migration
Bulle 1 (D = 0,6 cm)
10-8 10-6 10-4 10-2 100102104
102
50°C
70°C
90°C
30°C
/aT (Pa.s)
. * aT (s-1)
Loi de Carreau-Yasuda à seuil
3
Obtention d ’une courbe
maîtresse sur 11 décades
Détermination de la zone
de migration des bulles
selonleurs tailles
4
78
5. Bibliographie du chapitre 2
[1] I. Walczak, "Détermination des produits organiques d'altérations chimiques et
radiochimiques du bitume. Applications aux enrobes bitumes", Thèse de Doctorat,
Institut National des Sciences Appliquées de Lyon (2000).
[2] T. F. Yen, J. G. Erdman, S. S. Pollack, "Investigation of the structure of petroleum
asphaltenes by XRD", Anal. Chem, 33: 1587-1594 (1961).
[3] D. Espinat, E. Rosenberg, M. Scarsella, L. Barre, D. Fenistein, D. Broseta, "Colloidal
structural evolution from stable to floculated state of asphaltene solutions and heavy
crudes", in Structure and Dynamics of Asphaltenes, O. C. Mullins and E. Y. Sheu.,
New York: Plenum Press, 145-202 (1998).
[4] O. C. Mullins, "The Modified Yen Model", Energy & Fuels, 24: 2179-2207 (2010).
[5] A. Sharma, H. Groenzin, A. Tomita, O. C. Mullins, "Probing Order in Asphaltenes
and Aromatic Ring System by HRTEM", Energy & Fuels, 16: 490-496 (2002).
[6] C. Cailleteau, "Influence de la morphologie du gel sur la cinétique d'altération des
verres borosilicatés : rôle du calcium et du zirconium", Thèse de Doctorat, Ecole
Polytechnique (2008).
[7] R. Tanaka, E. Sato, J. E. Hunt, R. E. Winans, S. Sato, T. Takanohashi,
"Characterization of Asphaltene Aggregates Using X-ray Diffraction and Small-Angle
X-ray Scattering", Energy & Fuels, 18: 1118-1125 (2004).
[8] J. S. Pedersen, "Analysis of Small-angle Scattering Data from Polymeric and Colloidal
Systems: Modelling and Least-squares Fitting", Adv. Colloid Interface. Sci, 70: 171-
201 (1997).
[9] D. Lesueur, "The colloidal structure of bitumen: Consequences on the rheology and on
the mechanisms of bitumen modification", Adv. Colloid. Interface. Sci, 145: 42-82
(2009).
[10] J. D. Ferry, "Viscoelastic Properties of Polymers", 3ème ed., New York, John Wiley &
Sons (1980).
[11] R. Jongepier, B. Kuilman, "The dynamic shear modulus of bitumens as a function of
frequency and temperature", Rheol. Acta, 9: 102-111 (1970a).
[12] R. Jongepier, B. Kuilman, "A widely applicable two-parameter viscosity-temperature
equation for bitumens ", Rheol. Acta, 9: 460-466 (1970b).
[13] V. Meyer, J. Pilliez, J. Habas, F. Montel, P. Creux, "Rheological Evidence of the
Diffusionnal Aggregation of Asphaltenes in Extra-Heavy Crude Oils", Energy &
Fuels, 22: 31543159 (2008).
[14] T. Aubry, T. Razafinimaro, P. Médéric, "Rheological investigation of the melt state
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81
CHAPITRE
3
83
Chapitre 3 Influence des conditions
opératoires d’extrusion sur le bitume et les
enrobés bitume
Ce chapitre est dédié à l’étude de l’influence des conditions opératoires d’extrusion (vitesse
de vis N et débit d’écoulement Q) sur les propriétés rhéologiques du bitume et des enrobés
bitume. En effet, la dispersion de sels est sensible à l’histoire thermomécanique que le
matériau a subie. Il s’agit donc d’estimer le comportement rhéologique et l’état de dispersion
des sels suivant les conditions d’extrusion. Cet état de dispersion a un impact important sur la
radiolyse, en particulier pour les émetteurs α et β.
L’objectif de ce chapitre est de faire le lien entre les enrobés modèles, synthétisés dans
différentes conditions (N et Q) et l’enrobé utilisé à l’échelle industrielle. En effet, l’enrobé
industriel a été préparé à N = 270 tr/min et Q = 75 kg/h (N/Q = 0,2 tr/g).
Ce chapitre est organisé en trois sections. Puisque l’enrobage de déchets radioactifs dans le
bitume s’effectue par extrusion en présence d’oxygène, il est intéressant de savoir, en premier
temps, si l’histoire thermomécanique pendant l’extrusion (N et Q) a des influences sur le
comportement rhéologique et chimique du bitume. Cette étude sera ensuite analysée par des
séparations analytiques et des analyses par spectroscopie infrarouge afin de comprendre
l’évolution de ces propriétés rhéologiques.
Dans l’objectif de faciliter la compréhension de l’effet des paramètres d’extrusion sur
l’enrobé bitume industriel, des échantillons modèles de types monosel et bisel, qui possèdent
des granulométries bien définies, ont été réalisés par extrusion. C’est la raison pour laquelle la
seconde partie de ce chapitre sera consacrée à l’étude rhéologique détaillée de ces enrobés
préparés dans différentes conditions d’extrusion. Des analyses par microscopie à balayage
environnementale sont ensuite réalisées pour une compréhension plus profonde des résultats
obtenus rhéologiquement. Une comparaison et discussion générale entre les enrobés fabriqués
seront présentées.
Pour finir cette partie, l’impact de N et Q sur le seuil d’écoulement et la viscosité newtonienne
est présenté. L’évolution de la contrainte seuil sera estimée en fonction du rapport N/Q.
Enfin, afin de s’approcher de l’enrobé industriel, les étapes effectuées dans la deuxième partie
de ce chapitre seront répétées dans la troisième partie, sur un enrobé de type STE3, préparé à
l’échelle de laboratoire avec différentes conditions opératoires, suivi par une étude
rhéologique. A la fin de ce chapitre, une étude de l’influence de N et Q sur la vitesse de
migration de bulles dans les quatre enrobés sera présentée.
84
Table des matières chapitre 3
1. Influence des conditions opératoires d’extrusion sur les propriétés du bitume pur ..... 86
1.1. Caractérisations rhéologiques ............................................................................ 86
1.1.1. Effet du débit d’écoulement Q ........................................................................ 86
1.1.2. Effet de la vitesse de vis N .............................................................................. 89
1.2. Séparation asphaltènes/maltènes ........................................................................ 90
1.3. Interprétation ...................................................................................................... 91
1.3.1. Effet du débit d’écoulement Q ........................................................................ 91
1.3.2. Effet de la vitesse de vis N ............................................................................. 93
1.4. Discussion générale ............................................................................................ 94
1.4.1. Evolution de la viscosité du bitume et modèles rhéologiques ........................ 95
1.4.2. Evolution de la viscosité du bitume en fonction de la teneur en asphaltènes . 97
2. Influence des conditions opératoires d’extrusion sur les propriétés des enrobés bitumes
.................................................................................................................................... 101
2.1. Enrobé monosel type BaSO4 .................................................................................. 101
2.1.1. Effet de la vitesse de vis N ............................................................................... 101
2.1.2. Effet du débit d’écoulement Q ......................................................................... 103
2.1.3. Discussion ........................................................................................................ 104
2.2. Enrobé monosel type NaNO3 ................................................................................. 107
2.2.1. Effet de la vitesse de vis N ............................................................................... 107
2.2.2. Effet du débit d’écoulement Q ......................................................................... 109
2.2.3. Discussion ........................................................................................................ 110
2.3. Enrobé bisel ............................................................................................................ 111
2.3.1. Effet de la vitesse de vis N ............................................................................... 111
2.3.2. Effet du débit d’écoulement Q ......................................................................... 113
2.4. Comparaison et discussion générale entre les 3 enrobés bitumes .......................... 115
3. Enrobé industriel de type STE3 ................................................................................. 118
3.1. Effet de la vitesse de vis N ............................................................................... 120
3.2. Effet du débit d’écoulement Q ......................................................................... 123
3.3. Comparaison et discussion générale ................................................................ 125
4. Mesure de la vitesse de migration des bulles ............................................................. 127
5. Bilan de ce chapitre .................................................................................................... 130
85
6. A retenir du chapitre 3 ................................................................................................ 132
7. Bibliographie du chapitre 3 ........................................................................................ 133
86
1.       
propriétés du bitume pur
D’après la littérature, le bitume, comme tous les matériaux organiques, est très sensible à la
présence d’oxygène. Cette sensibilité se traduit par un phénomène de vieillissement.
De nombreuses études ont pour objectif d’évaluer l’effet de la présence d’oxygène sur les
propriétés physico-chimiques du bitume. Pour ceci, différents tests ont été développés,
tels que le TFOT (Thin Film Oven Test), le RTFOT (Rolling Thin Film Oven Test) [1-3],
le PAV (Pressure Ageing Vessel) [4].
Il a été montré que le vieillissement est responsable d’une augmentation dans la teneur en
hétéroatomes, principalement l’oxygène, ce qui conduit à une augmentation de la viscosité du
bitume [5]. Par conséquent, la teneur en hétéroatomes (Soufre S, Oxygène O et azote N) et en
molécules polaires dans le bitume a un rôle important, puisqu’une teneur élevée conduit à une
augmentation du degré d’association des molécules par des liaisons intra ou intermoléculaires
[5].
Comme il a été déjà signalé dans le 2ème chapitre, les hétéroatomes sont localisés
principalement dans les molécules d’asphaltènes et, par conséquent, leur augmentation
conduit à une association plus favorable de ces molécules.
Moschopedis et Speight [6], en exposant le bitume à l’oxygène, ont montré que l’oxygène agit
en tant que catalyseur dans la production d’asphaltènes. Ces productions sont dues à
l’insertion de l’oxygène dans les chaînes carbones (principalement insaturées C=C ou C≡C),
conduisant à la formation de groupes fonctionnels oxygénés. D’autre part, une aromatisation
(augmentation du rapport carbone/hydrogène et formation de doubles liaisons C=C) et des
processus de réticulation produits par des liaisons intra et intermoléculaires ont également
lieu.
Puisque l’enrobage de déchets radioactifs dans le bitume s’effectue par extrusion en présence
d’oxygène, il est intéressant de savoir si l’histoire thermomécanique dans l’extrudeuse a des
influences sur son comportement rhéologique et chimique.
Pour cela, cinq échantillons de bitume ont été préparés sur une extrudeuse bivis co-rotative
avec différentes conditions (3 vitesses de vis (N) et 3 débits d’écoulement (Q)). Les conditions
d’extrusion sont listées dans le Tableau 17.
Tableau 17- 
Echantillon
Vitesse de vis N
(tr/min)
Q
(g/h)
Temps de
séjour (sec)
A
70
1150
162
B
70
840
202
C
70
395
368
D
150
360
370
E
300
372
347
1.1. Caractérisations rhéologiques
1.1.1. Effet du Q
La Figure III.1-a présente l’évolution du module élastique G’ en fonction de la déformation à
87
100 rad/s et 50°C pour les trois composés A, B et C.
Il est clairement observé que le module élastique (G’) décroît avec l’augmentation du débit
(Q). En même temps, la déformation critique (γc) augmente légèrement, de 0,16 à 0,25. Nous
observons des résultats similaires pour l’évolution du module visqueux (G’’) et de la viscosité
complexe (η*) (Figure III.1-b).
Figure III.1 (a) Module élastique G’ et (b) viscosité complexe η* en fonction de la déformation pour les échantillons

La Figure III.2 présente l’évolution de la viscosité réelle, obtenue d’après les tests en
écoulement, pour les trois composés A, B et C. Le comportement global est newtonien, avec
un seuil d’écoulement qui apparaît à faible taux de cisaillement (inférieur à 10-4 s-1). Au-delà
de 10 s-1, la chute des viscosités est due à la fracturation du bitume. Nous observons une
décroissance de la viscosité newtonienne lorsque le débit Q augmente. Les valeurs sont de
540, 640 et 950 Pa.s pour les composés A, B et C, respectivement.
Une très bonne superposition entre les valeurs obtenues en dynamique (Figure III.1-b) et en
continu (Figure III.2) est obtenue (la règle de Cox-Merz est applicable).
Figure III.2 Evolution de la viscosité en fonction du taux de cisaillement pour les échantillons préparés à une vitesse

