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PIRONE T. - Les Italiens à La Havane - EHESS Mémoire Master 2

Authors:

Abstract

(EHESS) " ENQUÊTER SUR LES STRUCTURES D'OPPORTUNITÉ DES ENTREPRENEURS EN PERSPECTIVE TRANSNATIONALE. LE CAS DES ITALIENS A LA HAVANE. Acteurs, trajectoires, stratégies et intermédiaires " Sous la direction de : Blandine Destremau (CNRS, IRIS/EHESS) et Violaine Jolivet (UDEM) Membres du jury : Valerio Simoni-Senior Research Fellow, IHEID-Geneva Paris, Juin 2021
ECOLE DES HAUTES ETUDES EN SCIENCES SOCIALES
Master Recherche en Sciences Sociales
Mention Sociologie Générale
Année 2020-2021
EHESS, Master 2
TOMMASO PIRONE
Mémoire de recherche
Sous la direction de
Blandine Destremau - Directrice de recherches, CNRS, Iris /EHESS
Sous la codirection de
Violaine Jolivet - Professeure agrégée, Université de Montréal
ENQUÊTER SUR LES STRUCTURES D’OPPORTUNITÉ DES ENTREPRENEURS
EN PERSPECTIVE TRANSNATIONALE.
LE CAS DES ITALIENS A LA HAVANE
Acteurs, trajectoires, stratégies et intermédiaires.
Membres du jury : Valerio Simoni - Senior Research Fellow, IHEID - Geneva
Paris, Juin 2021
LES ENTREPRENEURS ITALIENS À LA HAVANE
Cuba and Hispaniola - FORLANI, PAOLO (fl.1560-71)
À Sun
2 Tommaso Pirone
LES ENTREPRENEURS ITALIENS À LA HAVANE
SOMMAIRE
INTRODUCTION 6
PREMIERE PARTIE. LE PANORAMA DES ÉCHANGES SUR LE LONG TERME ENTRE
L’ITALIE ET CUBA : DE LA COOPÉRATION INTERNATIONALE À L'INVESTISSEMENT
DANS LE SECTEUR PRIVÉ DE LA HAVANE 20
1.DE LA TRANSCULTURACIÓN AU TRANSNATIONALISME : LE “FIL ROUGE” DE
L’HISTOIRE CUBAINE 21
2. LE CADRE THÉORIQUE. ÉTUDIER LES STRUCTURES D'OPPORTUNITÉ EN
PERSPECTIVE TRANSNATIONALE 32
3. ITALIE-CUBA : COOPÉRATION INTERNATIONALE ET INVESTISSEMENTS
ÉCONOMIQUES. 46
DEUXIÈME PARTIE. LES FORMES ET LES TRAJECTOIRES DU
TRANSNATIONALISME ITALIEN A LA HAVANE. LES MOBILITÉS DE COOPÉRATION ET
LES MOBILITÉS TOURISTIQUES : DES GÉNÉRATEURS MULTIPLES DE LIENS 58
4. DE LA COOPÉRATION INTERNATIONALE À L’INVESTISSEMENT TOURISTIQUE :
UNE TRAJECTOIRE COMMUNE POUR LES MISSIONNAIRES ITALIENNES
EXPATRIÉES À LA HAVANE 59
5. LES GROUPES VIRTUELS À BASE ETHNIQUE : « ITALIANI A CUBA », UNE
RESSOURCE CENTRALE POUR LA CONSTRUCTION DU RÉSEAU TRANSNATIONAL
72
6. DES NOUVELLES CONVERGENCES ENTRE LES MOBILITÉS TOURISTIQUES ET
L’ENTREPREUNARIAT TRANSNATIONAL À LA HAVANE 85
TROISIÈME PARTIE. LES LIENS ENTRE LES MOBILITÉS DE TRAVAIL ET LE
CUENTAPROPISMO 99
7. STRATÉGIES, RÉSEAUX ET CIRCULATIONS : TERRITORIALITÉ MULTISITUÉE ET
ACCUMULATION DE CAPITAL TRANSNATIONAL 100
CONCLUSIONS 127
BIBLIOGRAPHIE 137
TABLE DES MATIÈRES 146
3 Tommaso Pirone
LES ENTREPRENEURS ITALIENS À LA HAVANE
INTRODUCTION
«Para un país como el nuestro, carente de grandes
riquezas mineras, el turismo es una fuente de ingresos
de indiscutible importancia. El desafío consiste en
diseñar estrategias que potencien sus posibilidades de
desarrollo en favor de la nación, en lo cultural y en lo
humano, porque en las virtudes de nuestro pueblo
reside el alma de la nación ».
(Graziella Pogolotti, 3 mai 2017)1
Au printemps 2021 Graziella Pogolotti reçoit dans le Palais de la Révolution l’Orden
José Martí, un prix très réputé à Cuba qui a été dans le passé assigné à des figures reconnues
au niveau international, telles que Salvador Allende, Thomas Sankara et Nelson Mandela.
Graziella Pogolotti est la descendante d’une famille italienne qui a contribué au
développement de La Havane à partir du début du XXe siècle. Son premier ancêtre émigré
aux Amériques, Dino Pogolotti (1879–1923), était un entrepreneur immobilier Piémontais. Il
a été le fondateur du premier quartier ouvrier de Cuba. Son fils Marcelo (1902–1988), dont
la trajectoire a été marquée par des allers-retour fréquents entre l’île caribéenne et l’Italie,
pays il a commencé sa carrière artistique, était un peintre futuriste très réputé. Pour finir,
sa fille Graziella - ou « Graciela » si l’on emploie la prononciation cubaine - est écrivaine,
journaliste et l’une des plus hautes représentantes de la culture cubaine contemporaine. Née à
Paris en 1932, Graciela réside à La Havane depuis l’âge de sept ans. Elle y a étudié la
philosophie et les lettres à l’Université de La Havane et à La Sorbonne de Paris. Après une
longue carrière dans le journalisme, entamée en 1959 à la suite de la révolution castriste - elle
collabore actuellement avec la rédaction du quotidien Juventud Rebelde. Dans le monde
intellectuel cubain, Graziella Pogolotti a récemment été insérée dans les cent personnalités les
1. « Pour un pays comme le nôtre, dépourvu de grandes richesses minérales, le tourisme est une source de
revenus d'une importance incontestable. Le défi consiste à concevoir des stratégies qui renforcent son potentiel
de développement en faveur de la nation, culturellement et humainement, car l’âme de la nation réside dans les
vertus de notre peuple. »
Pogolotti, Graziella. “Breve historia del turismo”. Cubadebate, 3 mai 2017.
http://www.cubadebate.cu/opinion/2017/05/03/breve-historia-del-turismo/, consulté le 29 mars 2021.