10-4 10-3 10-2 10-1 100101
103
104
105
(a)
Q = 1150 g/h
Q = 840 g/h
A
B
C
Module élastique G' (Pa)
Déformation (-)
Q = 395 g/h
10-6 10-4 10-2 100
102
103
A
B
C
Viscosité complexe  (Pa.s)
Déformation (-)
(b)
Q = 395 g/h
Q = 840 g/h
Q = 1150 g/h
10-5 10-4 10-3 10-2 10-1 100101
102
103
104
A (Q = 1150 g/h)
B (Q = 840 g/h)
C (Q = 395 g/h)
Viscosité (Pa.s)
Taux de cisaillement . (s-1)
Q = 395 g/h
Q = 840 g/h Q = 1150 g/h
88
Pour une compréhension plus approfondie de la microstructure, des tests en balayage en
fréquence ont été réalisés. La Figure III.3-a présente l’évolution du module élastique (G’) en
fonction de la fréquence angulaire (ω) à une déformation incluse dans le domaine de linéarité
(γ = 10-3) et à T = 50°C. À haute fréquence, nous observons une augmentation de la valeur du
module élastique avec la décroissance de Q, ce qui est cohérent avec les résultats obtenus
précédemment lors du balayage en déformation (Figure III.1-a). A faible fréquence,
un plateau apparaît, ce qui est une caractéristique d’un comportement solide-élastique.
Cet effet est plus prononcé à faible Q avec un plus large plateau. Par ailleurs, le module
visqueux (G’’) varie en fonction de ω avec une pente de 1 à faibles fréquences (Figure III.3b).
Ces résultats indiquent globalement une augmentation des interactions entre les particules
d’asphaltènes. Dans la littérature [7], et comme nous avons vu précédemment (chapitre 2),
ce phénomène est plutôt attribué à un second processus de relaxation, lié aux interactions
entre les particules d’asphaltènes (formation des agrégats).
Figure III.3 (a) Module élastique en fonction de la pulsation, (b) module visqueux et viscosité complexe en fonction
de la pulsation, pour les échantillons préparés à 70 tr/min et 50°C.
10-2 10-1 100101102
10-2
100
102
104
Q = 395 g/h
Q = 1150 g/h
A
B
C
G' (Pa)
(rad/s)
Q décroît
(a)
10-2 10-1 100101102
100
101
102
103
104
105
A
B
C
A
B
C
(rad/s)
G'' (Pa)
1
102
103
104
Q = 1150 g/h
Q = 840 g/h
Q = 395 g/h
(b)
* (Pa.s)
89
1.1.2. Effet de la vitesse de vis N
Les mêmes essais rhéologiques ont également été réalisés pour étudier les effets de la vitesse
de vis N sur les propriétés du bitume. La Figure III.4 présente l’évolution du module élastique
G’, G’’ et η* en fonction de la déformation à 50°C pour les composés C, D et E (Tableau 17).
Tout d’abord, nous observons un changement de G’ plus prononcé avec N que dans le cas de
Q. L’augmentation de N de 70 à 150 tr/min conduit à une décroissance du module élastique
G’ (de 1,66×104 à 2,6×103) et à une augmentation de la déformation critique γc (de 0,16
à 0,25). Par contre, cette situation s’inverse pour l’échantillon E extrudé à 300 tr/min
(G’ = 5,2 ×103 Pa, γc = 0,20) (Figure III.4-a). Le même comportement est observé pour le
module visqueux (G’’) et la viscosité complexe (η*) (Figure III.4-b, c).
Figure III.4 (a) Module élastique (G’) (b) module visqueux (G’’) (c) viscosité complexe (η*) en fonction de la
déformation (γ) pour les échantillons p
rad/s, 50°C).
Nous présentons à la Figure III.5 les tests de balayage en fréquence obtenus pour les
échantillons C, D et E. Sur toute la gamme de fréquence angulaire, le même classement que
les tests du balayage en déformation (Figure III.4) est obtenu. Enfin, l’apparition d’un plateau
à basse fréquence sur G’ est observé dans tous les cas.
10-4 10-3 10-2 10-1 100101
102
103
104
105
N = 70 tr/min
N = 300 tr/min
C
D
E
G' (Pa)
Déformation (-)
N = 150 tr/min
(a)
10-4 10-3 10-2 10-1 100101
104
105
(b)
N = 150 tr/min
N = 300 tr/min
N = 70 tr/min C
D
E
G'' (Pa)
Déformation (-)
10-4 10-3 10-2 10-1 100101
200
400
600
800
1000
(c)
N = 150 tr/min
N = 300 tr/min
N = 70 tr/min C
D
E
* (Pa.s)
Déformation (-)
90
Figure III.5 Module visqueux et viscosité complexe en fonction de la pulsation pour les échantillons préparés à
différentes vitesse de vis et à 50°C.
Il est important de signaler que tous les tests rhéologiques, que ce soit en Q ou en N, ont aussi
été réalisés à 22 et 70°C. Nous observons les mêmes ordres de classement pour G’, G’’ et η*
qu’à 50°C, sauf , bien évidement que le plateau de G’ paraît plus tôt à 70°C (accélération des
phénomènes de relaxation) alors qu’à basse température le plateau est absent (phénomène
plus lent, en raison de la diminution de l’agitation thermique des asphaltènes dans le bitume à
22°C, ce qui entraîne des phénomènes de relaxation des asphaltènes plus lents) (Figure III.6).
Figure III.6 Module élastique en fonction de la pulsation à 22, 50 et 70°C.
Dans l’objectif d’expliquer et de comprendre les variations rhéologiques obtenues, des
analyses chimiques ont été effectués, d’une part des mesures de la teneur en asphaltènes pour
les 5 composés via une séparation asphaltènes/maltène, et d’autre part des analyses infrarouge
en regardant les changements de l’aire des bandes d’absorption.
1.2. Séparation asphaltènes/maltènes
La teneur en asphaltènes pour les cinq échantillons extrudés a été évaluée par la méthode
ASTM [8] qui consiste à séparer les asphaltènes des maltènes par précipitation dans le
10-2 10-1 100101102
10-2
100
102
104
C
D
E
C
D
E
(rad/s)
G' (pa)
102
103
N = 150 tr/min
N = 300 tr/min
* (Pa.s)
N = 70 tr/min
10-2 10-1 100101102
102
104
106
108
22°C
50°C
Fréquence angulaire (rad/s)
Module élastique G' (Pa) 22°C
70°C
10-3
10-1
101
103
105
Module élastique G' (Pa) 50 et 70°C
91
n-pentane. La fraction volumique a été calculée selon :
)Eq.1(
.. Asphmass
sasphaltène
bitume
Asphvol
ρbitume = 1,02 g/cm3 est la masse volumique du bitume à 20°C, ρasphaltènes = 1,165 g/cm3 est
celle des asphaltènes et φmass est le pourcentage massique des asphaltènes.
Tous les résultats sont donnés dans le Tableau 18.
Tableau 18- 
Echantillon
N
(tr/min)
Q
(g/h)
τ
(s)
υmass
(%)
υvol
(%)
Viscosité
(Pa.s)
A
70
1150
162
17,6
15,5
540
B
70
840
202
18,75
16,5
640
C
70
395
368
24
21,1
980
D
150
360
370
19,5
17,1
295
E
300
372
347
21,9
19,2
430
F
-
-
-
0
0
14
Ces valeurs présentent des barres d’erreurs de l’ordre de ± 5%. La viscosité newtonienne du
bitume sans asphaltènes (maltènes) a également été mesurée et a pour valeur 14 Pa.s.
1.3. Interprétation
1.3.1. Q
D’après le Tableau 18, il est observé qu’à une vitesse de vis constante (70 tr/min),
la décroissance de Q de 1150 à 395 g/h conduit à une augmentation de la fraction volumique
d’asphaltènes de 15,5 à 21,1%, accompagnée par une viscosité deux fois plus importante
(Figure III.7). Les modules visqueux et élastiques sont aussi plus élevés à faible fréquence
(Figure III.3-a) : les interactions entre les agrégats d’asphaltènes sont favorisées quand la
fraction volumique d’asphaltènes augmente, ce qui explique ces valeurs élevées de G’ et G’’
avec Q faible.
Figure III.7 B et C préparés
avec différents débits Q à 50°C.
Afin d’interpréter ces résultats d’un point de vue microstructural, une série de mesures
400 600 800 1000 1200
16
18
20
22
Débit d'écoulement Q (g/h)
vol asphaltènes (%)
400
500
600
700
800
900
1000
Q =1150 g/h
Q =840 g/h
Q =395 g/h
Viscosité (Pa.s)
92
infrarouge a été effectuée. La Figure III.8 présente les changements entre les spectres
infrarouges pour les trois bitumes A, B et C. La décroissance de Q conduit à une
augmentation de la bande carbonyle (C=O) localisée à 1700 cm-1. D’autres bandes
d’absorption, telles que les bandes d’élongation (C-O) localisées entre 910-1300 cm-1 et les
sulfoxydes S=O (1030 cm-1), augmentent également lorsque Q décroît. Les valeurs des aires
de ces bandes sont listées dans le Tableau 19.
Tableau 19- Valeurs des aires de quelques pics pour les échantillons A, B et C.
Echantillon
A(C=O)/A
1700 cm-1
A(C=C)/A
1600 cm-1
A(S=O)/A
1030 cm-1
A(C-H)/A
(900-730 cm-1)
A720/ A (1460+1376)
A
0
0,032
0,012
0,060
0,081
B
0,0109
0,074
0,016
0,057
0,068
C
0,0160
0,078
0,022
0,050
0,050
La Figure III.8 présente également la croissance de la bande C=C aromatiques à 1600 cm-1 et
la diminution de l’aire des trois bandes localisées entre 900 et 730 cm-1, attribuées aux C-H
aromatiques, avec la décroissance de Q. Ceci indique une augmentation du rapport C/H,
signifiant que des cycles aromatiques s’assemblent pour produire des feuillets d’asphaltènes.
Par conséquent, la structure devient plus compacte. Ceci confirme l’augmentation de la teneur
en asphaltènes d’un point de vue microscopique.
En outre, nous observons la diminution du rapport des chaînes aliphatiques longues localisées
à 720 cm-1 (supérieur à 4 CH2 successifs) avec la décroissance du débit Q, ce qui valide et
confirme que la structure devient plus compacte à faible Q.
Figure III.8 Spectres infrarouge des échantillons A, B et C ; (a) zone entre 4000 2000 cm-1 et (b) zone entre 2000 et
400 cm-1.
Afin d’expliquer ce comportement, intéressons nous au procédé d’extrusion. En effet,
le temps de séjour du bitume dans l’extrudeuse pourrait être la cause principale de ces
variations. Dans une extrudeuse bivis, le temps de séjour augmente quand le débit
d’écoulement décroît [9]. Dans nos conditions, nous pouvons estimer le temps de séjour
moyen à 162, 202 et 368 sec, pour 1150, 840 et 395 g/h, respectivement. Par conséquent, un
temps de séjour long permet au matériau de se restructurer [10, 11] et de promouvoir la
4000 3500 3000 2500 2000
0,0
0,1
0,2
0,3
0,4
0,5
Absorbance (-)
Nombre d'onde (cm-1)
1150 g/h
840g/h
395 g/h
(a)
as CH3, CH2
s CH3, CH2
O-H C-H sp2
2000 1600 1200 800 400
0,0
0,1
0,2
0,3
C-H aro
S=O
s CH3
as CH3, CH2
C=C
Absorbance (-)
Nombre d'onde (cm-1)
1150 g/h
840g/h
395 g/h
(b)
C=O
93
diffusion de l’oxygène [12], conduisant à une matrice plus oxydée. La haute température de
l’extrudeuse (140-180°C) facilite la diffusion de l’oxygène et conduit à une accélération du
processus de vieillissement, entraînant une augmentation de la teneur en asphaltènes.
Ces résultats sont complètement cohérents avec les études effectuées par Pérez-Lepe et ses
collaborateurs, puisque une augmentation de temps de séjour du bitume dans l’extrudeuse
conduit à une augmentation de sa viscosité et sa teneur en asphaltènes [13].
1.3.2. Effet de la vitesse de vis N
A Q constant, et d’après le Tableau 18, une augmentation de la vitesse de vis conduit à une
décroissance de la viscosité et de la teneur en asphaltènes jusqu’à une valeur à partir de
laquelle ces deux paramètres augmentent de nouveau (Figure III.9).
Figure III.9 onienne pour les trois échantillons C, D et E préparés
avec différentes vitesses N à 50°C.
Une observation de la microstructure par spectroscopie infrarouge clarifie la situation et
explique pourquoi ces changements ont lieu. La Figure III.10 présente l’effet de la vitesse de
vis sur les spectres infrarouges attribués aux composés C, D et E.
Figure III.10 Spectres infrarouge des échantillons C, D et E ; (a) zone entre 4000 2000 cm-1 et (b) zone entre 2000
et 400 cm-1.
50 100 150 200 250 300
17
18
19
20
21
22
23
N=300 tr/min
N=150 tr/min
Vitesse de vis N (tr/min)
vol asphaltènes (%)
N=70 tr/min
200
400
600
800
1000
Viscosité (Pa.s)
4000 3500 3000 2500 2000
0,0
0,1
0,2
0,3
0,4
s CH3, CH2
as CH3, CH2
C-H sp2 O-H
Absorbance (-)
Nombre d'onde (cm-1)
70 tr/min
150 tr/min
300 tr/min
(a)
2000 1600 1200 800 400
0,0
0,1
0,2
0,3
S-S
C=S
(b)
Absorbance (-)
Nombre d'onde (cm-1)
70 tr/min
150 tr/min
300 tr/min
C=O
C=C
as CH3, CH2
s CH3
S=O
C-H aro
94
En comparant les deux échantillons C et D, nous observons que l’augmentation de N conduit
à une décroissance des aires des bandes C=C, C=O, S=O et à une augmentation des C-H
aromatiques et des chaînes aliphatiques longues à 720 cm-1. Ces résultats sont complètement
cohérents avec ceux obtenus dans le cas de l’effet du débit. Toutes les valeurs sont listées
dans le Tableau 20. Ainsi, pour l’échantillon à 150 tr/min, il nous semble que le phénomène
d’oxydation est réduit, mais il ne peut pas être expliqué par le temps de séjour puisque les
valeurs sont semblables : 368 sec à 70 tr/min (composé C) et 370 sec à 150 tr/min
(composé D). L’énergie spécifique (Espe) fournie par l’extrudeuse peut être la cause de cette
variation.
Tableau 20- Valeurs des aires de quelques pics pour les échantillons C, D et E.
Echantillon
A(C=O)/A
1700 cm-1
A(C=C)/A
1600 cm-1
A(S=O)/A
1030 cm-1
A(C-H)/A
(900-730 cm-1)
A720/ A (1460+1376)
C
0,016
0,078
0,022
0,050
0,050
D
0,006
0,037
0,011
0,055
0,102
E
0
0,058
0,005
0,055
0,078
En effet, l’augmentation de la vitesse de vis de 70 à 150 tr/min conduit proportionnellement à
une Espe (150 tr/min) > Espe (70 tr/min). La croissance de cette énergie peut mener à un
éloignement des hétéroatomes et, par suite, une viscosité plus faible avec le composé D est
obtenue. L’explication de cette diminution reste toutefois ambigüe.
Au contraire, le spectre du composé E à 300 tr/min est complètement différent. En effet, une
augmentation de la teneur en asphaltènes est observée, concomitante avec une décroissance
des bandes d’oxydation (C=O) et des aromatiques (C=C), ce qui signifie un faible processus
d’oxydation. Il est totalement incohérent avec les résultats précédents où une augmentation en
teneur d’asphaltènes est accompagnée par une augmentation de contributions d’aromatisation
et d’oxydation. Mais de nouvelles bandes apparaissent dans la région 1200-500 cm-1.
Une bande intense à 1200-1050 cm-1, attribuée à C=S, et une autre bande autour de 640-
540 cm-1, pour les S-S, sont clairement identifiables. Ces deux bandes pourraient être la cause
principale de l’augmentation de viscosité et de la teneur en asphaltènes.
Contrairement aux autres conditions opératoires, où le temps de séjour domine, à forte vitesse
de vis, le taux de cisaillement généré (proportionnel à la vitesse de rotation) devient
probablement le paramètre dominant. Par conséquent, l’énergie mécanique spécifique fournie
par l’extrudeuse devient suffisante pour modifier la microstructure par la création de liaisons
intra et intermoléculaires (S-S), conduisant à une augmentation de la teneur en asphaltènes.
En fait, une teneur élevée en soufre dans le bitume 70/100 (4,35%) facilite la réalisation des
auto-associations des molécules (S-S), démontrées par infrarouge, ce qui entraîne une rigidité
plus importante du bitume E.
1.4. Discussion générale
Un résultat paradoxal est observé en comparant les échantillons B et D. En effet, ils montrent
approximativement la même fraction volumique en asphaltènes (16,5 pour B et 17,1 pour D),
mais une viscosité newtonienne pour B deux fois plus élevée que celle du composé D
95
(640 versus 295 Pa.s). Si l’on compare maintenant les spectres FTIR, nous remarquons que la
bande carbonyle centrée à 1700 cm-1 est plus élevée pour le composé D, ce qui est
complètement cohérent avec le temps de séjour dans l’extrudeuse. En effet, l’estimation du
temps de séjour conduit à 202 secondes pour l’échantillon B, comparé avec 370 secondes
pour D. D’un autre coté, les bandes d’aromatisation (C=C) et sulfoxyde (S=O) sont plus
élevées avec le composé B, ce qui est cohérent avec l’évolution de la viscosité.
Par conséquent, nous pouvons supposer que l’augmentation de la vitesse de vis de 70 à 150
tr/min induit une séparation des hétéroatomes ou des molécules polaires, qui mène à des
petites agrégats d’asphaltènes (le nombre des feuillets aromatiques dans une molécule
d’asphaltène diminue). Donc, une compétition entre la vitesse de vis (taux de cisaillement,
déformation et énergie mécanique spécifique) et le débit d’écoulement (temps de séjour) a
lieu, et la viscosité du bitume est obtenue par compromis entre la teneur en asphaltènes et la
quantité des hétéroatomes existant ou insérés (processus d’oxydation) dans le bitume.
Dans une extrudeuse bivis, les variations de la vitesse de vis N et du débit Q sont souvent
traduites par le rapport N/Q, auquel est proportionnelle l’énergie mécanique spécifique.
Dans l’objectif de mieux interpréter les résultats précédents, nous avons tracé sur la Figure
III.11-a, b, les différentes aires déterminées par ATR-FTIR en fonction de ce rapport N/Q.
Sur ces Figure III.11-a, b, nous remarquons le passage par un maximum au niveau de C=C,
C=O et S=O et par un minimum au niveau des chaînes CH2 longues (N/Q aux alentours
de 10), qui expliquent l’obtention de la viscosité et de la teneur en asphaltènes les plus élevées
dans le cas du composé C. D’autre part, pour le composé D, la faible contribution C=C ainsi
que le maximum obtenu sur l’aire de la bande des chaînes longues CH2 expliquent la valeur
de la viscosité la plus faible.
Figure III.11 Evolution des aires des bandes obtenues par ATR-IR en fonction du rapport N/Q ; (a) bandes
2 (aromatisation et aliphaticité).
1.4.1. Evolution de la viscosité du bitume et modèles rhéologiques
Il existe dans la littérature beaucoup de modèles théoriques et de corrélations empiriques
traitant la viscosité des produits pétroliers tels que les bitumes. Cependant, la plupart de ces
modèles sont fondés sur un système simplifié où les asphaltènes sont dispersés dans un
solvant organique tel que le toluène. D’après la littérature [14], la structure la plus appropriée
010 20 30 40 50
0,000
0,005
0,010
0,015
0,020
0,025
Effet de Q
E
D
E
D
C
C
B
B
A
Fort N
C=O
S=O
Aire (-)
N/Q (tr/g)
Faible N
A
(a)
Effet de N
010 20 30 40 50
0,02
0,04
0,06
0,08
0,10
(b)
Aire (-)
N/Q (tr/g)
C=C
CH2
Faible N
Fort N
C
B
A
B
C
A
D
D
E
E
Effet de Q
Effet de N
96
à un bitume est la structure colloïdale dans laquelle les asphaltènes (2-8 nm) sont dispersés
dans une matrice maltène. Il est bien connu que la viscosité d’une dispersion colloïdale peut
être décrite par une équation de type Krieger-Dougherty [15] :
)Eq.2(1
max0
q
eff
bit
r
η0 est la viscosité du liquide dispersant (maltène dans le cas du bitume), q un facteur de
forme des particules dispersées qui est égale à [η] × φmax avec [η] la viscosité intrinsèque, φmax
est le volume d’empilement maximal et φeff est la fraction volumique effective de la phase
dispersée. Dans une dispersion colloïdale, φeff peut être aussi représenté par le produit d’une
constante de solvatation qui dépend de la température et de la fraction volumique réelle φ :
)3Eq.(.
K
eff
La viscosité intrinsèque [η] des particules d’asphaltènes est variable. 2,5 est généralement
proposé pour les particules sphériques dures mais, pour les formes ellipsoïdale et disque, il est
supérieur à 2,5. Luo et Gu [16] ont trouvé que les particules d’asphaltènes possèdent une
forme non-sphérique ([η] entre 5 et 6) et probablement avec différentes tailles, c’est à dire
polydisperse. La fraction volumique d’empilement maximale φmax est également difficile à
appréhender puisque elle est dépendante de la structure et de l’origine du bitume. Storm et
Sheu [17] ont trouvé que φmax des particules d’asphaltènes est proche de 0,35. Par contre, Luo
et Gu [16] estiment cette valeur plutôt à 0,6 -0,7.
La Figure III.12 présente l’évolution de la viscosité relative des échantillons extrudés en
fonction de la fraction volumique des asphaltènes. Tout d’abord, nous observons qu’on ne
peut pas construire une courbe maîtresse avec tous les points, ce qui indique que la fraction
volumique n’est pas le seul paramètre qui contrôle la viscosité.
Figure III.12 Viscosité relative mesurée pour les 5 échantillons de bitume en fonction de la fraction volumique des
asphaltènes à 50°C (symboles) et ajustement par une équation type Krieger-Dougherty (ligne).
0 5 10 15 20 25 30
0
20
40
60
80
100 Krieger-Dougherty :
q=5,5 et max =0,37
Effet de Q
Effet de N
Viscosité relative (-)
Fraction volumique d'asphaltènes (%)
Krieger-Dougherty :
q=4,35 et max =0,35
97
Sur la Figure III.12, il semble que l’on puisse distinguer deux familles, plus ou moins bien
modélisées par la loi de Krieger-Dougherty : les échantillons à 70 tr/min (débit différent)
montrent un φmax de 0,37 et un facteur de forme q de 5,5. Par ailleurs, les échantillons à Q
constant donnent un φmax de 0,35 et un facteur de forme q de 4,35. Ces valeurs sont proches de
celles trouvées dans la littérature [17].
1.4.2. Evolution de la viscosité du bitume en fonction de la teneur en
asphaltènes
Afin de confirmer les résultats obtenus ci-dessus, d’une part, et de trouver une relation entre la
viscosité du bitume et la teneur en asphaltènes d’autre part, des études plus spécifiques ont été
entreprises. Ces essais consistent à séparer le bitume en asphaltènes et maltènes par la
méthode standard ASTM, puis de reconstituer le bitume, afin de disposer d’un protocole
satisfaisant pour pouvoir réaliser ensuite différents échantillons variant selon leur fraction
volumique en asphaltènes et de structure semblable à celle du bitume d’origine.
La validation de cette méthode s’est faite après s’être assuré de la similarité des propriétés
entre le bitume d’origine et le bitume reconstitué. Ainsi, l’analyse de leurs propriétés
macroscopiques a tout d’abord été effectuée par comparaison de leur masse volumique
respective et de leur réponse rhéologique à un test en écoulement. La mesure de la masse
volumique par pycnomètre donne une valeur similaire pour les deux bitumes : dorigine = 1,025
et dreconstitué = 1,030.
La Figure III.13 présente l’évolution de la viscosité en fonction du taux de cisaillement
observée lors de tests en écoulement à 50°C pour le bitume d’origine et le bitume reconstitué.
Cette Figure montre une valeur de viscosité de 940 Pa.s et de 890 Pa.s, respectivement, pour
le bitume d’origine et pour le bitume reconstitué, soit une différence de 6 %.
Figure III.13 Viscosité en fonction du taux de cisaillement pour le bitume d'origine et le bitume reconstitué.
L’étude des propriétés microscopiques a été menée en comparant les réponses à des tests
rhéologiques en régime dynamique (balayage en formation ainsi qu’en fréquence).
La Figure III.14 présente l’évolution des modules G’ et G’’ versus la fréquence angulaire,
10-3 10-2 10-1 100101102
101
102
103
104
newt = 890 Pa.s
Bitume d'origine
Bitume reconstitué
Viscosité (Pa.s)
Taux de cisaillement (s-1)
newt = 940 Pa.s
98
réalisée pour les deux bitumes. Elle permet d’observer une allure similaire des courbes,
malgré la petite différence observée à basse fréquence sur G’.
Figure III.14 Modules G' et G'' en fonction de la fréquence angulaire pour le bitume d'origine et le bitume
reconstitué.
Cette approche a également été complétée par ATD-ATG ainsi que par comparaison des
liaisons chimiques en présence par IRTF. Par ATD-ATG, on observe une masse restante de
16,02 % et de 15,28 % à 780°C, respectivement, pour le bitume d’origine et le bitume
reconstitué. Les cendres restantes correspondent aux fractions réticulées. En zoomant sur la
zone de perte de masse entre 300 et 600 °C, on observe une parfaite superposition des courbes
(voir Figure III.15-a). Les spectres IRTF révèlent que les liaisons chimiques relatives aux
deux bitumes sont de même nature et que leur présence relative dans les deux matériaux ainsi
que leurs concentrations sont identiques (Figure III.15-b).
Figure III.15 (a) Perte de masse en fonction de la température pour le bitume d'origine et le bitume reconstitué, (b)
spectre IRTF du bitume d'origine et du bitume reconstitué.
Enfin, le SAXS, permet de comparer les deux échantillons à l’échelle nanométrique. La
Figure III.16 représente l’évolution de l’intensité I en fonction du vecteur d’onde q.
Une bonne superposition des deux courbes est remarquée. La dimension fractale df, pente de la
10-2 10-1 100101102
10-1
100
101
102
103
104
105
G' Bitume d'origine
Bitume reconstitué
G', G'' (Pa)
Fréquence angulaire (rad/s)
G''
4000 3500 3000 2500 2000 1500 1000 500
0,0
0,1
0,2
0,3
0,4
0,5
Absorbance (-)
Nombre d'onde (cm-1)
Bitume d'origine
Bitume reconstitué
(b)
300 350 400 450 500 550 600
0
20
40
60
80
100
Masse restante (%)
Temperature (°C)
Bitume d'origine
Bitume reconstitué
(a)
99
courbe à faible q, vaut 1,076 et 1,068 respectivement pour le bitume d’origine et le bitume
reconstitué. Cette valeur signifie que les asphaltènes présentent des structures
unidimensionnelles (bâton, filament) dans les deux matériaux.
On observe également la présence d’une « bosse amorphe » située entre 0,721 Å-1 et 2,271 Å-1
soit pour des distances caractéristiques entre 2,77 Å et 8,72 Å. D’autre part, deux pics
cristallins sont présents sur la bosse amorphe, pour q = 1,53 Å-1 et q = 1,69 Å-1, soit pour des
distances caractéristiques de 4,11 Å et de 3,71 Å. Ces deux pics sont attribués à la distance
entre les feuillets d’asphaltènes.
Figure III.16 Intensité en fonction du vecteur d'onde q obtenu par SAXS pour le bitume d'origine et le bitume
reconstitué.
Dès lors qu’une méthode de reconstitution du bitume a pu être jugée satisfaisante, différents
échantillons représentatifs de bitumes, variant selon leur fraction en asphaltènes, ont été
synthétisés. Ces derniers ont alors été analysés afin d’étudier la variation des propriétés
rhéologiques du bitume en fonction de la fraction volumique en asphaltènes, allant de 1% à
50%. La Figure III.17 représente l’évolution de la viscosité relative ηr=η/η0 en fonction de la
fraction volumique en asphaltènes qui a été modélisée par une loi de type Krieger-Dougherty.
Les paramètres φmax et q ont été déterminés à l’aide de la fonction solveur d’Excel et l’on
obtient : φmax = 0,432 et q = 5,707, soit une viscosité intrinsèque [η] de 13,19 ; ces valeurs
sont cohérentes avec celles obtenues lors des essais à Q et N variables. La valeur élevée de [η]
provient de l’effet conjugué de la non-sphéricité des particules et de l’effet de solvatation dû à
la présence des résines [16, 18]. Cette valeur est tout à fait cohérente avec celle obtenue par
Luo et al. [16] de 13,69.
10-2 10-1 100101
10-2
10-1
100
101
0,7 1,4 2,1
0,01
0,1
I (cm-1 )
q -1)
I (cm-1)
q -1)
Bitume d'origine
Bitume reconstitué
Région pour
le calcul de la pente
a(bit.pur) = -1,076
a(bit.recon) = -1,068
100
Figure III.17 Viscosité relative du bitume reconstitué en fonction de sa fraction volumique en asphaltènes et
modélisation par une loi de type Krieger-Dougherty.
La valeur de φmax de 43,2% signifie que l’on ne peut pas réaliser un bitume de fraction
volumique plus élevée. On observe effectivement une divergence de la viscosité lorsque la
fraction volumique se rapproche de cette valeur. Ces résultats montrent qu’en absence de
contrainte mécanique (influence de N et Q), il est possible d’incorporer une quantité plus
importante d’asphaltènes (φmax augmente). En effet, l’augmentation de la fraction volumique
d’asphaltènes (0,43 au lieu de 0,35 ou 0,37) est certainement due à l’absence des liaisons intra
et intermoléculaire provoquées par les hétéroatomes. La reconstitution du bitume après avoir
été dissous dans un solvant conduit à la même composition chimique, mais pas à la même
organisation des molécules (formule développée). Par conséquent, l’effet des hétéroatomes
sur la viscosité du bitume peut être non négligeable si le matériau a subi préalablement des
contraintes thermomécanique (γ, N, Espe, …). Cette viscosité est déterminée à la fois par la
teneur en asphaltènes et en hétéroatomes.
A ce stade, les caractéristiques rhéologiques de la matrice bitume ont été bien étudiées et
comprises, ainsi que l’influence des conditions opératoires d’extrusion, N et Q.
Mais l’enrobé utilisé dans le cas réel est plus complexe. Il est composé de 60 % de bitume et
de 40 % en masse de sels. Ces sels permettent d’immobiliser les radionucléides par co-
précipitation afin d’assurer leur confinement. L’introduction de ces sels dans le bitume a été
réalisée par un processus industriel à haute température, dans une extrudeuse bivis corotative.
Pour cela, nous allons étudier dans la 2ème partie de ce chapitre l’influence de l’ajout de sels,
ainsi que l’effet des conditions d’extrusion (vitesse de vis N et débit d’écoulement Q) sur le
comportement rhéologique des enrobés.
La stratégie consiste à préparer des échantillons modèles simples (monosel et bisel) par
extrusion. Pour chaque enrobé, cinq composés ont été préparés, avec trois vitesses de vis N de
70 à 300 tr/min et trois débit d’écoulement Q de 0,6 à 1,2 kg/h.
0,00 0,05 0,10 0,15 0,20 0,25 0,30 0,35 0,40
10-1
100
101
102
103
104
105
106
rel exp
rel model
relative (Exp et model)
vol d'asphaltènes
101
Cette étape d’extrusion a ensuite été suivie par une caractérisation rhéologique, afin de
comprendre d’une part l’impact de ces sels sur le comportement rhéologique du bitume pur, et
d’autre part d’étudier les effets de conditions d’extrusion (N et Q) sur l’état de dispersion des
sels et la réponse rhéologique.
Dans l’objectif de simplifier et de clarifier les explications des résultats, nous allons diviser
cette partie en trois sections, chacune étant attribuée à un type d’enrobé. Dans chaque section,
une stratégie commune a été utilisée. Dans un premier temps, l’effet de la vitesse de vis sur
les propriétés rhéologiques du composé est présenté. Ensuite, l’influence du débit
d’écoulement est discutée.
2.       
propriétés des enrobés bitumes
2.1. Enrobé monosel type BaSO4
2.1.1. Effet de la vitesse de vis N
La Figure III.18-a présente l’évolution du module élastique G’ en fonction de la déformation
γ, à une fréquence angulaire de 100 rad/s, pour les trois enrobés réalisés avec différentes
vitesses de vis à 50°C (Tableau 21). Il est observé que les modules G’ au plateau sont
nettement plus élevés que celui du bitume pur et que ces modules augmentent légèrement
avec la vitesse de vis N.
Figure III.18 (a) module élastique G’ et (b) module élastique relatif G’/G’p en fonction de la déformation pour les
enrobés BaSO4 préparés avec différentes vitesses de vis.
En parallèle, l’évolution du module élastique normalisé (G’/G’p) en fonction de la
déformation (Figure III.18-b) montre la décroissance du domaine de linéarité avec la vitesse
de vis. Ce dernier effet est couramment appelé « effet Payne » dans le cas des polymères
chargés. Il est lié à la destruction d’un réseau d’interaction existant entre les charges
dispersées dans la matrice polymère [19]. La limite du domaine viscoélastique linéaire
(déformation critique) a été définie comme le point au-delà duquel la valeur mesurée de G*
est diminué à 90 % de sa valeur initiale [20].
10-5 10-4 10-3 10-2 10-1 100101
103
104
T = 50°C
Bitume pur
W1 (N = 70 tr/min)
W2 (N = 150 tr/min)
W3 (N= 300 tr/min)
Module élastique G' (Pa)
Déformation (-)
(a)
10-5 10-4 10-3 10-2 10-1 100101
0,0
0,3
0,6
0,9
1,2
Bitume pur
W1 (N = 70 tr/min)
W2 (N = 150 tr/min)
W3 (N = 300 tr/min)
(G'r) = G'/G'p
Déformation (-)
N augmente
(b)
T = 50°C
102
Une faible déformation critique peut être attribuée à l’augmentation de la concentration des
particules dans la matrice ou à une amélioration de l’état de dispersion [21-23]. Dans notre
cas, puisque la concentration de sels introduits est constante quelle que soit la vitesse de vis
(Tableau 21), ce résultat montre que la qualité de l’état de dispersion est améliorée quand la
vitesse de vis croît.
Tableau 21- 4.
Enrobé
BaSO4
N
(tr/min)
Q
(g/h)
%
massique
de sels
W1
70
606
38,9
W2
150
552
39
W3
300
603
39,7
W4
70
798
37,5
W5
70
1140
40,4
Afin d’étudier plus en détail l’état de dispersion et de quantifier les interactions entre les sels,
des tests de balayage en fréquence ont ensuite été effectués.
La Figure III.19-a représente le module élastique G’ en fonction de la pulsation mesuré à
50°C, dans le domaine de linéarité (γ = 10-3) pour les 3 composés W1, W2 et W3. A haute
pulsation, la contribution de la matrice bitume domine par rapport à la contribution des
agrégats [21] mais, à faible pulsation, un plateau apparaît qui est classiquement attribué au
réseau de sel et est associé à un comportement pseudo-solide.
D’après la littérature, la croissance du module élastique à basse fréquence angulaire est
expliquée par l’existence d’un réseau de charges en interaction [20, 23, 24]. Cet effet est plus
prononcé pour la vitesse de vis élevée avec une large augmentation de G, qui indique la
présence de fortes interactions entre les particules de BaSO4.
Par ailleurs, l’augmentation de N conduit également à une légère déviation du module
visqueux G’’ à basse pulsation. Cette déviation est parfois attribuée à la présence de larges
agglomérats et expliquée par un processus de relaxation interne (énergie dissipée) [25]
(Figure III.19-b).
Figure III.19 Module élastique (a) et visqueux (b) en fonction de la pulsation pour les enrobés BaSO4 préparés avec
différentes vitesses de vis.
10-2 10-1 100101102
10-1
100
101
102
103
104
105
(a)
T = 50°C
Bitume pur
W1 (N = 70 tr/min)
W2 (N = 150 tr/min)
W3 (N = 300 tr/min)
Module élastique G'(Pa)
Fréquence angulaire (rad/s)
10-2 10-1 100101102
100
101
102
103
104
105
106
(b)
Bitume pur
W1 (N = 70 tr/min)
W2 (N = 150 tr/min)
W3 (N = 300 tr/min)
Module visqueux G'' (Pa)
Fréquence angulaire (rad/s)
T = 50°C
103
Les plateaux observés sur G’ et G’’ à N = 300 tr/min conduisent à une forte augmentation de
la viscosité complexe η* à basse fréquence (Figure III.20). Ce résultat indique clairement
l’amélioration de l’état de dispersion quand N augmente, principalement au-delà d’une valeur
seuil de 150 tr/min.
Figure III.20 Viscosité complexe en fonction de la pulsation pour les enrobés BaSO4 préparés avec différentes
vitesses de vis.
Dans la littérature, une approche simple a été développée pour quantifier les interactions entre
les charges dispersées dans une matrice. Elle se base sur l’utilisation d’un modèle théorique
de type Carreau-Yasuda à seuil. Ce modèle, présenté dans le chapitre 2, est donné par :
 
)4Eq.()(1* 1
0
0a
n
a

σ0 est le seuil d’écoulement, η0 la viscosité newtonienne, λ un temps caractéristique, a le
paramètre de Yasuda et n l’indice sans dimension de la loi puissance. La détermination de ces
paramètres se fait numériquement à l’aide d’un solveur Microsoft Excel, en minimisant la
différence entre les valeurs expérimentales et celles calculées par le modèle. Dans ce cas,
le seuil d’écoulement du bitume est égal à 0,005 Pa à 50°C. Il varie à 0,74, 0,75 et 42,9 Pa
pour les trois enrobés produits à 70, 150 et 300 tr/min, respectivement.
2.1.2. Q
Des balayages en déformation et en fréquence ont été réalisés sur les échantillons W1, W4 et
W5 extrudés à différents débits d’écoulement, allant de 600 à 1200 g/h. Nous observons sur la
Figure III.21-a, b l’augmentation du module élastique, accompagnée par une diminution de la
déformation critique quand le débit augmente. Ces résultats semblent montrer une
amélioration de l’état de dispersion des sels.
10-2 10-1 100101102
103
104
T = 50°C Bitume pur
W1 (N = 70 tr/min)
W2 (N = 150 tr/min)
W3 (N = 300 tr/min)
Viscosité complexe (Pa.s)
Fréquence angulaire (rad/s)
104
Figure III.21 - (a) module élastique G’ et (b) module élastique relatif G’/G’p en fonction de la déformation pour les
enrobés BaSO4 
Sur les tests de balayage en fréquence (Figure III.22-a, b), la même tendance est observée :
à faible pulsation, un plateau pseudo-solide apparaît avec le débit le plus élevé
(Q = 1140 g/h). Cependant, le niveau de ce plateau est moins prononcé que celui observé avec
la forte vitesse de vis (N = 300 tr/min). Aucune différence sur G’ n’est remarquée entre les
deux échantillons W1 (débit faible 600 g/h) et W4 (débit moyen 798 g/h). L’estimation du
seuil d’écoulement par la loi de Carreau-Yasuda à seuil (Eq. 4) donne des valeurs de 0,75,
0,93 et 3,41 Pa, pour 606, 798 et 1140 g/h, respectivement.
Figure III.22 Module élastique (a) et viscosité complexe (b) en fonction de la pulsation pour les enrobés BaSO4

2.1.3. Discussion
Comme il a été mentionné précédemment, l’augmentation de la vitesse de vis ou du débit
d’écoulement montre les mêmes effets sur le comportement rhéologique. Cependant, dans la
littérature, l’état de dispersion est généralement amélioré avec les faibles débits et les fortes
vitesses de vis, qui favorisent des taux de cisaillement plus élevés (N fort) et des temps de
séjour plus longs (Q faible) [9, 26].
La diminution de la déformation critique ainsi que l’augmentation du seuil d’écoulement au-
delà de 150 tr/min sont le signe de l’amélioration de l’état de dispersion (Figure III.23). Les
10-5 10-4 10-3 10-2 10-1 100
104
2x104
3x104(a)
Bitume pur
W1 (Q = 583 g/h)
W4 (Q = 798 g/h)
W5 (Q = 1140 g/h)
Module élastique G' (Pa)
Déformation (-)
T = 50°C
10-5 10-4 10-3 10-2 10-1 100101
0,4
0,6
0,8
1,0
1,2 T = 50°C
Bitume pur
W1 (Q = 583 g/h)
W4 (Q = 798 g/h)
W5 (Q = 1140 g/h)
G'r
Déformation (-)
(b)
10-2 10-1 100101102
10-1
100
101
102
103
104
105
Bitume pur
W1 (Q = 583 g/h)
W4 (Q = 798 g/h)
W5 (Q = 1140 g/h)
Module élastique G' (pa)
Fréquence angulaire (rad/s)
T = 50°C (a)
10-2 10-1 100101102
1000
2000
3000 T = 50°C (b)
Bitume pur
w1 (Q = 606 g/h)
w4 (Q = 798 g/h)
w5 (Q = 1140 g/h)
Viscosité complexe h (Pa.s)
Fréquence angulaire (rad/s)
105
photos MEB confirment cette tendance (Figure III.24). En outre, il est observé que le nombre
de larges agglomérats de BaSO4 décroît quand la vitesse de vis augmente.
Figure III.23 N dans le cas des
enrobés BaSO4.
Ce qui est plus surprenant, ce sont les résultats similaires obtenus lorsque le débit
d’écoulement augmente : la déformation critique diminue, accompagnée par une
augmentation du seuil d’écoulement (Figure III.25). Néanmoins, la valeur du seuil
d’écoulement est dix fois plus faible que celle obtenue avec la forte vitesse de vis N (3,41 et
42,9 Pa), ce qui indique que la qualité de l’état de dispersion est probablement moins
prononcée quand le débit d’écoulement augmente. D’un autre côté, les observations MEB
(Figure III.24) n’apportent pas une explication définitive, puisque des résultats similaires
(nombre des agglomérats, état de dispersion) sont obtenus quel que soit le débit d’écoulement.
50 100 150 200 250 300
0,00
0,01
0,02
0,03
0,04
0,05
Déformation critique
Seuil d'écoulement
Vitesse de vis (tr/min)
Déformation critique (-)
0
10
20
30
40
50
Seuil d'écoulement (Pa)
106
Figure III.24 Images MEB (×250) pour les enrobés BaSO4 préparés avec différentes vitesses de vis N et débits
Q.
L’état de dispersion n’évolue donc pas de manière monotone en fonction du rapport N/Q,
comme c’est souvent le cas en extrusion bi-vis [26, 27].
Le profil de vis spécifique utilisé ici pourrait expliquer ces résultats. En effet, contrairement à
un profil de vis classique, celui utilisé dans cette étude possède à la sortie un élément de vis à
pas inverse, permettant de retenir la matière et de récupérer le matériau par gravité.
Par conséquent, l’augmentation du débit conduit à une augmentation du taux de
remplissage local, en amont du pas inverse. Ceci entraîne un temps de séjour et une énergie
mécanique localement plus élevés, ce qui pourrait expliquer une meilleure dispersion des sels
à fort débit.
300 tr/min, 603 g/h 70 tr/min, 1140 g/h
150 tr/min, 552 g/h 70 tr/min, 798 g/h
70 tr/min, 606 g/h 70 tr/min, 606 g/h
107
Figure III.25 avec le Q dans le
cas des enrobés BaSO4.
2.2. Enrobé monosel type NaNO3
Tout d’abord, il est important de noter deux caractéristiques principales des sels de NaNO3.
Contrairement aux sels de BaSO4, ces sels sont solubles dans l’eau. Par conséquent, les sels
cristallisent au moment de l’évaporation de l’eau dans l’extrudeuse à travers les fourreaux 4,
5, 6 et 7.
Cette particularité a un effet majeur sur la morphologie des enrobés, ainsi que sur leurs
propriétés rhéologiques. Les cinq enrobés de NaNO3 ainsi que leurs conditions d’extrusion
sont donnés dans le Tableau 22.
Tableau 22 3.
Enrobé
NaNO3
N
(tr/min)
Q
(g/h)
%
massique
de sels
N1
70
590
36,2
N2
150
596
38,8
N3
300
596
40
N4
70
857
36,3
N5
70
1183
38,1
2.2.1. Effet de la vitesse de vis N
La Figure III.26 présente l’évolution du module élastique G’ en fonction de la déformation à
100 rad/s, mesurée à 50°C pour les trois composés N1, N2 et N3 (voir Tableau 22).
Contrairement au premier cas (monosel BaSO4), il est observé que le module élastique et la
déformation critique diminuent avec l’augmentation de la vitesse de vis.
600 700 800 900 1000 1100 1200
0,02
0,03
0,04
0,05 Déformation critique
Seuil d'écoulement
Débit d'écoulement (g/h)
Déformation critique (-)
0,5
1,0
1,5
2,0
2,5
3,0
3,5
Seuil d'écoulement (Pa)
108
Figure III.26 (a) module élastique G’ et (b) module élastique relatif G’/G’p en fonction de la déformation pour les
enrobés NaNO3 préparés avec différentes vitesses de vis.
Pour compléter l’étude, des balayages en fréquence ont été réalisés. La Figure III.27-a
présente l’évolution du module élastique G’ en fonction de la pulsation dans le domaine
liniaire (γ = 0,001) pour les trois composés, mesuré à 50°C.
Sur cette Figure III.27-a, deux comportements opposés sont observés. A haute pulsation, en
accord avec les résultats obtenus précédemment en balayage en déformation, le module
élastique G’ diminue avec l’augmentation de la vitesse de vis. Cependant, à faible pulsation,
un plateau tend à apparaître mais avec une tendance inversée, G’ augmente avec
l’augmentation de la vitesse de vis N. La valeur de G’ à ω = 0,01 rad/s est de 1,26, 2,15 et
2,62 Pa à 70, 150 et 300 tr/min, respectivement.
Figure III.27 Module élastique (a) et visqueux (b) en fonction de la pulsation pour les enrobés NaNO3 préparés avec
différentes vitesses de vis.
Sur la Figure III.27-b, l’évolution du module visqueux G’’ en fonction de la fréquence
angulaire est présentée. A haute fréquence, les trois courbes montrent une tendance similaire à
celle observée avec G’, où les modules G’’ diminuent avec la vitesse de vis. A basse
pulsation, une faible variation de la courbe à 300 tr/min (composé N3) apparaît. L’observation
de la viscosité complexe η* confirme la complexité du comportement rhéologique des
enrobés NaNO3 (Figure III.28). Une déviation de la viscosité est observée à faible pulsation à
10-5 10-4 10-3 10-2 10-1 100101
0,4
0,6
0,8
1,0
1,2 (b)
Bitume pur
N1 (N = 70 tr/min)
N2 (N = 150 tr/min)
N3 (N = 300 tr/min)
G'r
Déformation (-)
10-5 10-4 10-3 10-2 10-1 100101
103
104
105
Bitume pur
N1 (N = 70 tr/min)
N2 (N = 150 tr/min)
N3 (N = 300 tr/min)
Module élastique G' (Pa)
Déformation (-)
T = 50°C (a)
10-2 10-1 100101102
10-1
100
101
102
103
104
105
Bitume pur
N1 (N = 70 tr/min)
N2 (N = 150 tr/min)
N3 (N = 300 tr/min)
Module élastique G' (Pa)
Fréquence angulaire (rad/s)
T = 50°C (a)
10-2 10-1 100101102
100
101
102
103
104
105
106
Bitume pur
N1 (N = 70 tr/min)
N2 (N = 150 tr/min)
N3 (N = 300 tr/min)
Module visqueux G'' (Pa)
Fréquence angulaire (rad/s)
T = 50°C (b)
Faible déviation de G'' à 300 tr/min
109
300 tr/min. Le seuil d’écoulement correspondant (6,9 Pa) est plus faible que celui obtenu avec
l’enrobé BaSO4 (42,9 Pa) produit dans les mêmes conditions (N = 300 tr/min et Q = 600 g/h).
Figure III.28 Viscosité complexe en fonction de la pulsation pour les enrobés NaNO3 préparés avec différentes
vitesses de vis.
2.2.2. Q
D’après les tests de balayage en déformation, nous observons une décroissance du module
élastique G’ et de la déformation critique γc quand le débit d’écoulement Q augmente pour les
trois enrobés N1, N4 et N5 (Figure III.29-a, b). Une observation similaire à celle de l’effet de la
vitesse de vis est obtenue.
Figure III.29 (a) module élastique G’ et (b) module élastique relatif G’/G’p en fonction de la déformation pour les
enrobés NaNO3 
De la même façon que pour l’effet de N, quand Q augmente, G’ et η* diminuent à haute
pulsation et augmentent à faible fréquence angulaire (Figure III.30-a, b). Une large
augmentation de la viscosité complexe est obtenue au débit le plus élevé (enrobé N5),
conduisant à un seuil d’écoulement de l’ordre de 20,2 Pa (Figure III.30-b).
10-2 10-1 100101102
1000
2000
3000
4000
5000 Bitume pur
N1 (N = 70 tr/min)
N2 (N = 150 tr/min)
N3 (N = 300 tr/min)
Viscosité complexe * (Pa.s)
Fréquence angulaire (rad/s)
T = 50°C
10-5 10-4 10-3 10-2 10-1 100101
0,0
0,2
0,4
0,6
0,8
1,0
1,2
Bitume pur
N1 (Q = 590 g/h)
N4 (Q = 857 g/h)
N5 (Q = 1183 g/h)
G'r
Déformation (-)
Q augmente
T = 50°C
10-6 10-5 10-4 10-3 10-2 10-1 100101
104
105
10-5 10-4 10-3 10-2 10-1 100101
0,0
0,2
0,4
0,6
0,8
1,0
1,2
Pure bitumen
A (Q = 596 g/h)
D (Q = 857 g/h)
E (Q = 1183 g/h)
G'r
Strain (-)
Q increase
Bitume pur
N1 (Q = 590 g/h)
N4 (Q = 857 g/h)
N5 (Q = 1183 g/h)
Module élastique G' (Pa)
Déformation (-)
T = 50°C (a)
110
Figure III.30 - Module élastique (a) et viscosité complexe (b) en fonction de la pulsation pour les enrobés NaNO3
p
2.2.3. Discussion
A haute fréquence angulaire, une décroissance de G’, G’’ et η* est observée avec
l’augmentation de la vitesse de vis ou du débit d’écoulement. Les observations MEB montrent
clairement une structure hétérogène à faible N et une diminution de la taille des cristaux de
NaNO3 quand la vitesse de vis augmente de 150 à 300 tr/min (Figure III.31).
Figure III.31 Images MEB (×250) pour les enrobés NaNO3 préparés avec différentes vitesses de vis N et débits
Q.
10-2 10-1 100101102
10-1
100
101
102
103
104
105
Bitume pur
N1 (Q = 590 g/h)
N4 (Q = 857 g/h)
N5 (Q = 1183 g/h)
Module élastique G' (Pa)
Fréquence angulaire (rad/s)
T = 50°C (a)
10-2 10-1 100101102
103
2x103
3x103
4x103(b)
Bitume pur
N1 (Q = 590 g/h)
N4 (Q = 857 g/h)
N5 (Q = 1183 g/h)
Viscosité complexe * (Pa.s)
Fréquence angulaire (rad/s)
T = 50°C
300 tr/min, 596 g/h 70 tr/min, 1183 g/h
150 tr/min, 596 g/h 70 tr/min, 857 g/h
70 tr/min, 590 g/h 70 tr/min, 590 g/h
(a) (b)
111
Comme il a été montré dans le Tableau 22, la fraction massique de sels NaNO3 est constante
dans les cinq échantillons (φm ≈ 40%, correspondant à une fraction volumique φv de l’ordre de
21,7%). Par conséquent, les différences observées sur la viscosité sont probablement liées à la
différence de taille des cristaux et à leurs morphologies différentes.
Comme nous voyons à la Figure III.31, la taille des cristaux tend à diminuer en passant de 150
à 300 tr/min, mais pas entre 590 et 1183 g/h. Par ailleurs, l’interprétation du comportement
visqueux des composés NaNO3 à haute pulsation reste ambigüe. Par contre, à basse pulsation,
la décroissance de la taille des cristaux due à l’augmentation de la vitesse de vis conduit à des
interactions plus importantes, induisant une augmentation du caractère élastique et
l’apparition d’un plateau. Comme dans le cas de BaSO4, cet effet est principalement visible à
la vitesse de vis la plus élevée (N = 300 tr/min) et à Q élevé aussi.
Par contre, les observations MEB pour les trois enrobés (N1, N4 et N5) produits avec différents
débits d’écoulement montrent une morphologie similaire, quel que soit le débit.
Le comportement rhéologique particulier du composé extrudé au débit le plus élevé reste donc
difficile à expliquer. En revanche, la comparaison entre les deux photos MEB attribuées aux
enrobés N3 et N5, indiquent des tailles de cristaux plus petites avec l’enrobé N5 extrudé à fort
Q, ce qui permet d’expliquer l’obtention d’une contrainte seuil plus importante 20,2 Pa face à
2,62 pour le composé N3.
2.3. Enrobé bisel
Tout d’abord, il est important de signaler que les enrobés bisels sont formés de 2/3 de sels
insolubles (BaSO4) et 1/3 de sels solubles (NaNO3). Les cinq enrobés sont présentés dans le
Tableau 23.
Tableau 23 
Enrobé
Bisel
N
(tr/min)
Q
(g/h)
%
massique
de sels
B1
70
585
35,9
B2
150
585
38,3
B3
300
585
38,9
B4
70
814
34,9
B5
70
1200
32,5
2.3.1. Effet de la vitesse de vis N
Les tests de balayage en déformation ont été réalisés pour les trois composés B1, B2 et B3
extrudés à 70, 150 et 300 tr/min, respectivement. Aucun effet de N n’est observé sur
l’évolution du module élastique (G’) des trois composés (Figure III.32).
112
Figure III.32 Module élastique G’ en fonction de la déformation pour les enrobés bisels préparés avec différentes
vitesses de vis.
Cette superposition des courbes résulte de l’obtention de deux effets antagonistes que l’on a
vu dans le cas de deux monosels NaNO3 et BaSO4. En effet, dans le cas de BaSO4,
l’augmentation de N conduit à une croissance de G’ due à une dispersion améliorée, mais une
décroissance de valeurs de G’ est observée dans le cas de NaNO3. C’est donc un compromis
entre deux effets contradictoires. La valeur de G’ au plateau pour les enrobés bisels (B1, B2 et
B3) est égale à la moyenne des modules des enrobés bitume : 2/3 G’BaSO4 + 1/3 G’NaNO3
(23000 Pa).
Les tests de balayage en fréquence montrent, à haute pulsation, un résultat complètement
cohérent avec les tests en balayage en déformation, où les paramètres G’ G’’ et η* sont
identiques, quelle que soit la vitesse de vis appliquée. A faible pulsation, une légère
augmentation de G’ est remarquée, accompagnée par une faible augmentation de la viscosité
complexe quand la vitesse de vis augmente. Il semblerait que ce soit le réseau de BaSO4 qui
contôle le comportement rhéologique de l’enrobé (Figure III.33-a, b).
10-5 10-4 10-3 10-2 10-1 100101
103
104
105
Bitume pur
B1 (N = 70 tr/min)
B2 (N = 150 tr/min)
B3 (N = 300 tr/min)
Module élastique G' (Pa)
Déformation (-)
113
Figure III.33 Module élastique (a) et viscosité complexe (b) en fonction de la pulsation pour les enrobés bisels
préparés avec différentes vitesses de vis.
2.3.2. Effet du Q
L’augmentation du débit d’écoulement Q montre une décroissance du module élastique (G’)
(Figure III.34-a) concomitante avec une diminution du module visqueux G’’ et de la viscosité
complexe η* (Figure III.34-c, d). Ce résultat est complètement similaire à celui obtenu
précédemment dans le cas de monosel de type NaNO3. Donc, malgré la faible augmentation
du module G’ avec le débit observée dans le cas des monosels BaSO4 (Figure III.25),
la réponse rhéologique du bisel est plutôt contrôlée par le sel NaNO3 quand le débit Q
augmente.
10-2 10-1 100101102
500
1000
1500
2000
2500
3000 (b) Bitume pur
B1 (N= 70 tr/min)
B2 (N= 150 tr/min)
B3 (N= 300 tr/min)
Viscosité complexe * (Pa.s)
Fréquence angulaire (rad/s)
10-2 10-1 100101102
10-1
100
101
102
103
104
105
Bitume pur
B1 (N = 70 tr/min)
B2 (N = 150 tr/min)
B3 (N = 300 tr/min)
Module élastique G' (Pa)
Fréquence angulaire (rad/s)
(a)
114
Figure III.34 (a) Module élastique G’, (b) module élastique relatif G’/G’p , (c) module visqueux G’’, (d) viscosité
complexe η* en fonction de la déformation γ 
L’effet de Q sur les trois composés B1, B4 et B5 est très clair, contrairement à l’effet de N.
Un plateau très bien défini sur G’ est observé à basse pulsation, accompagné par une valeur la
plus élevée de G’ pour le plus fort Q (Figure III.35-a). Une faible déviation est également
notée sur le module visqueux G’’ avec le débit le plus élevé (composé B5), Figure III.35-b.
Figure III.35 Module élastique (a) et viscosité complexe (b) en fonction de la pulsation pour les enrobés bisels
ment.
10-5 10-4 10-3 10-2 10-1 100101
0,6
0,8
1,0
1,2
Bitume pur
B1 (Q = 585 g/h)
B4 (Q = 814 g/h)
B5 (Q = 1200 g/h)
G'r
Déformation (-)
(b)
10-5 10-4 10-3 10-2 10-1 100101
103
104
105
Bitume pur
B1 (Q = 585 g/h)
B4 (Q = 814 g/h)
B5 (Q = 1200 g/h)
Module élastique G' (Pa)
Déformation (-)
(a)
10-5 10-4 10-3 10-2 10-1 100101
102
103
104
Bitume pur
B1 (Q = 585 g/h)
B4 (Q = 814 g/h)
B5 (Q = 1200 g/h)
Viscosité complexe * (Pa.s)
Déformation (-)
(d)
10-5 10-4 10-3 10-2 10-1 100101
104
105
106
Bitume pur
B1 (Q = 585 g/h)
B4 (Q = 814 g/h)
B5 (Q = 1200 g/h)
Module visqueux G'' (Pa)
Déformation (-)
(c)
10-2 10-1 100101102
10-1
100
101
102
103
104
105
Bitume pur
B1 (Q = 585 g/h)
B4 (Q = 814 g/h)
B5 (Q = 1200 g/h)
Module élastique G' (Pa)
Fréquence angulaire (rad/s)
(a)
10-2 10-1 100101102
100
101
102
103
104
105
106
Pure bitumen
B1 (Q = 585 g/h)
B4 (Q = 814 g/h)
B5 (Q = 1200 g/h)
Module visqueux G" (Pa)
Fréquence angulaire (rad/s)
(b)
115
Ces deux déviations observées sur G’ et G’’ se traduisent par une forte augmentation de la
viscosité complexe η* (Figure III.36) due à une interaction plus importante entre les sels.
Figure III.36 Viscosité complexe en fonction de la pulsation pour les enrobés bisels préparés avec différents débits

A fort débit, une évolution similaire de la viscosité est remarquée entre les deux composés B5
(Bisel) et N5 (monosel NaNO3). Il semblerait que la réponse rhéologique du bisel, à fort Q,
dépende fortement de la fraction soluble (NaNO3).
2.4. Comparaison et discussion générale entre les 3 enrobés
bitumes
La Figure III.37 présente une comparaison entre les viscosités complexes (η*) pour les trois
composés (BaSO4, NaNO3 et Bisel) pour différentes conditions d’extrusion : 70 tr/min
600 g/h (Figure III.37-a), 300 tr/min 600 g/h (Figure III.37-b) et 70 tr/min 1200 g/h
(Figure III.37-c). De façon générale, la viscosité des enrobés est plus élevée que celle du
bitume pur, quelles que soient les conditions appliquées.
10-2 10-1 100101102
1000
1500
2000
2500
3000
3500
Bitume pur
B1 (Q = 585 g/h)
B4 (Q = 814 g/h)
B5 (Q = 1200 g/h)
Viscosité complexe * (Pa.s)
Fréquence angulaire (rad/s)
116
Figure III.37 Viscosité complexe des enrobés bitume préparés avec différents conditions (a) 70 tr/min, 600 g/h, (b)
au-Yasuda à
seuil.
A haute pulsation, quelles que soient les conditions d’extrusion (N et Q), la viscosité attribuée
aux monosels NaNO3 est plus importante que celle des enrobés bisels et monosels BaSO4.
10-2 10-1 100101102
103
104
NaNO3
Bisel
BaSO4
Bitume
300 tr/min, 600 g/h
Viscosité complexe (Pa.s)
Fréquence angulaire (rad/s)
(b)
10-2 10-1 100101102
103
104
NaNO3
Bisel
BaSO4
Bitume
70 tr/min, 1200 g/h
Viscosité complexe (Pa.s)
Fréquence angulaire (rad/s)
(c)
10-2 10-1 100101102
103
104
NaNO3
Bisel
BaSO4
Viscosité complexe (Pa.s)
Fréquence angulaire (rad/s)
Bitume
70 tr/min, 600 g/h (a)
117
Une classification est bien respectée η*(NaNO3) > η*(bisel) > η*(BaSO4), sauf à 1200 g/h
η*(BaSO4) devient plus importante que celle du bisel, ce qui est certainement dû à la plus
faible teneur en sels dans le cas du composé B5 (32,5% en masse) (Tableau 23).
Cette classification est certainement due à la fraction volumique des sels incorporés dans le
bitume où φ(NaNO3) ≈ 21,7 > φ(Bisel) ≈ 15,2 > φ(BaSO4) ≈ 13,2.
A basse pulsation, le même ordre est respecté, sauf à N = 300 tr/min un croisement entre
les spectres est observé. L’enrobé BaSO4 (W3) devient plus visqueux que NaNO3 (N3) et bisel
(B3).
L’augmentation de la viscosité complexe à faible ω peut être comparée à celle d’un matériau
possédant un seuil d’écoulement. Dans l’objectif de décrire ce comportement, nous avons
utilisé le modèle de Carreau-Yasuda à seuil (Eq. 4).
La Figure III.37 montre une très bonne superposition entre le modèle et les valeurs
expérimentales. Le Tableau 24 résume les paramètres obtenus d’après ces traitements. Nous
nous limitons dans ce Tableau à présenter les deux paramètres les plus intéressants : le seuil
d’écoulement σ0 et la viscosité limite η0.
Tableau 24 Viscosité newtonienne (η0  σ0 -Yasuda dans
différentes conditions opératoires pour les trois enrobés bitume.
Vitesse de
vis (tr/min)
Débit
(g/h)
Enrobés BaSO4
Enrobés Bisel
Enrobés NaNO3
η0
(Pa.s)
σ0
(Pa)
η0
(Pa.s)
σ0
(Pa)
η0
(Pa)
σ0
(Pa)
70
600
1460
0,75
1770
1,43
2650
2,60
150
600
1610
0,74
1720
1,50
2250
3,38
300
600
2150
42,9
2140
1,93
2070
6,90
70
800
1500
0,93
1950
5,29
2580
3,68
70
1200
1720
3,41
2620
15,5
2070
20,2
Quel que soit le type de matériau, l’augmentation de N et Q conduit à une augmentation du
seuil d’écoulement. Il est montré que N a le plus fort effet dans le cas de BaSO4 où la
contrainte seuil la plus élevée est obtenue à N = 300 tr/min (σ0 = 42,9 Pa). D’autre part,
l’augmentation de Q favorise aussi l’augmentation du seuil d’écoulement : dans le cas de
NaNO3 et bisel, des seuils de 15,5 et 20,2 sont obtenus avec l’enrobé B5 et N5,
respectivement, à Q = 1200 g/h.
La valeur du seuil d’écoulement est un indicateur des interactions entre les particules dans un
composé chargé. Comme il a été vu précédemment, ce seuil varie avec les conditions
d’extrusion. Si nous exprimons ces conditions par le rapport de la vitesse de vis par le débit
d’écoulement (N/Q exprimé en tr/g), nous pouvons observer sur la Figure III.38 que les trois
types de sels présentent le même comportement : un seuil d’écoulement maximal à faible et à
fort N/Q et minimal pour les valeurs intermédiaires.
A l’exception de N = 300 tr/min, les valeurs de seuil d’écoulement pour les trois composés se
classent d’une façon régulière, avec σBaSO4 < σBisel < σNaNO3. En effet, à N = 300 tr/min, le seuil
d’écoulement de BaSO4 devient le plus important, traduisant les fortes interactions entre les
grains de sels de BaSO4.
118
Comme indiqué précédemment, cette évolution de σ0 avec N/Q peut être expliquée par le rôle
du cisaillement à forte vitesse de rotation et par l’augmentation du taux de remplissage en
zone finale à fort débit.
De manière générale, on peut conclure que, malgré une concentration minoritaire, le
comportement de l’enrobé bisel est d’abord contrôlé par le comportement du NaNO3.
Figure III.38 σ0) en fonction du rapport N/Q pour les trois enrobés bitume.
Après avoir décrit l’influence des conditions opératoires d’extrusion sur les propriétés
rhéologiques des enrobés modèles (monosels et bisel), des études similaires ont également été
effectuées sur les échantillons de l’enrobé industriel STE3.
3. Enrobé industriel de type STE3
Comme il a été signalé dans le chapitre 1, la composition des enrobés STE3 est complexe,
avec différents types de sels de granulométrie et de solubilité différentes. La Figure III.39
présente une observation MEB (grossissement × 1000) de l’enrobé STE3 élaboré à
N = 70 tr/min et Q = 568 g/h (N/Q = 7,4 tr/g).
Figure III.39 1 (N = 70 tr/min et Q = 568 g/h).
510 15 20 25 30
10-1
100
101
102
Composés NaNO3
Composés Bisel
Seuil d'écoulement 0 (Pa)
Rapport N/Q (tr/g)
Composés BaSO4
119
Sur la Figure III.39, une distribution en taille de grains est présentée, allant de petits grains
(quelques centaines de nanomètres) jusqu’aux agglomérats (quelques dizaines de
micromètres). Afin de déterminer la localisation et l’état de dispersion des différents types de
sels, des analyses EDX ont été réalisées (Figure III.40).
Figure III.40 1 (N = 70 tr/min et Q = 568 g/h).
Un bon état de dispersion est observé pour les deux éléments Co et Fe (le mieux dispersé). Par
contre, Ba et Na se présentent sous forme des larges agglomérats, certainement dus à leurs
teneurs élevées dans la composition de la boue STE3, ainsi que leurs affinités chimiques. Le
soufre (S) est présent dans deux types de sels différents ; les insolubles, comme BaSO4 et
CoS, et le Na2SO4 (soluble). Finalement, le potassium K se localise dans le précipité formé de
ferrocyanure de nickel (PPFeNi), il présente un état de dispersion similaire à celui de Fe.
L’objectif de ce paragraphe étant similaire à celui concernant les enrobés mono et bisels,
le Tableau 25 présente les différents enrobés STE3, élaborés dans différentes conditions
opératoires N et Q.
Tableau 25 
Enrobé
STE3
N
(tr/min)
Q
(g/h)
%
massique
de sels
S1
70
568
35,4
S2
150
572
35,2
S3
300
555
37
S4
70
823
35
S5
70
1129
36,6
(a) (b) (c)
(e) (f)
(d)
120
3.1. Effet de la vitesse de vis N
La Figure III.41 présente l’évolution du module élastique G’ en fonction de la déformation γ,
à une fréquence angulaire de 100 rad/s, pour les trois enrobés synthétisés (S1, S2 et S3), à
50°C (Tableau 25).
Figure III.41 Module élastique G’ (a) et module relatif G’r (b) en fonction de la déformation pour les enrobés STE3
préparés avec différentes vitesses de vis.
Il est observé que les modules G’ diminuent avec la vitesse de vis N, accompagnés par une
diminution du domaine de linéarité. Il est important de noter que la faible reaugmentation du
module élastique G’ dans S3 peut être due au fait qu’il contient plus de sels (37 % au lieu de
35,5 %). La Figure III.42 représente l’évolution des modules élastiques G’ et visqueux G’’ en
fonction de la pulsation, mesurée à 22, 50 et 70°C pour les trois enrobés S1, S2 et S3 extrudés à
différentes vitesses. Quelle que soit la température, à haute pulsation, on observe les mêmes
tendances sur les modules G’ que le résultat observé précédemment par les tests de balayages
en déformation.
10-6 10-4 10-2 100
103
104
105
(a)
Bitume pur
S1 (N = 70 tr/min, Q = 568 g/h)
S2 (N = 150 tr/min, Q = 572 g/h)
S3 (N = 300 tr/min, Q = 555 g/h)
Module élastique G' (Pa)
Déformation (-)
10-5 10-4 10-3 10-2 10-1 100101
0,25
0,50
0,75
1,00
Bitume pur
S1 (N = 70 tr/min, Q = 568 g/h)
S2 (N = 150 tr/min, Q = 572 g/h)
S3 (N = 300 tr/min, Q = 555 g/h)
G'r = G'/G'p
Déformation (-)
(b)
121
Figure III.42 Module élastique et visqueux en fonction de la pulsation à 22°C (a), 50°C (b) et 70°C (c).
A basse fréquence, les modules G’ présentent des profils dépendant de la température.
A 22°C, les pentes sur G’ et G’’ sont quasi-égales (0,85 et 1 respectivement). Lorsque la
température augmente, la viscosité de la phase bitume diminue et l’on voit apparaître
clairement les interactions entre les grains dans notre fenêtre d’observation, qui se caractérise
par un plateau à basse fréquence. Ce plateau est classiquement attribué à l’existence d’un
réseau de sels percolant [19-21]. Dans notre cas, ce phénomène est d’autant plus marqué que
la température est élevée.
A N = 300 tr/min et T = 70°C (Figure III.42-c), un croisement entre les modules G’ et G’’ a
lieu à basse fréquence. Ce phénomène signifie le passage d’un état liquide à un état solide où
G’ devient plus important que G’’.
Par ailleurs, le module G’’ évolue linéairement avec la pulsation, indépendamment de la
température et de la vitesse de vis, avec une pente égale à 1 à 50 et 70°C.
Les observations MEB confirment l’amélioration de l’état de dispersion en augmentant la
vitesse de vis N (Figure III.43). D’après ces photos, nous observons la diminution du nombre
des agrégats de sels en augmentant la vitesse de vis de 70 à 300 tr/min.
10-2 10-1 100101102
10-1
100
101
102
103
104
105
(c)
Module élastique G' et visqueux G" (Pa)
70°C
S1 (N = 70 tr/min, Q = 568 g/h)
S2 (N = 150 tr/min, Q = 572 g/h)
S3 (N = 300 tr/min, Q = 555 g/h)
Fréquence angulaire (rad/s)
10-2 10-1 100101102
10-1
100
101
102
103
104
105
106
(b)
S1 (N = 70 tr/min, Q = 568 g/h)
S2 (N = 150 tr/min, Q = 572 g/h)
S3 (N = 300 tr/min, Q = 555 g/h)
50°C
Module élastique G' et visqueux G" (Pa)
Fréquence angulaire (rad/s)
10-2 10-1 100101102
103
104
105
106
107
108
(a)
22°C
S1 (N = 70 tr/min, Q = 568 g/h)
S2 (N = 150 tr/min, Q = 572 g/h)
S3 (N = 300 tr/min, Q = 555 g/h)
Module élastique G' et visqueux G" (Pa)
Fréquence angulaire (rad/s)
122
Figure III.43 Images MEB (×250) pour les enrobés S1 (a), S2 (b) et S3 (c) préparés à N = 70, 150 et 300 tr/min,
respectivement.
L’estimation du seuil d’écoulement par la loi de Carreau-Yasuda à seuil sur les courbes de
viscosité complexe donne des valeurs de 0,55 ; 0,30 et 1,88 Pa pour les trois enrobés S1, S2 et
S3, respectivement produits à 70, 150 et 300 tr/min (Figure III.44-a). Cette augmentation du
seuil à N = 300 tr/min, observée sur la Figure III.44-b, est également le signe de
l’amélioration de l’état de dispersion [28].
Figure III.44 (a) Mesure de la contrainte seuil par la loi de Carreau-Yasuda à seuil pour les échantillons extrudés