4 Tommaso Pirone
LES ENTREPRENEURS ITALIENS À LA HAVANE
plus importantes de l’Université Alma Mater de La Havane (D’Amico, Román, 2015) après
avoir reçu des nombreux prix.
L’histoire de cette famille d’origine italienne marque encore fortement la société
cubaine contemporaine. Ainsi, aux marges Sud-Ouest du centre-ville de La Havane dans la
municipalité de Marianao, el barrio (le quartier) Pogolotti, qui aujourd’hui porte le nom de
son ancien fondateur, est un quartier très animé qui abrite, en continuité historique avec ses
racines ouvrières, une communauté à haut degré de multiethnicité et de présence de Religions
traditionnelles africaines (RTA)2. Au fil d’un siècle, les trois générations Pogolotti - Dino,
Marcello et Graziella - ont été porteurs d’une influence culturelle, artistique et
entrepreneuriale de premier ordre à Cuba. Les Pogolotti constituent donc un exemple d’un
noyau familial exceptionnel originellement formé par des entrepreneurs étrangers qui a
contribué activement à façonner l’histoire cubaine de l’indépendance jusqu’à nos jours.
Le cas de la famille Pogolotti met en évidence de façon anecdotique l’importance
d’étudier les relations transnationales entretenues par le réseau diasporique italien avec la
société cubaine. Celles-ci ont des impacts multiples au sein des transformations sociales,
politiques et économiques en cours à Cuba. Cette amorce permet d’introduire l’objet au cœur
de ce mémoire de recherche, à savoir la classe d’entrepreneurs transnationaux formée par la
population italienne récemment expatriée à Cuba et notamment dans sa capitale, La Havane.
Comment pourrait-on décrire et qualifier cette présence ? Si des liens de continuité peuvent
être tissés avec les migrations italiennes du passé, ces mouvements récents du Nord en
direction des régions du Sud Global engendrent des tensions qui appellent à porter des
regards sociologiques renouvelés.
Objectifs et hypothèses de recherche
Dans cette perspective, ma collaboration en tant qu’Assistant de recherche au projet «
(Re)investir La Havane » m’a amené à étudier la population italienne expatriée à Cuba3. Lors
de l’enquête préliminaire, j’ai relevé la présence d’un dense réseau transnational de
trabajadores por cuenta propia (d’auto-entrepreneurs) d’origine italienne composé par des
acteurs aux motivations, aux projets et aux trajectoires très hétérogènes, tous ayant vécu une
expérience de mobilité et d’investissement dans le secteur touristique à Cuba. Dans ce
3. P.I Violaine Jolivet, Canadian Social Sciences and Humanities Research Council Grant CRSH
430-2018-00400 - 2018-2021.
2. La Santería ou le Palo Monte, entre autres. https://pogolottis.home.blog/storia-della-famiglia-pogolotti/,
consulté le 29 mai 2021.
5 Tommaso Pirone
LES ENTREPRENEURS ITALIENS À LA HAVANE
mémoire de recherche je vais tenter d’aborder cette partie de la nouvelle migration Nord-Sud,
d’Italie vers l’île majeure des Caraïbes et notamment vers La Havane, sous l’angle des
pratiques entrepreneuriales transnationales.
Pour ce faire, je vais analyser l’émergence de cet entrepreneuriat étranger sous le
prisme des processus, des acteurs et des différents niveaux qui sont constitutifs de ce
phénomène transnational. J’ai décidé de me focaliser sur les structures d’opportunité qui
permettent aux Italiens de s’installer et de développer des activités économiques à Cuba. Par
« structures d’opportunité » j’entends l’ensemble interactionnel des facteurs qui participent à
la formation de ce réseau international très actif au sein des nouvelles dynamiques
micro-entrepreneuriales et touristiques de la capitale cubaine. Ce mémoire de recherche vise
donc à saisir les convergences multiples entre la diaspora italienne et l’espace social et
économique havanais en proposant une analyse partielle des racines, des formes et des
tensions qui les constituent.
Pour aborder les nouvelles dynamiques migratoires, ce projet devra porter « un regard
sociologique à la fois plus large et plus précis » (Martiniello et Rea, 2011). Suivant mon
hypothèse, la dimension multi-scalaire des structures d’opportunité (Pécoud, 2004) est celle
qui permet de prendre en compte de la complexité du phénomène.
Différents niveaux d’analyse seront employés :
- en premier lieu, l’approche macro qui s’attarde sur l’intérêt de prendre en
compte les structures socio-économiques (Haveman, Cohen, 1994; Massey,
Durand, Malone, 2002) ;
- deuxièmement, l’approche micro qui, dans une perspective individuelle,
focalise l’attention sur les acteurs, leurs motivations et trajectoires (Ferris,
1985; Richmond, 1994 ; Emirbayer, Goodwin, 1994 ; Tarrius, 2002) ;
- en dernier, l’échelle méso-analytique, c’est à dire l’étude des dynamiques et
des processus qui relient le niveau micro au contexte des possibilités macro et
qui engendre le cadre des structures d’opportunités.
L’imbrication entre ces niveaux d’analyse permettra de faire émerger quelles sont les
structures d’opportunité qui assurent les processus d’investissement des Italiens à Cuba et la
manière dont elles se construisent.
Ce travail, construit autour d’une population - les cuentapropistas (entrepreneurs)
italiens du secteur touristique de La Havane - qui, jusqu’ à présent, a été peu investie par les
travaux en sciences sociales, contribue au développement des études qui portent sur les
migrations transnationales. En s’appuyant sur un cadre conceptuel interdisciplinaire, une
6 Tommaso Pirone
LES ENTREPRENEURS ITALIENS À LA HAVANE
méthode d’enquête mixte et multi-scalaire, les différents niveaux - contexte-acteur-réseaux -
seront analysés conjointement. L’objectif est donc celui de poser les bases pour l’ouverture de
nouvelles pistes de recherches utiles à la compréhension des nouvelles tensions émergentes
dans le contexte cubain, traversé par des transformations socio-économiques profondes.
Cheminement et contexte de la recherche
Entre un séjour d’échange transnational avec l’Université de Montréal et une
expérience prolongée de travail de terrain à Cuba, mon cheminement au sein de l’École des
Hautes Études en Sciences Sociales de Paris a été caractérisé par une approche critique,
interdisciplinaire et multidirectionnelle. Le mémoire ici présenté devra constituer, avant tout,
le reflet de ce parcours.
La Havane, capitale de Cuba, qui est l’un des derniers pays à promouvoir au niveau
institutionnel des valeurs socialistes, se trouve à l’intersection de mes passions autour des
utopies révolutionnaires et de mes intérêts académiques sur l’étude des inégalités, des modes
de vie et des nouvelles dynamiques urbaines Longtemps fermée aux échanges avec l’étranger
par ses politiques internes, surtout à cause du blocus économique mis en place par les
États-Unis, Cuba constitue un cas d’étude exceptionnel (Hoffmann, Whitehead, 2006 ; 2008).
Bien que, dans le cadre du séminaire « Cuba Recherche. Penser Cuba par le bas et en
perspective transnationale » (EHESS, IHEAL), l’ « exceptionnalisme » du contexte cubain ait
été déconstruit par certains chercheurs, sur le plan législatif l’encadrement des flux
migratoires constitue un enjeu majeur pour le gouvernement de l’île. L’émigration de Cuba a
longtemps représenté un départ définitif et, notamment à cause des tensions avec les
États-Unis, l’immigration est strictement réglementée. Ainsi, les possibilités pour les
étrangers et les cubano-américains d’acquérir la résidence permanente à Cuba, le moyen qui
permet d’accéder à la propriété privée, ne s’élargissent qu’à partir de la dernière décennie. Il
s’agit d’une période de réformes profondes qui débute suite à la récession économique des
années 1990 et qui mène à l’ouverture vers le tourisme international, les capitaux et les
investissements étrangers (Destremau, Leleu et Graber, 2017).
Considérée comme figée dans le temps depuis la révolution de 1959, Cuba connaît à
partir de la Période spéciale de fortes tensions vers le changement social et économique
(Destremau et al., 2016). Dans les deux dernières décennies, l’adoption de réformes en
direction de la « actualización » du modèle socialiste, dont la plus importante dans le cadre
de mon travail de recherche concerne la réouverture du marché de l’immobilier, ont amené
de profondes transformations dans le tissu social. Depuis la libéralisation de la propriété «
7 Tommaso Pirone
LES ENTREPRENEURS ITALIENS À LA HAVANE
personnelle » (privée)4, parallèlement à l’amélioration générale des conditions de vie, due à
une plus grande disponibilité de devises, les disparités économiques antérieures à la
révolution ont été réactivées.
C’est notamment dans la capitale, La Havane, que les ouvertures économiques les
plus récentes, activées et négociées par différents acteurs, engendrent des nouvelles
dynamiques dans le secteur touristique. En particulier, les étrangers ayant droit à la résidence
permanente et les Cubains ayant accès aux revenus des membres de la famille vivant à
l’étranger ont commencé à investir d’importants capitaux à La Havane dans l’achat et la
rénovation de nombreuses propriétés dans le but de les convertir en casas particulares
(Simoni, 2016 ; Chapon, 2019 ; Jolivet, Alba, 2021). D’autre part, à travers les articles 29 et
30 contenus dans la Constitution adoptée à la suite du référendum constitutionnel organisé en
2019, le contrôle direct de la propriété privée par l’État est établi « dans le but de préserver
les valeurs socialistes d’égalité et de justice sociale » (Constitución de la República de Cuba
2019 : art. 30). À Cuba, il est donc permis de posséder un seul logement et une « casa para el
descanso », un logement à la campagne ou à la mer. Par l’adoption de ces politiques
top-down en direction de l’égalité et du principe redistributif, l’administration cubaine tente
de freiner l’accumulation de propriétés immobilières et des richesses (Pleyan, 2020).
A partir de l’étude des nouvelles dynamiques qui se déclenchent dans le secteur
touristique de La Havane, secteur qui, comme souligné dans l’amorce, est stratégique dans le
développement économique du pays, je vais tenter de faire émerger le rôle du réseau
entrepreneurial italien dans l’approfondissement de ces tensions et dans l’ouverture des
frontières socio-économiques cubaines.
Approche théorique, démarche empirique et posture du chercheur
En continuité avec mon parcours académique, ce travail s’inscrit dans
l’interdisciplinarité. Il mobilisera à la fois la sociologie, la géographie et la socio-histoire des
migrations, la sociologie des réseaux sociaux, du tourisme, de l’entrepreneuriat, de la famille
et des relations interétatiques. La géographie critique et urbaine, ainsi que les études des
mobilités, des contextes (post)coloniaux et du Sud Global feront également partie de la
recherche.
Ce mémoire s’inscrit dans le cadre du projet de recherche international « (Re)investir
La Havane » dirigé par Violaine Jolivet (Université de Montréal - Département de
4. A Cuba, la propriété des logements est dite “personnelle”. Dans ce mémoire je vais donc employer cette
définition.
8 Tommaso Pirone
LES ENTREPRENEURS ITALIENS À LA HAVANE
Géographie). Le projet vise à analyser les mutations sociospatiales générées par la
réouverture du marché immobilier dans la capitale cubaine et les transformations
conséquentes de ses quartiers centraux. Le travail préliminaire qui a eu lieu pendant
l’échange à l’Université de Montréal au dernier trimestre de l’année 2019 m’a permis de
relever le poids significatif de la population italienne au sein de ces processus
d’investissement.
Un certain nombre d’études mettent en avant les difficultés rencontrées dans les
interactions avec le contexte et les institutions cubaines dans le cadre du développement
d’une recherche de terrain (Geoffray, 2011 ; Messu, 2012). Pour ma part, j’ai pu disposer
d’un VISA étudiant d’une durée de trois mois - ou, plutôt, d’un mois renouvelable maximum
trois fois - grâce aux longues démarches administratives entamées par Mme Jolivet. Cette «
accréditation », qui nous a permis de procéder aux entretiens enregistrés, a été négociée avec
la FLACSO - Facultad Latinoamericana de Ciencias SOciales qui a collaboré à la mise en
place de l’enquête de terrain. Ainsi, deux étudiant/es cubain/es encadré/es par Mme Luisa
Iñiguez, professeure de Géographie à la FLACSO, ont été impliqués et ont mis à disposition
leur expertise et connaissance du terrain.