(a) (b)
(c)
10-2 10-1 100101102
100
200
300
400
500 S1 (N = 70 tr/min, Q = 568 g/h))
S2 (N = 150 tr/min, Q = 572 g/h))
S3 (N = 300 tr/min, Q = 555 g/h))
Viscosité complexe (Pa.s)
Fréquence angulaire (rad/s)
(a)
50 100 150 200 250 300
0,0
0,5
1,0
1,5
2,0
Seuil d'écoulement (Pa)
Vitesse de vis (tr/min)
(b)
123
3.2. Effet du Q
Des balayages en déformation ont été réalisés sur les échantillons S1, S4 et S5 extrudés à
différents débits d’écoulement, allant de 600 à 1200 g/h (Tableau 25). La Figure III.45 montre
une légère augmentation du module élastique, accompagnée d’une diminution de la
déformation critique quand le débit augmente.
Figure III.45 (a) Module élastique G’ et (b) module élastique relatif G’/G’p en fonction de la déformation pour les

Sur les tests de balayage en fréquence (Figure III.46-a, b), la même tendance est
observée, quelle que soit la température (22, 50 ou 70°C). A 70°C, un plateau pseudo-solide
apparaît, quel que soit le débit, à faible pulsation. Cependant, le niveau de ce plateau est plus
prononcé quand on augmente le débit : les valeurs de G’ à 10-2 rad/s sont égales à 1,2 ; 2,2 et
6,4 Pa pour Q = 568, 823 et 1129 g/h, respectivement. De plus, l’augmentation de Q conduit à
une légère déviation du module visqueux G’’ à basse pulsation. Cette déviation est parfois
attribuée à la présence de larges agglomérats et expliquée par un processus de relaxation
interne (énergie dissipée) [25].
Figure III.46 Modules élastique (a) et visqueux (b) en fonction de la pulsation à 70°C, pour les enrobés préparés à

Comme pour l’effet de la vitesse de vis, l’augmentation de Q conduit à un croisement entre
les deux modules G’ et G’’ à basse fréquence (Figure III.47) et pour une température de 70°C.
10-6 10-5 10-4 10-3 10-2 10-1 100101
104
105
Bitume pur
S1 (N = 70 tr/min, Q = 568 g/h)
S4 (N = 70 tr/min, Q = 823 g/h)
S5 (N = 70 tr/min, Q = 1129 g/h)
Module élastique G' (Pa)
Déformation (-)
(a)
T = 50°C
10-5 10-4 10-3 10-2 10-1 100101
0,4
0,6
0,8
1,0
T = 50°C
(b)
Bitume pur
S1 (N = 70 tr/min, Q = 568 g/h)
S4 (N = 70 tr/min, Q = 823 g/h)
S5 (N = 70 tr/min, Q = 1129 g/h)
G'relatif
Déformation (-)
10-2 10-1 100101102
10-1
100
101
102
103
104
(a)
T = 70 °C
S1 (N = 70 tr/min; Q = 568 g/h)
S4 (N = 70 tr/min; Q = 823 g/h)
S5 (N = 70 tr/min; Q = 1129 g/h)
Module élastique G' (Pa)
Fréquence angulaire (rad/s)
10-2 10-1 100101102
100
101
102
103
104
105
S1 (N = 70 tr/min; Q = 568 g/h)
S4 (N = 70 tr/min; Q = 823 g/h)
S5 (N = 70 tr/min; Q = 1129 g/h)
Module Visqueux G'' (Pa)
Fréquence angulaire (rad/s)
T = 70 °C
(b)
124
Figure III.47 Modules élastique et visqueux en fonction de la pulsation à 70°C, pour les enrobés préparés à

La Figure III.48 présente l’estimation du seuil d’écoulement à 70°C. Nous obtenons des
valeurs de 0,55 ; 3,83 et 5,58 Pa, pour 568, 823 et 1129 g/h, respectivement.
Figure III.48 Mesure de la contrainte seuil par la loi de Carreau-Yasuda à seuil pour les échantillons extrudés avec
différents débits.
Les observations MEB visualisent effectivement une amélioration de l’état de dispersion
puisque le nombre et la taille des agrégats diminuent avec le débit d’écoulement (Figure
III.49).
10-2 10-1 100101102
10-1
100
101
102
103
104
105
T = 70 °C
S1 (N = 70 tr/min; Q = 568 g/h)
S4 (N = 70 tr/min; Q = 823 g/h)
S5 (N = 70 tr/min; Q = 1129 g/h)
G',G'' (Pa)
Fréquence angulaire (rad/s)
Croisement G' et G''
10-2 10-1 100101102
300
600
900 S1 (N = 70 tr/min, Q = 568 g/h))
S4 (N = 70 tr/min, Q = 823 g/h))
S5 (N = 70 tr/min, Q = 1129 g/h))
Viscosité complexe (Pa.s)
Fréquence angulaire (rad/s)
125
Figure III.49 Images MEB (×250) pour les enrobés S1 (a), S4 (b) et S5 (c) préparés à Q= 568, 823 et 1129 g/h,
respectivement.
La diminution de la déformation critique (Figure III.45-b), l’augmentation du seuil
d’écoulement (Figure III.48) ainsi que les observations MEB (Figure III.49) sont le signe de
l’obtention d’un réseau percolant de sels avec l’augmentation du débit d’écoulement Q.
Cette amélioration, comme il a été argumenté dans la deuxième partie de ce chapitre, provient
du profil de vis spécifique utilisé, en particulier de l’élément de vis à pas inverse en position
terminale permettant un temps de séjour et une énergie mécanique localement plus élevés.
3.3. Comparaison et discussion générale
La Figure III.50 présente l’évolution de la viscosité complexe des enrobés STE3 préparés
dans différentes conditions opératoires N et Q en fonction de la pulsation et à T = 70°C.
(a) (b)
(c)
126
Figure III.50 Viscosité complexe des enrobés STE3 préparés 
-Yasuda à seuil.
Sur cette Figure, une très bonne superposition entre le modèle de Carreau-Yasuda et les
valeurs expérimentales est obtenue. Le Tableau 26 résume les paramètres obtenus d’après ces
traitements (viscosité η0 et contrainte seuil σ0).
Tableau 26  0) et  0-Yasuda pour
différentes conditions opératoires pour les enrobés STE3, à 70°C.
Enrobé
N
Q
N/Q
η0
σ0
tr/min
g/h
tr/g
Pa.s
Pa
S1
70
568
7,37
204
0,55
S2
150
572
15,7
180
0,30
S3
300
555
32,4
183
1,89
S4
70
823
5,10
397
3,83
S5
70
1129
3,72
456
5,58
D’après la Figure III.50, une augmentation de la viscosité complexe est observée à basse
fréquence quand on augmente la vitesse de vis ou le débit d’écoulement. La viscosité paraît
plus sensible au débit d’écoulement, où une déviation plus marquée est obtenue que celle avec
l’augmentation de la vitesse de vis. L’obtention d’un point de croisement entre G’ et G’’ à
basse fréquence se traduit d’après la littérature par l’obtention d’une pente qui tend vers -1
(caractéristique d’une structure gel). Ces valeurs sont de -0,41, -0,43 et -0,49 pour les enrobés
S3, S4 et S5, respectivement.
La représentation de la contrainte seuil en fonction du rapport N/Q (Figure III.51) montre la
présence de deux régimes de variations (Figure III.51) : la partie localisée dans la gamme [6 ;
35 tr/g] présente un seuil d’écoulement relativement faible par rapport à celui observé dans la
partie localisée en dessous de 6 tr/g (faible N/Q) qui présente une faible dépendance avec la
température. De plus, la Figure III.51 présente une évolution similaire à celle observée pour
les monosels et les bisels (Figure III.38).
10-2 10-1 100101102
200
400
600
800
1000 S1 (N = 70 tr/min, Q = 568 g/h))
S2 (N = 150 tr/min, Q = 572 g/h))
S3 (N = 300 tr/min, Q = 555 g/h))
S4 (N = 70 tr/min, Q = 823 g/h))
S5 (N = 70 tr/min, Q = 1129 g/h))
Viscosité complexe (Pa.s)
Fréquence angulaire (rad/s)
T = 70°C
127
Figure III.51 σ0) en fonction du rapport N/Q pour les trois enrobés STE3.
La valeur de la contrainte seuil aura un impact direct sur la migration des bulles de gaz
générées par radiolyse. En effet, plus le seuil est important, plus la taille de la bulle doit être
élevée pour atteindre des vitesses suffisantes pour évacuer le gaz. Ce point sera abordé plus en
détail lors du prochain chapitre.
4. Mesure de la vitesse de migration des bulles
Dans ce paragraphe, nous présentons l’influence des conditions opératoires N et Q ainsi que
de la nature d’enrobé sur la migration des bulles. A partir des valeurs de la contrainte seuil
présentées dans les Tableau 24 et 26, nous pouvons calculer le rayon minimal à partir duquel
les bulles commencent à migrer dans les enrobés bitume :
)Eq.5(
..4 30
min g
R
avec Δρ = 1400, 1330, 1280 et 1350 kg/m3 pour les enrobés monosels BaSO4, les bisels,
les monosels NaNO3 et l’enrobé industriel STE3 respectivement.
La taille minimale est très dépendante de la nature de l’enrobé, ainsi que des conditions
opératoires. Une augmentation du rayon minimal des bulles est observée avec l’augmentation
de N et Q, quelle que soit la nature de l’enrobé (Tableau 27).
Comme le terme en Δρ est quasi-constant, on retrouve le même classement que pour la valeur
de seuil, c’est-à-dire Rmin (BaSO4) < Rmin (STE3) < Rmin (bisel) < Rmin (NaNO3).
0 5 10 15 20 25 30 35
10-1
100
101
Seuil d'écoulement (Pa)
Rapport N/Q (tr/g)
50°C
70°C
128
Tableau 27 Rayon minimal et maximal des bulles dans les différents enrobés bitume préparés à différents N et Q.
Enrobé
N
Q
Rmin (µm)
Rmax (cm)
BaSO4
W1
70
606
41
8,0
W2
150
552
40
8,1
W3
300
603
2343
0,1
W4
70
798
51
6,5
W5
70
1140
186
1,8
NaNO3
N1
70
590
155
2,3
N2
150
596
202
1,8
N3
300
596
412
0,9
N4
70
857
220
1,6
N5
70
1183
1207
0,3
Bisel
B1
70
585
82
4,2
B2
150
585
86
4,0
B3
300
585
111
3,1
B4
70
814
304
1,1
B5
70
1200
891
0,4
S1
70
568
38
9,4
S2
150
572
84
4,3
STE3
S3
300
555
64
5,6
S4
70
823
440
0,8
S5
70
1129
418
0,9
De l’autre côté, le rayon maximal d’une bulle pouvant être atteint a été calculé par la loi de
Laplace :
)Eq.6(
2
max
0R
Ces valeurs sont présentées dans le Tableau 27. Ils indiquent que les rayons obtenus avec les
enrobés BaSO4 sont les plus importants, à l’exception de l’enrobé W3 extrudé à N = 300
tr/min (0,1 cm). Une augmentation de N et Q conduit à une diminution du rayon maximal. Par
contre, l’enrobé W3 à N = 300 tr/min montre une valeur du rayon minimum plus importante
que le rayon maximum (Rmin > Rmax). Ceci peut être à la présence d’un très bon état de
dispersion qui empêche les bulles de migrer et de croître.
L’augmentation de N et Q conduit à une restriction de la gamme de rayons. A titre d’exemple,
dans le cas de NaNO3, le passage de 70 tr/min à 300 tr/min conduit à une diminution de la
gamme des bulles migrantes de [155µm ; 2,3 cm] à [412 µm ; 0,9 cm].
A partir de ces gammes de rayons déterminées, la vitesse de migration d’une bulle peut être
calculée par l’équation :
)Eq.7(
3.. 2
Rg
U
La Figure III.52 présente l’évolution de la vitesse de migration des bulles calculée en fonction
de leur diamètre à 50°C, pour les trois enrobés modèles et l’enrobé industriel.
129
Figure III.52 Vitesse de migration en fonction du diamètre de bulles dans les enrobés bitume à 50°C : Monosel
BaSO4 (rouge), Monosel NaNO3 (noir), bisel (bleu) et STE3 (vert).
La plus faible vitesse de migration est obtenue dans le cas des enrobés STE3. La vitesse de
migration dans STE3 est inférieure à UNaNO3 < Ubisel < UBaSO4. Ce classement est
principalement attribué à la valeur de la viscosité ηSTE3 > ηNaNO3 > ηbisel > ηBaSO4.
Une influence des conditions opératoires N et Q est observée surtout à N = 300 tr/min, où une
diminution de la vitesse est observée, quelle que soit la nature de l’enrobé (S3, N3, B3 ou W3).
10-3 10-2 10-1 100101102
10-10
10-8
10-6
10-4
10-2
Monosel BaSO4 (W1)
Bisel (B1)
Monosel NaNO3 (N1)
STE3 (S1)
U (m/s)
D (cm)
N = 70 tr/min et Q = 600 g/h
130
5. Bilan de ce chapitre
Ce chapitre a présenté les effets des conditions opératoires d’extrusion N et Q sur les
propriétés rhéologiques du bitume pur d’une part et sur des échantillons modèles et industriel
d’enrobés bitume d’autre part.
Le temps de séjour et la vitesse de cisaillement présentent une influence très importante sur
les propriétés du bitume. En effet, une augmentation du temps de séjour (débit Q faible)
conduit à une augmentation de la teneur en asphaltènes, qui se traduit par une viscosité
newtonienne plus importante. Par contre, l’augmentation de la vitesse de vis conduit à des
modifications structurales de la matrice bitume. Une déformation critique est remarquée à
partir de laquelle de nouvelles bandes d’absorption (C=S et S-S) ont été détectées par
infrarouge. L’apparition de ces bandes se traduit par une augmentation de la viscosité du
bitume. Par conséquent, l’effet de la présence des hétéroatomes sur la viscosité du bitume est
non négligeable. Cette viscosité est déterminée par la teneur en asphaltènes et en
hétéroatomes.
Dans le cas des enrobés, une grande influence de la nature des sels (soluble et insoluble) sur la
réponse rhéologique est remarquée. Pour les monosels, une évolution similaire de la réponse
rhéologique est obtenue en augmentant N ou Q. En effet, l’augmentation de N et Q dans le cas
de BaSO4 conduit à des modules plus importants. Au contraire, dans le cas de monosels
NaNO3, les modules diminuent. Les bisels présentent un compromis entre les deux monosels.
L’effet de N est plutôt controlé par la présence de BaSO4, alors que celui de Q semble lié au
NaNO3. Dans le cas de l’enrobé STE3, il a été observé une diminution des modules avec la
vitesse de vis et une croissance avec le débit d’écoulement. L’augmentation de N et Q dans
STE3 conduit à une augmentation de la viscosité complexe à basse fréquence, traduisant une
amélioration de l’état de dispersion. L’effet de Q est plus important sur l’augmentation de la
viscosité que celui de N.
L’effet des conditions opératoires sur la viscosité complexe a été étudié pour les différents
enrobés. Le modèle de Carreau-Yasuda à seuil s’applique parfaitement, quels que soient
l’enrobé et les conditions opératoires. Le classement de la viscosité est généralement
η*(STE3) > η*(NaNO3) > η*(Bisel) > η*(BaSO4), sauf à N = 300 tr/min où l’enrobé BaSO4
(W3) présente la valeur la plus élevée en raison du meilleur état de dispersion.
Par ailleurs, une augmentation de N et Q conduit à une augmentation de la contrainte seuil σ0,
quelle que soit la nature de l’enrobé. L’évolution de la contrainte seuil a été exprimée en
fonction du rapport N/Q où trois zones semblent exister : deux zones à faible et à fort N/Q, où
le seuil est élevé, alors que la troisième zone, aux valeurs intermédiaires, présente un seuil
faible.
A partir de ces valeurs (σ0 et η0), les gammes de taille des bulles migrantes dans les enrobés,
dans toutes les conditions opératoires, ont été déterminées. L’augmentation de N et Q conduit
à une restriction de cette gamme, quelle que soit la nature de l’enrobé.
Enfin, les vitesses de migration des bulles ont été calculées dans toutes les conditions.
La vitesse de migration est la plus faible dans le cas du STE3 qui possède la viscosité la plus
131
élevée. L’augmentation de N et Q (surtout à N = 300 tr/min et Q = 1200 g/h) conduit
essentiellement à une diminution remarquable de la vitesse de migration.
132
6. A retenir du chapitre 3
510 15 20 25 30
10-1
100
101
102
Composés STE3
Composés NaNO3
Composés Bisel
Seuil d'écoulement 0 (Pa)
Rapport N/Q (tr/g)
Composés BaSO4
10-2 10-1 100101102
103
2x103
3x103
4x103
5x103STE3
NaNO3
Bisel
BaSO4
Viscosité complexe (Pa.s)
Fréquence angulaire (rad/s)
Bitume
Variation de la viscosité avec la nature
desels incorporés dans le bitume
Influence des conditions opératoires sur
l’état de dispersion de sels
variation
dela valeur de seuil d’écoulement
Diminution de la vitesse de migration
des bulles
1
2
10-3 10-2 10-1 100101102
10-10
10-8
10-6
10-4
10-2
Monosel BaSO4 (W1)
Bisel (B1)
Monosel NaNO3 (N1)
STE3 (S1)
U (m/s)
D (cm)
N = 70 tr/min et Q = 600 g/h
3
133
7. Bibliographie du chapitre 3
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135
CHAPITRE
4
137
Chapitre 4 Effet de l’irradiation γ sur le
comportement du bitume pur et de l’enrobé
STE3
Dans l’objectif d’évaluer l’influence des éléments radioactifs incorporés (émetteurs α, β et γ)
sur le comportement des enrobés bitume, des irradiations γ externes ont été réalisées pour
simuler les effets induits par les émetteurs β, γ. Ce chapitre est consacré à l’étude de
l’influence de l’irradiation γ sur les propriétés physico-chimiques et rhéologiques du bitume et
de l’enrobé STE3, ainsi qu’à l’estimation des distributions de taille des bulles suivant les
conditions d’irradiation (dose, débit de dose,…).
Ce chapitre est divisé en trois parties : la première est dédiée à l’effet de l’irradiation sur les
propriétés du bitume pur. Des modifications externes, telles que le gonflement, et internes
(propriétés rhéologiques) ont été observées. Des caractérisations analytiques et
spectrométriques ont été réalisées afin d’analyser plus finement les changements des
propriétés rhéologiques.
La deuxième partie de ce chapitre présente les mêmes objectifs, mais l’étude sera effectuée
sur l’enrobé industriel STE3 (60% en masse de bitume et 40% en sels).
Pour finir, ce chapitre utilise les données rhéologiques obtenues dans les deux premières
parties afin de définir une loi permettant d’estimer la viscosité de l’enrobé industriel irradié à
partir de celle du bitume pur irradié.
138
Table des matières chapitre 4
Table des matières chapitre 4 .......................................................................................... 138
1. Comportement sous irradiation de la matrice bitume ................................................ 140
1.1. Evolution du gonflement .................................................................................. 141
1.1.1. Gonflement du bitume pur conditionné dans des conteneurs différents....... 141
1.1.1.1. Béchers en verre ..................................................................................... 141
1.1.1.2. Pots en aluminium .................................................................................. 142
1.1.2. Effet du diamètre sur le taux de gonflement ................................................. 143
1.1.3. Interprétation de l’effet de dose sur le gonflement par microtomographie X ....
...................................................................................................................... 145
1.2. Modifications des propriétés rhéologiques sous irradiation ............................. 147
1.2.1. Effet de l’oxygène ........................................................................................ 147
1.2.2. Effet de l’irradiation sur les propriétés rhéologiques en absence d’oxygène 150
1.3. Modifications internes ou structurales ............................................................. 154
1.3.1. Variation sous irradiation γ de la teneur des fractions (séparation SARA) .. 154
1.3.2. Evolution des masses du bitume et de ses fractions en fonction de la dose
(SEC) ...................................................................................................................... 156
1.3.2.1. Evolution des masses du bitume avec la dose d’irradiation ................... 156
1.3.2.2. Evolution des masses des fractions sous irradiation ............................... 157
1.3.3. Evolution des indices d’aromaticité (Ic) et d’aliphaticité (Ia) en fonction de la
dose ...................................................................................................................... 159
1.3.4. Confirmation de l’augmentation des masses d’asphaltènes par diffraction des
rayons X ..................................................................................................................... 159
1.3.5. Variation de la teneur en résidu de carbone avec la dose d’irradiation ........ 161
1.3.6. Conséquences des modifications structurales sur la température de transition
vitreuse Tg ................................................................................................................... 162
1.4. Bilan ................................................................................................................. 164
2. Comportement sous irradiation de l’enrobé industriel (STE3) .................................. 165
2.1. Evolution du gonflement des enrobés STE3 en fonction de la dose ................ 165
2.1.1. Gonflement de l’enrobé STE3 ...................................................................... 165
2.1.2. Comparaison du gonflement du bitume pur et du STE3 .............................. 166
2.2. Effet de l’irradiation γ sur la population de bulles dans STE3 ......................... 167
2.2.1. Effet de la dose d’irradiation ........................................................................ 167
139
2.2.2. Effet du débit de dose ................................................................................... 168
2.2.3. Effet de l’ajout de sels .................................................................................. 170
2.3. Effet de l’irradiation γ sur la rhéologie du STE3 ............................................. 170
3. Détermination d’une loi de rhéo-vieillissement radiolytique pour STE3 à T = 22°C 174
4. Bilan de ce chapitre .................................................................................................... 179
5. A retenir du chapitre 4 ................................................................................................ 180
6. Bibliographie du chapitre 4 ........................................................................................ 181
140
Comme il a été signalé au début de ce manuscrit, les radioéléments contenus dans les enrobés
bitume émettent des rayonnements α, β et γ qui interagissent principalement avec la matrice
bitume. L’effet principal des interactions rayonnements/matière, dans le cas des enrobés
bitume, est la production de gaz de radiolyse, majoritairement de l’hydrogène. Le rendement
radiolytique β et γ en hydrogène des enrobés est égal à 0,33 molécules pour 100 eV,
soit 3,3 ×10-8 mol.J-1 dans le système international (S.I.) [1].
Pour estimer et quantifier les effets des radioéléments ainsi que leur influence sur les enrobés
bitumes, des irradiations γ externes d’échantillons inactifs ont été réalisées dans un irradiateur
au 60Co.
1. Comportement sous irradiation de la matrice bitume
D’après la littérature, l’irradiation modifie la structure moléculaire du bitume et conduit à la
production de gaz de radiolyse [2]. Généralement, la production de gaz est dépendante de
plusieurs facteurs, en particulier le débit de dose (), la dose totale absorbée (D) ainsi que le
grade du bitume [2, 3].
Le niveau du gonflement résulte de la compétition entre la génération de gaz et son
évacuation. Le gonflement persiste quand l’accumulation de gaz de radiolyse dans la matrice
est supérieur à la vitesse d’évacuation [2, 4]. Il est dépendant de plusieurs paramètres tels que
la géométrie du fût, la dose totale et le grade du bitume.
Comme il a été mentionné dès le début de ce manuscrit, le bitume utilisé en France pour cette
application se caractérise par un grade 70/100. Ce type de bitume possède un comportement
viscoélastique, (chapitre 2 [5]). Ces caractéristiques minimisent la fissuration de ce bitume
sous irradiation, alors que plusieurs cas de fissuration ont été observés avec un autre type de
bitume (grade R85/40) utilisé dans plusieurs pays, y compris la Belgique [2, 6]. Par
conséquent avec un bitume 70/100, l’évacuation de l’hydrogène ne peut pas s’évacuer au
travers des fissures, ce qui entraîne un gonflement plus important.
Plusieurs modèles ont été développés dans la littérature pour prédire le taux du gonflement.
Phillips et al. [2] ont proposé deux modèles théoriques : dans le modèle IL2, le taux de
gonflement est estimé par le produit du débit de dose (I) par la hauteur du fût (L); ce modèle
ne prend pas en compte les mécanismes de production de gaz. Le deuxième modèle est plus
compliqué et il a été développé en considérant un état d’équilibre entre la production, la
croissance des bulles et leur évacuation. Une bonne cohérence est obtenue entre les données
expérimentales et le modèle théorique. Les études de Burnay en 1987 [3] sont basées sur le
second modèle de Phillips et al [2]. Afin de bien ajuster le modèle théorique aux données
expérimentales, il était nécessaire d’augmenter la valeur du taux de production de gaz de
l’ordre de 1,3 × 1017 au lieu de 1,5 × 1016 molécules.kg-1.Gy-1. Par ailleurs, ce modèle exige
également la connaissance de plusieurs paramètres tels que le coefficient de diffusion, de
solubilité du gaz, la viscosité initiale, le coefficient du durcissement radiochimique de la
matrice, le rayon de la cavité,… De plus, la forme des bulles dans ce modèle est limitée à la
forme sphérique. Ce modèle montre toutefois une corrélation avec les observations réalisées
sur des fûts industriels [3] mais avec de nombreux paramètres ajustables.
141
Dans l’objectif d’évaluer le taux de gonflement sur le bitume 70/100, plusieurs échantillons
conditionnés dans différentes géométries ont été irradiés. Ces échantillons ont été irradiés à un
débit de dose proche de 5000 Gy/h et ils ont intégré des doses d’irradiation D allant de 1 à
7 MGy. Il est important de noter que le débit de dose utilisé ici est de 1000 à 5000 fois plus
élevé que dans la réalité, le but étant d’accélérer les phénomènes radiolytiques.
1.1. Evolution du gonflement
Comme indiqué précédemment, le bitume 70/100 est un matériau viscoélastique, ce qui lui
confère la propriété d’accommoder la déformation et par conséquent de gonfler, sans fissurer,
sous irradiation.
Le gonflement des échantillons a été suivi en mesurant la hauteur (ou le volume) de
l’échantillon, avant et après irradiation (mesuré en sortie d’irradiateur). La valeur de
gonflement est obtenue par :
1)(Eq.100(%)
i
if H
HH
G
avec Hi la hauteur initiale (avant irradiation) et Hf la hauteur finale. Puisque le gonflement est
de forme concave, la hauteur finale (Hf) a été calculée par :
2)(Eq.
2ps
f
HH
H
avec Hp la hauteur finale à la paroi et Hs la hauteur finale au sommet de la surface libre.
La Figure IV.1 présente une schématisation de la méthode de mesure du gonflement.
Figure IV.1 Schéma de la méthode de mesure du gonflement.
1.1.1. Gonflement du bitume pur conditionné dans des conteneurs différents
1.1.1.1. Béchers en verre
Sept échantillons de bitume pur ont été irradiés à un débit de dose de l’ordre de 5000 Gy/h et
ont intégré des doses d’irradiation allant de 1 à 7 MGy. La Figure IV.2 montre l’évolution du
taux de gonflement en fonction de la dose d’irradiation. Nous observons une augmentation du
D = 80 mm
Hi
Hp
Hs
Hf
L ~ 80 mm Bitume
G%
142
gonflement avec la dose totale d’irradiation, ce qui est en accord avec les données de la
littérature.
Figure IV.2 
Une augmentation quasi-linéaire est observée jusqu’à 3 MGy, avec une vitesse initiale de
gonflement (pente) de l’ordre de 14% par MGy. A partir de 3 MGy, le taux de gonflement se
stabilise (≈ 50 55 %), ce qui signifie qu’un état d’équilibre entre la production et
l’évacuation de gaz est atteint.
1.1.1.2. Pots en aluminium
Trois échantillons ont été irradiés à 1, 2 et 4 MGy à 5000 Gy/h, dans des pots en aluminium.
L’objectif était d’une part d’évaluer le taux de gonflement des bitumes avec une surface
(diamètre) plus faible (4 cm au lieu de 8 cm) et d’autre part de tester si la nature du container
avait une influence sur le taux de gonflement (effet de paroi, glissement,...). La Figure IV.2
montre le même type d’évolution que celle observée avec le bécher en verre :
une augmentation rapide du taux de gonflement jusqu’à 2 MGy, suivie par une stabilisation
au-delà. Par ailleurs, nous observons que le gonflement est plus important avec des
géométries dont le rapport surface/volume est plus faible. Une vitesse initiale de gonflement
de l’ordre de 32% par MGy (2 fois plus importante) est obtenue.
Dans la littérature, il a été observé que plus la hauteur du bitume dans la géométrie est
importante, plus le gonflement final est élevé [2]. En effet, plus la hauteur de la géométrie est
importante, plus les bulles ont besoin de temps pour s’évacuer, d’où un taux de gonflement
final plus important. Par contre, l’effet du diamètre n’a pas été développé dans la littérature.
Deux hypothèses peuvent être proposées afin d’expliquer l’observation d’un gonflement plus
important avec les faibles diamètres :
La taille des bulles est différente et dépendante de la géométrie (plus grande avec un
diamètre plus important), ce qui conduit à une accélération du processus d’évacuation et un
0 2 4 6 8
0
15
30
45
60
75
32%/1 MGy
14%/1 MGy Bécher en verre = 8 cm
Bécher en aluminium = 4 cm
Gonflement G (%)
Dose d'irradiation totale (MGy)
143
taux de gonflement moins important. En effet, d’après la loi de Hadamard- Rybczynski
corrigée par l’effet de paroi, utilisée par de nombreux auteurs [7] (Eq. 3), nous pouvons
calculer la vitesse de migration d’une bulle gazeuse soumise à la poussée d’Archimède dans
le bitume :
3)(Eq.)1(
12.. 35,2
2
bulle
dg
U
avec Δρ la différence de densité volumique entre la matrice et la bulle, d le diamètre de la
géométrie, η la viscosité newtonienne de la matrice et λ le rapport du diamètre de la bulle
(dbulle) par le diamètre de la géométrie (d). L’effet de paroi est plus important dans le cas de
géométries ayant un faible diamètre. En effet, avec un large diamètre, le rapport (dbulle/d) sera
faible, ce qui conduit à une vitesse de migration plus rapide.
La surface d’évacuation de gaz et donc le flux d’hydrogène par diffusion est plus élevé
avec un grand diamètre (d).
Actuellement, rien ne nous permet de trancher entre les deux hypothèses.
1.1.2. Effet du diamètre sur le taux de gonflement
Dans l’objectif de mieux comprendre l’effet du diamètre sur le taux de gonflement, quatre
échantillons en verre avec différents diamètres allant de 2,5 à 10 cm ont été irradiés jusqu’à
1 MGy, (Figure IV.3). Une diminution régulière du taux de gonflement est observée avec
l’augmentation du diamètre.
Il est également intéressant de noter la bonne reproductibilité du gonflement obtenu (15,6 et
17%) pour le diamètre de 8 cm. De plus, il semble que la matière du container (verre ou
aluminium) n’a que peu d’influence sur le taux de gonflement. Ceci exclu les artefacts de
glissement aux parois.
Figure IV.3 Gonflement du bitume pur en fonction du diamètre du pot à D = 1 MGy.
Afin d’expliquer cette diminution du taux de gonflement, le flux de gaz (H2) à travers la
surface a été calculé. La quantité de gaz évacuée est donnée par la différence entre la quantité
2 4 6 8 10
10
20
30
40
Gonflement G (%)
Diamètre (cm)
144
de gaz de radiolyse totale générée par l’irradiation et le volume de gaz piégé dans le bitume
(calculé à partir du gonflement).
Le volume de la quantité de gaz de radiolyse générée est donné par :
4)(Eq.)( 2)()( mmgazgaz VmDHGVnV
avec n le nombre de moles créées, Vm le volume molaire du gaz en m3/mol, G(H2) le
rendement radiolytique en mol/J, m la masse du bitume en kg et D la dose d’irradiation en Gy
(J/kg). Le volume du gaz piégé dans la matrice est la différence entre le volume de
l’échantillon avant et après irradiation c.à.d le gonflement. Le Tableau 28 présente une
synthèse des données.
Tableau 28 Volume produit et évacué pour les échantillons de bitume pur irradiés à 1 MGy.
Géométrie
Dose
Volume de
gaz produit
Hf
Vgonflement
Volume
évacué
Vitesse
cuation
d
(cm)
Hi
(cm)
MGy
cm3
cm
cm3
cm3
cm/s
2,3
8,7
0,962
26,2
12,1
14,3
11,9
4,2 × 10-6
4
6,9
0,915
60,1
10,6
46,5
13,6
1,6 × 10-6
4,9
8,9
0,895
114
11,2
43,3
70,4
5,5 × 10-6
8
8,1
0,842
260
9,5
70,4
189
5,5 × 10-6
8
8,7
0,938
310
10
67,9
242
7,1 × 10-6
10,2
8,3
0,792
404
9,2
77,6
327
5,9 × 10-6
La Figure IV.4 présente l’évolution du volume de gaz évacué en fonction du diamètre. Il est
observé que ce volume est quasi-constant jusqu’à un diamètre de 4 cm, puis augmente quasi-
linéairement avec le diamètre. Par conséquent, le gonflement sera moins important en
augmentant le diamètre du container.
Figure IV.4 Volume de gaz évacué en fonction du diamètre de la géométrie à 1 MGy.
2 4 6 8 10 12
0
100
200
300
400
Volume de gaz évacué (cm3)
Diamètre (cm)
145
Il est important de signaler que la différence observée entre les deux valeurs à un diamètre de
8 cm, est due au fait que les deux échantillons ont intégdeux doses réelles d’irradiation
différentes (0,842 et 0,938 MGy).
Le volume évacué peut s’écrire :
5)(Eq.
tSV
Ue
e
Ue est la vitesse de sortie des bulles à l’interface, S la surface libre et t le temps de
gonflement.
Comme la durée d’irradiation (≈ 189,7 heures) est identique pour tous les échantillons, on
obtient les valeurs de vitesses indiquées au Tableau 28. Elles sont quasi-identiques entre 8 et
10 cm et plus faibles à 2,3 et 4 cm, ce qui met peut être en évidence l’effet de paroi évoqué
précédemment, où les bulles s’accrochent aux parois en diminuant le rapport surface/volume.
1.1.3.         
microtomographie X
Dans l’objectif d’évaluer l’effet de la dose totale d’irradiation, d’une part sur le gonflement et
d’autre part sur la distribution et la quantité de bulles créées, des caractérisations par
microtomographie X ont été réalisées.
Le résultat obtenu se compose de 700 images en utilisant le logiciel myVGL studio développé
par la société Phoenix X-ray. Une reconstitution d’une vidéo en 2D par le logiciel imageJ a
été réalisée, à partir des 700 coupes.
Afin de simplifier le traitement des résultats et de faire une première approche, nous nous
limitons dans cette étude à une seule photo, numéro 350 (correspondant à une section au
milieu de la géométrie). Par ailleurs, le traitement du volume entier (700 photos) nécessite le
développement d’un modèle ou d’une méthode statistique. Ce point n’a pas été développé
dans cette étude mais une prochaine thèse va permettre d’aborder toutes ces perspectives.
La méthode utilisée dans le traitement de ces images consiste tout d’abord à binariser la photo
(noire et blanche), en se basant sur le contraste. Après avoir glé l’échelle (700 pixels pour
8 cm), une étape d’analyse des bulles a été réalisée pour calculer leur nombre et leur taille
moyenne.
Ces essais ont été effectués à la température ambiante (25 ± 3°C). Deux échantillons de
bitume (1 et 4 MGy) ont été suivis par microtomographie X immédiatement après
irradiationiii. Etant donné que la hauteur du bécher contenant le bitume est égale à 15 cm, et
que le détecteur X fait 12 cm de hauteur. Les dimensions de l’échantillon analysé sont
limitées. Par conséquent, la mesure de microtomographie X a été effectuée sur une partie
seulement de ce bécher (partie haute choisie 10 cm). Une photo en 2D a été prise sur la
partie basse du bécher et on trouve quasiment le même état.
La Figure IV.5 présente les deux photos (partie haute) obtenues suite à cette analyse de
microtomographie X et l’on constate que les bulles sont plus nombreuses lorsque la dose
iii Les échantillons ont été récupérés la veille de la mesure de microtomographie X. Durant ce temps, les
échantillons ont été placés au frigo puis transportés dans une glacière réglée à 0 4°C, afin de figer les bulles.
146
d’irradiation est plus élevée. Nous observons également l’apparition de trois grandes bulles
qui couvrent la surface. Ces trois bulles possèdent un rayon moyen de l’ordre de 1 à 1,5 cm.
Figure IV.5 Bulles de gaz en noire et matrice bitume en grise, (a) bitume pur irradié à 1 MGy et (b) bitume pur
irradié à 4 MGy.
La binarisation ainsi que le traitement de ces photos sont proposés sur la Figure IV.6.
Les résultats de traitement sont listés dans le Tableau 29. Une augmentation du nombre de
bulles de 72 à 95 est obtenue en augmentant la dose de 1 à 4 MGy. Puisque les 3 bulles
surfaciques présentent des tailles beaucoup plus importantes que celles des autres bulles, ces
bulles ont été supprimées lors de l’étape de binarisation. La surface moyenne d’une bulle est
alors de 0,118 et 0,109 cm2, pour les échantillons de bitume irradiés à 1 et 4 MGy,
respectivement.
Figure IV.6 Binarisation et traitement de bulles créées par irradiation dans le bitume en utilisant le logiciel ImageJ,
(a) bitume pur irradié à 1 MGy et (b) bitume pur irradié à 4 MGy.
(a) (b)
Bitume irradié 1 MGy Bitume irradié 4 MGy
Bitume irra dié 4 MGy
Binarisation
Traitement
(a) (b)
Bitume irra dié 1 MGy
147
Tableau 29 
Composé
Dose totale
(MGy)
Durée