En termes quantitatifs, Cuba est recensée dans les 25 pays majoritairement concernés
par la diaspora italienne. Selon des données de 2019, plus de 4.000 citoyen/nes italien/nes
sont inscrit/es à l’AIRE (l’Anagrafe Italiani Residenti all’Estero)5dont environ la moitié
(1993) est composée par des femmes. 39 % sont expatriés et la majorité parmi ceux-ci (22
%) déclare vivre à Cuba depuis 5-10 ans, ce qui correspond en termes temporels, à
l’ouverture du marché de l’immobilier et, plus récemment, à la période de distension des
relations diplomatiques avec les États-Unis d’Obama6.
Si l’analyse quantitative a été préalablement utilisée, aux fins de la recherche j’ai
privilégié une méthode d’enquête qualitative.
« La complexité du monde cubain, de cette société métisse, fruit du croisement de
différents peuples, espagnols, africains, anglais, russes, américains, chinois, de cette
île, destination des pirates, lieu d’amusement, de danse, de rhum, de cigares, de sexe
facile et champ de bataille des révolutions, m’a confirmé que la méthode de
recherche qui peut le mieux décrire et entrer dans tous ces multiples visages de la
6. Licata, Delfina. 2019. “Rapporto Italiani nel Mondo 2019. Sintesi”. Fondazione Migrantes. 35 p.
https://www.migrantes.it/wp-content/uploads/sites/50/2019/10/Sintesi_RIM2019.pdf.
5. Le registre des Italiens Résidents à l’Étranger.
9 Tommaso Pirone
LES ENTREPRENEURS ITALIENS À LA HAVANE
société, de la politique, de la culture, est la méthode ethnographique, car elle permet
de décrire et de comprendre de l'intérieur les traits d'une culture et ses modes de
fonctionnement » (Tadiello, 2020).
En collaboration avec un étudiant canadien-colombien, j’ai participé à un séjour d’étude
ethnographique d’une durée de trois mois à La Havane qui s’est déroulé entre les mois de
janvier et avril 2020, avant l’arrivée de la pandémie de COVID-19 qui a partiellement limité
le développement de l’enquête. En particulier, j’ai appliqué une approche ethnographique «
par le bas ».
« L’approche par le bas, en s’intéressant aux pratiques et au vécu des individus
apparaît pertinente dans la mesure elle permet d’accéder à l’intimité et au
quotidien des familles transnationales » (Chapon, 2019).
A travers les outils de l’observation participante, du récit de vie, de prise de notes
ethnographiques et de l’entretien libre et semi-dirigé, j’ai tenté de procéder à l’analyse des
trajectoires, des relations et des modes de vie des acteurs italiens installés dans la capitale
cubaine.
Ainsi, pendant le séjour d’enquête de terrain, j’ai pu rencontrer environ 30
entrepreneurs italiens résidents dans les quartiers côtiers au Nord de La Havane, à savoir - de
l’Ouest vers l’Est - Miramar, Vedado, Centro Habana et la Habana Vieja. Une fois les
entretiens retranscrits, j’ai procédé au processus d’anonymisation. Ainsi, en accord avec les
interviewés, j’ai modifié les noms de l’ensemble des acteurs. Les seuls qui n’ont pas été
modifiés, sous requête des intéressés, sont représentés par les prénoms des « entrepreneurs
de cause » Andrea et Samuel. Dans ce texte, les paragraphes sont reportées les citations
des passages des entretiens sont suivis par des codes - comme par exemple « Entretien EXT
#1 », dont « EXT » est l’abréviation de extranjero (étranger) et le chiffre qui le suit
représente le numéro assigné à chaque entretien et classé en ordre temporel. Ces codes ont
été utilisés en amont pour le projet de recherche « (Re)investir La Havane ».
Ce réseau de contacts a été préalablement construit lors de l’enquête préliminaire
grâce à un travail d’ethnographie du numérique, des réseaux sociaux et des forums,
notamment le groupe Facebook « Italiani a Cuba » et le forum récent « CIRC - Comitato
Italiani Residenti a Cuba ». Le « virtuel » acquiert de plus en plus de place dans le « social
». Ainsi, des concepts tels que « E-diaspora » sont au cœur des études sur les migrations
contemporaines (Severo, Zuolo, 2012 ; Vekemas, 2015). La pratique d’intégrer les «
communautés virtuelles » (Proulx, Latzko-Toth, 2000), préalable à l’arrivée dans un contexte
étranger, est très répandue et touche également à mon expérience personnelle. Dans les mois
10 Tommaso Pirone
LES ENTREPRENEURS ITALIENS À LA HAVANE
qui ont précédé la recherche de terrain à La Havane, dans le cadre d’un échange académique
avec le département de Géographie de l’UdeM, je me suis installé à Montréal. Pour ce faire,
j’ai procédé à l’inscription dans le groupe Facebook « Italiani a Montréal ». Une fois ajouté
dans le groupe, j’ai pu publier un message dans lequel je demandais des renseignements
concernant la ville et les informations utiles à mon installation. En expliquant les raisons et
l’intérêt académique qui me poussait à me déplacer vers le Canada, j’ai été contacté par un
professeur italien installé à Québec qui s’est révélé être intéressé par ma trajectoire et par les
sujets que j’allais enquêter. De là, une collaboration scientifique est née. C’est donc à partir
de cette expérience que j’ai décidé d’intégrer également le groupe Facebook « Italiani a
Cuba » avant mon arrivée sur l’île dans le but d’entrer en contact avec les membres et d’en
étudier les interactions.
C’est notamment grâce à un contact-clef, Andrea, avec lequel j’ai initialement
interagi pendant le travail ethnographique auprès du réseau « Italiani a Cuba », que j’ai pu
interviewer la majorité des acteurs particuliers et institutionnels rencontrés à La Havane. J’ai
mené non seulement des entretiens avec des petits-investisseurs, mais, grâce à Andrea qui a
longtemps été impliqué dans la coopération italienne, j’ai pu entrer également en contact
avec des sujets faisant partie des Institutions Gouvernementales (AICS - Agenzia Italiana per
la Cooperazione e lo Sviluppo et l’Ambassade d’Italie) et des Organisations Non
Gouvernementales italiennes (ARCS, GVC et Cospe).