(heures)
Nombre
Taille
moyenne
(cm2)
Aire
totale
(cm2)
Aire bulles
(%)
Bitume pur
1
200
72
0,12
8,65
15,8
4
800
95
0,11
9,05
16,5
Par conséquent, l’augmentation du nombre de bulles peut expliquer pourquoi le gonflement
est plus important avec une dose d’irradiation plus élevée. Par ailleurs, il est important de
signaler que ce n’est pas seulement l’augmentation du nombre des bulles qui peut entraîner
une augmentation du taux de gonflement. En fait, le temps d’irradiation pour 4 MGy est de
l’ordre de 800 heures, face à 200 heures pour 1 MGy. Cette durée longue entraîne des
modifications structurales du bitume, en particulier la viscosité, entrainant un
emprisonnement des bulles dans la matrice. Sans oublier les événements qui peuvent se
dérouler avec un temps plus long, tels que la migration des bulles, leur croissance…
1.2. Modifications des propriétés rhéologiques sous irradiation du
bitume pur
1.2.1. 
Puisque pendant les irradiations externes et dans le cas réel l’oxygène est présent à l’interface,
il est important, avant d’étudier l’influence de l’irradiation sur les propriétés du bitume et de
l’enrobé STE3, de mettre en évidence l’effet de l’oxygène sur ces propriétés.
D’après la littérature, il a été montré que l’oxygène entraîne un phénomène de durcissement
de la croûte de l’échantillon de bitume irradié [8, 9]. Ce durcissement est limià quelques
millimètres puisque la diffusion de l’oxygène, à température ambiante, ne dépasse pas 1 cm
[10]. C’est la raison pour laquelle trois échantillons de bitume placés dans des pots en
aluminium ont été irradiés à 5000 Gy/h jusqu’à 1, 2 et 4 MGy. Le temps d’irradiation pour ces
trois échantillons est estimé à 200, 400 et 800 heures. A la fin de l’irradiation, les pots ont été
coupés en trois parties : haute (surfacique), moyenne et basse, afin d’évaluer les propriétés
rhéologiques en fonction de la position. La Figure IV.7 présente un schéma de l’expérience.
Figure IV.7 
1) Irradiation 2) Fragmentation 3) Rhéologie et IR
h = 15 cm
5 cm
2,5 cm
h(bitume) = 7,5 cm
Gonflement
148
Sur la Figure IV.8 a, b et c, nous présentons l’évolution de la viscosité en fonction du taux de
cisaillement pour les échantillons irradiés à 1, 2 et 4 MGy respectivement. Il est observé que
plus on s’approche de la surface plus la viscosité est importante à partir de 2 MGy. Une
superposition des viscosités de la partie basse et moyenne est observée, quelle que soit la dose
d’irradiation. Nous constatons également que la viscosité surfacique est de 3,5 et 15 fois plus
importante que celle de la partie moyenne et basse pour les échantillons irradiés à 2 et 4 MGy,
respectivement.
Figure IV.8 Viscosité de la partie haute, moyenne et basse pour les échantillons de bitume pur irradiés à 1, 2 et 4
MGy.
Par conséquent, un durcissement du bitume par radio-oxydation a lieu, mais il est limité à la
surface. Afin de déterminer les modifications structurales résultant de la présence de
l’oxygène, des spectres infrarouges ont été réalisés sur les différentes parties irradiées à 1, 2 et
4 MGy. La Figure IV.9 présente les trois spectres infrarouges attribués aux parties irradiées à
2 MGy. L’apparition d’une bande à 1700 cm-1, attribuée aux carbonyles (C=O), est observée
dans la partie haute (surfacique). De plus, la bande localisée à 1030 cm-1, attribuée aux
sulfoxydes S=O, augmente en s’approchant de la surface (Tableau 30). La même tendance est
observée aux autres doses d’irradiation (1 et 4 MGy).
10-6 10-5 10-4 10-3 10-2 10-1 100
104
105
106
107
108
(c)
D = 4 MGy
Bitume pur
Partie haute
Partie moyenne
Partie basse
Viscosité (Pa.s)
Taux de cisaillement (1/s)
10-5 10-4 10-3 10-2 10-1 100
105
106
107
(b)
D = 2 MGy
Bitume pur
Partie haute
Partie moyenne
Partie basse
Viscosité (Pa.s)
Taux de cisaillement (1/s)
10-5 10-4 10-3 10-2 10-1 100
2x105
4x105
6x105
8x105
106
Bitume pur
Partie haute
Partie moyenne
Partie basse
Viscosité (Pa.s)
Taux de cisaillement (1/s)
D = 1 MGy
(a)
149
Figure IV.9 Spectre FT-IR des parties haute, moyenne et basse irradiées à 2 MGy.
Par ailleurs, le calcul des indices d’aromaticité (Ic) et d’aliphaticité (Ia) montre une
augmentation de Ic accompagnée d’une diminution de Ia en s’approchant de la surface.
Les valeurs sont présentées dans le Tableau 30.
Tableau 30 Indices spectrométriques obtenus pour les parties irradiés à 1, 2 et 4 MGy.
Dose (MGy)
Parties
Ic
Ia
I(S=O)
I(C=O)
1
Partie basse
0,067
0,069
0,026
0
Partie moyenne
0,065
0,066
0,024
0
Partie haute
0,083
0,063
0,034
0
2
Partie basse
0,051
0,082
0,021
0
Partie moyenne
0,052
0,066
0,033
0
Partie haute
0,062
0,065
0,071
0,826
4
Partie basse
0,037
0,071
0,031
0
Partie moyenne
0,041
0,062
0,029
0,166
Partie haute
0,058
0,057
0,049
0,175
L’augmentation de la teneur en C=C a été expliquée dans la littérature par le rôle catalyseur
de l’oxygène qui favorise la formation des liaisons insaturées [11].
Après avoir quantifié l’effet de l’oxygène, toutes les mesures qui seront effectuées par la suite
ont été réalisées sur des échantillons de bitume prélevés au centre de la géométrie.
2000 1600 1200 800 400
0,0
0,1
0,2
0,3
S=O
C=O
Absorbance (-)
Nombre d'onde (cm-1)
Partie basse
Partie moyenne
Partie haute
D = 2 MGy
150
1.2.2.         
du bitume pur
La Figure IV.10 présente l’évolution de la viscosité en fonction du taux de cisaillement pour
les échantillons de bitume irradiés entre 1 et 7 MGy, à trois températures différentes (22, 50 et
70°C). Une augmentation de la viscosité newtonienne est observée avec la dose d’irradiation
totale.
Figure IV.10 Viscosité en fonction du taux de cisaillement pour des échantillons de bitume pur irradiés à différentes
doses, allant de 0 à 7 MGy, à 22°C (a), 50°C (b) et 70°C (c).
Comme il a été mentionné dans le chapitre 2, la chute de la viscosité newtonienne aux forts
cisaillements (au-delà de 1 s-1) est due à la fracturation du bitume, ce que l’on voit sur la
Figure IV.10 à 50 et 70°C. Par contre, la limitation du plateau newtonien à 22°C est due à la
limitation du capteur du rhéomètre utilisé.
Le Tableau 31 présente les valeurs de la viscosité newtonienne à 22, 50 et 70°C pour tous les
échantillons irradiés entre 0 et 7 MGy.
10-5 10-4 10-3 10-2 10-1 100
104
105
106
107
(a)
T = 22°C
0 MGy 1 MGy
2 MGy 3 MGy
4 MGy 5 MGy
6 MGy 7 MGy
Viscosité (Pa.s)
Taux de cisaillement (s-1)
10-6 10-4 10-2 100102
102
103
104
(b)
T = 50°C
0 MGy 1 MGy
2 MGy 3 MGy
4 MGy 5 MGy
6 MGy 7 MGy
Viscosité (Pa.s)
Taux de cisaillement (s-1)
10-6 10-4 10-2 100102
101
102
103
0 MGy 1 MGy
2 MGy 3 MGy
4 MGy 5 MGy
6 MGy 7 MGy
Viscosité (Pa.s)
Taux de cisaillement (s-1)
T = 70°C
(c)
151
Tableau 31 Valeurs de la viscosité newtonienne à 22, 50 et 70°C pour les échantillons irradiés à différentes doses.

(MGy)
Viscosité (Pa.s)
22°C
Viscosité (Pa.s)
50°C
Viscosité (Pa.s)
70°C
0
4,40 × 105
940
56
0,9384
5,04 × 105
1100
60
1,8523
5,56 × 105
1350
69
2,8586
7,14 × 105
1750
86
4,0822
1,10 × 106
2850
114
4,7367
1,18 × 106
3075
128
6,2316
2,64 × 106
4760
200
7,1948
3,31 × 106
5760
250
Par ailleurs, l’évolution des modules élastique G’ et visqueux G’’ en fonction de la pulsation
ω montre une croissance de ces modules en fonction de la dose d’irradiation, quelle que soit
la température de mesure (22, 50 ou 70°C). La Figure IV.11-a montre l’évolution de G’, G’’
en fonction de la fréquence à des doses différentes, à 22°C. À basse fréquence [0,1 0,01
rad/s], les modules évoluent en fonction de la pulsation avec une pente de l’ordre de 1,05 pour
G’ et 0,95 pour G’’.
Figure IV.11 Module élastique G’, module visqueux G’’ (a) et tan delta (b) en fonction de la pulsation pour des
échantillons de bitume irradiés à différentes doses à 22°C.
D’autre part, une diminution de l’angle de phase (tan delta = G’’/G) est remarquée en
augmentant la dose d’irradiation (Figure IV.11 b). Cette diminution signifie que le module
élastique est plus sensible à l’irradiation que le module visqueux. D’autre part, quelle que soit
la dose d’irradiation, le module visqueux reste plus important que celui d’élasticité.
A basse fréquence, et à plus haute température (50 et 70°C), un plateau apparaît sur G’,
qui est attribué à des interactions entre les agrégats d’asphaltènes [5] (Figure IV.12).
Par contre, aucune déviation n’est remarquée sur le module visqueux G’’. Une augmentation
de la valeur de G’ au plateau est obtenue sous irradiation, ces valeurs sont très proches.
10-2 10-1 100101102
102
103
104
105
106
107
108
G'
G''
(a)
0 MGy 1 MGy
2 MGy 3 MGy
4 MGy 5 MGy
G', G'' (Pa)
Fréquence angulaire (rad/s)
T = 22°C
10-2 10-1 100101102
0
2
4
6
8
10
0 MGy 1 MGy
2 MGy 3 MGy
4 MGy 5 MGy
tan(delta)
Fréquence angulaire (rad/s)
Dose
T = 22°C
(b)
152
Les courbes à 3 et 4 MGy à 70°C montrent une valeur légèrement plus faible que celle
obtenue avec 1 et 2 MGy, ce qui est difficilement explicable.
Figure IV.12 Module élastique G’ en fonction de la fréquence angulaire ω pour des échantillons de bitume irradiés à
différentes doses à 50°C (a) et 70°C (b).
De plus, la représentation des modules G’ et G’’ sur le même graphique montre un croisement
entre ces deux modules à basse fréquence (Figure IV.13) et à fortes doses pour G’ à 50 et
70.°C
Figure IV.13 G’, G’’ en fonction de la pulsation pour des échantillons de bitume irradiés à différentes doses à 50°C