Une fois sur le terrain, à travers la méthode dite « de la boule de neige », à partir
d’une petite base de contacts, j’ai pu élargir le travail au réseau d’Italiens largement présents
à La Havane. Un des acteurs interviewés a été obtenu grâce à l’intermédiation d’un voisin de
la casa particular dans laquelle j’ai séjourné dans le quartier Centro Habana (Cayo Hueso,
plus précisement). Le voisin, Eni, qui passe ses journées devant la porte d’entrée de
l’immeuble, m’a raconté avoir offert des services de maçonnerie à un italien propriétaire
d’une casa particular pas loin de notre immeuble. C’est ainsi que j’ai pu faire la
connaissance de Giovanni, entrepreneur bolognais depuis longtemps installé à La Havane.
En outre, le contact d’Alessandro, jeune host romain qui possède un appartement dans le
Vedado, a été repéré pendant les sessions d’observation ethnographique dans les rues
centrales du tourisme havanais. En particulier, j’ai pu entrer en contact avec Alessandro car
j’ai remarqué, affiché sur un poteau, l’annonce de vente de sa casa particular. Ceci a attiré
mon attention car le numéro de téléphone à contacter était anticipé par le préfixe italien +39.
Les investissements de ces acteurs ont mené à l’ouverture de différentes activités
liées au secteur touristique, telles que des agences touristiques, paladares (restaurants),
11 Tommaso Pirone
LES ENTREPRENEURS ITALIENS À LA HAVANE
pizzerias, heladerias (glaciers), casas particulares, locations de vélos et de voitures
d’époques. Pour la qualité des données ethnographiques recueillies, et compte tenu des
limites de ce mémoire de recherche, j’ai concentré l’analyse autour d’une dizaine de cas
d’études qui portent spécifiquement sur le domaine de l’hébergement de courte durée (casas
particulares) et d’autres formes entrepreneuriales non directement liées au secteur
touristique.
La proximité en termes linguistico-culturels avec les enquêtés a constitué un élément
facilitant l’instauration d’une relation de confiance. Toutefois, des questionnements plus
approfondis autour des difficultés, de la posture et de la légitimité en tant que chercheur
européen dans un contexte (post)colonial du Sud global comme celui cubain sont nécessaires
(Rigg, 2007; Parnell et Oldfield, 2014). En effet, un tel travail est utile pour faire avancer les
réflexions autour des rapports de pouvoir et leur reproduction lors de la mise en place de la
démarche de recherche, visant le développement d’une approche décoloniale (Grosfoguel,
2007).
Bien qu’on puisse affirmer éprouver une certaine légitimité lorsqu’on identifie
comme objet de recherche non pas la population locale, mais les sujets italiens qui, grâce à la
possession d’un capital économique, ont pu investir dans l’achat d’une propriété à La
Havane, les difficultés et les limites en termes de positionnement demeurent toujours
présentes. En ce sens, dans un travail de 2015, Snyman souligne la persistance de « points of
shaming » (moments de honte) lorsqu’en tant que chercheurs blancs on tente d’appliquer les
approches développées par le Decolonial turn (tournant décolonial). De plus, dans le cas du
contexte cubain, comme certains auteurs le font noter, le rapprochement du chercheur à
l’identité de touriste peut « constituer un biais dans la relation » et notamment dans
l’interaction avec les hôtes locaux (Simoni, McCabe, 2008).
Le choix de concentrer la recherche autour de la population italienne a pu
partiellement éviter de telles problématiques. Toutefois, les différences en termes de vécu et
de positionnement par rapport aux relations entretenues par les Italiens enquêtés avec les
Cubains sur place a créé des tensions qui auraient pu mettre en danger le bon déroulement de
la recherche, ainsi que l’objectivité requise dans le travail de terrain.
Structure et annonce du plan
Je procède à la présentation de la structure de ce mémoire de recherche qui clôture
mon parcours de Master au sein de la mention Sociologie générale de l’École des Hautes
12 Tommaso Pirone
LES ENTREPRENEURS ITALIENS À LA HAVANE
Études en Sciences Sociales. Le texte sera structuré en trois parties. Les deux premières
parties sont composées par trois chapitres et chaque chapitre est à son tour réparti en trois
sections. Le chapitre unique qui compose la dernière partie sera anticipé par une introduction
approfondie qui aide à relier les réflexions et les résultats présentés dans la deuxième partie.
La structuration ici présentée tente de reconstituer analytiquement les structures
d’opportunité et notamment le cadre multi-scalaire qui les composent, formé par un niveau
macro-contextuel, l’échelle micro-individuelle et le niveau méso-analytique.
1. La première partie, intitulée Le panorama des échanges sur le long terme entre
l’Italie et Cuba : de la coopération internationale à l’investissement dans le secteur
privé de La Havane, retrace les éléments macro-contextuels utiles au déploiement des
données qualitatives issues du travail de terrain.
Bien que les projets coloniaux qui ont marqué le passé italien n’aient pas impacté
directement Cuba, j’ai remarqué une dynamisation des échanges entre les deux pays. Il s’agit
d’un phénomène actualisé très récemment suite à l’envoi, au printemps 2020, de deux
brigadas de médecins cubains dans les régions du Nord-Italie violemment affectées par la
pandémie de COVID-19. Cet événement représente une nouveauté absolue : c’est la première
fois qu’un pays du Sud Global assure des activités d’assistance et de soin dans un pays riche
du Nord. L’intérêt d’approfondir les circulations italo-cubaines prend ainsi un caractère
global.
Je débuterai avec un chapitre introductif qui discute le cadre des mobilités et des
échanges italo-cubains sur le long terme dans le but de relever la présence de relations
bilatérales consolidées entre les deux pays. En perspective socio-historique, je vais mettre en
évidence la place de l’immigration italienne au sein de la société cubaine. Retracer l’histoire
des liens entre Cuba et l’Italie permet de mettre en évidence la présence consolidée de
relations entre les deux populations à plusieurs niveaux. Un tel travail présente un double
intérêt : d’une part, l’influence de ces racines est mobilisable dans les processus de
construction des récits et des discours de certains acteurs faisant partie de la nouvelle mobilité
italo-cubaine ; de l’autre, cela permet de mettre en évidence les fractures et les liens de
continuité entretenus avec le phénomène contemporaine.
Dès la fondation de la Ciudad de San Cristóbal de La Habana par Christophe Colomb
en 1519, jusqu’aux guerres d’indépendance, le phénomène diasporique des Italiens vers Cuba
a été particulièrement intéressant du point de vue qualitatif. Il a fallu attendre l’explosion du
tourisme de masse et la construction de Cuba comme une des principales destinations
13 Tommaso Pirone
LES ENTREPRENEURS ITALIENS À LA HAVANE
touristiques à l’échelle mondiale pour que la mobilité italienne acquiert une telle importance
au niveau quantitatif.
Dans la période récente, l’ouverture au tourisme international est accompagnée par la
reconfiguration des géométries de la coopération internationale. Dans ce cadre,
l’intensification des relations diplomatiques par le haut engendrent des possibilités
économiques inédites pour les entrepreneurs italiens qui commencent ainsi à s’intéresser au
contexte cubain.
2. Ces mobilités de coopération sont génératrices d’investissements et de nouvelles
pratiques transnationales qui se développent notamment dans le secteur touristique
privé de La Havane. Ces liens seront retracés à l’échelle micro-individuelle dans la
deuxième partie qui est intitulée Les formes et les trajectoires du transnationalisme
italien à La Havane. Les mobilités de coopération et les mobilités touristiques : des
générateurs multiples de liens.
À travers la mobilisation des données ethnographiques recueillies pendant le travail
de terrain, je vais enquêter sur les pratiques des entrepreneurs italiens à La Havane sous le
prisme de la trajectoire migratoire. Les lectures classiques de la migration concernant les
facteurs push/pull, les logiques économiques et les motifs d’attractivité de l’espace d’accueil
qui déterminent les choix des acteurs seront mobilisées et complétées par l’étude de la
dimension spatio-temporelle des circulations transnationales (Baby-Collin, 2014). J’ai en fait
remarqué que les acteurs italiens installés à La Havane retournent de façon récurrente dans
leur pays d’origine. A travers la mobilisation de trois cas d’études, je vais analyser la place de
ces dynamiques de mobilité dans les processus d’accumulation de capitaux utiles à
l’investissement dans le contexte cubain.
Je procède ensuite à l’analyse des données issues du travail ethnographique mené
auprès des groupes virtuels à base ethnique. Le réseau Facebook, et en particulier le groupe
public « Italiani a Cuba », largement utilisé par la population enquêtée, a été investi et
représente une source fondamentale de contacts qui a été notamment exploitée pendant le
séjour de terrain à La Havane. L’étude de la plateforme technologique a également fourni des
éléments utiles à la compréhension des processus de négociation identitaire et des pratiques
entrepreneuriales et touristiques mises en place par la communauté transnationale. L’espace
interactionnel « Italiani a Cuba » constitue donc un véritable facteur de cohésion sociale.
Comme on le verra, les discussions dans le cadre de ce groupe Facebook mettent en lumière
l’intérêt porté par les acteurs italiens sur le contexte cubain, développé tout au long du
14 Tommaso Pirone
LES ENTREPRENEURS ITALIENS À LA HAVANE
processus d’installation et de mobilité transnationale, ainsi que leur connaissance profonde de
celui-ci. Parmi le public largement hétérogène en termes générationnels et sociaux, on verra
émerger une surreprésentation masculine très marquée.
Je vais tenter de mettre à l’épreuve la validité de ces réflexions en creusant l’étude de
la trajectoire de trois acteurs très investis dans les interactions virtuelles du réseau « Italiani a
Cuba ». Rencontrés lors de mon séjour de terrain, je vais approfondir l’étude du fondateur du
groupe (Marco « Cubanite »), d’un « touriste de longue durée » (Andrea) qui a m’a guidé à la
découverte de La Havane et d’un « entrepreneur social » (Samuel), fier fidelista, très engagé
dans des nombreux projets humanitaires dans la capitale cubaine.
Sur la base de ces données, je procède à explorer le lien entre les trajectoires
migratoires et l’entrepreneuriat. Dans les cas retracés, les mobilités touristiques engendrent
une multiplicité de formes entrepreneuriales. Comme le remarquent certains auteurs
(Chauvin, Grossetti et Zalio, 2014), la notion d’entrepreneur ne renvoie pas, elle non plus, à
une catégorie identifiable et homogène. Dans cette perspective, l’expérience des «
entrepreneurs sociaux » - ou « entrepreneurs de cause » - italiens de La Havane mène à créer
des nouvelles convergences entre les pratiques touristiques, l’humanitarisme et la coopération
internationale.
3. La troisième partie, intitulée Les liens entre les mobilités de travail et le
cuentapropismo, porte sur les stratégies, les réseaux et les pratiques circulatoires des
petits-entrepreneurs italiens à La Havane.
Dans une approche méso-analytique, je vais tenter de relier la dimension macro
représentée par le contexte institutionnel, social et économique dans lequel trouvent leur
place les échanges transnationaux, avec l’échelle micro-sociologique des choix, des
motivations et des trajectoires individuelles des cuentapropistas italiens enquêtée tout au long
de la deuxième partie. Pour ce faire, je vise à analyser les processus d’installation et
d’insertion de certains acteurs transnationaux dans le marché touristique cubain tout en
cherchant à inscrire ces dynamiques dans l’évolution du cadre normatif qui règle le secteur
économique privé à Cuba.
Je vais concentrer cette partie autour de l’analyse des dynamiques de mobilisation des
ressources, du capital social, des stratégies et des réseaux développés par les agents tout au
long du processus migratoire (Rosenfeld, 1992; Faist, 2010; Hily, Berthomière, Mihaylova,
2004; Waters, Jiménez, 2005). En ce sens, je vais identifier trois stratégies constitutives du
15 Tommaso Pirone
LES ENTREPRENEURS ITALIENS À LA HAVANE
niveau méso-analytique des structures d’opportunité qui permettent aux entrepreneurs italiens
d’investir dans le secteur immobilier à Cuba,mis à profit à travers la location touristique.
A) En premier lieu, le mariage avec un/e partenaire cubain représente la voie privilégiée
pour l’ensemble des acteurs étrangers qui souhaitent s’insérer dans ces dynamiques
marchandes. A partir de la notion de « citoyenneté matrimoniale » développée par
Fresnoza-Flot et Ricordeau (2017), je vais analyser les questions liées aux rapports
matrimoniaux particulièrement présents au sein des relations entre les petits
investisseurs italiens et les locaux.