Ce dernier effet se traduit par une forte augmentation de la viscosité complexe à basse
fréquence (Figure IV.14).
10-2 10-1 100101102
10-2
10-1
100
101
102
103
104
(b)
T = 70°C
0 MGy
1 MGy
2 MGy
3 MGy
4 MGy
5 MGy
G' (Pa)
Fréquence angulaire (rad/s)
10-2 10-1 100101102
100
101
102
103
104
105
0 MGy
1 MGy
2 MGy
3 MGy
4 MGy
5 MGy
G' (Pa)
Fréquence angulaire (rad/s)
T = 50°C (a)
10-2 10-1 100101102
10-2
10-1
100
101
102
103
104
105 G' 0 MGy G'' 0 MGy
G' 1 MGy G'' 1 MGy
G' 2 MGy G'' 2 MGy
G' 3 MGy G'' 3 MGy
G' 4 MGy G'' 4 MGy
G' 5 MGy G'' 5 MGy
T = 70°C
G', G'' (Pa)
Fréquence angulaire (rad/s)
10-2 10-1 100101102
100
101
102
103
104
105
106 G' 0 MGy G'' 0 MGy
G' 1 MGy G'' 1 MGy
G' 2 MGy G'' 2 MGy
G' 3 MGy G'' 3 MGy
G' 4 MGy G'' 4 MGy
G' 5 MGy G'' 5 MGy
G', G'' (Pa)
Fréquence angulaire (rad/s)
T = 50°C
153
Figure IV.14 Viscosité complexe η* en fonction de la fréquence angulaire ω pour des échantillons de bitume irradiés
à 50°C (a) et 70°C (b).
Il est important de rappeler l’absence de point de croisement à basse fréquence, dans cette
gamme d’observation, pour l’échantillon de bitume pur non irradié. Cette apparition avec
l’irradiation peut être expliquée par des modifications structurales. Ce dernier point sera
abordé dans la partie 1.3.
L’apparition du plateau sur G’ ainsi que la déviation de la viscosité complexe à faible
pulsation rend le principe d’équivalence temps-température (PETT) non applicable, quelle
que soit la dose d’irradiation, ce que l’on voit sur la Figure IV.15-a, c, qui montre le PETT
pour les doses de 2 et 5 MGy. La même tendance est observée aux autres doses d’irradiation.
Figure IV.15 -température à D = 2 MGy (a), 5 MGy (c), diagramme de Black (angle de
phase en fonction du module complexe) à D = 2 MGy (b), 5 MGy (d).
10-2 10-1 100101102
103
104
0 MGy 1 MGy
2 MGy 3 MGy
4 MGy 5 MGy
 (Pa.s)
Fréquence angulaire (rad/s)
T = 50°C
10-2 10-1 100101102
102
103
T = 70°C
0 MGy 1 MGy
2 MGy 3 MGy
4 MGy 5 MGy
* (Pa.s)
Fréquence angulaire (rad/s)
10-4 10-3 10-2 10-1 100101102103104105
100
101
102
103
104
105
106
107
108(c)
Dose = 5 MGy
G' 22°C
G'' 22°C
G' 50°C
G'' 50°C
G' 70°C
G'' 70°C
G', G'' (Pa)
*aT (rad/s)
10-4 10-3 10-2 10-1 100101102103104105
100
101
102
103
104
105
106
107
108(a)
G' 22°C
G'' 22°C
G' 50°C
G'' 50°C
G' 70°C
G'' 70°C
G', G'' (Pa)
*aT (rad/s)
Dose = 2 MGy
100101102103104105106107108
10
20
30
40
50
60
70
80
90
100 (b)
Dose = 2 MGy
22°C
50°C
70°C
Delta (degrees)
|G*| (Pa)
100101102103104105106107108
10
20
30
40
50
60
70
80
90
100 Dose = 5 MGy
22°C
50°C
70°C
Delta (degrees)
|G*| (Pa)
(d)
154
De même, la représentation sous forme de diagramme de Black montre aussi la non-
applicabilité du PETT sur les bitumes irradiés (Figure IV.15-b, d). Ce résultat n’est pas
surprenant puisque le PETT ne s’applique déjà pas dans le cas du bitume pur.
D’après les résultats observés avec l’augmentation de la dose d’irradiation, la question qui se
pose maintenant est celle de l’origine des changements de propriétés rhéologiques. C’est la
raison pour laquelle des techniques de caractérisation physico-chimiques ont été utilisées.
1.3. Modifications internes ou structurales
1.3.1. Variation sous irradiation de la teneur des fractions (séparation
SARA)
La séparation des molécules contenues dans les bitumes en fonction de leur polarité est une
technique très souvent utilisée grâce à sa facilité de mise en œuvre. Néanmoins le choix des
solvants d’élution, est un sujet controversé dans la littérature [12-14]. Les études de Pierre et
al. [15] montrent que la teneur en asphaltènes diminue avec l’augmentation de la longueur de
chaîne du solvant. A titre d’exemple, la teneur en asphaltènes est beaucoup plus faible avec le
nonane (C9) qu’avec le pentane (C5). Ce fait est interprété par la dissolution plus prononcée
de la couche de la résine qui entoure les particules d’asphaltènes, en augmentant la formule
brute (nombre de carbone) du solvant [12, 15].
La procédure de séparation présentée dans le chapitre 1 a été utilisée pour tous les bitumes
irradiés. Les valeurs présentent des barres d’erreurs de ± 5 %.
Le fractionnement SARA a été effectué sur les échantillons de bitume irradiés entre 1 et 7
MGy afin d’évaluer l’impact de l’irradiation sur ces familles génériques. Le Tableau 32 et la
Figure IV.16 présentent le récapitulatif de ces séparations ainsi que, pour rappel,
la composition du bitume non irradié (0 MGy).
Tableau 32 
Dose
Saturés
Aromatiques
Résines
Asphaltènes
Total
MGy
%
%
%
%
%
0
30,4
31,9
13,5
23,6
99,4
1
28,8
32,8
15
23,3
99,9
2
20,1
37,7
18,6
23,8
100,2
3
18
44,2
14,9
23
100,1
4
16,1
44,6
17,3
23,1
101,1
5
14,6
45,8
17,2
22,5
100,1
6
10,9
48,6
18,8
23
101,3
7
8,6
49,9
19,3
23,2
101
D’après ce tableau, une augmentation de la teneur en aromatiques et résines est obSERV2E
vec l’augmentation de la dose d’irradiation. Par contre, le pourcentage en chaînes aliphatiques
(saturés) diminue de 30 % (échantillon non irradié) à 9 % pour le bitume irradié à 7 MGy.
155
D’autre part, la teneur en asphaltènes est indépendante de la dose d’irradiation. Ces valeurs
sont schématisées à la Figure IV.16.
Figure IV.16 Evolution de la ten
Le changement de la phase mobile (solvant d’élution) se fait au moment le produit à la
sortie de la colonne sera incolore. Les saturés, les aromatiques et les résines montrent des
couleurs jaunes, rouges et noires respectivement (Figure IV.17). La couleur des fractions
saturées devient de plus en plus incolore en augmentant la dose d’irradiation. Par contre,
la couleur des aromatiques tend vers le noir.
Figure IV.17 Fractions du bitume issues de la séparation SARA : résines (a), aromatiques (b) et saturés (c).
La teneur en saturés diminue du fait des coupures des chaînes et de la formation des gaz de
radiolyse (dihydrogène et faibles alcanes), due à l’interaction entre le rayonnement γ et les
aliphatiques. Par conséquent, l’irradiation entraine la création de défauts tels que les
insaturations (doubles et/ou triples liaisons C≡C), ou encore la formation de cycles
aromatiques. La présence de liaisons insaturées favorise la formation d’un cycle aromatique
suite à la forte délocalisation des électrons. Ce sont les réactions de cycloaddition. On peut
citer parmi celles-ci les réactions de DielsAlder [16], la trimérisation des alcynes ou une
cyclisation [2+2+2] de trois alcynes.
0 1 2 3 4 5 6 7
10
20
30
40
50
60 Saturés
Aromatiques
Résines
Asphaltènes
Fraction (%)
Dose absorbée (MGy)
(c)(b)(a)
156
Les fractions aromatique et résine augmentent suite à la diminution du pourcentage des
aliphatiques. Par conséquent, une aromatisation du bitume se produit sous irradiation γ.
1.3.2. Evolution des masses du bitume et de ses fractions en fonction de la
dose (SEC)
La détermination de la masse moléculaire moyenne de toutes les fractions a été réalisée par
une SEC (chromatographie exclusion stérique) couplée avec un réfractomètre différentiel (RI)
qui produit un signal proportionnel à la masse et donc à la concentration. Le détecteur mesure
une différence d’indice de réfraction entre une cellule étalon qui contient de l'éluant pur
(THF) et une cellule de détection s'écoule l'échantillon élué. La concentration de
l’échantillon doit être inférieure à 5 g/L.
1.3.2.1. 
La Figure IV.18 montre que les échantillons de bitume présentent trois distributions de masse
assez différentes, nommées 1, 2 et 3. Les pourcentages de ces distributions sont
respectivement 15, 79 et 6 %.
Figure IV.18 
(en bleu).
Puisque la 2ème distribution massique présente plus de 75%, tous les calculs se sont basés sur
ce pic. Il est important de noter que les calculs ont également été réalisés sur les 1er et 3ème pic
et la même tendance est observée. Le Tableau 33 présente les distributions en nombre (Mn),
en masse moyenne (Mw) ainsi que l’indice de polymolécularité (Ip) pour les échantillons de
bitume irradiés de 0 à 7 MGy.
800 900 1000 1100 1200
0
5
10
15 1 : Les grandes masses (15%)
2 : Les masses moyennes (79%)
3 : Les faibles masses (6%)
3
2
I (mV)
Temps de rétention (sec)
1
157
Tableau 33 Masses moléculaires moyennes en nombre (Mn), en poids (Mw) et indice de polymolécularité (Ip) pour les
échantillons de bitume pur irradiés entre 0 et 7 MGy.
Dose

Mn
Mw
Ip
MGy
g/mol
g/mol
0
1216
1970
1,62
1
1307
2078
1,60
2
1369
2358
1,72
3
1403
2551
1,82
4
1434
2640
1,84
5
1450
2743
1,89
6
1460
2766
1,90
7
1468
2776
1,91
Une augmentation de la masse moléculaire moyenne en nombre (Mn) et en poids (Mw) en
fonction de la dose est effectivement observée (Figure IV.19) jusqu’à une dose de 4-5 MGy.
Au-delà de 5 MGy, la masse moléculaire tend à saturer à 1470 g/mol (Mn) et 2780 g/mol
(Mw).
Figure IV.19 Masses moléculaires moyennes en nombre (Mn) et en poids (Mw
1.3.2.2. Evolution des masses des fractions sous irradiation
La Figure IV.20 présente l’évolution de la masse moléculaire en nombre des différentes
fractions en fonction de la dose d’irradiation. Une augmentation de cette masse moléculaire
avec la dose est observée pour les aromatiques, résines et asphaltènes. Par contre, les masses
de fractions aliphatiques n’évoluent pas avec la dose jusqu’à 5 MGy. Au-delà de 5 MGy,
une diminution de masse des aliphatiques est obtenue.
0 1 2 3 4 5 6 7
1200
1300
1400
1500
Mn
Mw
Dose d'irradiation (MGy)
Mn (g/mol)
2000
2200
2400
2600
2800
Mw (g/mol)
158
Figure IV.20 Evolution de la masse moléculaire en nombre des fractions de bitume en fonction de la dose

En outre, un saut de masse est observé sur la Figure IV.20 pour les trois fractions
(aromatiques, résines et asphaltènes) entre 2 et 4 MGy. Afin d’expliquer ce dernier effet,
l’évolution de l’intensité en fonction du temps de rétention a été tracée pour chacune de ces
fractions. La Figure IV.21 montre un effet intéressant qui apparait à partir d’une dose de
4 MGy. Cet effet se traduit par l’apparition de nouvelles contributions à faible temps de
rétention (forte masse moléculaire), ce qui entraine un déplacement de la bande 1 vers la
masse la plus élevée (temps de rétention le plus faible) (Figure IV.21).
Figure IV.21 Elugrammes obtenus pour les aromatiques et les résines irradiés entre 0 et 5 MGy.
D’après ces résultats, l’augmentation de la teneur en aromatiques et la diminution des
aliphatiques dans le bitume, ainsi que l’augmentation des masses des fractions insaturées
(aromatiques, résines et asphaltènes), expliquent les variations rhéologiques (viscosité) avec
la dose d’irradiation, observées dans la partie 1.2. De plus, l’augmentation des masses des
asphaltènes avec la dose pourrait expliquer l’augmentation du plateau observé sur G’ à 50 et
70°C, ainsi que le point de croisement entre G’ et G’’.
-1 0 1 2 3 4 5 6 7 8
1100
1200
1300
1400
1500
1600 Saturés
Aromatiques
Résines
Asphaltènes
Dose d'irradiation (MGy)
Mn (g/mol)
Saturés ( ), Aromatiques ( )
0
2000
4000
6000
8000
10000
Mn (g/mol)
Résines ( ), Asphaltènes ( )
900 1000 1100 1200
0
10
20
30
(a)
Aromatiques
2
Apparition d'une nouvelle
contribution à 4 et 5 MGy
I (mV)
Temps de rétention (sec)
Aro_0MGy
Aro_1MGy
Aro_2MGy
Aro_3MGy
Aro_4MGy
Aro_5MGy
Augmentation de
l'abondance avec la dose
1
800 900 1000 1100 1200
0
10
20
30
2
1
I (mV)
Temps de rétention (sec)
Rés_0MGy
Rés_1MGy
Rés_2MGy
Rés_3MGy
Rés_4MGy
Rés_5MGy
Résines
(b)
159
Afin d’aller plus loin en terme d’exploitation des résultats obtenus ci-dessus, trois techniques
ont été utilisées permettant de confirmer ces changements de masses. Ces techniques sont la
spectroscopie infrarouge, la diffraction des rayons X et l’analyse gravimétrique et thermique
ATD/ATG.
1.3.3. IcIa) en fonction
de la dose
Les indices d’aromaticité (Ic) et d’aliphaticité (Ia) pour les échantillons irradiés ont été
calculés selon la méthode déjà introduite dans le premier chapitre. Ils sont présentés sur la
Figure IV.22.
Figure IV.22 
bitume pur.
Une augmentation de l’indice d’aromaticité, concomitante avec une diminution de l’indice
d’aliphaticité à partir de 3 4 MGy, est observée en augmentant la dose d’irradiation.
Ces résultats confirment les teneurs et les masses des fractions obtenues suite aux séparations
analytiques présentées ci-dessus.
1.3.4.       
diffraction des rayons X
Comme introduit dans le premier chapitre, la DRX a été utilisée dans la littérature [17] afin de
déterminer la distance entre les feuillets d’asphaltènes (dm) et le nombre d’empilements (M)
dans un cluster d’asphaltènes.
Deux échantillons (non irradié et irradié à 5 MGy) ont été suivis par DRX. La Figure IV.23
présente les deux diffractogrammes associés à ces deux échantillons.
0 1 2 3 4 5 6 7
0,04
0,06
0,08
0,10
0,12
0,14
Aromaticité
Aliphaticité
Dose d'irradiation (MGy)
Aromaticité (A1600/A)
0,24
0,25
0,26
0,27
0,28
Aliphaticité ((A1460+A1376)/A))
160
Figure IV.23 Diffractogrammes pour les échantillons de bitume non irradié et irradié à 5 MGy, (a) spectres à pleine
échelle et (b) spectres zoomés.
Le profil comporte une large bande amorphe caractérisant le caractère quasi-amorphe du
bitume. De plus, ces profils contiennent deux pics de cristallinité, placés à 22 et 24° en .
Dans la littérature, ces pics sont attribués aux distances entre les feuillets aromatiques
composants les asphaltènes [18-20].
Il est important de noter que le pic observé à 43° dans la Figure IV.23-a est attribué à l’alliage
de Fe-C utilisé dans les porte-échantillons.
Des changements dans les diffractogrammes sont observés en augmentant la dose
d’irradiation. Un nouveau pic apparaît à 28° après irradiation, produit par les portions
aromatiques (pic 3).
Afin de déterminer les paramètres des cristallites, la distance entre les feuillets d’asphaltènes
(dm) a été tout d’abord estimée à partir du maximum du pic, en utilisant la relation de Bragg
( = 2.dm.sinθ). La Figure IV.24 donne une explication des termes (dm et Lc).
Figure IV.24 Les paramètres de cristallites (dm et Lc) du bitume.
Les paramètres des cristallites tirés de la Figure IV.23 pour les deux échantillons de bitume
sont résumés dans le Tableau 34.
Tableau 34 Paramètres des cristallites du bitume non irradié et irradié à 5 MGy.
Bitume 0 MGy
Bitume 5 MGy
(°)
dm
(Ǻ)
Lc
(Ǻ)
M
(-)
(°)
dm
(Ǻ)
Lc
(Ǻ)
M
(-)
Pic 1
21,7
4,1
7,8
2,9
21,7
4,1
7,38
2,80
Pic 2
24,1
3,7
7
2,9
24,1
3,7
12,78
4,45
Pic 3
-
-
-
-
28,9
3,1
22,75
8,35
10 20 30
0
1000
2000
(b)
Intensité
2 (°)
0 MGy
5 MGy
010 20 30 40 50
1000
2000
3000
4000
Intensité
2 (°)
0 MGy
5 MGy
(a)
Zoom
Pic 1
Pic 2
Pic 3
dm
Lc
161
L’augmentation de la dose d’irradiation conduit à une augmentation de la hauteur moyenne de
la pile de feuillets aromatiques perpendiculaire au plan (Lc), de 7 à 13, au même angle de
diffraction ( = 24,1°), indiquant l’augmentation du nombre de feuillets d’asphaltènes M
dans un cluster de 3 à 5. En outre, la distance dm diminue avec l’irradiation, ce qui signifie un
compactage des feuillets d’asphaltènes.
Par ailleurs, le nouveau pic qui apparaît à 29° avec l’irradiation possède également la distance
dm la plus faible (3,1), ce qui indique la présence d’une structure plus compacte. De plus, cette
structure dense apparait clairement dans le terme M le nombre de feuillets d’asphaltènes
dans un cluster est de 8,35 en moyenne par rapport à 2,9 avant irradiation.
Par conséquent, l’irradiation conduit à la création et/ou à la fusion de cycles aromatiques, ce
qui entraine surtout une augmentation de la taille des asphaltènes et l’obtention d’une entité
plus compacte (dm plus faible).
1.3.5. radiation
Dans l’objectif de compléter et de vérifier le phénomène de réticulation du bitume sous
irradiation, nous avons utilisé une analyse thermogravimétrie (ATG) couplée avec une
analyse thermique différentielle (ATD). La Figure IV.25-a montre la courbe d’ATD/ATG
obtenue pour l’échantillon de bitume non irradié. L’échantillon non irradié commence à
perdre de la masse à partir d’une température de l’ordre de 200°C. La perte de masse localisée
dans la zone 200 350 °C est attribuée dans la littérature à l’émission des gaz tels que H2,
CH4, CO/CO2 [21]. La perte de masse attribuée à ces gaz est relativement faible (< 3%).
A partir de 350°C, une décomposition du matériau a lieu. La première dérivée (Figure IV.25-
b) pour la courbe d’ATD/ATG montre une décomposition maximale à 484°C. Après
dégradation, l’échantillon de bitume laisse un résidu de carbone d’environ 16,3% de sa masse
initiale à 800°C.
Figure IV.25 Perte de masse (a) et sa première dérivée (b) en fonction de la température pour le bitume non irradié.
De la même façon, le résidu de carbone d’échantillons irradiés, entre 1 et 7 MGy, a été
déterminé. Il est observé d’après la Figure IV.26 que ce résidu devient plus important avec
l’irradiation. Un résidu de 23% est obtenu à 7 MGy. Cette augmentation de la teneur en résidu
de carbone sous irradiation est une indication de la réaction de réticulation produite dans le
matériau.
0200 400 600 800
0
20
40
60
80
100 (a)
Perte de masse (%)
Température (°C)
0 MGy
Perte =83,711%
Restant = 16,29%
0200 400 600 800
0,0
0,5
1,0
1,5
0 MGy
Dérivée
Température (°C)
Tmax = 484 °C
(b)
162
Figure IV.26 

Une deuxième méthode, utilisant la distillation sur colonne, publiée dans la littérature [21],
a été utilisée afin de vérifier les résultats obtenus par ATD/ATG. Cette méthode est présentée
en annexe A. Une très bonne cohérence entre les deux méthodes est obtenue (Figure IV.26).
1.3.6. Conséquences des modifications structurales sur la température de
transition vitreuse Tg
Les bitumes, comme les polymères amorphes, présentent un certain nombre de propriétés
communes à tous les systèmes désordonnés, telle que la présence d’une transition vitreuse
Tg [22].
La transition vitreuse dépend de cinq facteurs :
Le volume libre du polymère (ʋf) : c’est le volume du polymère qui n’est pas occupé
par les molécules elles-mêmes. Il est donné par l’expression suivante : ʋf = ʋ - ʋs, avec ʋ le
volume spécifique du polymère (cm3/g) et ʋs le volume spécifique des molécules compactées
(cm3/g). Plus ʋf est grand, plus les molécules peuvent bouger et plus la Tg est basse [23].
Les forces d’attraction entre les molécules : plus les liaisons sont fortes, plus l’énergie
thermique pour les rompre est élevée, ce qui se traduit par une Tg très élevée. Dans certains
cas, la Tg est plus élevée que la température de dégradation thermique du polymère, c’est le
cas par exemple du polyacrylonitrile.
La mobilité interne des chaînes : la réticulation limite la mobilité des chaînes, ce qui
conduit à une légère augmentation de la Tg [22].
La rigidité des chaînes : les chaînes ayant des difficultés à se tordre ou bouger
entrainent des Tg plus élevées. A titre d’exemple, les chaînes qui ont des doubles liaisons
(C=C) dans la chaîne principale, ou sont principalement des chaînes aromatiques, ont une très
grande rigidité de chaîne, ce qui induit une Tg élevée [23].
0 1 2 3 4 5 6 7
16
18
20
22
24 Distillation sur colonne
ATD/ATG
Masse restante (%)
Dose absorbéee (MGy)
163
La longueur des chaînes : Tg varie en fonction de la longueur des chaînes suivant la
relation : Tg = Tg C/x [23], Tg est la valeur asymptotique de Tg pour une longueur de
chaîne infinie, C une constante pour un polymère donné et x la longueur de la chaîne.
Par conséquent, plus les chaînes sont courtes, plus leur mobilité est grande, ce qui conduit à
une diminution de Tg.
D’après les résultats obtenus précédemment, une augmentation de la teneur en aromatiques
accompagnée par une augmentation de la masse moléculaire moyenne des chaînes est
observée avec la dose d’irradiation entrainant une augmentation de la viscosité et donc la
rigidité du bitume. Par conséquent, et en se basant sur les définitions des paramètres qui
peuvent influencer sur la valeur de Tg , majoritairement la rigidité, la longueur ainsi que la
mobilité des chaînes, nous nous attendons à une augmentation de cette valeur avec
l’irradiation.
Pour confirmer ce point, des essais par DSC modulée ont été effectués sur les échantillons de
bitume irradiés entre 1 et 5 MGy. Comme expliqué dans le deuxième chapitre, la transition
vitreuse a été calculée au moyen de la courbe du composant réversible (Rev. ΔH). Sur la
Figure IV.27, nous présentons une courbe de DSC modulée de l’échantillon de bitume irradié
à 2 MGy. Une valeur de Tg de l’ordre de -14°C est obtenue.
Figure IV.27 Evolution dtotal, réversible et non-réversible en fonction de la température par