B) En deuxième lieu, un grand nombre d’acteurs enquêtés maintient un lien constant
avec l’Italie, ce qui crée des mobilités et des circulations transnationales. Ces
mouvements représentent des éléments centraux à l’accumulation de ressources utiles
aux processus d’investissement économique.
C) En dernier, la notion de « capital international » représentées par les ressources
professionnelles, culturelles, linguistiques, symboliques et scolaires développées tout
au long de la « carrière migratoire » (Martiniello, Rea, 2011) est indissociablement
liée à ces pratiques.
A travers la mobilisation de cinq cas d’études idéal-typiques, je vais donc explorer ces
dimensions clés.
Dans cette partie, une attention particulière sera dédiée aux « espace(s) relationnel(s)
» (Simon, 2002) créés par les Italiens tout au long de la trajectoire migratoire, articulés entre,
d’une part, des réseaux sociaux formés lors de l’installation à La Havane et, de l’autre, des
échanges continuellement entretenus avec le pays d’origine. Cet ensemble d’acteurs constitue
l’articulation des différentes relations tissées dans le pays d’accueil. Selon les nuances
d’intensité, de réciprocité, d’horizontalité et d’intersectionnalité de ces rapports, je vise à
prouver l’émergence d’inégalités sociales. En ce sens, j’avance l’hypothèse, qui pourra faire
l’objet de recherches futures, selon laquelle les entrepreneurs italiens contribuent à la
formation de relations et de représentations (post)coloniales au sein de l’espace social cubain.
16 Tommaso Pirone
LES ENTREPRENEURS ITALIENS À LA HAVANE
Fig. 0 Tableau résumé des cas d’études mobilisés dans ce mémoire de recherche.
Acteurs
Trajectoire
Temporalités
Ressources
Investissements
FEMMES
Anna
(4.1)
Mobilité de coopération
Mobilité de travail
2009-2010
Mariage, mobilité,
capital
professionnel
Coopératif, affectif,
attachement au
quartier, casa
particular
Clara
(4.2)
Mobilité de coopération
Mobilité de travail
2009-2010
Mariage, réseau
professionnel, lien
familial (filles)
Coopératif, affectif,
casa particular
Vivien
(4.3)
Mobilité de coopération
Mobilité de travail
2000
Mariage, emploi,
mode de vie
alternative (vegan)
Affectif, nouveaux
projets, casa
particular
HOMMES
Marco “Cubanite”
(6.1)
Mobilité touristique
Mobilité de travail
2004
Lien professionnel,
lien familial (fils),
“cubanite”
Affectif, touristique,
professionnel
Andrea
(6.2)
Mobilité touristique
Mobilité de coopération
2002 le premier
voyage, jamais
installé
Militantisme,
“cubanite”, réseaux
de contacts
Militant,
entrepreneur de
cause, humanitaire
Samuel
(6.3)
Mobilité de coopération
Mobilité de travail
1995
Militantisme,
“cubanite”,
citoyenneté par
mérite
Entrepreneur de
cause, militant,
humanitaire
Alessandro
(7.1)
Mobilité de travail
Mobilité touristique
2013 mariage
2018 installation
Mariage, capital
économique et
professionnel,
circulations
Touristique, casa
particular
Giovanni
(7.2)
Mobilité de travail
Mobilité touristique
2005 premier
voyage
2012 licence et
installation
Mariage d’intérêt,
capital économique
et professionnel,
circulations
Touristique, casa
particular (8
chambres)
Simone
(7.3)
Mobilité de travail
Mobilité touristique
2014 installation
Mariage,capital
économique,
changer mode vie
Casa particular
Checco
(7.4)
Mobilité de travail
Mobilité touristique
Depuis 1990
voyages aux
Caraïbes
2011 installation
Double mariage,
circulations, capital
économique et
professionnel
3casas particulares
Silvestro
(7.5)
Mobilité de travail
Mobilité touristique
2013 installation
Mariage,
circulation, capital
économique et
professionnel
Touristique, casa
particular
17 Tommaso Pirone
LES ENTREPRENEURS ITALIENS À LA HAVANE
TABLE DES MATIÈRES DE LA PREMIÈRE PARTIE
« Le panorama des échanges sur le long terme entre l’Italie et Cuba : de la coopération
internationale à l’investissement dans le secteur privé de La Havane »
Éléments macro-contextuels
1. Du transculturalisme au transnationalisme : le “fil rouge migratoire” de
l’histoire cubaine
1.1 Introduction à la Cuba métisse
1.2 Focus historique sur la migration italienne à Cuba. Dès la fondation de La
Havane à l’émergence du phénomène au cours du 1800
1.3 La présence italienne à Cuba au tournant du XXe siècle : le commerce
transnational, la révolution et les nouvelles relations internationales
2. Le cadre théorique. Étudier les structures d’opportunité en perspective
transnationale
2.1 La notion de structure d’opportunité : un outil multi-scalaire pour
l’analyse des migrations
2.2 La mondialisation et le tournant transnational
2.3 Le transnationalisme à l’épreuve du contexte cubain : quelques pistes, de
nombreuses lacunes
3. Italie-Cuba : la coopération internationale et les investissements économiques
3.1 Le contexte post-révolution : les relations bilatérales, la réémergence du
marché et des possibilités d’investissement
3.2 Cuba et la coopération au XXIe siècle : un nouvel horizon pour les
investisseurs italiens
3.3 La négociation de la dette et le financement de projets de coopération
18 Tommaso Pirone
LES ENTREPRENEURS ITALIENS À LA HAVANE
TABLE DES MATIÈRES DE LA DEUXIÈME PARTIE
« Les formes et les trajectoires de la transnationalisme italien à La Havane. Les mobilités
de coopération et les mobilités touristiques : des générateurs multiples de liens »
Eléments micro
4. De la coopération internationale à l’investissement privé : une trajectoire
commune pour les missionnaires italiennes expatriées à La Havane
Anna, l’architecte-coopérante italienne : attachement au quartier et projet de
vie transnational
Clara et la famille transnationale : entre formes d’intégration et précarité des
liens
Vivien de l’Ambassade d’Italie. La “communauté” italienne et le projet végan
: un pont de Cuba vers le monde ?
5. Les groupes virtuels à base ethnique : “Italiani a Cuba”, une ressource centrale
pour la construction du réseau transnational
“Italiani a Cuba” : une galaxie de groupes en expansion
Les catégories d’utilisateurs du groupe. Le tourisme à Cuba : une affaire pour
les hommes ?
Les discussions et la reproduction de l’identité nationale : entre réaffirmation
et négociation
6. Des nouvelles convergences entre les mobilités touristiques et l’entrepreunariat
transnational à La Havane
Cuba ti amo : la “cubanite” et le tourisme de longue durée des Italiens à
Cuba
Andrea et la trajectoire touristique militante : des nouvelles convergences
entre le tourisme et la coopération internationale
Un entrepreneur de cause. Samuel, Fidelismo y boxeo
19 Tommaso Pirone
LES ENTREPRENEURS ITALIENS À LA HAVANE
TABLE DE MATIÈRES DE LA TROISIÈME PARTIE
« Les liens entre les mobilités de travail et le cuentapropismo »
Eléments méso
7. Stratégies, réseaux et circulations : territorialité multisituée et accumulation de
capital transnational
7.1 Alessandro, du mariage au cuentapropismo : précarité et accumulation de
capital transnational
Entre stigmatisation et transformations : la centralité du secteur no
estatal
7.2 Giovanni, du B&B dans le centre-ville de Bologne à la casa particular de
Centro Habana : la “carrière” touristique transnationale
Les casas particulares : des B&B traditionnels “à la cubaine”
7.3 De cadre d’une multinationale à arroz con pollo : Simone et le mode de vie
“cubanisé”
7.4 Un double mariage transnational : l’entreprise familiale de Checco et le
“sentiment de supériorité post-colonial”
7.5 Silvestro, réussite, circulations et “sentiment de culpabilité post-colonial”
20 Tommaso Pirone
LES ENTREPRENEURS ITALIENS À LA HAVANE
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Article
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Utilising an interdisciplinary methodology that draws from cultural studies and critical tourism studies, this article examines the production of difference at the intersection of hedonism and revolution in the Cuban Ministry of Tourism's international campaign, Auténtica Cuba. I analyse how the campaign's feature film, Auténtica Cuba, carefully crafts a narrative of authenticity in its construction of the island as ‘an unrivalled paradise’. I pay close attention to how the production, commodification and marketing of Cuban difference for tourist consumption is contested and perpetuated, especially as difference is embodied by Afro-Cubans in the film. I conclude by considering whether the campaign provides what Stuart Hall terms, effective translation, in its aims to challenge the gendered, racialised and sexualised constructions of Cuba and Cubans as objects for tourist consumption. As tourism shapes and is shaped by neocolonial discourses of difference, this work is timely as – in light of the speculation about future transformations on the island – it considers the implications of the state's renewed framing of the expansion of tourism development as central to the work of the revolution.
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50 años después de la promulgación de la Ley de Reforma Urbana, que canceló los procesos de especulación urbana en Cuba, en el año 2011 el gobierno de Raúl Castro modificó la Ley de la Vivienda abriendo la posibilidad de la libre compraventa de viviendas y, con ello, el funcionamiento de un creciente mercado inmobiliario. Ocho años después de esa medida ya comienzan a percibirse los efectos en la geografía social y económica de las ciudades y se evidencian las carencias legislativas y tributarias de un marco regulatorio concebido para otra realidad socioeconómica. Es urgente la actualización de la normativa jurídica, el perfeccionamiento del registro y el catastro urbano, así como la introducción de nuevos instrumentos fiscales que controlen los incipientes procesos de gentrificación urbana. Fifty years after the promulgation of the Urban Reform Law, which cancelled the urban speculation processes in Cuba, in 2011 the Raúl Castro government amended the Housing Law opening the possibility of free sale of homes and, with this, the operation of a growing real estate market. Eight years after that measure, the effects on the social and economic geography of cities are already being perceived and the legislative and tax deficiencies of a regulatory framework designed for another socioeconomic reality are evident. It is urgent to update the legal regulations, perfecting the urban registry and cadastre, as well as the introduction of new fiscal instruments that control the incipient processes of urban gentrification.
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Una nueva version revisada y actualizada del libro Componentes etnicos de la nación cubana requiere una breve presentación. En 1995 Miguel Barnet, actual Presidente honorario de la Unión de Escritores y Artistas de Cuba, me pidió un libro para la Colección La Fuente Viva de la Fundacion Fernando Ortiz, que aun daba sus primeros pasos. Entonces le propuse parte del texto introductorio que había preparado para el Atlas de los ins-trumentos de la música folclórico-popular de Cuba (1997), de cuyo colectivo de autores formé parte durante más de un decenio. Una porción importante de este texto tambien sirvió de base para otra monografia que elaboramos con la doc-tora Ana Julia Garcia Rally, Historia étnica de Cuba, que a su vez formaba parte del Atlas etnográfico de Cuba: cultura popular tradicional, cuya punta del iceberg se dejó ver en una multimedia en español e inglés en el año 2000. Esa obra obtuvo en 1998 uno de los Premios anuales de nuestra Academia de Ciencias de Cuba y ha servido para múltiples cursos de postgrados y conferencias en diversas universidades y centros de investigación.
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This fascinating work provides an enlightening guided tour of the island of Cuba's historical, political, economic, and sociocultural development from the pre-Columbian period to the present.
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Quels parcours de vie mènent à se retrouver, au grand âge, entouré d‘amour et de sollicitude, ou isolé et esseulé ? Comment faire face, en vieillissant, à cette question angoissante : « Qui prendra soin de moi ? »Cette enquête ethnographique décrit la vie quotidienne des vieux Cubains, qui sont nés avant 1959 et atteignent aujourd’hui leur quatrième âge, dans un contexte de crise économique et d’incertitude politique, où les cadres d’existence qu’ils ont connus et contribué à construire sont bouleversés.Dans un style narratif et vivant, Blandine Destremau montre comment les hommes et les femmes de cette génération vivent et aménagent leur vieillissement, alors que les solidarités familiales ont été affectées par les migrations, la chute de la fécondité et la renaissance d’une culture entrepreneuriale. Comment les politiques publiques, très performantes dans le domaine sanitaire, prennent-elles la mesure des besoins de care et y répondent-elles ? L’auteure propose en fin d’ouvrage une sociologie du vieillissement à Cuba.