De la même façon, toutes les Tg des échantillons irradiés ont été déterminées par DSC
modulée. La Figure IV.28 présente l’évolution de Tg de la matrice en fonction de la dose
d’irradiation.
-100 -50 0 50 100
-0,16
-0,14
-0,12
-0,10
-0,08
-0,06
-0,04
H totale
H réversible
H irréversible
Température (°C)
H total (W/g)
Tg = -14 °C
-0,14
-0,12
-0,10
-0,08
-0,06
-0,04
-0,02
62,5
43,4
27,7
15,2
H Rev et H non. Rev (W/g)
-2,2
D = 2 MGy
164
Figure IV.28 
Une augmentation de la valeur de Tg est observée, ce qui confirme les suggestions proposées
précédemment. L’augmentation de Tg est accompagnée par une croissance de la capacité
calorifique Cp. En effet, la capacité calorifique à pression constante (Cp) est liée à l’énergie
qui doit être fournie pour dilater le corps en présence d’une pression externe. Il s’agit donc de
l’énergie qu’il faut fournir pour augmenter de 1°C la température de 1g de bitume. Avec
l’irradiation, le taux de réticulation augmente et un durcissement du système est observé,
entrainant une augmentation de la Cp afin de dilater le système. Ceci est cohérent avec les
résultats obtenus. Le Tableau 35 résume les valeurs de Tg et Cp obtenues.
Tableau 35 Valeurs de Tg et Cp 
Dose
Tg
Cp
MGy
°C
J/g.°C
0
-20
0,16
1
-14,5
0,35
2
-14
0,38
3
-12
0,46
4
-7,2
0,45
5
-6,4
0,49
1.4. Bilan
A la fin de cette partie, nous avons réussi à comprendre les changements observés sous
irradiation au niveau des propriétés rhéologiques grâce à l’utilisation des différentes
techniques physico-chimiques. Une aromatisation du bitume (augmentation de la teneur en
0 1 2 3 4 5
-21
-18
-15
-12
-9
-6
Tg (°C)
Dose (MGy)
165
chaînes insaturés et cycles aromatiques, accompagnée par une diminution des chaînes
aliphatiques) a lieu sous irradiation, induisant une rigidité de la structure interne du bitume et
par conséquent une augmentation de sa viscosité. En outre, cette aromatisation du bitume est
accompagnée par une augmentation des masses des aromatiques, des résines et des
asphaltènes, ce qui entraîne une structure des asphaltènes plus compacte et plus dense sous
irradiation.
Après avoir décrit l’influence de l’irradiation sur le bitume pur, des irradiations γ ont
également été effectuées sur les échantillons de l’enrobé industriel STE3.
2.      
(STE3)
Six échantillons d’enrobé STE3 ont été extrudés à N = 70 tr/min et Q = 583 g/h.
Cinq échantillons parmi ces six ont été irradiés, à la température ambiante, et ils ont intégré
des doses d’irradiation D allant de 1 à 5 MGy. Le sixième échantillon a été conservé comme
référence non irradiée.
2.1. Evolution du gonflement des enrobés STE3 en fonction de la
dose
2.1.1. 
Deux séries de STE3 ont été irradiées. La 1ère série, contenant 7 béchers en verre (contenant
8 × 8 cm du bitume), a été irradiée avec un débit de dose de l’ordre de 5000 Gy/h.
Le gonflement de ces échantillons a été mesuré à la fin de l’irradiation. La 2ème rie est
limitée à un seul échantillon irradié à 1 MGy avec un débit de dose de l’ordre de 400 Gy/h.
La mesure du gonflement de cet échantillon a été effectuée à différentes échéances durant
l’irradiation. Le Tableau 36 résume les conditions d’irradiation.
Tableau 36 
Enrobés bitume (STE3)
Débit de dose (Gy/h)
400
5000
Dose totale (MGy)
1
1, 2, 3, 4, 5, 6 et 7
La Figure IV.29 montre l’évolution du taux de gonflement du STE3 en fonction de la dose
d’irradiation pour les deux débits de dose. Nous observons la même évolution du gonflement
que celui du bitume pur, avec une vitesse initiale de gonflement de l’ordre de 26 29 % par
MGy, contrairement à 14% pour le bitume pur. Cette vitesse ne semble pas être
considérablement affectée par le débit de dose, ce qui est cohérent avec les études de
Bernat [1]. De plus, un état d’équilibre estimé à 65 70 % de gonflement semble s’installer à
forte dose vers le 5 MGy, comme dans le cas du bitume pur.
166
Figure IV.29 Gonflement du STE3 en fonction de la dose à différents débits de dose.
2.1.2. Comparaison du gonflement du bitume pur et du STE3
La Figure IV.30 montre le gonflement obtenu pour les deux composés bitume pur et STE3.
Nous observons que le gonflement du STE3 est plus important que celui du bitume pur, avec
un facteur de l’ordre de 1,3 à 1,5, quelle que soit la dose d’irradiation. Deux points peuvent
expliquer ces résultats :
L’introduction de sels dans la matrice bitume gêne le mouvement des bulles en raison
de l’augmentation de l’élasticité de la matrice ainsi que de la viscosité newtonienne. Nous
verrons plus tard que la viscosité du STE3 est plus importante que celle du bitume pur.
Or, d’après la relation de Hadamard- Rybczynski (Eq. 3), la vitesse de migration est d’autant
plus faible que la valeur de la viscosité de la matrice est plus élevée. Par conséquent, une
augmentation de la viscosité de STE3 conduit à une vitesse de migration plus lente des bulles
d’H2, ce qui entraîne un taux de gonflement plus important.
Le nombre des bulles crée dans le STE3 est beaucoup plus important, certainement dû
à une augmentation du nombre de sites de nucléation (plus d’interfaces). Ce point sera
confirmé plus tard par microtomographie X.
0 1 2 3 4 5 6 7 8
0
15
30
45
60
75
STE3 à 5000 Gy/h
STE3 à 400 Gy/h
Gonflement G(%)
Dose d'irradiation totale (MGy)
26 - 29% / MGy
167
Figure IV.30 Comparaison du gonflement du bitume pur et du STE3 à 5000 Gy/h.
Enfin, il est important de noter que la Figure IV.30 représente les gonflements réels et non
ramenés à une masse de bitume irradié. En effet, le STE3 contient 40% en masse de moins de
bitume, donc la quantité d’H2 produite est 40% plus faible. Il en résulte que l’effet des sels sur
le gonflement est donc d’autant plus important.
2.2. 
L’effet de la dose totale d’irradiation, du débit de dose et de l’ajout de sels sur la distribution
et la quantité de bulles créées a été évalué par des caractérisations en microtomographie X.
2.2.1. 
Une augmentation du nombre et de la taille des bulles a été observée avec l’augmentation de
la dose d’irradiation, similaire au cas du bitume pur, mais avec des proportions (nombre de
bulles) plus importantes. En effet, l’augmentation de la dose d’irradiation de 1 à 4 MGy
conduit à une augmentation du nombre de bulles moyen de 90 à 200 bulles (Figure IV.31).
Des bulles avec des tailles plus petites ont été observées avec une dose de 1 MGy (0,104 cm2
au lieu de 0,153 cm2 dans le cas de 4 MGy). Les résultats obtenus sont listés dans le Tableau
37.
Figure IV.31 
0 1 2 3 4 5 6 7 8
0
15
30
45
60
75
Bitume pur
STE3
Gonflement G(%)
Dose d'irradiation (MGy)
55 %
72 %
BWP 1 MGy BWP 4 MGy
(a) (b)
168
Tableau 37 
Dose Totale
(MGy)
Nombre
Taille moyenne
(cm2)
Aire totale iv
(cm2)
1
90
0,104
9,38
4
200
0,153
31,3
2.2.2. Effet du débit de dosev
L’effet du débit de dose a également été visualisé par microtomographie X pour les
échantillons de STE3. La Figure IV.32 montre l’état du STE3 irradié à la même dose
d’irradiation (1 MGy) mais avec deux débits de dose (400 et 5000 Gy/h).
Figure IV.32 Effet du débit de dose sur la forme, la taille et le nombre des bulles créées, (a) STE3 à 5000 Gy/h et (b)
STE3 à 400 Gy/h.
L’effet du débit de dose est clairement marqué. Une diminution du débit de dose conduit à des
bulles plus uniformes (quasi monodisperses), de forme sphériques et de petites tailles, tandis
qu’à 5000 Gy/h, une large distribution de taille de bulles est observée, accompagnée d’une
forme aléatoire.
Le traitement de ces images est présenté à la Figure IV.33 : une augmentation du nombre de
bulles de 216 à 418 (environ 2 fois plus), concomitante avec une diminution de la taille de
0,067 à 0,048 cm2 (1,5 fois plus faible), est remarquée avec la diminution du débit de dose de
5000 à 400 Gy/h.
iv Aire totale des bulles dispersées dans la matrice bitume
v Ces mesures ont été effectuées sur les deux parties du bécher (basse et haute) et, au moyen du logiciel
VGStudio Max (GE inspection), ces deux parties ont été couplées afin de reconstruire le bécher entier.
(b)(a)
169
Le Tableau 38 présente les valeurs obtenues après traitement. En multipliant le nombre de
bulles par leur volume moyen, calculé en supposant que la forme des bulles est sphérique
pour les deux débits de dose (5000 et 400 Gy/h), nous obtenons quasiment la même valeur
(2,8 et 3,3 cm3, respectivement), ce qui nous permet d’expliquer l’obtention du même taux de
gonflement dans les deux cas (environ 26 29 %/MGy).
Tableau 38 Données obtenues suite au traitement des images par le logiciel ImageJ.
Débit de
dose
Nombre des
bulles (nb)
Surface
moyenne (S)
Rayon
moyen (R)
Volume
moyen (V)
V × nb
Gy/h
-
cm2
cm
cm3
cm3
400
414
0,048
0,123
7,91 × 10-3
2,81
5000
216
0,067
0,146
0,013
3,30
Figure IV.33 Binarisation et traitement des bulles à différents débits de dose dans STE3 à 1MGy, (a) 5000
Gy/h et (b) 400 Gy/h.
(a) (b)
170
Dans le cas des fûts de STE3 réels, le débit de dose est beaucoup plus faible que les valeurs
utilisées (5000 ou 400 Gy/h), il est de l’ordre de 0,5 à 5 Gy/h. D’après les résultats obtenus
par microtomographie X, nous nous attendons donc à un nombre de bulles beaucoup plus
important, mais avec une taille plus faible (en approximation 4 à 5 fois plus faible).
Cette diminution de taille pourrait induire un temps plus important pour que ces bulles soient
relâchées hors le fût du STE3 à travers la surface à dose équivalente impliquant un
gonflement plus important en fonction du temps.
2.2.3. 
L’effet de l’ajout de sels a été évalué en comparant les photos obtenues avec 1 et 4 MGy pour
les deux composés bitume pur (Figure IV.5) et STE3 (Figure IV.31). Un nombre de bulles
plus élevé est observé dans l’enrobé STE3 quelle que soit la dose : 90 bulles pour STE3
contre 72 pour le bitume pur à 1 MGy. A 4 MGy, l’augmentation va de 95 (bitume pur) à 200
bulles (STE3).
Par contre, une taille moyenne de bulles plus faible est observée dans le cas de STE3. Cette
diminution de taille de bulles pourrait être expliquée par la présence de sels dans la matrice
bitume, qui tend à limiter les phénomènes de croissance de bulles, soit par mûrissement
d’Ostwald, soit par coalescence. Ce dernier phénomène a été visualisé par la reconstitution
des images en 3D sous forme de vidéo (Figure IV.34).
Sur la Figure IV.34-a, cas du bitume pur, nous observons la présence de bulles avec
différentes tailles. Une grande bulle en 3D est sélectionnée. Cette croissance de bulles peut
résulter du phénomène de coalescence, visualisé sur la Figure IV.34-b, cas de l’enrobé STE3.
Trois visions différentes (dessus, droite et avant) confirment la présence de ce phénomène de
coalescence.
Figure IV.34 Visualisation des bulles en 3D par microtomographie X, (a) dans le bitume et (b) dans STE3 à 3 MGy.
2.3. u STE3
Dans l’objectif d’évaluer l’effet de l’irradiation γ sur les propriétés physiques (viscosité et
élasticité), des mesures rhéologiques sur les échantillons ont été effectuées à trois
températures 22, 50 et 70°C.
(a) (b)
171
Les courbes en écoulement (viscosité en fonction du taux de cisaillement) pour les
échantillons de STE3 irradiés entre 1 et 5 MGy à un débit de 5000 Gy/h sont présentées sur la
Figure IV.35.
Figure IV.35 Viscosité en fonction du taux de cisaillement pour des échantillons de STE3 irradiés à différentes doses
allant de 0 à 5 MGy, à 22°C (a), 50°C (c) et 70°C (d), et viscosité newtonienne en fonction de la dose à 22°C (b).
Une augmentation de la viscosité newtonienne est clairement observée en augmentant la dose
d’irradiation. Les valeurs de la viscosité newtonienne pour tous les échantillons à 22, 50 et
70°C sont classées dans le Tableau 39. De plus, une influence du débit de dose sur la viscosité
est remarquée pour les échantillons irradiés à 1MGy. Une viscosité légèrement plus élevée
avec un débit de dose plus faible (400 Gy/h) est obtenue. Ceci peut être à un effet de
réticulation du STE3 sous irradiation. En effet, l’obtention d’une dose de 1 MGy avec un
débit de dose de 400 Gy/h nécessite un temps d’irradiation de l’ordre de 100 jours, contre 8
jours d’irradiation avec 5000 Gy/h, c'est-à-dire une durée d’interaction rayonnement-matière
plus longue, ce qui pourrait entrainer un taux de réticulation plus important. En effet, les
chaînes carbonées ont plus de temps pour interagir entre elles afin d’obtenir un état
thermodynamique plus stable.
Par ailleurs, quelle que soit la dose d’irradiation ou le débit de dose, les viscosités
newtoniennes des enrobés STE3 restent très importantes devant celles du bitume pur.
Le rapport des viscosités STE3/bitume pur est égal à 3,1 pour une dose nulle. Une
comparaison entre les viscosités de STE3 et bitume pur sera présentée dans la partie 3.
10-6 10-4 10-2 100102
103
104
(c)
STE3 0 MGy STE3 1 MGy à 5000 Gy/h
STE3 2 MGy STE3 3 MGy
STE3 5 MGy STE3 1 MGy à 400 Gy/h
Viscosité (Pa.s)
Taux de cisaillement (1/s)
10-6 10-4 10-2 100102
102
103
104
(d)
STE3 0 MGy
STE3 1 MGy à 5000 Gy/h
STE3 2 MGy
STE3 3 MGy
STE3 5 MGy
STE3 1 MGy à 400 Gy/h
Viscosité (Pa.s)
Taux de cisaillement (1/s)
0 1 2 3 4 5 6
5,0x106
1,0x107
1,5x107
(b)
Viscosité (Pa.s)
Dose d'irradiation (MGy)
T = 22°C
10-5 10-4 10-3 10-2 10-1
106
107
0 MGy
1 MGy
2 MGy
3 MGy
5 MGy
Viscosité (Pa.s)
Taux de cisaillement (1/s)
(a)
5000 Gy/h
T = 50C T = 70C
T = 22C
172
Tableau 39 Valeurs de la viscosité newtonienne du STE3 à différentes températures sous dose et débit de dose
différents.

(MGy)
Débit de dose
(Gy/h)
Viscosité (Pa.s)
22°C
Viscosité (Pa.s)
50°C
Viscosité (Pa.s)
70°C
0
-
1,35 × 106
3670
220
1,082
400
2,80 × 106
6040
290
1,029
5000
2,03 × 106
4040
235
1,942
5000
3,13 × 106
6610
310
2,927
5000
4,73 × 106
8870
435
5,152
5000
1,10 × 107
18230
695
De la même façon, les modules élastiques et visqueux ont également augmenté avec la dose
d’irradiation. La Figure IV.36 montre l’évolution de G’ et G’’ en fonction de la fréquence
angulaire à 22°C. A basse fréquence, les modules G’ et G’’ évoluent avec la fréquence avec
une pente de 1 et 0,8 respectivement.
Comme pour la viscosité newtonienne, les modules G’ et G’’ sont plus élevés avec un débit
de dose de 400 Gy/h, quelle que soit la température.
Figure IV.36 Module élastique (a), module visqueux (b) en fonction de la fréquence angulaire pour les échantillons
de STE3 irradiés, à 22°C.
De plus, comme observé dans le cas du bitume pur, une diminution de la tangente delta,
traduisant une élasticité plus sensible à l’irradiation, est obtenue (Figure IV.37).
10-2 10-1 100101102
104
105
106
107
108
(b)
STE3 0 MGy
STE3 1 MGy à 5000 Gy/h
STE3 2 MGy
STE3 3 MGy
STE3 5 MGy
STE3 1 MGy à 400 Gy/h
Module visqueux G'' (Pa)
Fréquence angulaire (rad/s)
10-2 10-1 100101102
103
104
105
106
107
108
(a)
STE3 0 MGy
STE3 1 MGy à 5000 Gy/h
STE3 2 MGy
STE3 3 MGy
STE3 5 MGy
STE3 1 MGy à 400 Gy/h
Module élastique G' (Pa)
Fréquence angulaire (rad/s)
173
Figure IV.37 tan (delta) en fonction de la pulsation pour les échantillons de STE3 irradiés.
En augmentant la température, une déviation sur G’ commence à apparaître à 50°C, jusqu’à
l’obtention d’un plateau à 70°C (Figure IV.38). Contrairement au cas du bitume pur,
ce plateau pseudo-solide est dû aux interactions entre les charges (sels) [24, 25].
Figure IV.38 Module élastique en fonction de la pulsation à 50°C (a) et 70°C (b) pour les échantillons de STE3
irradiés.
A basse fréquence, une évolution inattendue du plateau sur G’ est observée. Ce plateau, large
à 0 MGy, tend à disparaitre lorsque la dose d’irradiation augmente, à l’exception de
l’échantillon irradié à 1 MGy avec un débit de dose de 400 Gy/h, il présente un plateau
large avec une valeur de G’ plus élevée à 10-2 rad/s, environ 3,8 Pa.
Cette disparition du plateau avec l’irradiation pourrait être due à l’augmentation de la
viscosité de la matrice bitume qui limite les interactions entre les sels. Cet effet est
effectivement clair sur la viscosité complexe à 70°C, l’augmentation de la dose
d’irradiation conduit à la disparition de la déviation de la viscosité complexe à basse
fréquence (Figure IV.39).
10-2 10-1 100101102
1
2
3
4
5
6
7 0 MGy
1 MGy à 5000 Gy/h
2 MGy
3 MGy
5 MGy
1 MGy à 400 Gy/h
tan(delta) (-)
Fréquence angulaire (rad/s)
T = 22 °C
Dose
10-2 10-1 100101102
100
101
102
103
104
105
106 STE3 0 MGy
STE3 1 MGy à 5000 Gy/h
STE3 2 MGy
STE3 3 MGy
STE3 5 MGy
STE3 1 MGy à 400 Gy/h
Module élastique G' (Pa)
Fréquence angulaire (rad/s)
(a)
T = 50°C
10-2 10-1 100101102
10-1
100
101
102
103
104
T = 70°C
(b)
STE3 0 MGy
STE3 1 MGy à 5000 Gy/h
STE3 2 MGy
STE3 3 MGy
STE3 5 MGy
STE3 1 MGy à 400 Gy/h
Module élastique G' (Pa)
Fréquence angulaire (rad/s)
174
Par contre, on note la forte déviation de la viscosité complexe avec l’échantillon de STE3
irradié avec 400 Gy/h à 1 MGy.
Figure IV.39 Viscosité complexe en fonction de la pulsation pour les échantillons de STE3 irradiés : valeurs
expérimentales (symboles) et modèle de Carreau-Yasuda à seuil (trait plein).
L’estimation de la contrainte seuil par la loi de Carreau-Yasuda à seuil à 70°C, représentée sur
le graphe par le trait plein, montre une diminution de cette contrainte en augmentant la dose
d’irradiation. Le Tableau 40 résume les valeurs des viscosités et contraintes obtenues.
Tableau 40 Valeurs des contraintes seuil et viscosités newtoniennes issues de la loi de Carreau-Yasuda à seuil pour
les échantillons de STE3 irradiés.

MGy
Débit de
dose
Gy/h
0
Pa.s
0
Pa
0
-
210
0,94
1,082
400
267
2,1
1,029
5000
273
0,65
1,942
5000
339
0,6
2,927
5000
627
0
5,152
5000
744
0
3.     -vieillissement radiolytique
pour STE3 à T = 22°C
Tout d’abord, nous avons établi l’influence de la présence de sels sur la viscosité du bitume
non irradié. Le rapport de viscosité entre STE3 et bitume pur est de 3,1 à 22°C à dose nulle.
La viscosité du bitume pur et du STE3 augmente avec la dose totale d’irradiation, avec un
effet beaucoup plus marqué pour l’enrobé STE3 (Figure IV.40).
10-2 10-1 100101102
100
1000
STE3 0 MGy STE3 1 MGy à 5000 Gy/h
STE3 2 MGy STE3 3 MGy
STE3 5 MGy STE3 1 MGy à 400 Gy/h
Viscosité complexe (Pa.s)
Fréquence angulaire (rad/s)
T = 70°C
175
Figure IV.40 Viscosité  
symboles sont les valeurs expérimentales et les lignes représentent les ajustements par des fonctions exponentielles.
Une faible augmentation de la viscosité du bitume pur est observée dans la zone (02 MGy) ;
à partir de 3 MGy, la viscosité augmente plus rapidement. La viscosité newtonienne du
bitume pur évolue avec la dose totale d’irradiation selon une loi exponentielle :
6)(Eq.1049,3
023,2
exp1098,8)( 54
D
D
purBitume
D est exprimée en MGy et η en Pa.s.
La Figure IV.40 psente l’ajustement par la loi exponentielle ci-dessus de la viscosité
newtonienne du bitume pur en fonction de la dose d’irradiation.
La viscosité d’un matériau chargé par des particules peut être estimée selon un modèle
théorique de type Krieger-Dougherty [26]. Ce modèle est donné par l’équation suivante :
7)(Eq.1 max
].[
max
3
eff
purbitumeSTE
φeff est la fraction volumique effective de particules, φmax est la fraction d’empilement
maximale, par exemple elle est égale à 0,637 pour un empilement compact aléatoire et à 0,74
pour cubique à faces centrées ; [η] est la viscosité intrinsèque. La viscosité intrinsèque est
définie par la valeur limite du rapport viscosité spécifique/concentration à une dilution infinie
(concentration nulle) :
)8(Eq.
)1(
][
0
0
c
r
c
sp C
C
avec C la concentration du polymère en gramme par 100 mL de solution et ηsp la viscosité
spécifique. En général, la viscosité intrinsèque des macromolécules linéaires est liée à la
masse moléculaire en poids Mw et au degré de polymérisation. La loi de Mark-Houwink-
0 1 2 3 4 5 6 7 8
0,0
5,0x106
1,0x107
1,5x107 Bitume pur
STE3
Viscosité newtonienne (Pa.s)
Dose d'irradiation (MGy)
T = 22C
176
Sakurada (MHS) permet de relier la viscosité intrinsèque [η] à la masse molaire moyenne
viscosimétrique Mv par la relation suivante [27]:
)9(Eq.][
v
MK
Il s'agit d'une relation semi-empirique dans laquelle les coefficients K et α varient avec le
couple solvant/polymère considéré et la température de la solution et ils sont indépendants de
la masse du polymère.
Le paramètre α, qui est fonction de la rigidité de la chaîne en solution [28], varie
habituellement entre 0,5 et 0,8 pour les polymères linéaires flexibles (pelote statistique
souple) [29]. Cette valeur est généralement plus élevée (0,8 1,1) pour les polymères ayant
un squelette rigide (structure bâtonnet) ou des propriétés de drainage particulièrement élevées
en solution [30]. Cependant, cette valeur est proche de 2 pour les polymères ayant une rigidité
absolue (sous forme d’une tige rigide).
Dans le modèle de Krieger-Dougherty, le produit [η]. φmax est souvent symbolisé par un
facteur q qui est le facteur de forme avec une valeur de [η] = 2,5 attribuée à des particules
solides sphériques monodispersées [26]. Par contre, cette valeur est souvent plus élevée
lorsque la forme de l’objet est plutôt ellipsoïdale polydispersée. D’après la littérature, il a été
observé que la valeur de la viscosité intrinsèque dans le cas du bitume chargé est souvent dans
la gamme 2,4 - 4,9 [12].
Dans notre cas, la viscosité du bitume pur et du STE3 à 22°C est connue. De plus, le rapport
de viscosité (STE3/bitume pur) à 22°C est égal à 3,1 à dose nulle. Par conséquent, le facteur
  
 est égal à 3,1. En supposant que la fraction maximale est 0,637
(empilement compact aléatoire) et le facteur de forme est égal à 2 (équation du Quemada
[31]), nous pouvons calculer la viscosité intrinsèque qui est égale à 3,2 g/l. La fraction
volumique effective est alors égale à 0,27. Cette dernière valeur est proche de la valeur de la
fraction volumique réelle de sels introduite dans le STE3 (φv = 0,22).
Afin de déterminer une relation entre la viscosité du STE3 et du bitume pur en fonction de la
dose, il nous faut vérifier si le rapport entre STE3 et bitume pur à toute dose est constant.
Puisque ce rapport n’est pas constant, il faut prendre en compte l’évolution de la viscosité
intrinsèque avec la dose. Comme nous l’avons vu précédemment, l’irradiation a induit des
modifications structurales, en particulier des réticulations conduisant à l’augmentation de la
masse moléculaire moyenne du bitume. Dans l’objectif de vérifier ce point, des mesures de
masse ont été effectuées par SEC. La Figure IV.19, présentée dans la 1ère partie de ce chapitre,
a montré une augmentation de la masse moléculaire moyenne avec la dose d’irradiation. Nous
pouvons alors supposer que la viscosité intrinsèque est fonction de la dose d’irradiation.
En réécrivant l’équation (7), nous obtenons :
)10(Eq.
1
)/(
1
][
max
3
max
eff
purbitumeSTE
Log
Log
Nous pouvons maintenant calculer la viscosité intrinsèque en fonction de la dose totale
d’irradiation (i.e. le rapport ηSTE3bitume pur). La viscosité intrinsèque augmente avec la dose
177
d’irradiation (Figure IV.41-a) et varie avec la masse moléculaire selon l’équation de Mark-
Houwink-Sakurada (MHS) (Figure IV.41-b). Les valeurs obtenues pour les constantes α et K
de l’équation de MHS du bitume sont de 1,64 et 1,37× 10-5 dL/g, respectivement.
Le coefficient de corrélation de la droite tracée à la Figure IV.41-b est de 0,977, ce qui
démontre l’excellente linéarité de la relation obtenue :
11)(Eq.104,1][ 64,1
5v
M
avec Mv la masse moléculaire viscosimétrique moyenne.
D’après cette équation, l’obtention d’une pente supérieure à 1 (1,64) démontre la rigidité de la
structure du bitume. De plus, cette valeur traduit la présence d’une structure bâtonnet-tige,
ce qui est cohérent avec les résultats obtenus par diffusion des rayons X aux petits angles
(voir annexe B).
Figure IV.41 
quation (12) en trait plein) et (b) masse moléculaire viscosimétrique moyenne (en échelle log log).
0 1 2 3 4 5 6
3
4
5
6
[]lim = 6,1 dl/g
[] (dl/g)
Dose d'irradiation (MGy)
(a)
[]0 = 2,99 dl/g
3,28 3,32 3,36 3,40 3,44
0,3
0,4
0,5
0,6
0,7
0,8
0,9
= 1,37 x 10-5 Mv
1,64
r2 = 0,93
Log [
]
Log (Mv)
(b)
= 1,64
178
Sur la Figure IV.41-a nous pouvons remarquer que la viscosité intrinsèque tend à saturer à
6,1 dL/g au-delà de 5 MGy. Nous pouvons ainsi proposer une loi permettant de décrire
l’évolution de la viscosité intrinsèque [η] avec la dose (D) :
)12(Eq.))exp(1()][]([][)]([0lim0DD
[η] 0 est la viscosité intrinsèque à dose nulle, [η]lim la valeur limite à dose élevée et a une
constante. Pour [η]0 = 2,99 dL/g et [η]lim = 6,1 dL/g, nous obtenons α = 0,36 MGy-1.
Nous pouvons maintenant relier la viscosité newtonienne du STE3 irradié à celle du bitume
irradié en utilisant l’équation de Krieger-Dougherty, dans laquelle la viscosité intrinsèque et la
viscosité de la matrice bitume sont dépendantes de la dose d’irradiation :
)Eq.13(1)()( max
).]([
max
030
D
eff
purbitumeSTE DD
η0 bitume pur(D) et [η](D) sont données par les équations (6) et (12), respectivement.
Une comparaison entre les valeurs expérimentales de la viscosité newtonienne du STE3 et
l’équation (13) est donnée sur la Figure IV.42. Nous constatons une excellente superposition
entre le modèle proposé et l’expérience soulignant la robustesse du modèle et de l’approche
adoptés.
Figure IV.42 Valeurs expérimentales de la viscosité newtonienne du STE3 (symboles) et relation théorique proposée
(trait plein).
Afin de vérifier la validité de cette loi, une deuxième série d’irradiation des échantillons de
STE3 a été refait à des doses de 4, 6 et 7 MGy. La mesure de la viscosité de ces échantillons
(symboles bleus) montre une très bonne corrélation avec le modèle proposé (Figure IV.42).
0 1 2 3 4 5 6 7 8
0
1x107
2x107
3x107
4x107 STE3 - série 1
STE3 - série 2
Modèle proposé
Viscosité (Pa.s)
Dose d'irradiation (MGy)
179
4. Bilan de ce chapitre
L’effet de l’irradiation γ sur le comportement du bitume pur et d’un enrobé bitume de
composition industrielle (STE3) a été évalué dans ce chapitre. Le gonflement des composés
bitumineux dépend de la dose totale d’irradiation, de la géométrie utilisée, de la teneur en sels
et du comportement rhéologique.
Une augmentation de la dose d’irradiation conduit à une augmentation du taux de gonflement
avec une pente initiale de 14%/MGy pour le bitume pur, pour lequel un plateau apparaît aux
alentours de 4 5 MGy, signifiant qu’un état d’équilibre entre la production et l’évacuation
de bulles est atteint. Pour les débits de dose considérés dans cette étude (400 à 5000 Gy/h) un
gonflement constant de l’ordre de 50 55 % est obtenu pour une dose supérieure à 4 MGy
dans le cas du bitume pur.
Par ailleurs, l’ajout de sels conduit à un gonflement plus important que celui d’un bitume pur.
Un gonflement maximal est observé à partir de 5 MGy, avec une valeur de l’ordre de 70%.
Par contre, un taux de gonflement du bitume pur plus important est observé lorsque le rapport
surface/volume du conteneur est plus faible, du fait d’un volume moins important de bulles de
H2 évacuées.
Le nombre, la taille et la forme des bulles de gaz créées par irradiation sont fortement
dépendants des conditions d’irradiation.
En effet, une augmentation du nombre et de la taille des bulles est observée en augmentant la
dose d’irradiation de 1 à 4 MGy. Par ailleurs, des bulles plus petites et plus uniformes sont
obtenues avec un débit de dose faible (400 Gy/h) dans le cas du STE3.
Un effet prononcé de l’irradiation sur les propriétés rhéologiques du bitume est mise en
évidence dans ce chapitre. Une augmentation de la dose d’irradiation conduit à une
augmentation de la viscosité newtonienne du bitume pur selon une loi exponentielle. Cette
augmentation de la viscosité avec l’irradiation est due à des changements structuraux. Une
aromatisation du bitume, accompagnée par une augmentation des masses, prend place sous
irradiation corrélativement à la production d’H2. De plus, l’irradiation modifie la valeur de la
viscosité intrinsèque. L’évolution de cette viscosité [η] en fonction de la masse moléculaire du
bitume, selon la loi de Mark-Houwink-Sakurada, avec une pente de l’ordre de 1,64 valide le
modèle théorique proposé, reliant la viscosité newtonienne de l’enrobé STE3 avec celle du
bitume pur selon une loi de type Krieger-Dougherty qui dépend de la dose d’irradiation.
180
5. A retenir du chapitre 4
Bitume
ou
enrobé bitume
Création des bulles
Gonflement
Irradiation
0 1 2 3 4 5 6 7 8
0
15
30
45
60
75
Bitume pur
STE3
Gonflement G(%)
Dose d'irradiation totale (MGy)
1
2
0 1 2 3 4 5 6 7
10
20
30
40
50
60 Saturés
Aromatiques
Résines
Asphaltènes
Fraction (%)
Dose absorbée (MGy)
-1 0 1 2 3 4 5 6 7 8
1100
1200
1300
1400
1500
1600 Saturés
Aromatiques
Résines
Asphaltènes
Dose d'irradiation (MGy)
Mn (g/mol)
Saturés ( ), Aromatiques ( )
0
2000
4000
6000
8000
10000
Mn (g/mol)
Résines ( ), Asphaltènes ( )
10-5 10-4 10-3 10-2 10-1 100
105
106
107
(a)
T = 22°C
0 MGy 1 MGy
2 MGy 3 MGy
4 MGy 5 MGy
6 MGy 7 MGy
Viscosité (Pa.s)
Taux de cisaillement (s-1)
Dose d'irradiation augmente
Variation du pourcentage des fractions
avec l’i rradia tion
Variation de la masse moléculaire des
fracti ons avec l’irrad iation
Augmentation de la viscosité avec la
dose d’ irradia tion
0 1 2 3 4 5 6 7 8
0,0
2,0x106
4,0x106
6,0x106
8,0x106 Bitume pur
STE3
Viscosité newtonienne (Pa.s)
Dose totale (MGy)
Variation de la
viscosité avec
l’irra diation
Une très bonne corrélation entre le
modèle et le s valeurs exp érimentales
max
).]([
max
030 1)()(
D
eff
purbitu meSTE DD
3
3,28 3,32 3,36 3,40 3,44
0,3
0,4
0,5
0,6
0,7
0,8
0,9
= 1,37 x 10-5 Mv
1,64
r2 = 0,93
Log [
]
Log (Mv)
= 1,64
Variation de la
viscosité intrinsèque
avec l’i rradia tion
0 1 2 3 4 5 6
0,0
5,0x106
1,0x107
1,5x107
2,0x107
Valeurs experimentales
Modèle proposé
Viscosité (Pa.s)
Dose d'irradiation (MGy)
(a)
181
6. Bibliographie du chapitre 4
[1] P. Bernat, "Eude du comportement des enrobés bitumineux sous irradiation gamma ",
Thèse de Doctorat, Université Réné Descartes-Paris 6 (1994).
[2] D. C. Philipps, J. W. Hitchon, D. I. Johnson, "The Radiation Swelling of Bitumens
and Bituminised Wastes ", J. Nucl. Mater, 125: 202-218 (1984).
[3] S. G. Burnay, "Comparative evaluation of and radiation effects in a bitumenisate",
Nucl. Chem. Waste. Manage, 7: 107-127 (1987).
[4] C. Tiffreau, M. F. Libert, P. P. Vistoli, J. Sercombe, "Dossiers de synthèse sur le
comportement à long terme des colis : Dossier opérationnel "bitume"," CEA
CadaracheN°= DEN/DTN/SMTM/LMTE/ 2004- n°69 (2004).
[5] M. Mouazen, A. Poulesquen, B. Vergnes, "Correlation between thermal and
rheological studies to characterize the behavior of bitumen ", Rheol. Acta, 50: 169-178
(2011).
[6] W. Kluge, W. Hild, R. Köster, G. Meier, H. Krause, "Bitumenisation of radioactive
waste concentrates from reprocessing, nuclear research establishments and nuclear
power plants," N°= KFK 2975 (1980).
[7] P. Attané, L. Palade, "Rhéologie d'enrobés bitumineux," CEA - Laboratoire de
Rhéologie, Grenoble, Rapport confidentiel, N°= 2011 210 6B039770 (1997).
[8] X. A. Vargas, N. Afanasjeva, M. Alvarez, P. H. Marchal, L. Choplin, "Asphalt
rheology evolution through thermo-oxidation (aging) in rheo-reactor", Fuel, 87: 3018-
3023 (2008).
[9] ASTM Standard D 6521-08, Standard Practice for Accelerated Aging of Asphalt
Binder Using a Pressurized Aging Vessel (PAV) (2008).
[10] E. Valcke, F. Rorif, S. Smets, "Ageing of EUROBITUM bituminised radioactive
waste: An ATR-FTIR spectroscopy study ", J. Nucl. Mater, 393: 175-185 (2009).
[11] S. E. Moschopedis, J. C. Speight, "The effect of air blowing on the properties and
constitution of a natural bitumen", J. Mater. Sci, 12: 990-998 (1977).
[12] D. Lesueur, "The colloidal structure of bitumen: Consequences on the rheology and on
the mechanisms of bitumen modification", Adv. Colloid. Interface. Sci, 145: 42-82
(2009).
[13] L. Raki, J.-F. Masson, P. Collins, "Rapid Bulk Fractionation of Maltenes into
Saturates, Aromatics, and Resins by Flash Chromatography", Energy & Fuels, 14:
160-163 (2000).
[14] ASTM Standard D 4124 - 09, Standard Test Method for Separation of Asphalt into
Four Fractions (2009).
[15] C. Pierre, L. Barre, A. Pina, M. Moan, "Composition and Heavy Oil Rheology", Oil
& Gas Science and Technology - Rev. IFP, 59: 489-501 (2004).
[16] O. Diels, K. Alder, "Diels-Alder Reaction", Ann, 98: 460 (1928).
[17] R. Tanaka, E. Sato, J. E. Hunt, R. E. Winans, S. Sato, T. Takanohashi,
"Characterization of Asphaltene Aggregates Using X-ray Diffraction and Small-Angle
X-ray Scattering", Energy & Fuels, 18: 1118-1125 (2004).
[18] D. Espinat, E. Rosenberg, M. Scarsella, L. Barre, D. Fenistein, D. Broseta, "Colloidal
structural evolution from stable to floculated state of asphaltene solutions and heavy
crudes", in Structure and Dynamics of Asphaltenes, O. C. Mullins and E. Y. Sheu.,
New York: Plenum Press, 145-202 (1998).
[19] T. F. Yen, J. G. Erdman, S. S. Pollack, "Investigation of the structure of petroleum
asphaltenes by XRD", Anal. Chem, 33: 1587-1594 (1961).
[20] O. C. Mullins, "The Modified Yen Model", Energy & Fuels, 24: 2179-2207 (2010).
182
[21] F. Cataldo, Y. Keheyan, S. Baccaro, "The effect of gamma-irradiation of anthracite
coal and oil bitumen", J. Radioanal. Nucl. Chem, 262: 443-450 (2004).
[22] E. Munch, "Impact de la déformation sur la mobilité moléculaire des polymères
amorphes", Thèse de Doctorat, Institut National des Sciences Appliquées (2006).
[23] J. Lecomte-Beckers, "Cours de Physique des Matériaux", Université de Liège (2010).
[24] T. Aubry, T. Razafinimaro, P. Médéric, "Rheological investigation of the melt state
elastic and yield properties of a polyamide-12 layered silicate nanocomposite", J.
Rheol, 49: 425-440 (2005).
[25] A. Durmus, A. Kasgoz, C. W. Macosko, "Linear low density polyethylene
(LLDPE)/clay nanocomposites. Part I: Structural characterization and quantifying clay
dispersion by melt rheology", Polymer, 48: 4492-4502 (2007).
[26] I. M. Krieger, T. J. Dougherty, "A Mechanism for Non-Newtonian Flow in
Suspensions of Rigid Spheres", Trans. Soc. Rheol, 3: 137-152 (1959).
[27] C. P. Hiemenz, P. T. Lodge, "Polymer Chemistry", 2nd ed., Boca Raton, CRC Press
(2004).
[28] M. Poirier, "Fractionnement et caractérisation de la chitine dans le système N,N-
Diméthylacétamide/Chlorure de Lithium", Thèse de Doctorat, Université Laval,
Faculté des Sciences et de Génie (2000).
[29] C. Joly-Duhamel, "Cours de Caractérisation des Polymères et Matières Plastiques",
Ecole de Chimie de Montpellier (2011).
[30] H. G. Elias, "Macromolecules1- Structure and properties", New York, Plenum Press
(1977).
[31] D. Quemada, "Rheology of Concentrated disoerse systems and minimum energy
dissipation principle", Rheol. Acta, 16: 82-94 (1977).
183
CONCLUSION GÉNÉRALE
ET PERSPECTIVES
185
Conclusion générale
Au cours de ce travail, nous nous sommes focalisés sur l’étude du comportement
mécanique et physico-chimique de déchets bitumineux de faible et moyenne activité. Le but
de cette thèse est donc d’acquérir les données expérimentales rhéologiques et leur évolution
sous irradiation pour in fine prédire l’évolution dans le temps des colis de bitume en terme de
gonflement en situation de stockage. Les enrobés de bitume sont synthétisés par extrusion bi-
vis et sont composés de 60% en masse de bitume et de 40% en masse de sels. Dans ces sels
sont présents les radioéléments (émetteurs α, β et γ) qui vont irradier la matrice organique
jusqu’à décroissance totale des éléments radioactifs en générant in situ des bulles de gaz d’H2
majoritairement. Par conséquent, l’influence des conditions opératoires d’extrusion et des
conditions d’irradiation γ ont été abordées dans ce travail de thèse avec, comme « fil rouge »,
la description du comportement rhéologique.
Pour cela il a été nécessaire de comprendre finement la physico-chimie de la matrice elle-
même : le bitume. C’est la raison pour laquelle nous avons mené une étude expérimentale
portant à la fois sur ses propriétés rhéologiques et sur ses propriétés thermiques et structurales.
La corrélation entre ces mesures nous a permis de formuler plusieurs conclusions importantes.
Le bitume est un matériau organique fortement thermodépendant (Ea ≈ 150 kJ/mol) et
présente un seuil d’écoulement, lui aussi thermodépendant mais à des températures inférieures
à 50°C. La présence de ce seuil d’écoulement est principalement due aux interactions entre les
agrégats d’asphaltènes et aux fractions cristallisées dans le bitume qui disparaissent par fusion
aux alentours de 50°C et dont les agrégats sont soumis à l’agitation thermique au-delà
(présence d’une Tg vers 50°C). Pour ces raisons, le PETT n’est pas strictement applicable
mais il est toutefois possible d’obtenir et d’ajuster par une loi de Carreau-Yasuda à seuil
l’évolution de la viscosité en fonction du taux de cisaillement sur 11 décades.
A partir de cette loi, la détermination du seuil d’écoulement a permis d’estimer la taille
minimale des bulles de H2 formées par radiolyse à partir de laquelle elles peuvent être
soumises à la migration par poussée d’Archimède.
Afin de déterminer le comportement de l’enrobé industriel simulé, des enrobés modèles
ont été synthétisés dans différentes conditions opératoires d’extrusion (N et Q). L’objectif
était d’une part d’estimer l’influence de l’histoire thermomécanique sur le matériau final, et
ainsi de faire le lien entre ces enrobés de synthèse et l’enrobé industriel, et d’autre part
d’évaluer l’effet des conditions opératoires ainsi que l’influence du type de sel sur le
comportement rhéologique du matériau.
Il a été constaté que la réponse rhéologique d’un enrobé bitume varie différemment selon
la nature du sel incorporé (soluble, insoluble) et selon les conditions opératoires (N et Q). En
effet, l’état de dispersion de sels insolubles (BaSO4) est amélioré lorsque la vitesse de vis est
élevée alors que, dans le cas des sels solubles NaNO3, c’est plutôt un fort débit qui améliore la
dispersion des sels. Par ailleurs, un modèle de type Krieger-Dougherty permet de rendre
compte de l’évolution de la fraction volumique de sels (influence de la composition de
l’enrobé). De plus, la loi de Carreau-Yasuda à seuil permet d’ajuster l’évolution de la
186
viscosité en fonction du taux de cisaillement, quelle que soit la nature de l’enrobé. Cette loi
permet de caractériser quantitativement l’état de dispersion via la valeur de la contrainte seuil
σ0, qui est un indicateur des interactions entre les particules dans un composé chargé.
La dépendance des valeurs de σ0 en fonction des conditions opératoires (rapport N/Q),
révèle l’obtention d’un profil commun pour tous les enrobés extrudés. Ce profil se traduit par
deux comportements différents ; le premier se localise entre une valeur N/Q entre 7 et 20 tr/g
et se caractérise par un seuil d’écoulement relativement faible. Le second comportement
prend place lorsque N/Q < 7 et > 20 tr/g, et s’exprime par une contrainte seuil élevée. Ce seuil
d’écoulement élevé a un impact important sur la taille minimale de bulle soumise à la
migration.
Grâce à l’utilisation de la technique de microtomographie X, nous avons réussi, pour la
première fois dans le cadre des études effectuées sur les enrobés bitume, à visualiser
clairement la population des bulles de gaz générées sous irradiation au sein de la matrice
bitume. Leur nombre, leur taille et leur forme, sont fortement dépendants des conditions
d’irradiation et de la présence ou non de sels. Une augmentation du nombre et de la taille de
bulles est observée en augmentant la dose d’irradiation de 1 à 4 MGy. Par ailleurs, des bulles
plus petites et plus uniformes sont obtenues avec un débit de dose faible (400 Gy/h) dans le
cas d’un enrobé de type STE3.
Durant cette thèse, nous avons en outre évalué l’effet de l’irradiation γ sur le
comportement du bitume pur et d’un enrobé bitume (STE3). Le gonflement des composés
bitumineux dépend de la dose d’irradiation, de la géométrie utilisée (surface/volume), de la
teneur en sels et du comportement rhéologique. L’introduction de sels dans la matrice
augmente le nombre de bulles par une augmentation des sites de nucléation et empêche les
bulles de s’évacuer à cause du seuil d’écoulement plus élevé, conduisant ainsi à un
gonflement plus important avec les enrobés bitumes.
De plus, nous avons quantifié l’influence de l’irradiation sur les propriétés physico-
chimiques du bitume et des enrobés, grâce à l’utilisation de diverses techniques de
caractérisation physico-chimiques.
En effet, une augmentation de la viscosité et de l’élasticité du bitume et des enrobés est
observée sous irradiation. La viscosité newtonienne du bitume pur et des enrobés de type
STE3 augmente avec la dose d’irradiation, selon une loi exponentielle. Ces modifications sont
e dues à des changements structuraux. Une aromatisation du bitume, accompagnée par une
augmentation des masses, prend place sous irradiation.
Afin de faire le lien entre les enrobés irradiés à l’échelle du laboratoire et l’enrobé réel
produit industriellement, un modèle théorique, basé sur l’expression de Krieger-Dougherty,
a été établi (Eq. 1).
)1.(1 max
].[
max
3Eq
eff
purbitumeSTE
Ce modèle présente une relation entre la viscosité d’enrobé bitume irradié et celle du
bitume pur irradié pour toutes les doses d’irradiation entre 0 et 7 MGy (Eq. 2), tout en prenant
en compte l’évolution de la viscosité intrinsèque avec la dose d’irradiation (Eq. 3).
2)(Eq.1049,3
023,2
exp1098,8)( 54
D
D
purBitume
187
 
)3.()36,0(exp111,399,2)(][ EqDD
Pour finir, grâce aux mesures chromatographiques, l’évolution de la viscosité intrinsèque
en fonction de la masse moléculaire, selon la loi de Mark-Houwink-Sakurada, valide le
modèle théorique proposé.
188
Perspectives
Plusieurs points restent cependant à aborder et approfondir.
Dans cette étude, le traitement des données issues de la microtomographie X a été limité à
une seule coupe. Pour obtenir des informations statistiques, il est à présent nécessaire de
développer un modèle qui permette de traiter le volume entier (700 coupes). De plus, des
microtomographies X ont été réalisées à différentes échéances de temps après l’irradiation. Il
serait donc intéressant de traiter plus finement ces données cinétiques, tout en sachant qu’elles
ne sont pas représentatives du cas réel où l’auto-irradiation est un phénomène continu et que,
par conséquent, le matériau est à saturation en H2. En effet, puisque l’émission des
rayonnements et donc l’endommagement de la matrice (création de bulles H2,…) se fait
continuement, un travail important reste à accomplir afin d’estimer l’état des bulles en
fonction du temps. Pour cela, un matériau modèle transparent et de rhéologie comparable à
celle du bitume permettrait de visualiser les phénomènes. Un dispositif expérimental (infusion
H2 ou hélium) permettant de garantir la saturation en H2 du matériau nous donnerait de
précieuses informations et permettrait de nous rapprocher des cas réels.
Dans cette optique l’utilisation d’un irradiateur γ (échelle du laboratoire) possédant un
débit de dose faible (< 100 Gy/h) pendant plusieurs dizaines de mois permettra de prendre en
compte les aspects cinétiques et la réponse rhéologique du matériau à ces faibles débits de
dose.
Enfin, il est important d’intégrer les nouvelles données de base obtenues lors de cette thèse
dans un code de calcul prédictif qu’il reste à développer. Ce développement nécessitera en
parallèle des expériences complémentaires et de validation sur un échantillon modèle et réel
dans la mesure de possible.
189
Diminution du nombre des bulles et dégonflement après l’arrêt de
l’irradiation

.
Par contre, l’auto-irradiation (cas réel des enrobés bitume) est un
phénomène en continu
Recherche d’un matériau modèle transparent semblable au
bitume
+
Garder le matériau à saturation en gaz: expérience de perméation
ou d’infusion
t0t0 + 1 mois
a) b)
191
ANNEXES
193
Annexe A Extraction du bitume sur
colonne
Cette méthode consiste à dissoudre 0,85 g du bitume dans 100 mL d’éthyle acétate (solvant
d’extraction). Après avoir dissous le bitume, une étape de chauffage à 77°C pendant 1 heure a
été réalisée [1]. Après refroidissement, l’extrait a été filtré via un filtre de porosité 3,3 µm.
La fraction insoluble restante sur le filtre a été rincée par l’acétone et séchée à l’air pendant
une journée. Cette méthode est schématisée par la Figure A.1.
Figure A.1 
Les valeurs des masses obtenues sont présentées sur la Figure A.2. Il est remarqué que la
fraction insoluble dans l’éthyle acétate augmente avec la dose d’irradiation.
Cette augmentation signifie l’augmentation du taux de réticulation et de carbonisation du
bitume sous irradiation [1]. Cette fraction insoluble est produite par une réaction de
réticulation des résines qui entourent les particules d’asphaltènes [1].
0,85 g du bitume
+
 77C
1h
Réfrigérant
eau
eau
194
Figure A.2 
0 1 2 3 4 5
14
16
18
20
22
24
Masse restante (%)
Dose d'irradiation (MGy)
Extraction sur colonne
195
Annexe B Diffusion des rayons X aux petits
angles (SAXS)
L’utilisation de la technique de diffusion de rayons X (SAXS) nous permet d’accéder à des
valeurs de q faibles (Figure B.1). Dans cette gamme, la dimension fractale à faible q a été
calculée. Cette dimension vaut 1 quelle que soit la dose d’irradiation, et les asphaltènes
présentent des structures unidimensionnelles indépendamment de la dose d’irradiation.
Figure B.1           
MGy.
D’autre part, on peut avoir une première idée de la taille des « disques » formés par les
feuillets en traçant la fonction représentant le facteur de forme, fonction de q et de la
géométrie. Si l’on considère le modèle le plus simple qui est celui de sphères de rayon R,
on utilise la fonction de facteur de frome [2] ci-dessous :
   
 
 
2
3
cossin3
),(
qR
qRqRqR
RqF
avec R le rayon des sphères uniformes. La courbe en pointillés sur la Figure B.2 représente
cette fonction (après l’avoir ajustée à l’aide d’un coefficient permettant de la faire glisser de
façon verticale). Le rayon R qui permet de faire correspondre au mieux la courbure de cette
courbe modèle à celle des données obtenues est de 40 Å, ce qui peut correspondre au
rayon approximatif des feuillets d’asphaltènes. Cette valeur est incluse dans la gamme des
dimensions proposée dans littérature (entre 2 et 8 nm) [3].
0,01 0,1 1 10
0,01
0,1
1
I (cm-1)
q (A°-1)
Bit. 0MGy
Bit. 1MGy
Bit. 2MGy
Bit. 3MGy
Bit. 4MGy
Bit. 5MGy
- 1
196
D’autre part, on note que la courbe représentant les données présente une courbure plus
arrondie, signe d’une géométrie oblate des feuillets, ce qui tend à correspondre à une
géométrie de type disque bâtonnet [4].
Figure B.2 I en fonction du q pour les données de SAXS obtenues (trait plein) et le modèle théorique sphérique
(pointillés).
Bibliographie des annexes
[1] F. Cataldo, Y. Keheyan, S. Baccaro, "The effect of gamma-irradiation of anthracite
coal and oil bitumen," J. Radioanal. Nucl. Chem, 262: 443-450 (2004).
[2] J. S. Pedersen, "Analysis of Small-angle Scattering Data from Polymeric and Colloidal
Systems: Modelling and Least-squares Fitting," Adv. Colloid Interface Sci, 70: 171-
201 (1997).
[3] D. Lesueur, "The colloidal structure of bitumen: Consequences on the rheology and on
the mechanisms of bitumen modification," Adv. Colloid. Interface. Sci, 145: 42-82
(2009).
[4] C. Cailleteau, "Influence de la morphologie du gel sur la cinétique d'altération des
verres borosilicatés : rôle du calcium et du zirconium," Thèse de Doctorat, Ecole
Polytechnique (2008).
10-2 10-1 100101
10-9
10-7
10-5
10-3
10-1
101
I (cm-1)
q -1)
Bitume 0 MGy
Modélisation sphère
Evolution des propriétés rhéologiques des enrobés bitume,
vers une loi vieillissement/viscosité
RESUME : Cette thèse est un apport à la compréhension de l’évolution des propriétés rhéologiques des
enrobés bitume soumis à l’irradiation γ. La prédiction du gonflement en fonction de l’activité des
enrobés est nécessaire pour garantir l’intégrité des colis, en particulier durant la phase de réversibilité
du stockage (durée séculaire). Le but de cette thèse est donc d’acquérir les données expérimentales
rhéologiques et leur évolution sous irradiation pour prédire in fine l’évolution dans le temps des colis
de bitume en terme de gonflement.
Dans un premier temps, le comportement du bitume pur a été caractérisé par des mesures rhéologiques
et thermiques. Ensuite, pour se rapprocher du cas réel, des enrobés modèles et industriels ont été
préparés selon différentes conditions opératoires en extrudeuse bivis. Non seulement la fraction
volumique de sels influe sur la viscosité, mais aussi leur état de dispersion, leur granulométrie et leur
morphologie.
Des irradiations γ, à un débit de dose de 5000 Gy/h, du bitume pur et des enrobés de type STE3 ont été
menées afin de simuler l’effet des éléments radioactifs. L’irradiation entraîne un phénomène de
gonflement dû à la création de bulles de gaz d’hydrogène et apporte des modifications rhéologiques,
expliquées par des modifications structurales.
A partir de l’ensemble des résultats obtenus, une loi de rhéo-vieillissement radiolytique basée sur le
modèle de Krieger-Dougherty couvrant toute la période de réversibilité a été proposée. Cette loi prend
en compte la dose d’irradiation, la fraction volumique de sels incorporée dans le bitume et la
température.
Mots clés : bitume, enrobé bitume, rhéologie, extrusion, irradiation γ, gonflement, viscosité.
Evolution of rheological properties of Nuclear Bituminized Waste Products,
towards an ageing/viscosity law
ABSTRACT : This work is a contribution to the understanding of rheological properties of bitumen and
their evolution under γ irradiation. The prediction of swelling rate is necessary to evaluate the integrity
of the containers, particularly during the reversibility phase of the storage. The objective of this work
is thus to acquire the rheological data and its evolution under irradiation in order to predict the
container swelling with time.
In a first part of this work, the rheological and thermal characterizations of pure bitumen have been
assessed. Then, to approach the real case, a series of extrusion trials has been carried out at different
extrusion conditions on a laboratory scale co-rotating twin screw extruder.
γ irradiation, at dose rate of 5000 Gy/h, of pure bitumen and simulated BWP compounds were carried
out in order to estimate the effect of radioactive elements. Irradiation on pure bitumen and BWP
compounds entail swelling phenomenon due to the creation of hydrogen gas bubbles and rheological
modifications, explained by structural modifications.
From the overall results, a radiolytic rheo-ageing law, based on a Krieger-Dougherty model, covering
the reversibility phase has been proposed. This law takes into account the irradiation dose, the salts
volume fraction incorporated into the bitumen matrix and the temperature.
Keywords : bitumen, bituminized waste products, rheology, extrusion, γ irradiation, swelling,
viscosity.
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Article
Full-text available
Rheological measurements are used to compare clay nanocomposites prepared through melt mixing using two different polypropylene matrices. Steady state and transient nonlinear rheological experiments are employed to separate the contributions of flow induced orientation of the tactoids and particulate network build-up. The conditions under which the rheological properties are dominated by the aggregate network are subsequently identified. Under these conditions, the low frequency linear viscoelastic behavior is analyzed using scaling concepts for fractal networks to determine the degree of network formation by exfoliation. Moreover, the high frequency behavior of the moduli can be used to quickly assess the dispersion quality. The results from the analysis of the linear viscoelastic data are compared to structural features extracted from electron microscopy and small angle X-ray scattering data.
Article
Analysis and modeling of small-angle scattering data from systems consisting of colloidal particles or polymers in solution are discussed. The analysis requires application of least-squares methods, and the basic principles of linear and non-linear leastsquares methods are summarized with emphasis on applications in the analysis of small-angle scattering data. These include indirect Fourier transformation, square-root deconvolution, size distribution determinations, and modeling. The inclusion of corrections for instrumental smearing effects is also discussed. The most common analytical expressions for model form factors and structure factors are summarized. An example of analysis of small-angle neutron and X-ray scattering data from block copolymer micelles is given.
Chapter
Asphaltenes are a problem in the production of heavier crude oils for their tendency to flocculate and precipitate during both oil production and oil refining.1–3
Article
Nanocomposites based on melt blending of an organoclay and a thermoplastic matrix have end-use properties directly controlled by the state of dispersion of the clay and the resulting nanostructure. It is thus very important to be able to correctly quantify, the levels of intercalation and exfoliation of these systems. For the exfoliation, theological measurements in small amplitude oscillatory shear are very powerful because they put clearly in evidence the interactions between nanofillers. We show in this paper how it is possible to interpret the experimental results, we indicate the advantages and drawbacks of current methods used in the literature and we strongly suggest to use the melt yield stress to characterize exfoliation level.
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The petroleum industry is often concerned with the production, transportation and refining of heavy crude oils rich in asphaltenes. A successful addressing of the many difficulties encountered in these processes relies on a precise understanding of the chemical properties and colloidal behavior of asphaltenes under various thermodynamic and flow conditions. Whereas asphaltenes are generally considered to be the major factor responsible for these difficulties, the influence of the other constituents of oil, such as resins, must not be overlooked.
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Effect of ageing on bitumen chemistry and rheology was studied. Seven bitumens were aged according to the thin film oven test (TFOT) and the rolling thin film oven test (RTFOT). The binders were characterised using infrared spectroscopy, chromatography and dynamic mechanical analysis. Statistical correlation between different chemical parameters, as well as between chemical and rheological parameters, was examined. The relationship between TFOT and RTFOT was also investigated. It was observed that ageing influenced bitumen chemistry and rheology significantly. However, chemical and rheological changes were generally not consistent, and consequently, ageing susceptibility of bitumens may be ranked differently when different evaluation methods are used. Regardless of the type of the parameters measured, a strong correlation was observed between TFOT and RTFOT, and the two ageing procedures show similar severity.